[LE RÉSUMÉ] Les prix des assises 2023

Les primés de la seizième édition des prix des Assises du journalisme accompagnés de Patrick Cohen, de Raphael Garrigos et Isabelle Roberts, présidents du jury. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

La remise des prix de Assises 2023 était présidée cette année par les journalistes Des Jours Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos.
Le prix du livre « recherche » sur le journalisme, doté par la métropole tourangelle, revient au sociologue des médias à l’Institut français de presse, Rémy Rieffel, pour son ouvrage L’Emprise médiatique sur le débat d’idées. Trente années de vie intellectuelles 1989-2019 (PUF).

Le prix « Enquête et reportage » a été attribué Franck Depretz pour son travail sur le groupe Ebra intitulé Dans l’empire médiatique du Crédit Mutuel. Le jury, composé d’étudiantes et d’étudiants des 14 écoles de journalisme reconnues, a tenu a précisé que son choix était « politique » et entendait récompenser une démarche journalistique en accord avec leurs valeurs.

Alice Géraud est la lauréate du prix du livre du journalisme pour Sambre, Radioscopie d’un fait-divers. Son enquête sur les victimes d’un délinquant sexuel qui a sévi dans l’Est de la France, donne la parole aux victimes.

Le grand prix du journalisme Michèle Léridon a été remis à la SDJ du JDD et de Paris Match pour leur engagement contre les pratiques despotiques de leur nouveau propriétaire, Vincent Bolloré. A cause des pressions qu’ils subissent, les récipiendaires n’étaient pas présents à la cérémonie. Ils étaient représenté par Patrick Cohen qui a lui aussi pris position contre l’homme d’affaires breton quand il était en poste à Europe 1.

Rédaction web/EPJT

Journalistes et citoyens, un banquet aux avant-goûts de réconciliation

Le Bateau ivre de Tours a accueilli le banquet journaliste-citoyen de cette 16e édition des Assises. Photo : Jean Tramier/Assises du journalisme

Le Bateau ivre s’est transformé en restaurant le temps d’une soirée originale, mercredi. Au banquet des Assises du journalisme de Tours, 100 convives, 50 journalistes et 50 citoyens, se sont rencontrés pour échanger sur l’info, à toutes les sauces. Et essayer d’y retrouver goût.

’embarquement à 19h30 était ambitieux. Encore plus avec des journalistes dont le défaut est de trop parler. Pourtant, tout le monde était à l’heure mercredi soir, au Bateau ivre, à Tours. La salle de spectacle a été transformée pour accueillir le deuxième banquet Journalisme et citoyenneté. Vingt-cinq tables ont été dressées pour la soirée avec, à chacune d’elles, deux professionnels de l’information, et deux « citoyens ». Les convives ont été choisis dans des associations locales, féministes, écologistes, et tous ont un rapport à l’information réfléchi. Objectif de la soirée ? Déguster un (bon) repas traiteur et discuter du goût de l’info.

Avant le début du service, Thierry Bouvet, président du centre associatif et artistique, monte sur scène, prend le micro, et déclame un discours à mi-chemin entre manifeste et poésie. « Vous voilà à vos assises, dans notre bateau. Ne soyons pas des galériens de l’info mais des volontaires de l’aventure du donné à voir, à raconter, à lire et à écouter. Veuillez ne pas m’en vouloir de tenter de jouer avec les mots. » Comme un sentiment de gêne d’être face à un parterre de professionnels, dont le métier est de manier les mots. D’ailleurs, tout au long de la soirée, les citoyens auront du mal à s’imposer et à prendre la parole.

L’académicien retardataire 

Un seul retardataire : Erik Orsenna. Il achevait, quelques minutes plus tôt, sa carte blanche à Mame où se tient pendant une semaine la seizième édition des Assises. Cambré, essayant de se cacher entre ses épaules, son entrée dans la salle cherche à être discrète. Jérôme Bouvier, président de Journalisme et citoyenneté, l’association organisatrice, le dévoile. L’académicien est applaudi.

Les entrées arrivent. Sur certaines tables, on trinque. Pour ouvrir l’appétit, spaghetti de courgettes accompagné de sa question : qu’est-ce qui vous donne goût à l’info ? Sur la table 7, pour Gaëlle, citoyenne, l’actualité nourrit sa curiosité, ses intérêts personnels, et lui permet de comprendre le monde dans lequel elle vit. Elle était infirmière en Ehpad. Son refus de se faire vacciner lui a coûté son poste en décembre 2020. Ça attise la curiosité de Catherine Boullay, journaliste à L’Opinion.

La conversation embraye naturellement sur le complotisme. Gaëlle a très mal vécu le fait qu’on lui colle cette étiquette : « J’étais informée, la santé c’est mon métier. Je discutais avec les médecins, et j’ai refusé en conscience. » Elle est maintenant en reconversion pour devenir assistante de direction. Elle avouera plus tard être aussi gilet jaune.

 “Je me permet de vous interrompre”

À l’autre bout de la salle, les citoyens de la table 23 parlent de leur goût pour le long format. Un podcast de plus d’une heure ne leur fait pas peur. Au contraire, ils aiment prendre le temps de développer un sujet sur le fond. Mais les vingt minutes de l’entrée n’auront pas permis de finir la conversation. Les assiettes sont vides. C’est le jeu des chaises musicales, on prend sa serviette sur le bras, son verre d’eau dans une main, le verre de vin dans l’autre et on se dirige vers une autre table.

Vient le plat de résistance : une escalope de poulet aux épinards pour accompagner le dégoût de l’info. Cette fois-ci, on n’hésite pas à être critique et pessimiste. « Qu’est-ce qui vous hérisse les poils dans l’info ? » interroge Lucile Berland, pigiste indépendante et médiatrice de la soirée.

Sur l’une des tables, le directeur de la rédaction de La Nouvelle République, Luc Bourianne, prend place face à Benoît Bruère de France 3. « Je me permets de te tutoyer« , lance l’un d’eux à Gaëlle, l’ex-infirmière, qui ne voit pas de problème dans cette proximité.

Sauf quand la conversation devient technique et pas inclusive. « Je me permets de vous interrompre« , lance-t-elle, un peu dépassée. De retour dans la conversation, elle lâche : « Je ne fais pas confiance aux lignes éditoriales.« 

 “ Les marronniers, on n’en peut plus ”

Sur la table 23, c’est davantage la diversité des rédactions qui est remise en cause. Deux citoyens interpellent une étudiante en journalisme sur les profils de sa promotion et leurs origines sociales. Un paramètre qui se ressent dans le choix des sujets. Du coq à l’âne, les JT laissent un goût amer chez beaucoup. « Les marronniers, on n’en peut plus« , avoue Eric, membre d’un collectif d’artistes de rue.

Au dessert, les citoyens changent encore de place. Sucré rime avec solutions. Mais les citoyens ont quand même l’impression de ne pas être considérés. Zénaïde est membre de Touraine Women. Elle a pu présenter le concours qu’elle organise : récompenser les femmes cheffes d’entreprise de Tours.

La solution envisagée ici : davantage de jeunes dans les rédactions. Un sujet qui passionne Cécile Prieur, directrice de la rédaction de L’Obs. Autre proposition : l’éducation aux médias et à l’information. Les citoyens sont conscients de l’enjeu de bien s’informer, tout comme les journalistes, qui manquent parfois de pédagogie.

L’initiative a le mérite d’avoir mis le dialogue au cœur (coulant caramel) de la soirée. Au micro, une dame suggère que l’événement soit reproduit dans toutes les villes de France. Histoire de partager la recette.

Jane COVILLE et Maël PREVOST

[INTERVIEW] Isabelle Roberts & Raphaël Garrigos : « Se comporter en bons artisans du journalisme »

Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos sont présents aux Assises du journalisme 2023. Le duo qui a créé « Les Jours », en 2015, est cette année président du jury. Nous les avons interrogé avant la remise des prix sur les spécificités de leur média en ligne, ainsi que sur les grandes réflexions qui ont court dans le métier actuellement.

https://youtu.be/GtMVighsczY
Réalisé par Zacharie Gaborit/EPJT.

[INTERVIEW] Amara Makhoul (France 24) : « Il existe une énorme confusion des termes utilisés par les professionnels »

Amara Makhoul, rédactrice en chef du site InfoMigrants à France24, est présente aux Assises du journalisme de Tours. Elle anime une table ronde intitulée Exil, migration et journalisme. Elle pointe du doigt l’amalgame commis par des journalistes dans l’usage de certains termes. Selon elle, l’emploi de l’adjectif  « illégale » pour qualifier la migration est impropre. Il est préférable d’utiliser le mot « irrégulière ». 

Réalisé par Lina Kamoun/EPJT.

[rencontre] La ruralité, zone blanche de l’éducation aux médias

Isabelle Bordes, hier, lors de la conférence « Résidences de journalistes, partage d’expériences ». Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Isolées géographiquement et peu représentées dans l’actualité, les zones rurales peinent d’autant plus à avoir accès à l’éducation aux médias.

« La ruralité, c’est un quartier prioritaire. » Elodie Cerqueira, journaliste et présidente du Club de la presse Centre-Val de Loire, n’y va pas par quatre chemins pour parler de l’éducation aux médias dans les campagnes. « La ruralité, aujourd’hui, est une vraie cible de l’EMI. Les lycées au milieu des champs, où il n’y a rien autour, c’est joli mais ça veut dire que pour la moindre chose il faut affréter un bus. Ce sont des coûts en plus », ajoute-t-elle.

« Des zones très enclavées »

Cela ne veut pas dire qu’il est impossible de faire de l’éducation aux médias en zone rurale. Mais souvent, ces initiatives tiennent à la détermination personnelle de quelques individus. Karen Prévost-Sorbe, référente EMI pour l’académie Orléans-Tours, confirme : « Les médias sont principalement localisés dans des petites villes ou en métropole. Mais, il y a aussi des collèges et des écoles dans des zones très enclavées, où il est compliqué de faire venir des journalistes. »

La coordinatrice Clemi prend l’exemple de ce petit collège de 95 élèves, « au fin fond de l’Indre », à Ecueillé. « On a une classe média, avec une vraie web radio. Un ancien directeur de France Bleu est venu les encadrer et leur offrir cette chance. » La classe s’est d’ailleurs déplacée aux Assises du journalisme à Tours, « à plus de deux heures de bus. »

Isabelle Bordes fait le même constat. La journaliste, qui a travaillé pendant trente ans à Ouest-France a décidé il y a un an et demi de quitter son poste et de se lancer dans l’éducation aux médias. Depuis septembre 2022, elle effectue une résidence, une semaine par mois, dans un village de 2000 habitants dans le Calvados.

Un café des médias

Quand elle arrive dans le village, elle ne trouve aucun interlocuteur : « Il y a très peu de structures et il est très difficile d’aller vers les gens », raconte-t-elle. En plus de cela, « la difficulté, c‘est que l’EMI, c’est une notion qui est étrangère au grand public et ce sont des enjeux qui ne sont pas dans l’ère du temps dans ces territoires-là », poursuit la journaliste, pas habituée à ce genre de public.

Elle a finalement joué sur l’effet village. Chaque mercredi matin, jour de marché, elle organise « le café des médias », et s’installe à une table avec des journaux « pour se mettre à disposition des habitants, faire du lien et montrer que les journalistes sont des gens comme les autres ». Ce qu’essaient de faire aussi le collectif la Friche ou encore l’annuaire Vu des quartiers, qui visent eux à recréer un lien de confiance entre médias et habitants des quartiers prioritaires. Que ce soit dans les zones rurales ou les banlieues, le même problème d’accessibilité à l’EMI persiste.

 

 Fanny Uski-Billieux (EPJT)

[RÉSUMÉ] ChatGPT, ami ou ennemi des journalistes ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « ChatGPT, ami ou ennemi des journalistes ? »

Asma Mhalla, enseignante, spécialiste des enjeux géopolitiques du numérique, Benoit Raphaël, journaliste spécialisé dans l’intelligence artificielle et l’industrie des médias, fondateur de FLINT. Xavier Eutrope, journaliste à La Revue des médias de l’INA. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Asma Mhalla, enseignante, spécialiste des enjeux géopolitiques du numérique, Benoit Raphaël, journaliste spécialisé dans l’intelligence artificielle et l’industrie des médias et fondateur de FLINT. Animé par Xavier Eutrope, journaliste à La Revue des médias de l’INA

 

Les enjeux

Au coeur des débats et des préoccupations ces derniers mois, l’émergence de l’intelligence artificielle ChatGPT interroge sur le futur du journalisme. Capable de rédiger un article sur quasiment tous les sujets, il pourrait devenir un outil incontournable des rédactions. Une situation qui inquiète les journalistes qui craignent pour leur emploi.

Ce qu’ils ont dit

 Asma Mhalla. « La révolution de ChatGPT n’est pas technologique mais plutôt une révolution d’usage. »

« La révolution de l’IA que l’on fait miroiter comme une perspective à craindre est un fantasme. »

« La technologie est déjà partout mais elle n’a pas fait s’effondrer la société. Mais elle engendre des mutations »

« Ces technologies sont duales. Si elles sont civiles, elles sont aussi policières et militaires. »

« La technique n’est pas la technologie. La technologie n’est jamais idéologiquement neutre. »

 

Benoit Raphaël. « ChatGPT n’est pas ton ami ni ton ennemi. Ça n’est pas une personne. C’est un outil qui interagit avec nous. »

« Si on a peur d’être remplacés par des robots, c’est peut-être parce qu’on vit comme des robots »

« Toute tâche répétitive peut être remplacée mais on ne doit pas perdre de vue l’objectif du journalisme : produire une information nouvelle et de qualité. »

« On sait qu’aujourd’hui l’avenir de la presse est de moins produire mais d’avoir plus de qualité »

À retenir

ChatGPT n’est pas encore suffisamment performant pour être capable de remplacer un ou une journaliste. Cette intelligence artificielle pourrait en revanche être utile pour des tâches répétitives, permettant ainsi de libérer du temps pour les journalistes.

Il ne s’agit pas d’une révolution technologique mais plutôt une révolution d’usage. Les citoyens se sont largement appropriés cette nouvelle vague d’outils ce qui pose la question des mutations de nos sociétés engendrées par ces technologies.

Dorian Gallais (EPJT)

 

 

[RÉSUMÉ] Lutter contre les bulles informationnelles : comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Lutter contre les bulles informationnelles : Comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ?  »

 Xavier EUTROPE , Journaliste à la revue des médias de l’INA,  Mathilde SALIOU, journaliste de Next INpact et Cyrille FRANK, directeur de la formation et de la transformation numérique de CosaVostra Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Animé par Xavier EUTROPE , journaliste à la revue des médias de l’INA
Avec Mathilde SALIOU, journaliste de Next INpact et Cyrille FRANK, directeur de la formation et de la transformation numérique de CosaVostra

Les enjeux

A l’heure des réseaux sociaux, le public et les journalistes s’interrogent sur les enjeux du fonctionnement opaque des algorithmes qui entraînent des bulles informationnels. Le débat « Lutter contre les bulles informationnelles : Comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ? » tente de répondre à ces questions.

Ce qu’ils ont dit

Mathilde SALIOU : « À chaque fois qu’on like, qu’on tweete… on alimente la machine à algorithmes. »

« L’une des manières de faire rester les publics sur une plateforme, c’est de leur montrer des contenus avec lesquels ils ne sont pas d’accord. »

« Les chaînes de télévision extraient les moments de clash des émissions pour les poster sur les réseaux sociaux. C’est un problème, il faut que les journalistes comprennent ces effets. »

« Il ne faut pas que les réseaux sociaux nous laissent croire que leurs technologies sont dans les nuages mais qu’au contraire, elles ont un réalité, une existence voulue. »

Cyrille FRANK : ​« Les émotions créent de l’attention, de l’engagement. […] Les émotions négatives en particulier. »

« Aujourd’hui les contenus particulièrement relayés sur les réseaux sociaux sont des contenus télévisuels. »

« Derrière la question de la responsabilité, il y a la question de la régulation des médias et des réseaux sociaux. »

« Ce que les gens apprécie aujourd’hui sur Mastodon, c’est ce qu’ils aimaient sur Twitter au début. Ils étaient entre eux […] une impression d’entre soi. »

« L’un des rôles de l’EMI, est aussi d’expliquer aux utilisateurs comment fonctionne notre cerveau et nos biais cognitifs face aux contenus des réseaux sociaux. »

À retenir

L’opacité des algorithmes qui régissent les réseaux sociaux questionne et pose plusieurs questions. D’abord, la responsabilité des propriétaires des réseaux mais également celle des médias qui les alimentent par des contenus polarisant. Ensuite, un travail de pédagogie est à faire auprès des utilisateurs sur comment fonctionne notre cerveau et nos biais cognitifs face à ces algorithmes. Enfin, les intervenants au débat ont également évoqué les outils législatifs que les pouvoirs publics pourraient mettre en place pour réguler les algorithmes responsables des bulles informationnelles.

Thomas LEMOULT-EMMLER (EPJT)

 

 

[INTERVIEW] Pascal Guénée : Des états généraux pour « réfléchir à l’avenir de la formation et à l’emploi des jeunes journalistes »

Les états généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes ont eu lieux en octobre dernier. Pascal Guénée, président de la Conférence des écoles de journalisme (CEJ) revient sur cette réunion, inédite. C’est la première fois que étudiants, journalistes, employeurs, représentants syndicaux se retrouvaient autour de la table pour évoquer l’avenir de la profession. Il répond aux questions de Maël Prévost.

Réalisé par Maël Prévost/EPJT.

[RÉSUMÉ] Storykillers : lutter contre les entreprises de la désinformation

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Storykillers : lutter contre les entreprises de la désinformation »

Laurent Richard et Cécile Andrzejewski évoquent leur enquête Story Killers, menée en collaboration avec une centaine de journalistes à travers le monde, sur l’industrie de la désinformation en Inde, à Israël, à Malte, au Mexique… Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Laurent RICHARD, fondateur de Forbidden Stories et Cécile ANDRZEJEWSKI, journaliste de Fordbidden Stories.

Animé par Nassira EL MOADDEM, journaliste indépendante. 

 

 

Les enjeux

« Ils ont tué le messager, ils ne tueront pas le message. » Tel est le maître-mot de Forbidden Stories, le réseau de journalistes monté en 2017 afin de poursuivre les travaux de journalistes assassinés ou emprisonnés à travers le monde. Son fondateur, Laurent Richard, et Cécile Andrzejeweski, journaliste de Fordbidden Stories, aspirent à penser la profession autrement, à l’échelle globale. Leur démarche : le journalisme collaboratif.

Ce qu’ils ont dit

Laurent Richard (fondateur de Forbidden Stories) : « L’importance est de travailler de manière collaborative et solidaire, pour poser les questions que les journalistes de nombreux pays ne peuvent plus poser. »

« La collaboration apporte de la protection. Ça ne fait aucun sens de tuer un journaliste s’il y en a cinquante autres derrière, prêts à prendre la relève. La collaboration permet de générer du changement à l’échelle globale. »

« Il n’y a pas beaucoup d’écoles de journalisme dans le monde qui apprennent le journalisme collaboratif. C’est plutôt la culture du loup solitaire. Tous les sujets ne se prêtent pas à la collaboration. Mais c’est important de changer l’état d’esprit. »

Cécile Andrzejewski (journaliste de Fordbidden Stories)  : ​« Au moment de l’apparition de Story Killers, l’enquête qu’on a menée, des chiffres sont sortis montrant que les femmes journalistes étaient davantage victimes. »

« La question de la mise en danger se pose au fil de l’enquête. Plus on avance, plus on se rend compte que les gens en face sont puissants et dangereux. »

« C’est un peu rare, pour un journaliste, d’avancer à plusieurs et de mettre ses sources en commun. Mais il y a une espèce d’émulation qui est magique à vivre. »

 

 

 

À retenir

A travers le récit de Story Killers, l’enquête de Forbidden Stories sur les industries de la désinformation à travers le monde, Laurent Richard et Cécile Andrzejewski mettent l’accent sur la collaboration dans l’investigation. Ils regrettent une vision parfois trop solitaire du journalisme et appellent à la formation de consortiums. Ces réseaux permettraient d’offrir à l’opinion publique des informations que « certains ont voulu cacher ». Un combat pour le journalisme et l’intérêt général.

La volonté de Forbidden Stories est ainsi de prolonger le travail d’enquête de journalistes assassinés ou actuellement derrière les barreaux. Si les revenus de l’organisation ne lui permet pas de mettre en oeuvre ce travail pour l’ensemble des journalistes victimes dans le monde, sa volonté est d’agir à l’échelle globale. Et ce, parce que la désinformation est un problème lui-même à l’échelle globale, qui tue nos démocraties. Pour ce faire, le réseau recherche avant tout des journalistes de terrain. Car il ressort de cette conférence qu’une investigation de qualité combine terrain, y compris dangereux, et collaboration.

Élias INSA (EPJT)

 

 

[RÉSUMÉ] Exil et migrations : humaniser le traitement journalistique

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Exil, migrations et journalisme »

Eleonora CAMILLI, Sarah FRERES, Ali MAHFOUT, Mariama THIAM et Amara MAKHOUL ont évoqué des pistes pour humaniser le traitement médiatique des migrations. Photo : Mathias FLEURY/EPJT

Avec Eleonora CAMILLI, journaliste à Redattore Sociale (Italie) ; Sarah FRERES, journaliste à Imagine Demain le Monde et présidente de l’AJP (Belgique) ; Ali MAHFOUT, journaliste libyen en free-lance ; Mariama THIAM, journaliste à Africa Check.

Animé par Amara MAKHOUL, rédactrice en chef à France 24 et infomigrants.

 

Les enjeux

Faire un état des lieu du traitement journalistique des migrations et de l’exil, en évoquant des pistes de réflexion et d’amélioration pour le rentre plus humain et factuel.

Ce qu’ils ont dit

Eleonora CAMILLI, journaliste à Redattore Sociale (Italie) : « On ne sait plus qui on est, on est perdu, on se sent seul »

Sarah FRERES, journaliste à Imagine Demain le Monde et présidente de l’AJP (Belgique) : ​« C’est important que la profession se dote d’un cadre de référence en ce qui concerne le langage dédié aux migrations. Si les mots « migrant » et « illégal » sont souvent mis l’un avec l’autre, ils finissent par être associés. »

Ali MAHFOUT, journaliste libyen en free-lance :​ « Recueillir des témoignages et avoir de l’empathie c’est normal. Parfois, les récits sont tellement dramatiques qu’on a du mal à y croire. »

Amara MAKHOUL, rédactrice en chef à France 24 et infomigrants : ​ « Il faut sortir du traitement « événementiel » et retrouver des noms, des personnes, des histoires. »

 

À retenir

Après avoir confié des moments marquants qu’ils ont vécu lors de la réalisation de sujets traitant des migrations et de l’exil, les journalistes participants à l’atelier ont fait des proposition pour humaniser les débats. Ils ont ainsi évoqué la personnification des migrants, le besoin de raconter des histoires plutôt que des événements, et ont questionné l’utilisation dévoyée de certains termes dans les médias. 

Marie-Laurence Dalle, journaliste  est venu présenter l’enquête du SNJ sur la santé mentale des journalistes à Radio France. De nombreux dysfonctionnements ont été révélés.  Elle interpelle sur le manque de considération et de reconnaissance des journalistes. Cécile Sourd, directrice générale de Mediapart présente les différents dispositifs mis en place par la rédaction pour accompagner les salariés en burn out tels que les cellules d’écoute ou l’existence de référents présents dans chaque pôle de la rédaction formé à recueillir la parole des salariés).

Mathias Fleury (EPJT)

 

 

[RÉSUMÉ] Covid long, une agueusie journalistique

Retrouvez l’essentiel de l’atelier  « Covid Long,, une agueusie journalistique »
Arnaud Mercier, professeur en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris-Panthéon-Assas, Anaïs Bard, journaliste et rédactrice pour Envoyé Spécial France 2, Nicolas Berrod, journaliste pour Le Parisien, Sandra Guerrero, membre de l’association #ApresJ20 (en visio) et Jérôme Larché, médecin interniste. (en visio) Photo : Thomas Lemoult-Emmler/EPJT

Anaïs Bard, journaliste et rédactrice pour Envoyé Spécial France 2

Nicolas Berrod, journaliste pour Le Parisien

Sandra Guerrero, membre de l’association #ApresJ20 (en visio)

Jérôme Larché, médecin interniste (en visio)

Animé par Arnaud Mercier, professeur en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris-Panthéon-Assas.

Les enjeux

Animé par Arnaud Mercier, cette table ronde a fait l’état des lieux de la couverture médiatique du Covid long en France. Anaïs Bard, journaliste à France 2, exposait son parcours de malade et la création du numéro d’Envoyé spécial « Covid long : une maladie mystérieuse ». Le journaliste au Parisien Nicolas Berrod parlait de son intérêt pour ce sujet. La patiente Sandra Guerrero racontait son parcours pour la reconnaissance de la maladie et le médecin Jérôme Larché donnait son éclairage de praticien.

Ce qu’il a dit

Anaïs Bard : « En mai 2021, au sein de la sphère journalistique, personne ne connaissait le sujet. »

« La malade et la journaliste ont fusionné pour essayer de faire connaître la maladie. »

« Le Covid long a eu deux ennemies : le Covid initial et l’envie de parler d’autre chose que le sujet sanitaire. Les patients, les médecins, la recherche… il y avait plein de choses à dire. Un sujet foisonnant. »

« Le premier traitement médiatique du Covid long concernait l’existence ou non de la maladie. »

« Après le numéro d’Envoyé Spécial, beaucoup de malades m’ont dit merci. En parlant du Covid long sur une chaîne nationale publique en prime time, cela ajoute du poids à la parole des malades. »

Nicolas Berrod : « Il y a aussi une réalité en rédaction, les articles Covid sont beaucoup moins lus aujourd’hui. »

« Concernant le traitement journalistique du Covid Long, la réponse politique joue aussi. Le Ministère de la santé ne communique pas beaucoup sur le Covid long. »
« Ce n’est pas la sous-médiatisation d’un sujet par mes confrères qui m’empêche de traiter un sujet, au contraire. »
Jérôme Larché : « La médecine c’est aussi croire les patients, voir la maladie de manière empirique. »
« Chez les adultes, 10 à 15% des covids se transforment en Covid long. »
« Il y a une responsabilité partagée entre les médecins et les journalistes. »

À retenir

Alors que dès l’été 2020 des associations pour faire porter la voix des malades du Covid long avaient vu le jour, les journalistes ont mis du temps à s’emparer de cette question pour plusieurs raisons. Moins “spectaculaire” que les images apocalyptiques des premières semaines et ayant souffert d’une fatigue informationnelle concernant les sujets sanitaires après les confinements successifs, le Covid long concernerait entre 10 et 15% des personnes ayant été atteint d’un Covid « simple”. Des centaines de milliers de malades demandant une reconnaissance médicale, politique mais également médiatique.

Thomas Lemoult-Emmler (EPJT)

Pourquoi l’auto-entreprenariat est toujours boudé par la Commission de la carte de presse

Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Dans un contexte de crise économique dans les médias, de plus en plus de journalistes font le choix de l’auto-entreprenariat. Un statut souvent précaire et qui rend plus difficile l’accès à la carte de presse.

En 2022, le nombre de cartes de presse attribuées par la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) est de nouveau en baisse et pointe à 33 626.

Pourtant le nombre de primo-demandeurs est lui en hausse de 4,7% notamment en raison du développement de l’auto-entrepreunariat.

Les entreprises de presse ont régulièrement recours à des journalistes freelance qu’ils rémunèrent de plus en plus en facture et non en pige. Cette situation pose un certain nombre de problèmes pour ces journalistes, au premier rang desquels l’impossibilité d’obtenir la carte de presse. Car les conditions d’attribution de cette dernière restent immuables. Il faut justifier trois bulletins de salaire consécutifs, que le journalisme constitue l’activité principale et la principale source de revenus du demandeur. La commission reste pourtant à l’écoute des cas particuliers. La commission plénière, qui regroupe les représentants des journalistes et employeurs, étudie chaque année plus de 1 000 dossiers qui présentent des situations inédites.

Une vigilance extrême sur la relation salariée

Mais, donc, ces « situations inédites » ne concernent pas les auto-entrepreneurs, toujours exclus par la CCIJP. « Les commissaires sont opposés à une évolution au niveau de l’auto-entrepreunariat » confirme Olivier Samain, commissaire et ancienne voix d’Europe 1.

La commission reste réticente à faire évoluer les conditions d’attribution, arguant que la carte de presse représente avant tout une protection juridique régie par le Code du travail. Attribuer la carte de presse aux journalistes freelance ouvrirait ainsi selon la commission « un boulevard pour les entreprises de presse » estime Olivier Samain, ce qui favoriserait le recours aux auto-entrepreneurs et donc la précarisation encore plus grande du métier.

L’auto-entreprenariat prive de protection sociale prise en charge par un employeur et limite les recours en cas de litiges. La commission se veut être le dernier rempart face à cette flexibilisation de l’emploi journalistique, qui ne semble pourtant pas freiner les entreprises de presse dans leur pratique. 

Les limites de l’auto-entreprise

Mais la commission considère que les médias vont rapidement voir les limites à faire travailler des journalistes auto-entrepreneurs qui ne sont pas titulaires de la carte de presse. « Sans accréditation par exemple, les journalistes n’ont pas accès à un certain nombre de sources ce qui peut nuire à la qualité de leur travail », explique le commissaire de la CCIJP.

Et aussi à leur évolution salariale. La carte de presse est un outil de travail mais aussi la reconnaissance d’un statut, qui permet par exemple de faire le calcul de l’ancienneté et prétendre à des revalorisations salariales.

Dans le cas d’une cession d’un journal à un nouveau propriétaire, elle donne également la possibilité d’invoquer la clause de cession et aussi la clause de conscience, que ne permet pas le statut d’auto-entrepreneur. 

 

Dorian Gallais/EPJT

[RÉSUMÉ] Media Freedom Act : un réel impact dans le quotidien des journalistes ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Media Freedom Act : quelle mise en oeuvre en France ? »

Adina Revol, Cécile Dubois, Emmanuel Poupard et Clothilde Le Coz ont débattu et répondu aux questions concernant le Media Freedom Act. Photo : Mathias Fleury/EPJT

Avec Adina REVOL, porte-parole de la Commission Européenne en France ; Emmanuel POUPARD, 1er secrétaire général SNJ ; Cécile DUBOIS, co-présidente du SPIIL et rédactrice en chef de Citoyens.com.

Animé par Clothilde Le Coz, responsable du développement international Journalisme & Citoyenneté

 

 

Les enjeux

Questionner et définir le « Media Freedom Act », une législation censée réglementer le paysage médiatique au sein de l’Union européenne et garantir la protection de la liberté et du pluralisme des médias.

Ce qu’ils ont dit

Adina Revol (représentante de la Commission européenne) : ​« C’est un texte novateur qui protège le pluralisme et l’indépendance des médias. Il s’agit d’un règlement, pas d’une directive. Une fois approuvé et publié dans le journal officiel, il s’applique après 6 mois dans l’ensemble des pays de l’Union européenne. »

Emmanuel Poupard (1er secrétaire général du SNJ) : ​ « Le projet de règlement doit instaurer un code de conduite en ce qui concerne l’éthique et la déontologie journalistique à l’échelle européenne. Si le texte peut nous aider à avancer sur la question de la concentration des médias, c’est une bonne chose. »

Cécile Dubois (co-présidente du SPIIL) : « En quoi ce règlement est utile ? Sur le plan démocratique, l’article 4 est fondamental : il résume les droits fondamentaux des journalistes et des éditeurs. »

À retenir

Comment harmoniser les règlementations européennes concernant les droits de la presse et garantir les libertés fondamentales des journalistes ? C’est l’objectif du « Media Freedom Act », dont les contours sont actuellement définis par différents comités de la Commission européenne. Les journalistes et représentants syndicaux ont ainsi pu exprimer leurs attentes et leurs questionnements quant à cette législation. La plupart d’entre eux s’accordaient pour dire que le projet était une bonne initiative, mais qu’il n’était pas assez ambitieux pour avoir un impact réel dans les pays où les médias disposent déjà d’une liberté et d’une protection juridique importantes. Adina Revol, représentante de la Commission européenne, a évoqué un calendrier : l’objectif est de voter le texte d’ici novembre au Parlement européen, afin qu’il soit mis en place avant les prochaines élections européennes. 

 

Mathias Fleury (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] « Atelier Histoire « Belle Époque » : Quand les médias diffusent le goût de l’info »

Retrouvez l’essentiel de l’atelier histoire « « Belle Époque » : Quand Les Médias Diffusent Le Goût De L’Info »

Lisa Bolz, chercheuse en SIC au GRIPIC-CELSA, Claire Blandin, professeur des universités LabSIC/Univ Paris 13, et Arthur Asseraf, maître de conférences à l’Université de Cambridge (en visio) Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Arthur ASSERAF, historien à l’université de Cambridge,
Lisa BOLZ, chercheuse en SIC au Gripic-Celsa – Sorbonne Université

Animé par Claire BLANDIN, professeure des Universités en SIC à Paris 13.

Les enjeux

Claire Blandin a fait un état des lieux de la recherche sur les médias à la Belle Époque, autour de la construction du goût de l’info. Arthur Asseraf présentait son ouvrage Le désinformateur – Sur les traces de Messaoud Djebari. Lisa Bolz revenait sur le chapitre qu’elle a co-écrit avec Juliette Charbonneaux dans le collectif Paris Capitale Médiatique : « Paris assiégé, Paris menacé, Girardin déplacé ».
L’enjeu : En quoi les deux livres présentés renouvellent les perceptions des fabriques de l’information et la diffusion de celle-ci dans le Paris de la « Belle Époque ».

Ce qu’ils ont dit

Claire Blandin : « Le goût de l’info se construit à la Belle Époque parce que c’est une période d’alphabétisation des Français, voire de scolarisation. C’est le développement de produits écrits bons marchés, de découverte des produits de l’écrit. Ces derniers arrivent dans les classes populaires, et ne sont plus réservés à la petite bourgeoisie. »

« Il y a la mise en place de formes de narration, comme le « feuilleton ». À la fois pour l’actualité, qui parfois arrive par épisodes, ou encore par la fiction, avec les romans-feuilletons. »

Arthur Asseraf : « Il existait un décalage fort entre un espace public, médiatique européen, où les infos circulent vite et de façon dense, et ces espaces [les colonies] qui apparaissent comme des trous noirs d’information pour les européens. Djebari se positionne comme celui qui a accès à ces espaces. Il profite de ce développement du goût de l’information en France et à Paris à ce moment-là. »

Lisa Bolz : « Dans la correspondance d’Émile de Girardin avec son neveu, on a ses témoignages plus personnels, comment il se projette… On voit toutes les pensées en amont, qu’il reprend aussi parfois dans ses publications. »

À retenir

Arthur Asseraf retrace le parcours de Messaoud Djebari, né en Algérie dans les années 1860, qui va affoler le Tout-Paris en racontant comment il aurait retrouvé la trace de membres survivants d’une mission française dans l’actuel Niger.

Lisa Bolz s’est intéressée à la correspondance de cette figure, à la fois célèbre et méconnue, du monde médiatique de la Belle Époque. Précisément dans ses velléités patriotiques au moment de l’invasion allemande en 1870.

Avant la Première Guerre mondiale, la confiance envers les journalistes et les médias est sans doute extrêmement forte. La Belle Époque est la découverte collective de l’écrit. Le bourrage de crâne, dès 1914, crée une rupture de confiance, dont la presse écrite ne se remettra jamais.

Le métier de journaliste, peu institutionnalisé dans les années 1880, n’est pas encore totalement identifié parmi les métiers de l’écrit (publicistes, écrivains…). Avec l’histoire de Messaoud Djebari, on découvre que le métier avait parfois des liens avec le renseignement d’État, les interprètes militaires.

Déjà à l’époque, une proto-économie de l’attention se met en place. L’affaire Djebari ne dure que quelques semaines, le public parisien finit par passer à autre chose : d’autres choses plus spectaculaires arrivent. Maintenir l’intérêt du public est quelque chose de complexe et de très volatile, déjà à la Belle Époque.

Zacharie Gaborit (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Des journalistes défricheurs de l’info locale »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Des journalistes défricheurs de l’info locale »

Millie Servant, rédactrice en chef de Climax, développe le modèle de son média. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Juliette CABACO-ROGER, journaliste et co-fondatrice de Splann !, Deborah ADOH, journaliste et fondatrice d’endémie, Millie SERVANT, rédactrice en chef de Climax, Raphaël POUGHON, directeur de La compagnie rotative.

Animé par Richard HECHT, membre de l’UCP2F.

 

 

Les enjeux

Des médias locaux fondés sur un modèle alternatif émergent sur le territoire. Splann !, Climax ou encore Endémik cherchent à se rapprocher des citoyens tout en vivant de ces nouveaux modèles, à la fois économiques et éditoriaux.

Ce qu’ils ont dit

Déborah Adoh (journaliste et co-fondatrice d’Endémik, média en ligne) : ​« J’ai pris Endémik sur mon dos et je me suis engagée à faire du journalisme participatif. Je suis allée dans les collèges, les lycées, les médiathèques, les hôpitaux de jour… Je voulais construire avec les citoyens des reportages et connaître leur vision des médias. »

Millie Servant (rédactrice en chef de Climax, média sur l’urgence climatique) : ​« Plusieurs choix éditoriaux pourraient nous décrédibiliser : l’humour, la culture mème et le cynisme. Moi, ça m’interroge que le métier soit hostile à un journalisme qui laisse place aux émotions. »

«Si des petits médias comme nous patinent, c’est parce que les médias plus traditionnels siphonnent le lectorat et les fonds publics d’aide à la presse. »

Juliette Cabaco-Roger (journaliste et co-fondatrice de Splann !, média breton d’enquête) : ​« On enquête en fonction de l’actualité qu’on estime plus urgente, par exemple les sujets environnementaux. Sans les gens sur le terrain, notre travail serait impossible. Grâce à eux, on a déjà une base de travail. »

Raphaël Poughon (directeur de La compagnie rotative, média alternatif) : ​« Les modèles économiques sont en train de changer. Ce sont des micro-modèles pour des micro-médias, mais qui ont des communautés extrêmement engagées.»

À retenir

Si les trois médias présentés au cours de cet atelier divergent sur le plan de leur choix éditorial, tous ont pour ambition principale de se rapprocher des citoyens de leur territoire d’ancrage. Splann ! s’appuie sur les locaux pour enquêter sur la Bretagne, Climax traite des l’urgence climatique sous l’angle du cynisme et Endémik publie les reportages de citoyens rencontrés dans différents établissements (collèges, médiathèques, hôpitaux…). Un modèle pas encore stable pour les journalistes. La plupart écrivent pour d’autres titres, ont un statut complexe d’auto-entrepreneur ou ne bénéficient pas de la carte de presse.

Malgré cette instabilité, ces journalistes partagent le même engagement. Ils mettent désormais tout leurs poids dans la balance pour défricher une information locale utile aux citoyens.

 

Élias INSA (EPJT)

 

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[Interview] Michel Dumoret « Jamais considérer que ce qu’on reçoit sur les réseaux sociaux c’est argent comptant »

L’arrestation de Donald Trump ou encore Emmanuel Macron en éboueur dans les rues parisiennes sont, entre autres, les images qui circulent sur les réseaux sociaux ces derniers semaines. Leur point commun ? Elles ont été générées à partir d’un programme d’intelligence artificielle (IA), Midjourney. Avec des IA de plus en plus performantes, le risque pour les médias de propager une fausse image est présent. Michel Dumoret, directeur en charge de la lutte contre la désinformation à France Télévisions, revient sur le risque « démocratique » de ce type d’image et comment France Télévisions travaille dans ce contexte. Il évoque également les bons réflexes à adopter.

Réalisé par Kelvin Jinlack/EPJT.

[REPORTAGE] La jeunesse prend la parole aux Assises du journalisme

Thalie, élève en Terminale au lycée Choiseul à Tours présente sa chronique radio aux Assises du journalisme.

Photo : Maël Prévost/ EPJT

Les Terminales du lycée Choiseul à Tours ont participé mercredi 29 mars à une émission de radio en direct pendant les Assises du journalisme. La radio 100% lycéen, mise en place par la région Centre-Val-de-Loire offre la possibilité aux jeunes de donner de la voix.

Il est 10 heures au MAME lorsque les élèves du lycée Choiseul à Tours prennent place autour du plateau de radio. Laurent Garofalo, un ancien journaliste pour Europe 1, est à la technique. Il les conseille sur les manières de relancer leurs camarades afin de garder une dynamique pendant l’émission. Aujourd’hui il travaille pour Mediacoms, une agence qui met en place des radios temporaires comme Radio 100% lycéen. Cette web radio mise en place par la région Centre-Val-de-Loire a pour objectif de donner la parole aux jeunes. Parmi les vingt-trois lycées qui participent au projet cette année, des élèves de six établissements sont conviés aux Assises du journalisme pour l’évènement.

Pour redonner le goût de l’information à la jeunesse, les lycéens ont carte blanche pour les sujets. Ce matin, les sept élèves de Terminale de Choiseul se sont exprimés sur le thème de « l’engagement chez les jeunes » qu’ils ont choisi à l’unanimité. Cachée derrière la table de mixage, Mélanie Belondo, la CPE du lycée n’a qu’une hâte, que l’émission commence. « Les sujets proposés sont très riches. Participer aux Assises du journalisme c’est une manière pour les élèves de concrétiser leur engagement », affirme-t-elle avec enthousiasme.

« L’EMI est indispensable »

« S’informer est un devoir. Aujourd’hui il y a trop de fake news, donc l’EMI est indispensable », assure Lélia. « C’est important de maîtriser les médias, sinon on croit tout ce qu’on voit », ajoute Thalie, qui reconnaît qu’il y a un manque d’EMI chez les jeunes.

Mélanie Belondo est de l’avis de ses élèves. Elle voit l’EMI comme une de ses missions en tant que CPE. « La manière de s’informer fait partie des prérogatives du lycée. Cette sortie aux Assises du journalisme est une forme d’EMI », assure-t-elle.

Parmi les sept Terminales présents sur le plateau de radio, rares sont ceux qui s’informent sur ce médium. Lélia et Thalie écoutent beaucoup les émissions de France Inter et France culture. Et ils s’informent tous sur les réseaux sociaux comme Instagram. Les élèves suivent par exemple les comptes d’Hugo Décrypte ou de Brut. Thalie et Luna, qui vivent encore chez leur parents, regardent par ailleurs le 20 heures de TF1.

«Un véritable espace d’expression »

C’est la troisième année que Mélanie Belondo travaille main dans la main avec Médiacoms car le projet radiophonique a trouvé son public auprès des lycéens de Choiseul. « J’ai imposé le format radio car c’est l’occasion pour les élèves de s’entraîner à l’épreuve du grand oral du baccalauréat », explique-t-elle.

 Il est presque 11 heures dans la grande salle des Assises du journalisme de Tours et le live approche à grands pas. Les lycéens se concentrent et gardent leur calme pour ne pas laisser le stress monter. « Je veux que vous profitiez de ce moment », leur conseille la CPE. L’émission débute avec la chanson Happy de Pharell Williams. Il reste une minute avant le lancement. Des grandes inspirations sont prises et des petits rictus nerveux s’affichent sur les visages de ces lycéens de 17 et 18 ans. Luna est stressée. C’est elle qui lance l’émission. Les chroniques s’enchaînent, mêlée à des interactions entre les participants. Il y a également une grande place laissée au débat.

Lorsque Lohan parle de l’engagement écologique, il a la voix tremblante mais gagne vite en confiance au fur et à mesure de sa chronique. « J’aime quand ils se révèlent. L’émission dure une heure on sent qu’ils montent en puissance », confie avec tendresse la CPE. Pendant la deuxième partie de l’émission, les chroniqueurs sont beaucoup plus détendus. « L’atelier radio est un réel espace d’expression, je peux donner mon opinion, faire des revendications. C’est une belle opportunité à saisir », témoigne Luna. Titouan quant à lui confirme que la radio lui a permis de se libérer de sa timidité.

Thalie passe en dernier et propose aux auditeurs une chronique sur l’engagement en musique avec le rappeur Orelsan. Elle scande son texte avec passion. « J’étais dans mon élément. J’ai découvert la radio grâce à l’école. Ça a été un déclic sachant que je me destine à des études de journalisme » raconte-t-elle.

Il est midi et l’émission touche à sa fin. Les sept élèves chantonnent tous un « au revoir » avant de rendre l’antenne et de souffler pour de bon. « Nous sommes fiers de vous », lancent à l’unisson Laurent et Mélanie. Les lycéens aussi sont ravi d’avoir passé ce moment ensemble et d’avoir pu s’exprimer autour d’autant de sujets. C’est avec de grands sourires qu’ils repartent des locaux du MAME, direction le lycée Choiseul.

Zeïneb Hannachi (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Histoire d’un ogre – carte blanche à Erik Orsenna »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Histoire d’un ogre – carte blanche à Erik Orsenna »

Erik Orsenna, écrivain et académicien français. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Erik ORSENNA, écrivain et académicien français.

Animé par Catherine BOULLAY, journaliste spécialiste des médias à L’Opinion.

Les enjeux

Erik Orsenna, écrivain et académicien français, était présent mercredi 29 mars dans le cadre de la publication de son dernier ouvrage, Histoire d’un ogre. L’occasion, aussi, de donner son avis sur l’importance des journalistes dans la société, aujourd’hui.

Ce qu’il a dit

Erik Orsenna : « J’écris quand je ne comprends pas quelque chose. Ici, c’est pour comprendre pourquoi il existe cette haine entre les Français et ceux qui les nourrissent. Les Français adorent le pain mais détestent les céréaliers. »

« On n’a jamais eu autant besoin de journalistes car la société est compliquée. »

« Deux raisons peuvent expliquer pourquoi il y a un désintérêt des Français à l’égard du journalisme. La première : les journalistes ne travaillent peut-être pas assez. La seconde : les journalistes préfèrent parfois traiter des sujets de manière simple plutôt que complexe. »

« Comme il y a une grande demande, il faudrait que les analyses aillent plus loin. Mais les journalistes n’ont pas toujours les moyens financiers. »

« Ce sont les Assises de la nécessité et de la possibilité du journalisme. »

À retenir

Erik Orsenna est revenu brièvement sur son nouvel ouvrage, Histoire d’un ogre. Il y décrit le personnage d’un Breton, né à Quimper dans un moulin à papier des bords de l’Odet. Brutalement, il se transforme en « coucou » qui dévore toutes les entreprises. Ce personnage, jamais nommé, n’est autre que Vincent Bolloré.

Mais, surtout, Erik Orsenna a donné son opinion sur le rôle des journalistes. Il les décrit comme essentiels dans la société. Pourtant, la défiance des Français à leur égard ne cesse d’augmenter. L’occasion, également, de faire part de son inquiétude. Les organes de presse français sont majoritairement possédés par des milliardaires qui interviennent au sein des rédactions. Les journalistes doivent alors redoubler d’efforts pour proposer des contenus aux analyses plus poussées pour captiver le public.

Anne-France Marchand (EPJT)

[INTERVIEW]« Ensemble on retrouve le goût de l’info, le plaisir de s’informer »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Jérôme Bouvier, Président de Journalisme et Citoyenneté, l’association organisatrice des Assises, nous explique l’idée derrière la thématique de cette année « Retrouver le goût de l’info ».

« Une des raisons pour laquelle on fait ce métier de journaliste, c’est parce qu’on a le goût de l’autre, du terrain, des gens, des histoires, des parcours. Et je pense que depuis trois ans on a un peu perdu ce goût des gens. » C’est ainsi que Jérôme Bouvier justifie le thème de cette 16e édition des Assises internationales du Journalisme de Tours.

Une idée qui lui est venue après trois années intenses en actualité et qu’il a proposé cet automne au comité des Assises : « Je ne sais pas si vous vous souvenez les trois dernières années des Assises. On a eu s’informer au moment du Covid, ce moment incroyable où le monde s’est arrêté, il y a eu la guerre en Ukraine, il y a eu l’urgence climatique avec l’anxiété qu’elle génère. C’étaient des thèmes d’actualité très précis. Trois ans après, cette succession d’événements nous a profondément marqué dans nos rapports à l’actualité, dans notre rapport au monde et à l’autre. On a profondément perdu nos repères. »

Jérôme Bouvier a répondu aux questions d’Elise Bellot de l’EPJT. 

Pour le Président de Journalisme et Citoyenneté, cette nécessité de « redonner le goût de l’info » concerne autant les journalistes que les citoyens : « On le verra dans le baromètre ViaVoice des Assises qu’on rend public cet après-midi. Il y a plus d’un tiers de nos concitoyens qui disent « moi, depuis le Covid, depuis la guerre en Ukraine, je ne veux plus suivre l’info, c’est trop anxiogène pour moi ». Et puis, il y a ceux qui nous disent : « je ne veux plus suivre l’info parce que je ne nous fais plus confiance ». » C’est un travail collectif : « Ensemble on retrouve le goût de l’info, le plaisir de s’informer. »

 

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

[RÉSUMÉ] La conférence « Comment retrouver le goût de l’info, quelles propositions ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Comment retrouver le goût de l’info, quelles propositions ? »

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Raphaël GARRIGOS, co-fondateur des Jours et co-président du jury, Isabelle ROBERTS, co-fondatrice des Jours et co-présidente du jury, Thierry THUILLIER, directeur de l’information du groupe TF1 et directeur délégué de LCI et Cécile PRIEUR, directrice de la rédaction de L’Obs.

Animé par Catherine BOULLAY, journaliste spécialiste des médias à L’Opinion.

Les enjeux

Selon le baromètre 2023 de l’institut Vivavoice sur l’utilité du journalisme, 84 % des sondés disent que le journalisme est un métier et qu’il est utile. Si le résultat peut sembler bon, il est en fait de six points inférieur au baromètre de l’année précédente. L’objectif est de réfléchir sur les moyens de limiter cette baisse de confiance dans les journalistes et, dans l’idéal, récupérer ces lecteurs déçus.

Ce qu’ils ont dit

Isabelle ROBERTS (co-fondatrice des Jours et co-présidente du jury 2023) : « Notre proposition : ne pas tout faire, ne pas être exhaustif mais ce qu’on fait on le fait bien, en série et on l’épuise. »

« On ne s’interdit aucun sujet sauf si on n’a rien dire dessus. »

« Pour que les gens retrouvent le goût de l’info, il faut donner envie aux gens. Donc nous on a eu envie de raconter des histoires, de le faire sous forme de série. »

Raphaël GARRIGOS (co-fondateur des Jours et co-président du jury 2023) : « La fonction des chaînes d’info, c’est d’être en prise direct avec l’info, mais parfois on a l’impression que c’est plutôt les doigts dans une prise électrique. »

« La neutralité n’existe pas. On ne va pas donner 5 minutes aux juifs et 5 minutes à Hitler comme dirait Godard. »

« Nos abonnés nous dise qu’on est un peu le Netflix du papier. »

Thierry Thuillier (directeur de l’information du groupe TF1) : « La clé absolue, c’est de raconter des histoires. »

« Traiter l’actualité via le reportage permet de redonner du goût à l’information. Cela permet de raconter des histoires. »

« Il y a une question à se poser sur la transparence. Il est très important de montrer comment l’information fonctionne. Les journalistes ont leur propre indépendance, leur propre éthique et heureusement. »

Cécile PRIEUR (directrice de la rédaction de l’Obs) :​ « Au fond, redonner le goût de l’info, c’est faire notre travail. Notre travail de journaliste a le rôle social de sortir des informations. »

« Aujourd’hui on fait attention à la manière dont sont encadrés les journalistes. »

À retenir

Pour retrouver ce goût de l’information, les journalistes doivent se réinventer dans le fond de leur contenu et surtout dans la forme qu’ils donnent à leurs productions. Le média Les Jours s’inscrit dans cette lignée en faisant le choix fort de choisir spécifiquement les sujets qu’il traite tout en délaissant volontairement d’autres. Il choisit aussi pour quelques papiers de lui donner un format de série, popularisé par Netflix qui attire les jeunes.

Sur la question de la toxicité des informations, les intervenants sont tous d’accord : les grands sujets tels que l’Ukraine, l’environnement ou encore le Covid sont incontournables car ce sont les thèmes qui intéressent le plus les lecteurs. Pour redonner goût à l’information, même avec ces thématiques, les participants tablent sur un retour au terrain, au reportage et au local car ce qui compte c’est de raconter une histoire, celle des gens qui sont au plus près des évènements.

Zachary Manceau (EPJT)

[RÉSUMÉ] Label ou auto-régulation : comment certifier l’info ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « label ou auto-régulation : comment certifier l’info »

Benjamin Sabbah, directeur général à Worldcrunch, Kathleen Grosset, présidente de la CDJM, Thibaut Bruttin, adjoint au directeur de Reporters sans Frontière, Pascal Doucet Bon, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie France Télévision. . Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Benjamin SABBAH, directeur général à Worldcrunch, Kathleen GROSSET, présidente de la CDJM, Thibaut BRUTTIN, adjoint au directeur de Reporters sans Frontière, Pascal DOUCET BON, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie France Télévision. 

Animé par Christian GOUEROU, journaliste et médiateur pour Ouest-France

 

 

 

Les enjeux

Défiance des citoyens, fake news : quelles solutions existent pour regagner la confiance des citoyens ? Comment les médias peuvent-ils prouver que l’information proposée est de qualité ? Pour faire face à ces enjeux, des médias et des organismes s’engagent pour le public. 

Ce qu’ils ont dit

Benjamin SABBAH : « Sur le process de production journalistique, des organismes comme la CDMJ et la RSF ou des labels de qualité comme le JTI (journalism trust initiative) poussent à plus de transparence. C’est une bonne initiative  »

Thibaut BRUTTIN : ​« Il faut aussi demander plus de transparence de la part des systèmes de plateforme. Google news référence les médias par rapport à leur réputation. Mais c’est quoi, au juste, la réputation ? C’est un fonctionnement très opaque. »

Pascal DOUCET BON : « Cette autorégulation s’impose à nous par elle-même. Le problème, c’est que la plupart des régulateurs qui encadrent la pratique du journalisme et veillent au respect de la déontologie ne pointent que nos erreurs. Quand vous lisez leur bilan de fin d’année, vous avez l’impression que France Télévisions est un mauvais média. Même si nous reconnaissons que nous faisons des erreurs. »

Kathleen GROSSET : ​« Nous avons créé le conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM)  pour ne pas seulement montrer les erreurs des rédactions. Ça aurait montré une fausse image de leur travail. Tout n’est pas noir. »

 

À retenir

Pour regagner la confiance du public et lutter contre la désinformation, reporters sans frontières a créé le label JTI (journalism trust initiative) qui fonctionne par système d’adhésion libre. Ce label propose des critères de qualités et d’indépendance auxquels les médias signataires doivent se conformer. Il permet aux lecteurs d’identifier clairement les rédactions qui respectent ces normes. En parallèle, le conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM), instance de médiation entre les journalistes, les médias, les agences de presse et les publics, veille, lui aussi, au respect de la déontologie. Tout le monde peut saisir le CDJM  lorsqu’un doute existe sur les pratiques d’une rédaction. Le CDJM émet ensuite un avis, favorable ou non, et fonctionne comme un régulateur. 

Camelia Aidaoui (EPJT)

 

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Depuis 15 ans, La Chance donne la possibilité à tous de devenir journaliste

Chaque année, près de 80 étudiants bénéficient du dispositif égalité des chances grâce à la prépa gratuite La Chance. Un dispositif qui offre aux aspirants journalistes une possibilité d’intégrer une des 14 écoles reconnues par la profession.

« J’ai essayé de préparer seule les concours. Je me suis rendue compte qu’il y avait un fossé avec les autres étudiants, que je n’avais pas le bagage culturel nécessaire. » Mais La Chance lui a souri, et Lune Armand est parvenue à intégrer l’antenne de Strasbourg de cette association créée en 2007 pour plus de diversité dans les médias. Et comme elle, qui est entrée à l’École publique de journalisme de Tours, 45 étudiants sur les 80 de la promotion 2022, ont été admis à la rentrée suivante une école des quatorze écoles de journalisme reconnues.

« Représenter toutes les diversités dans tous les médias »

L’association La Chance est née d’une volonté d’offrir la possibilité à tous les étudiants, notamment boursiers, d’aspirer à un avenir de journaliste. Président depuis 2015, Marc Epstein perpétue cette philosophie avec un objectif : « représenter toutes les diversités dans tous les médias ». Les diversités d’origine, de parcours, de territoire. Lui-même, ancien grand reporter des pages internationales de l’Express et du Monde, a pu le constater durant sa carrière : l’entre-soi est omniprésent dans le métier.

« Quand on a grandi dans une famille où il n’y a pas de journalistes, où on est éloigné du monde des médias […] ou que l’on est issu dune zone rurale éloignée des grandes villes, La Chance est là pour les aider dans ces fameux concours. », assure Marc Epstein, qui se consacre pleinement à l’association depuis 3 ans.

« La prépa ma tout payé »

La prépa offre une formation de près de 250 heures ainsi qu’un accompagnement financier, à hauteur de 600 € en moyenne par étudiants. Sans cette aide, Lune n’aurait pas passé autant de concours. « La prépa m’a tout payé : déplacements, concours, aide au déménagement… », apprécie-t-elle. Des financements qui ne seraient d’ailleurs pas possible sans la quinzaine de partenariats noués par La Chance et parmi lesquels on recense Le Parisien, L’OBS, France TV ou encore La Croix.

Mais le recrutement, même s’il est fondé sur des critères sociaux, reste exigeant. Les candidats doivent passer un véritable concours : une première sélection sur dossier en ligne, puis un oral avec des épreuves écrites et d’actualité. Beaucoup le reconnaissent : cet examen permet de supprimer le sentiment d’illégitimité des étudiants. Et le résultat est incontestable : « Aujourd’hui, ce sont les médias qui nous contactent, […] peut-être par une prise de conscience qui s’ouvrent davantage vers des profils plus diversifiés. »

Sarah Costes. Montage : Maëva Dumas

Née à Paris, La Chance est aujourd’hui présente sur tout le territoire. De Bordeaux à Grenoble, en passant par Marseille, Strasbourg, Toulouse et Rennes. Elle compte 6 salariés et plus de 350 bénévoles dont la plupart sont d’anciens étudiants. Parmi eux, Yousra Gouja. Après un an de préparation au sein de La Chance en 2018-2019, elle est à présent pigiste dans la presse spécialisée. « La Chance nous aide et nous prépare à ce à quoi nous pourrons être confrontés après les écoles. Ils sont là pour nous challenger. » Une préparation intense qui lui a permis d’intégrer l’ESJ Pro Montpellier.

En parallèle du processus de tutorat, la prépa est un accompagnement sur le long terme. Elle fournit des aides pour trouver des stages, des alternances ; elle transmet des offres d’emploi et dispose d’un pôle insertion professionnelle. Lune le confirme : « La Chance, c’est une communauté. Tu n’es pas lâché, c’est un collectif tout au long de la vie de journaliste. »

Sarah Costes

[Article] Vente de livres : Les livres en dédicaces caracolent déjà en tête

Les locaux de la librairie « La Boite à Livres » sont situés 19 rue Nationale à Tours. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Chaque année, en marge des Assises du journalisme, la librairie “la Boite à Livres” tient son stand où elle propose à la vente uniquement des ouvrages qui concernent les médias et le journalisme. Et comme tous les ans, ce sont les livres en dédicace et les grands auteurs qui mènent la danse.  

Même si elle confie ne pas avoir encore de chiffres, Margot, la gérante du stand de la Boîte à Livres, est magnanime : « Il ne faut pas se le cacher, ce qui se vend mieux, ce sont les livres des auteurs en dédicace. » Elle ajoute : « en deuxième position, je dirais que ce sont les grands auteurs un peu classiques qui ont du succès comme Bruno Patino, Marc Endeweld ou encore Florence Aubenas. »

Cependant, les ouvrages des intervenants ont aussi du succès. C’est le cas de Mieux s’informer d’Anne-Sophie Novel. Le livre dans lequel elle guide les lecteurs pour se repérer dans le monde des médias, pour mieux les comprendre et éviter l’indigestion « se vend comme des petits pains », de l’aveu de Margot. L’autrice est d’ailleurs intervenue mardi aux Assises dans le cadre de l’atelier “La jungle des médias avec Anne-Sophie Novel et un bout des médias”.  

Ce soir la venue de l’académicien Érik Orsenna pour sa carte blanche (dans l’Auditorium à 18h30) devrait doper les ventes. L’auteur, qui a sorti cette année Histoire d’un ogre, métaphore des conquêtes médiatiques de Vincent Bolloré, saura à coup sûr attirer les foules.

Zachary Manceau

 

 

[RESUME] La conférence « Garantir le pluralisme des médias : quelle législation ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement «  GARANTIR LE PLURALISME DES MÉDIAS : QUELLE LÉGISLATION »

Avec Alexandre Buisine, journaliste et membre du SNJ, Benoit Huet, avocat au barreau de Paris, Nathalie Sonnak, présidente du COP CLEMI, Alexis Levrier, historien de la presse à l’Université de Reims.  Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Avec Alexandre BUISINE, journaliste et membre du SNJ, Benoit HUET, avocat au barreau de Paris, Nathalie SONNAC, presidente du COP CLEMI, Alexis LEVRIER, historien de la presse à l’Université de Reims.  

Animé par Lucile Berland journaliste et membre de l’association Informer n’est pas un délit (INPD)

 

 

Les enjeux

Vincent Bolloré, Bernard Arnault, Patrick Drahi, Arnaud Lagardère ou encore Xavier Niel. Vous avez forcément déjà lu un de leur journaux. Vous travaillez peut-être même pour l’un d’eux. La concentration de la presse régionale et nationale dans les mains de quelques propriétaires doit nous interpeller sur la question du pluralisme dans les médias. Est-ce qu’une myriade de médias équivaut forcément à du contenu différent ? Une réelle diversité d’opinion ? Ces tycoons qui achètent de l’influence posent un risque pour le journalisme et cultivent une défiance du public vis-à-vis des journalistes.

Ce qu’ils ont dit

Alexis LEVRIER : « La concentration des médias a parfois permis le pluralisme et l’émancipation de la presse par rapport au pouvoir politique. Cependant, aujourd’hui, la situation est différente. Nous sommes dans une crise structurelle, dû au modèle économique des médias et une crise structurelle à cause de la Covid. Suite à l’épidémie,  de nombreux médias sont tombés dans les mains de Bollore. »

Benoit HUET : « On a l’impression d’avoir le choix, en termes de médias, mais les contenus sont assez homogènes. »

« Au niveau de la législation, seulement l’audiovisuel est encadré, avec l’arcom. Une chaine ne peut donc pas être de gauche ou de droite. La rédaction doit donner la parole à des politiciens de tous bords. Les journaux, eux, ne sont pas tenus de respecter ce principe. »

Alexandre BUISINE : « Le problème avec l’Arcom, c’est que leur indépendance est discutable. Le système de nomination pose un problème. Avec la SNJ, nous demandons que la moitie du collège soit désigné par des journalistes salariés. Mais on nous répète qu’on est trop bête pour comprendre les technicités de l’arcom. »

« Plus il y a une concentration des médias dans quelques mains, plus les rédactions sont réduites et les journalistes licenciés. Ils sont remplacés par des créateurs de contenu. Le rêve de Reworld media (NDLA: le premier groupe de presse magazine français en nombre de journaux détenus), c’est de faire du journalisme sans journaliste. »

Benoit Huet : « Ce que fait Realworld est tout à fait légal. C’est bien là le problème. Il faut légiférer. C’est un groupe qui bénéficie des subventions d’aide à la presse. Il faut repenser ces critères d’attribution. »

Alexandre BUISINE : « Le problème, c’est que les propriétaires qui possèdent plusieurs journaux vont inciter les journalistes à publier les mêmes contenus. De plus, ils n’ont aucun intérêt à faire des médias rentables avec le système de défiscalisation des pertes. »

Nathalie SONNAC : « Les citoyens ne veulent pas payer pour de l’information. C’est une des causes de la concentration des médias. »

Lucile BERLAND en réponse : « Oui, mais les citoyens n’ont pas envie d’acheter un journal dans lequel ils ne se retrouvent pas. »

 

À retenir

Les journalistes doivent composer avec une défiance accrue des citoyens. La concentration des titres est un facteur d’aggravation qui amplifie ce phénomène.  Au milieu de tout ça, l’indépendance des rédactions est parfois menacée. Il faut apporter de réelles solutions à la hauteur de l’enjeu : repenser les critères d’attribution des aides à la presse, donner l’indépendance juridique aux rédactions, retoquer la loi relative à la liberté de communication de 1986. Le Freedom Media Act adopté par la Commission européenne propose également « des garanties contre les ingérences politiques dans les décisions éditoriales et contre la surveillance». La solution pour préserver notre indépendance sera peut-etre européenne.

Camelia Aidaoui

[RÉSUMÉ] Comment retrouver le goût de l’information ? (Etat des lieux avec DE FACTO, MILAN PRESSE, FONDATIONS DESCARTES, FONDATION JEAN-JAURÈS)

Retrouvez l’essentiel de l’événement « COMMENT RETROUVER LE GOÛT DE L’INFO ? » (Etat des lieux avec DE FACTO, MILAN PRESSE, FONDATIONS DESCARTES, FONDATION JEAN-JAURÈS)

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Marie-Anne DENIS, directrice générale de Milan Presse et David MEDIONI, journaliste et directeur de l’Observatoire des médias. 

Animé par Catherine BOULAY, journaliste spécialise des médias à L’Opinion.

 

 

Les enjeux

53% des Français disent souffrir de fatigue informationnelle. À partir de ce constat, comment redonner envie ? Faut-il que les médias changent complètement leur manière d’informer pour attirer à nouveau le public ? Ou doit-on repenser individuellement notre rapport à l’information ?

Ce qu’ils ont dit

Marie-Anne Denis (directrice générale de Milan Presse) : « 85% des jeunes (13-17 ans) pensent que l’info est importante. Ils ne sont pas du tout lassés par l’info. C’est une très bonne nouvelle. »

« Les ados sont contradictoires. Leur première source d’information ce sont les réseaux sociaux et pourtant c’est la source à laquelle ils donnent le moins de crédibilité. »

David Medioni (journaliste et directeur de l’Observatoire des médias) : « L’individu doit avoir un questionnement sur la manière dont il s’informe. Ensuite, évidemment, les médias traditionnels ont une part de responsabilité dans la fatigue informationnelle. Cette volonté de vouloir toujours étonner plutôt qu’informer me dit que oui, les médias ont leur part de responsabilité. »

« On est à un moment de bascule. Cette fatigue informationnelle, elle s’exprime aussi dans une fatigue institutionnelle importante. »

À retenir

À l’heure où de plus en plus de Français se disent affectés psychologiquement par les informations, certains décident de se couper complètement de l’info. Pour les deux intervenants, la fatigue informationnelle, au même titre que l’alimentation, est un enjeu de santé publique et devrait être traité comme tel. Ils militent pour la création d’une campagne de sensibilisation, comme la très connue « cinq fruits et légumes par jour », sur l’information.

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

 

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[RESUME] « Baromètre Viavoice – les Assises sur l’utilité du Journalisme »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Le baromètre Vivavoice / Les Assises sur l’utilité du Journalisme (France médias monde, France TV, Ouest France et Radio France » !

Photo : Eva Pressiat / EPJT

Avec François Xavier Lefranc, directeur de l’information à Ouest France, Pascal DOUCET BON, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie à France Télévisions, Frédérique MISSLIN, directrice adjointe de RFI, Léopold STRAJNIC, directeur adjoint de la rédaction de France Bleu.

Animé par Adrien BROCHE, Consultant Viavoice

 

 

Les enjeux

Le baromètre Vivavoice sur l’utilité du Journalisme est présenté pour la septième fois lors de ces Assises 2023. La question de l’utilité du journalisme est posée chaque année, accompagnée d’une seconde sur le thème des Assises. Pour cette édition, il s’agit du goût pour l’information.

Ce qu’ils ont dit

François Xavier Lefranc (directeur de l’information à Ouest France) : ​« Les résultats du baromètre ont un côté inquiétant et à la fois extrêmement rassurant, surtout en ce qui concerne la confiance et la volonté des publics à avoir une information vraie, vérifiée, impartiale. »

« La question est aussi de savoir si le journaliste a le temps de travailler. Le sujet, aujourd’hui, c’est le temps. Le temps de pouvoir travailler, traiter les informations, etc. »

Pascal DOUCET BON (directeur délégué de l’information en charge de la stratégie à France Télévisions) : « Il faut que nous, les rédactions, apprenions à écouter. Le courrier des lecteurs, un médiateur, des organes d’écoute ne suffisent pas. Il faut du dialogue avec les publics. »

« Il existe aussi un journalisme factuel, de décryptage, et donc de nuance. Mais on est en face d’autres médias, comme Twitter, qui ne s’embarassent pas de nuance. Le manque de nuance est plus lié à des externalités qu’à la pratique journalistique »

Frédérique MISSLIN (directrice adjointe de RFI) :​ « Est-ce que l’idée ne serait pas de co-construire nos éditions avec le public ? »

« Il y a une éducation à faire sur les manières de traité l’information. Pour le climat, il faut savoir qu’il y a des coûts, des formations nécessaires pour les sujets où on a peu de compétences. »

Léopold STRAJNIC (directeur adjoint de la rédaction de France Bleu) : « Pour les Gilets jaunes, on n’a pas été accueilli comme on le pensait, on était vu comme des instances du pouvoir. Donc on a ouvert nos rédactions pour rendre transparente nos pratiques. »

« Quand on a des mauvaises nouvelles à annoncer, normalement, on prend des pincettes. Mais dans le journalisme, dans notre pratique, il n’y a aucune nuance. Il faut mettre un coup d’arrêt à cette course au sensationnel. »

À retenir

Le baromètre de l’Institut Vivavoice présente chaque année ses résultats. 84% des Français disent que le journalisme est un métier et qu’il est utile. Mais c’est six points de moins que l’an dernier et surtout le pourcentage le plus bas depuis la création du baromètre. L’information professionnelle reste la source de confiance privilégiée du public et 88% des répondants jugent qu’il est utile de s’informer. Les attentes du public concernent la vérification des informations, une information partiale et hiérarchisée et enfin la nécessité d’information pratiques, utiles au quotidien.

Cependant, ce baromètre ne reste qu’un indicateur pour les médias, qui peuvent ou non en tenir compte.

Louise Monard-Duval

 

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Panthéon du journalisme : découvrez les dix premiers noms

Jérôme Bouvier dévoile les dix premières personnalités retenues pour le panthéon du journalisme. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Jérôme Bouvier, organisateur des Assises du Journalisme à Tours, a présenté les dix premiers noms qui incarnent les valeurs de la profession, à travers son panthéon du journalisme.

Ce mercredi après-midi, Jérôme Bouvier, le président de l’association Journalisme et Citoyenneté, qui organise les Assises du Journalisme à Tours, et le président du comité du prix Albert Londres, Hervé Brusini, ont révélé les dix premiers noms les plus cités en vue d’intégrer un panthéon du journalisme. « Nous avons assez peu de bagage historique sur notre profession, dans un moment de grande discussion sur qui est journaliste », a-t-il argumenté pour justifier le lancement de ce projet. « Le drame du journaliste, c’est l’ignorance de son histoire », déclare Hervé Brusini, qui veut y remédier. Pour y parvenir, Jérôme Bouvier a lancé une grande consultation sur le site journaliste.com où chacun pouvait choisir dix noms parmi une liste en contenant une cinquantaine, jusqu’à l’automne.

Voici les dix premiers noms :  Albert Londres, Albert Camus, Françoise Giroud, Emile Zola, Hubert Beuve-Méry, Joseph Kessel, Cabu, Louise Weiss, Pierre Lazareff et Theophraste Renaudot.

Ces personnalités ont été retenues parmi une cinquantaine de journalistes disparus. Pour poursuivre leur héritage, le panthéon est amené à s’agrandir chaque année avec l’entrée de deux nouveaux noms. En 2023, les Assises européennes du journalisme de Bruxelles seront aussi l’occasion de créer un panorama des journalistes qui continuent d’inspirer la profession à plus grande échelle, au sein de chaque pays de l’Union européenne.

 

Mathilde Lafargue (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Le baromètre social des Assises par Jean-Marie Charon : le collectif dans le journalisme aujourd’hui »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Le baromètre social des Assises par Jean-Marie Charon : le collectif dans le journalisme aujourd’hui »

Jean-Marie Charon, chercheur en sociologie à l’EHESS, Elise Descamps, journaliste et membre de la CFDT
et Maïté Darnault (en visioconférence), journaliste indépendante au collectif We Report. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Elise DESCAMPS, journaliste et membre de la CFDT et Maïté DARNAULT, journaliste indépendante au Collectif We Report.

Animé par Jean-Marie CHARON, chercheur en sociologie à l’EHESS.

 

Les enjeux

Le baromètre social des Assises était présenté ce mercredi 29 mars. Le but : faire un état des lieux de l’emploi des journalistes et des entreprises médiatiques.

Cette année, le focus portait sur la dimension collective dans le journalisme. Une multitude d’organisations existent et rassemblent nombre de journalistes. Leur objectif : l’entraide et le partage.

Ce qu’ils ont dit

Jean-Marie CHARON : « Le journalisme reste centralisé : 52,61 % des détenteurs de carte de presse se situent à Paris. La Bretagne arrive en seconde position, suivie de l’Aquitaine et des Pays de la Loire. »

« J’ai réalisé une typologie des principes des collectifs de journalistes. Le premier est l’entraide et le partage de moyens. Le second est la défense ou la promotion d’une catégorie particulière de journalistes. »

Elise DESCAMPS : « L’offre pléthorique des collectifs de journalistes est enthousiasmante. C’est rassurant de savoir qu’il y a de l’entraide dans un milieu que l’on pense individuel. »

« Il reste encore de la marge. Beaucoup de journalistes ne sont pas dans un collectif. C’est dommage car c’est une profession qui souffre et qui nécessite de serrer les rangs. »

Maïté DARNAULT : « L’un des prix de l’indépendance du pigiste, c’est la précarité. » 

À retenir

Les statistiques présentées concernaient les 34 043 journalistes qui détenaient la carte de presse sur l’année 2022. Les jeunes journalistes (de 30 et moins), qui représentent 13% de la profession, sont les plus touchés par la précarité. Ils représentent deux-tiers de cette tranche d’âge, soit un recul de 10% en comparaison de l’année précédente. Parmi eux : les pigistes, les journalistes en CDD et les demandeurs d’emploi. En ce qui concerne la parité, elle n’est pas encore atteinte : un peu moins de 48% des femmes détiennent la carte de presse.

Cette année, le focus portait sur la dimension collective de l’organisation des journalistes en dehors des rédactions. La majorité des associations sont sectorisées. Elles se développent dans un domaine particulier : défense des femmes, des pigistes mais aussi des personnes racisées. Leur but est aussi de permettre l’entraide et le partage entre les journalistes. Parmi ces organisations collectives sont recensées les associations de journalistes, les clubs de la presse, les sociétés et les collectifs de journalistes.

Anne-France Marchand (EPJT)

Créer un Panthéon du journalisme, l’ambitieux projet de Jérôme Bouvier

Jérôme Bouvier aux Assises du journalisme de Tours de 2023. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Le président des Assises du Journalisme a lancé une grande consultation sur les illustres journalistes qui mériteraient d’entrer dans un panthéon de la profession. Mercredi après-midi, il a révélé les dix noms les plus cités par les journalistes.

Donner « une photo de comment la profession se voit ». Tel est l’objectif de Jérôme Bouvier, qui a lancé en marge des Assises du Journalisme de Tours une grande consultation pour créer un panthéon des journalistes. ». L’idée est de savoir « d’où nous venons », explique le président de l’association Journalisme et citoyenneté. « Nous avons assez peu de bagage historique sur notre profession, dans un moment de grande discussion sur qui est journaliste », ajoute-t-il.

Albert Londres, premier choisi !

A l’instar du Panthéon où se retrouvent les héros et les héroïnes de la nation, ce panthéon du journalisme veut instaurer un débat démocratique autour des valeurs qui rassemblent la communauté de journalistes, environ 35 000 en France. L’objectif est de créer un véritable panthéon avec la BnF, avec la reconnaissance de deux nouveaux noms chaque année. Pour le lancement, cette année, Jérôme Bouvier a révélé les dix premiers noms – en tête desquels figure l’illustre Albert Londres – les plus cités par les quelque 500 journalistes qui ont pris part à la consultation disponible sur le site journaliste.com.

Le procédé est simple et pédagogique : chaque nom qui peut être retenu par le votant est associé à une biographie. Ceci permet de partir à la découverte de figures qui ont incarné le journalisme, de l’Ancien Régime à aujourd’hui. On y retrouve par exemple Marguerite Durand, dont le fondateur du panthéon ne connaissait pas l’existence. Elle est à l’origine du premier titre de presse féminine à la fin du XIXe siècle, La Fronde.

Des spécialistes de la presse et des historiens sollicités

Pour réunir les premiers noms, des journalistes, des spécialistes de la presse et des historiens ont été sollicités. L’entrée de certaines personnalités dans la liste a parfois été discutée, comme celle d’Émile Zola, déjà présent au Panthéon, ou encore de Jean Jaurès. Cela fait écho à « l’entre-deux de la presse française, dont l’évolution est intimement liée à la politique, au débat d’idées, à la littérature ou encore au genre du récit de voyage », rappelle Jérôme Bouvier. Pour lui, c’est Albert Camus qui est la source de son envie de devenir journaliste.

Lors de leur deuxième édition en 2023, les Assises européennes du journalisme de Bruxelles seront aussi l’occasion d’encourager tous les pays de l’Union européenne à faire de même, pour dessiner un panorama de l’héritage journalistique à plus grande échelle.

[RÉSUMÉ] « Ils ont créé leur média cette année »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Ils ont créé leur média cette année »

De gauche à droite, Gilles Vanderpooten, Ulyse Mathieu, Mathilde Boudon-Lamraoui, Axel Roux et Gilles Tanguy. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Gilles VANDERPOOTEN, directeur général de Reporters d’espoirs, Axel ROUX, rédacteur en chef de Vakita, Gilles TANGUY, président de L’informé, Mathilde BOUDON-LAMRAOUI, formatrice à la Friche, Ullyse MATHIEU, fondateur de Contre-jour.

Animé par Romain COLAS, rédacteur en chef adjoint de La Correspondance de la presse.

 

 

Les enjeux

Journalisme de solution (revue Reporters d’espoirs), journalisme populaire (Contre-jour), environnemental (Vakita) ou encore investigation économique-tech (L’informé), les journalistes de cette année veulent redonner goût aux médias en mettant en avant des angles originaux et attrayants.

Ce qu’ils ont dit

Gilles VANDERPOOTEN (Reporters d’espoirs) : ​« Nous considérons que le journalisme de solution est une méthodologie et non pas une idéologie. »

Axel ROUX (Vakita) : « Nous avons décidé de nommer notre média “Vakita”. Le Vatika est le mammifère marin le plus menacé au monde. Il représente pour nous l’urgence face à l’effondrement de la biodiversité. Notre média veut donc représenter à la fois l’urgence climatique et mettre en lumière les combats. »

« Ce qui nous tient à cœur c’est l’action, pouvoir engager notre audience dans des dynamiques d’action, telles que les mobilisations, pour essayer de faire bouger les lignes. »

Gilles TANGUY (L’informé) : ​« Nous voulons trouver notre place en nous adressant à tout le monde. D’une part, nous sommes pour la plupart tous salariés, notre média couvre alors l’information de chaque secteur. D’autre part, nous sommes aussi citoyens et nous nous intéressons aux informations générales. C’est la raison pour laquelle notre média ne les omet pas. Finalement, nous souhaitons toucher les deux facettes de notre lectorat. »

Mathilde BOUDON-LAMRAOUI (Collectif La Friche, Contre-jour)​ : « Nous ne sommes pas vraiment militants mais nous assumons de donner une place centrale aux personnes et aux sujets en marge, sous les radars des médias de masse. »

Ullyse MATHIEU (Contre-jour) :​ « Nous souhaitons créer des espaces de paroles dans les zones rurales, les quartiers populaires, les prisons ; partir de ces endroits que l’on côtoie pour en faire du journalisme. »

 

À retenir

En plus de vouloir promouvoir et mettre en écho de nouvelles manières de s’informer, les quatre médias présentés ont des perspectives différentes avec la presse papier et le numérique. Les revues de Contre-Jour et de Reporters d’espoirs souhaitent, avec le support papier, exposer « un objet singulier » qui laisserait une trace pérenne des recueils. Vakita lui, s’attachent au format vidéo en web, dont la plus-value serait l’image, la mise en forme et l’incarnation des enquêtes grâce au visuel. Quant à L’informé, le web serait le plus approprié face au déclin de la presse papier.

Du côté de la ligne éditoriale, les médias présentés n’ont aucune interférence et ont la liberté d’écrire sur tous les sujets. Cependant, quand L’informé et Reporters d’espoirs se veulent factuels, Vitika et Contre-jour ont une écriture plus engagée.

Aya El Amri (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] Conférence « Atelier école – États généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes : et maintenant ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Atelier école – États généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes : et maintenant ? »

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Antoine CHUZEVILLE, secrétaire général de la CPNEJ et membre du comité stratégique des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes, Agathe LEGRAND, jeune diplômée de l’EJDG – Grenoble, membre du comité étudiant des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes, Elodie LOMBARDO, directrice de l’innovation sociale de l’Afdas et Pascal GUENEE, président de la Conférence des écoles de journalisme, et directeur de Institut pratique du journalisme (IPJ) Dauphine/PSL

Animé par Anne TEZENAS DU MONTCEL , déléguée générale de la Conférence des écoles de journalisme en charge de l’organisation des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes.

Les enjeux

Suite au compte rendu des états généraux de la Conférence des écoles de journalisme, en octobre 2022, 36 propositions ont été faites pour améliorer la formation et l’insertion à la profession de journalisme. De la précarité des journalistes, à une carte de presse étudiante, en passant par la possibilité de prendre la parole en tant qu’étudiants, différents projets sont en cours de construction ou de discussion.

Ce qu’ils ont dit

Antoine CHUZEVILLE : « Il y a plusieurs réalisations concrètes qui vont être lancées dès 2023 : une carte de presse étudiante et un guide de la pige publié fin mai, à la demande des étudiants qui se retrouvent dans la jungle de la pige en sortie d’écoles. »

« Pour d’autres sujets, comme la précarité, il y a encore des discussions et des efforts à faire. C’est l’avenir de la profession qui est en jeu. »

Pascal GUENEE : « Les écoles ont mis en place des dispositif mais on intègre très peu les étudiants dans le dialogue, il était temps de les faire participer aux discussions autour des enjeux du métier de journaliste. »

« Il faut s’interroger sur les compétences que l’on doit apprendre dans les écoles, mais cela revient à s’interroger sur les critères de sélection pour entrer dans les écoles. »

« Notre responsabilité c’est de savoir quels sont les sujets prioritaires pour répondre au plus vite aux défis des états généraux. »

Agathe LEGRAND : ​« Lorsque l’on s’est réuni il y a un an pour les états généraux, ça nous a fait du bien. On n’était pas seulement étudiant dans une école, mais on faisait partie d’un ensemble, et on a pu discuter et voir que nos problèmes n’étaient pas uniques. »

« Chaque année, les problèmes sociaux, économiques, etc. changent, il faut donc des propositions différentes. »

Elodie LOMBARDO : « La formation est ce qui est important, donc on doit la développer. Et pour ça, l’Afdas va mettre en place une plateforme pour l’alternance dans tous les secteurs que nous gérons. »

« Il y a tout un travail fait par les écoles par rapport à l’augmentation des alternances. »

Anne TEZENAS DU MONTCEL : « Le but c’était d’être en contact et les états généraux ont permis cela. »

À retenir

À la question « et maintenant on fait quoi ? », les différents participants ont insisté sur le fait qu’il était temps d’agir suite aux discussions des états généraux de la CEJ. Trois projets prioritaires sont déjà bien engagés : une carte de presse étudiante, garantissant une reconnaissance et une sécurité pour les journalistes en formations, un encadrement des stages, concernant les conditions de travail des étudiants, et enfin une journée de discussion et de propositions concrètes sur les compétences, entre écoles, étudiants et rédactions.

Louise Monard–Duval

[RÉSUMÉ] « Atelier École : étudiant(s)s en journalisme, toujours aussi accros à l’info ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Atelier École partie I. Étudiant(s)s en journalisme, toujours aussi accros à l’info ? »

Cyril Petit, journaliste, Dario Borgogno, étudiant en première année de master à l’ESJ Lille, Corinne VANMERRIS, directrice adjointe de l’ESJ Lille et Maëva Dumas, étudiante en première année de master à l’EPJT, passée par la prépa La Chance. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Cyril PETIT, journaliste, Dario BORGOGNO, étudiant en première année de master à l’ESJ Lille, Maëva DUMAS, étudiante à l’EPJT, passée par La Chance pour la diversité.

Animé par Corinne VANMERRIS, directrice adjointe de l’ESJ Lille.

 

Les enjeux

Le suivi de l’actualité est indissociable du quotidien du journaliste. En première ligne de ce phénomène : les étudiants des écoles de journalisme. De plus en plus, un phénomène de « perte du goût de l’info » émerge. À l’image d’une partie des Français, ces étudiants ne sont pas non plus exclus de ce surmenage face au trop-plein d’information.

 

Ce qu’ils ont dit

Corinne VANMERRIS : ​« J’ai deux anecdotes à vous raconter. La première concerne Patrick de Saint-Exupéry, un journaliste installé dans la profession. Il venait à l’ESJ pour encadrer des sessions. Un jour, il est arrivé à la gare de Lille et m’a contacté pour me dire qu’il serait en retard à l’école parce qu’il avait pris des journaux pour les lire à la gare. C’était son rituel et j’ai senti qu’il prenait plaisir à parcourir l’actualité du jour. L’autre anecdote concerne les étudiants de l’ESJ. Ils sont venus me voir, un matin, pour me demander d’annuler le questionnaire d’actualité qui était prévu tous les quinze jours. Ils m’ont dit qu’ils n’avaient pas eu le temps de réviser l’actualité à cause de leur trop grande charge de travail. Et je me suis rendue compte, ici, que suivre l’actualité était, pour eux, un exercice très scolaire et non pas un plaisir. »

« Les 20-25 ans peuvent être victimes d’infobésité. Dans tous les sondages et les baromètres, c’est une tendance qui émerge. Il n’y a donc pas de raison pour que les étudiants en école de journalisme ne le soient pas aussi. »

Cyril PETIT : ​« L’actualité s’impose aux journalistes et n’est pas négociable. »

« Pour retrouver le goût de l’info, une des pistes serait de s’intéresser aux gens pour qu’en retour, ils s’intéressent à nous. »

Maëva DUMAS : ​« Quand on prépare les concours, le rythme est assez intense. Avec la prépa La Chance, nous avions une masse d’infos qu’il fallait connaître. Et, au sein de l’EPJT, nous avons des travaux pour maintenir ce suivi de l’actualité. »

Dario BORGOGNO : ​« Quand on arrive en école de journalisme, on fait un burn-out de l’info. Avant l’oral d’admissibilité à l’ESJ, j’apprenais plein de choses car j’angoissais à l’idée des questions qu’on allait me poser. »

 

À retenir

Dans les écoles de journalisme, les étudiants peinent parfois à prendre du plaisir dans leur suivi de l’actualité. La raison ? Leur intérêt est impacté par la charge de travail de leurs études. Alors que le suivi de l’actualité devrait être inné, il s’apparente parfois, pour certains, à un exercice scolaire. Surtout, le manque de temps les conduit à sélectionner les productions journalistiques qu’ils lisent, écoutent ou regardent. Résultat : les étudiants suivent davantage les sujets d’actualité qui les intéressent, au détriment de ceux qui les captivent moins. Cette sélection risque, pourtant, de biaiser leur regard sur certaines actualités.

Anne-France Marchand (EPJT)

[RÉSUMÉ] Résidences de Journalistes, partage d’expériences

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Résidences de journalistes, partage d’expériences »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Isabelle BORDES, journaliste indépendante, Mathilde BOUDON-LAMRAOUI, formatrice à La Friche, Guillaume DE LA CHAPPELLE, responsable de la communication à la DRAC Pays de la Loire, et Jean-Christophe THEOBALT, chargé de mission pour les nouvelles technologies de l’information et de la communication à la délégation au développement et à l’action territoriale du ministère de la Culture et de la Communication.

Animé par Elodie CERQUEIRA, présidente du Club de la Presse Centre-Val de Loire.

 

Les enjeux

Certains journalistes sont en résidences pour participer à des actions d’éducation aux médias. Gérées par les directions régionales des affaires culturelles (Drac), ces interventions ne sont pas encore reconnues comme du travail journalistique en soi. Cela peut donc être compliqué de se lancer. Vers quels acteurs se tourner ? Quel mode de rémunération choisir ? Partage d’expériences.

Ce qu’ils ont dit

Mathilde Boudon-Lamraoui : « Nous, notre approche journalistique passe par le récit de soi, on assume l’usage du « je » »

Jean-Christophe Théobalt : « Notre priorité au ministère, ce sont les adultes, mais en même temps c’est le public le plus difficile à toucher en termes d’éducation aux médias. »

Isabelle Bordes : « Les gens qui se sentent invisibles, il y en a plein dans les territoires ruraux »

Guillaume de la Chappelle : « Le profil parfait de l’intervenant, pour moi, c’est quelqu’un qui a un profil pédagogique mais qui est aussi un praticien »

À retenir

L’éducation aux médias est une mission relativement récente pour les Drac et elles ne sont pas toutes encore habituées aux résidences des journalistes. Il y a sur le territoire, de fait, une très grande diversité dans le fonctionnement de l’EMI : dans le montant des subventions ou dans les durées des résidences, entre autres. La Drac Pays de la Loire, par exemple, n’accepte que celles d’un minimum de deux mois, car elle estime qu’en deçà il est difficile de réaliser un travail de fond. Ce n’est pas le cas partout.

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] Conférence « Retrouver le goût d’entreprendre »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Retrouver le goût d’entreprendre dans les médias »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Jean-Cristophe BOULANGER, président de Context, Catherine RONIN, journaliste du média réunionnais Zinfos 974, Nadia BERRA, journaliste et fondatrice de Lisons Lizon, Alvina LEDRU-JOHANSSON présidente et directrice de la publication à Culs de Poule.

Animé par Laurent MAURIAC, co-président du SPIIL (Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne)

Les enjeux

À la recherche de plus de présence féminine dans les sujets traités, de médias davantage indépendants ou encore de titres qui donnent la parole aux enfants, ces journalistes n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient dans l’offre médiatique actuelle et ont décidé de créer leur média. Cependant, entre le marketing, la distribution, ou encore le design, les difficultés de l’entreprenariat sont nombreuses et peuvent dissuader.
Pour les rassurer, le syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL) les accompagne tout au long de leurs parcours et les informe des aides dont ils peuvent bénéficier.

Ce qu’ils ont dit

Jean-Christophe BOULANGER : ​« Il faut relativiser son rapport à l’échec. Qu’un projet ne marche pas n’est pas une finalité, ce n’est peut-être qu’une étape pour un destin plus grand. »

« S’il y a un truc que j’ai retenu de mes deux échecs, c’est bien choisir les gens autour de soi. Des gens avec qui on partage des valeurs où l’on respecte les compétences des uns et des autres. C’est vraiment le truc que j’avais sous-estimé. »

« Au début j’étais très seul mais quand le SPIIL a été créé ça a été indescriptible pour moi. Je pouvais enfin partager. »

Catherine RONIN : ​« Aujourd’hui on n’hésite plus pour demander aux gens de nous aider et ça marche. Il faut juste oser. »

« On préfère perdre de l’argent que dire à un journaliste “retiens ta plume“.»

Nadia BERRA : ​« Si on a peur de se tromper et de faire mal il ne faut pas entreprendre »

« Il y a plein d’outils pas cher qui sont très utile pour se lancer. »

« À chaque fois que je pose une brique, je m’assure qu’elle est bien solide. »

« Je vois cette revue comme une créature qui grandit petit à petit. »

Alvina LEDRU-JOHANSSON : ​ « Les écoles devraient plus sensibiliser à la réalité du monde des médias. Si on n’a pas connaissance d’incubateurs on perd des années. »

Laurent MAURIAC :« Il faut être capable de connaitre ses limites et ne pas attendre trop longtemps pour être épaulé. »

À retenir

Les principaux problèmes que rencontrent les créateurs de média ne concernent pas la partie éditoriale mais la partie entrepreneuriale. Ils déplorent un manque de préparation dans les écoles sur les difficultés de l’entreprenariat dans le monde médiatique. Ils font face aux problèmes financiers et font tous la course aux financements. Néanmoins pour se lancer, la bourse « Émergence » de l’État est une aide non négligeable. Elle peut aller de 30 000 à 50 000 euros et permet aux jeunes médias de commencer leur aventure sereinement.
Pour qu’un média fonctionne, les intervenants insistent sur la bonne alchimie entre la ligne éditoriale et la ligne entrepreneuriale. L’une ne fonctionne pas sans l’autre. C’est dans cette optique qu’il est nécessaire pour ces jeunes médias de rapidement s’entourer des bons collaborateurs dotés des compétences adéquates, comme par exemple des commerciaux et des webdesigners pour un journaliste avec une ligne éditoriale déjà solide.

Zachary MANCEAU (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Actualité des organisations syndicales : Briser le tabou du racisme dans les rédactions.

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Briser le tabou du racisme dans les rédactions »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Estelle Ndjandjo, porte-parole de l’Association des journalistes antiracistes et racisés (AJAR) et Rémi-Kenzo Pages, journaliste et membre du SNJ-CGT.

Animé par Clément OLLIVIER, journaliste indépendant.

 

 

Les enjeux

Face aux peu d’études et de données chiffrées sur le racisme dans les rédactions, les organisations syndicales souhaitent briser ce tabou avec leur rapport « briser le silence ». A travers un questionnaire transmis à 167 personnes de la profession, l’étude met en avant des chiffres sur les discriminations internes.

Ce qu’ils ont dit

Estelle Ndjandjo : « On avait peur qu’on nous associe à des mots qui ne nous correspondaient pas forcément. »

« Je suis une femme. Je suis féministe. Je suis noire. J’ai ce qu’on appelle une double peine. »

Rémi-Kenzo Pages : « Le but [de cette étude] est de faire prendre conscience aux gens du racisme dans le journalisme » ;

« Le racisme interne est un tabou dans les rédactions françaises. »

À retenir

L’étude « Briser le silence » a débuté d’un constat : les personnes qui subissent du racisme sont isolées dans les rédactions et la question de la diversité est inexistante en France. Les chiffres le montrent, 24.2 % des répondants déclarent avoir déjà été victimes de racisme au travail. Pourtant, 80 % qui s’estiment victimes et qui l’ont déclaré, affirment ne pas avoir été soutenus.

Parmi les solutions proposées par les membres du SNJ-CGT : une charte de modération, un protocole de sécurité sur le terrain ou encore rendre public les offres d’emploi.

Sarah Costes

 

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[RÉSUMÉ] Conférence « Faire confiance à la science ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Faire confiance à la science ? »
Helen Lee Bouyghes présente la fondation Reboot.

Photo : Laura Blairet/EPJT

Avec Helen Lee Bouygues, présidente de la fondation Reboot, Frédéric Courant, cofondateur de l’Esprit Sorcier TV, Laurence Devillers, professeur à la Sorbonne et présidente de la fondation Blaise Pascal et Etienne Klein, physicien et producteur de l’émission « Le pourquoi du comment » sur France Culture.

Animé par Élodie Cerqueira, présidente du Club de la Presse Centre-Val de Loire.

 

 

Les enjeux

Peut-on faire confiance à la science ? Il s’agit là d’une question large, soumise à interprétation. C’est ce qui a résulté du débat du mardi 28 mars au soir. Chaque intervenant a planché sur ses propres réflexions autour de cette interrogation. C’est donc un mélange de questionnements variés qui se sont élevés dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville de Tours. Des questionnements sur la connaissance des enjeux numériques, notamment en termes d’intelligence artificielle, sur les éventuelles législations ou sources d’éducation sur le sujet et sur la place des journalistes dans ce manège.

Ce qu’ils ont dit

Helen Lee Bouygues : « On ne prend plus le temps d’apprendre aujourd’hui. Les entreprises qui nous proposent des informations le savent et jouent sur le sensationnel pour nous faire rester. »

« Ce n’est pas une question d’âge sur les réseaux sociaux mais une question des contenus qui nous sollicitent sans arrêt. C’est sur cela qu’il faut légiférer, pas sur l’âge des utilisateurs. »

« Les jeunes n’ont pas l’habitude d’avoir le temps d’apprendre et de réagir. Il faut peut-être mettre un cadre à cela pour les réseaux sociaux mais aussi pour l’éducation de manière plus générale. »

Frédéric Courant : ​« Il y a une profonde curiosité dans la science pour le public, qu’il faut qu’on respecte. »

« Il y a le problème du temps dans le journalisme, qui manque toujours. Mais il y a aussi la satisfaction d’être payé à apprendre des choses. Ce métier demande un effort intellectuel : essayer de comprendre les choses avant de raconter des histoires. Sur les chaînes d’info en continu, on invite des experts que l’on ménage souvent. Ce n’est pas la même chose. »

Laurence Devillers : ​« Il y a une émergence de comportements dans la machine [à intelligence artificielle] qui n’a rien à voir avec une émergence de conscience, mais qui répond à notre besoin d’impression de parler à quelqu’un. »

« Il faut arrêter avec cette peur des machines qui nous remplaceraient. Elles apprennent différemment de nous. Tant qu’on en aura peur on ne comprendra pas ce que sont ces objets. »

« Je remarque que 90 % des programmeurs sont des hommes et que 90 % des robots programmés ont des caractéristiques féminines. Il faut se poser la question de la représentation que l’on donne de l’humanité à travers ces machines. »

« Je m’adresse aux journalistes. ChatGPT, c’est de la parole statistique en provenance de machines sans que les sources ne soient clairement identifiées. Attention à ces usages. »

Etienne Klein : « Notre cerveau n’a pas changé depuis 20 000 ans. Nous avons développé des biais cognitifs qui nous servent à prendre des décisions face à une information. Sans ces biais cognitifs, on ne survit pas. Nous sommes passés d’un contexte historique avec peu d’informations à un contexte avec beaucoup d’informations. Parmi lesquelles des fake news. »

« Notre cerveau n’aime pas être contredit. Les algorithmes se basent là-dessus et nous enferment dans des biais de confirmation. On se retrouve bloqué dans un monde qui se répète. »

« Il y a une complète confusion entre la compétence et la militance. Le fait d’avoir un avis tranché semble dédouaner de l’obligation de s’instruire. »

« Le droit de savoir, s’il n’est pas converti en désir de connaître, est complètement stérile. »

 

 

À retenir

Faire confiance à la science, en particulier dans l’espace médiatique, est un sujet vaste et fertile de questionnements. La place des journalistes dans l’utilisation du numérique, de l’intelligence artificielle mais surtout de leur compréhension de ces enjeux est primordial. Car elle affecte directement la façon dont ils parleront de la science et de ces nouvelles technologies au grand public. Une question que chacun et chacune doit se poser, comme nous ont invité à le faire les intervenants à la fin de la conférence.

Laura Blairet

 

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Assises 2023 : l’impact des grèves et des manifestations amoindri par l’anticipation des organisateurs

La 16e édition des Assises du Journalisme s’est ouverte à Tours en pleine mobilisation contre la réforme des retraites. Face à de possibles problèmes de transport, les organisateurs ont dû trouver des solutions en amont pour que chaque intervenant arrive à bon port.

La grève de la SNCF a empêché certains intervenants de venir mardi. La plupart ont cependant pu intervenir en visio.  (Photo : Edgar Zuniga Jr)

Deux événements se télescopaient ce mardi à Tours : la 10e journée de mobilisation contre la réforme des retraites et la 16e édition des Assises du Journalisme. Pour que cette dernière se déroule sans encombres, les organisateurs ont dû anticiper et sont assez satisfaits du résultat. « On est plutôt très bien au niveau de la fréquentation », explique Marie Jansen, l’une des organisatrices des Assises.

Ils ont travaillé de paire avec l’agence tourangelle « Corporate travel » pour gérer les billets de train des intervenants. Et pour ceux qui n’ont pas pu se déplacer, des visios ont été mises en place afin d’assurer au mieux le déroulement des diverses conférences. 

Il y a quand même eu des réajustements à faire dans la programmation, entre des changements d’intervenants, de modérateur, ou tout simplement une annulation. « Pour la conférence « Identifier les bonnes sources », une seule personne pouvait se déplacer et nous avons donc dû l’annuler », commente Eva Renaux, une autre des organisatrices de l’événement. Mais le plus dur semble passé, à écouter Marie Jansen : « Ça devrait aller mieux dans les prochains jours. »

Maylis YGRAND (EPJT)

[RESUME] La conférence « Urgence climatique et responsabilité des journalistes : des médias s’engagent ! »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « L’urgence climatique et la responsabilité des journalistes : des médias s’engagent ! »
Edouard Reis Carona, rédacteur en chef de Ouest-France, et Jean-Pierre Dorian, directeur de la rédaction de Sud-Ouest à la conférence  » Urgence climatique et responsabilités journalistes : des médias s’engagent ! « , mardi 28 mars. Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Avec Violaine CHAURAND, directrice RSE du groupe Bayard, Jean-Pierre DORIAN, directeur de la rédaction de Sud-Ouest (PQR), Vincent GIRET, directeur de l’information de Radio France, Edouard REIS CARONA, rédacteur en chef de Ouest-France.

Animé par Sidonie WATRIGANT, directrice de l’ESJ Pro.

 

Les enjeux

Les médias ont un rôle à jouer dans la perception qu’a le public du changement climatique. Ils doivent mettre à disposition de leurs lecteurs des « boîte à outils » dans laquelle ces derniers pourront trouver les réponses aux grandes questions qui se posent sur le sujet. La question climatique et la disparition de la biodiversité doivent être traiter à la hauteur des enjeux qu’elles soulèvent.

Ce qu’ils ont dit

Violaine CHAURAND : ​ « La rédaction a fait le choix d’orienter la transition écologique de pair avec la transition économique. »

Jean-Pierre DORIAN :« Aujourd’hui, les jeunes sont désintéressés de l’information. On espère que le sujet de la question climatique ramène les jeunes à l’information. »

« Les gens sont plus réceptifs. La question climatique impacte la vie des Français. On l’a identifié sur notre territoire avec notamment les incendies qui ont touchés le Sud-Ouest cet été. »

« Il s’agit aussi de balayer devant notre porte. Au sein de notre entreprise, les imprimeries, les livraisons, les déplacements de nos journalistes… tout ça a un coût énergétique. »

Vincent GIRET :« Avant, les rédacteurs en chefs se méfiaient un peu de ces thématiques-là. Le risque était de faire un journalisme militant et très idéologique. […] La difficulté est de faire du journalisme engagé sans faire du journalisme militant. »

« On est dans un contexte encore différent d’il y a deux ou trois ans. Les sujets sont remontés dans le temps d’antenne. Ce n’est plus la petite brève en fin de journal. »

 « Ça doit être un engagement systémique des entreprises. Chez nous, on travaille à diminuer les émissions carbone de l’activité des rédactions. »

Edouard REIS CARONA : « Sur le web, l’audience a été multiplié par six ou sept sur les sujets de la question climatique. Chez Ouest-France, nous ne mettons pas de pay-wall sur ces questions. Priorité à l’information. »

« Jusqu’à présent les articles qui fonctionnaient le mieux sur l’environnement c’étaient les articles sur les catastrophes naturelles. »

« Il faut qu’on décline nos sujets pour faire rentrer l’information climatique. Le travail éditorial montre que les rédactions sont en mouvement. On distille la question climatique dans tous les sujets. »

« La charte pour un journalisme au niveau de l’enjeu écologique n’est pas qu’un effet de mode. Elle est faîte pour nous permettre de nous engager pour les générations futures. La question climatique doit être inscrite dans l’ADN de l’entreprise. »

À retenir

Les Français sont demandeurs de contenus portant sur la question climatique. Les résultats d’audience sont formels : les émissions scientifiques trouvent du public, les articles web explicatifs génèrent du clic. Dans la hiérarchie éditoriale, les sujets sont remontés. Une seule brève en fin de journal ne suffit plus aux lecteurs ou aux auditeurs. Les rédactions tendent de répondre aux mieux à cette demande. Progressivement, les journalistes se forment pour traiter ces sujets à la hauteur de ce qu’ils méritent, sans être moralisateur, ni fataliste.

Jane Coville

 

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[LE RÉSUMÉ] Urgence climatique et responsabilités journalistes : la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Urgence climatique et responsabilités journalistes : la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique »

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Avec Anne-Sophie NOVEL, journaliste, réalisatrice et co-autrice de la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique, Steven JAMBOT, journaliste (RFI), producteur de « L’atelier des médias » et coordinateur éditorial des podcasts, Alexandre KOUCHNER, rédacteur en chef (L’ADN-Le Shift),

Animé par Sidonie WATRIGANT, directrice de l’ESJ Pro

 

 

Les enjeux

Face à un dérèglement climatique de plus en plus flagrant, les journalistes ont la responsabilité de rendre compte de la réalité de l’urgence. Alors que ces questions ont longtemps été délaissées et méprisées au sein des rédactions, certains professionnels de l’information montrent aujourd’hui leur détermination d’être à la hauteur de cet enjeu.

 

Ce qu’ils ont dit

Anne-Sophie NOVEL : ​ « L’avènement de cette charte a-t-il permis de changer certaines pratiques ? Non à 48 %. »

« On n’a pas vocation à contraindre, c’est une boussole. On est là pour éclairer un cap. »

« C’est d’avoir cette petite musique qui s’inscrit dans l’article, de comprendre que ce qu’on est en train de consulter s’inscrit dans une histoire au plus long cours. »

Steven JAMBOT : ​ « Nous n’avons pas vocation à être des donneurs de leçon. »

« On a fait ce texte pour qu’il s’inscrive sur le temps long. Lisez chacun des points du texte, ils seront valables dans 5 ans, 10 ans, etc. Ce n’est pas ancré dans l’humeur du moment. »

« Les réponses doivent être politiques et c’est aux médias et aux journalistes de pointer les errements du système dans lequel nous vivons. »

Alexandre KOUCHNER : ​« Est-ce que l’information que je suis en train de produire est alignée avec les engagements que j’ai pris ? Le fait que ça repose sur notre volonté est extrêmement fort. »

« Nous avons eu cette réflexion de ne plus dire la transition mais les transitions parce qu’elles sont écologique, économique, politique, culturelle. »

« Nous avons un rôle social à jouer, d’informer correctement et de faire comprendre ce que nous vivons. »

 

À retenir

Rendue publique le mercredi 14 septembre 2022, la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique a été conçue comme une boussole pour les professionnels de l’information. Ce texte a pour but de faire changer les mentalités et les pratiques dans le traitement journalistique du dérèglement climatique. Il a entre autres mis en exergue les systèmes économiques des médias français et la difficulté des rédactions de refuser des annonceurs. Un problème qui empêche les rédactions et les journalistes d’être en harmonie avec les engagements pris.

La charte a ouvert des débats mais n’a pas encore porté de fruits réellement visibles. Suite à un questionnaire diffusé récemment aux signataires de la charte, 48 % des répondants ont rapporté que la charte n’avait aucunement changé les pratiques.

Maylis YGRAND (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] Présentation du Prix l’Alerte à la Une

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Actualité des organisations syndicales : parole à la maison des lanceurs d’alerte »

Christian Dauriac, administrateur de la Maison des Lanceurs d’Alerte, présente le prix « l’Alerte à la Une ».

Photo : Laura Blairet/EPJT

Avec Christian Dauriac, administrateur de la Maison des Lanceurs d’Alerte et Dominique Pradalié, présidente de la FIJ (Fédération Internationale des Journalistes).

 

 

Les enjeux

La dernière conférence de la journée était l’occasion de présenter le nouveau prix mis en place par la Maison des Lanceurs d’Alerte : le prix « l’Alerte à la Une ». L’occasion de rappeler la nécessité de protéger les lanceurs d’alerte dans le cadre de la loi comme dans le cadre associatif.

Ce qu’ils ont dit

Christian Dauriac : « Les lanceurs d’alerte sont souvent des salariés licenciés à la suite de leur action. D’où l’importance du fond mis en place par la Maison des Lanceurs d’Alerte. »

Dominique Praladié :  « Presque toutes les grosses dernières enquêtes journalistiques, comme les LuxLeaks, ont été lancées grâce à un lanceur d’alerte. »

« Le lanceur d’alerte n’est plus perçu comme un traître ou un mouton noir. C’est ça qui a évolué. Grâce à la loi [Waserman du 21 mars 2022, qui élargit la protection des lanceurs d’alerte] mais surtout grâce à l’opinion publique. »

 

À retenir

La Maison des Lanceurs d’Alerte, cofondée par dix-sept organisations autour du journalisme, lance un nouveau prix appelé l’Alerte à la Une pour récompenser les enquêtes journalistiques.

Laura Blairet

 

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[LE RÉSUMÉ] Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ? »

De gauche à droite, Marine Leduc, Line Pagé, Ève Beaudin et Sarah Jacquin. Photo ArnaudFischer/EPJT.

Avec Blaise Andzango (Cameroun), président d’Eduk-Média, Line Pagé (Canada), présidente du conseil d’administration du CQEMI, Ève Beaudin (Canada), journaliste au Centre québécois d’éducation aux médias (CQEMI), Patrick Verniers (Belgique), directeur du Conseil supérieur de l’éducation aux médias, Sarah Jacquin (Liban), chargée de projet à la Fondation Samir Kassir.

Animé par Marine Leduc, chargée de Projet Le Retour de Zalumée/Globe Reporters.

 

 

Les enjeux

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) peine à s’installer véritablement dans les programmes scolaires français. Dans les pays francophones, la situation n’est pas mieux voire pire. Les invités mènent des initiatives pour le démocratiser dans des pays comme la Belgique, le Liban, le Canada ou le Cameroun.

Ce qu’ils ont dit

Line Pagé : ​ « On a de grandes ambitions avec le CQEMI, on voudrait aller beaucoup plus loin. On veut aussi devenir un carrefour des bonnes initiatives qui se font en termes d’EMI au Québec. »

« Au Québec, l’EMI est dans le programme scolaire mais n’est pas obligatoire. Chez nous, il n’y a pas eu d’événements tragiques comme en France qui ont forcé une prise de conscience à propos de l’éducation aux médias (attentats de 2015). Mais on essaie de s’y sensibiliser quand même. »

« J’ai beaucoup aimé le thème de cette édition des Assises. Je pense qu’il faut aller en classe et donner aux enfants l’envie de retrouver le goût de l’info. »

Ève Beaudin : ​ « On a développé une formation qui met en relation des journalistes avec des écoles. Il faut jumeler les journalistes avec des régions, le Québec étant vraiment très grand. On explique aux jeunes comment fonctionne le journalisme. Il y en a beaucoup qui pensent n’importe quoi. Il y a pas mal de choses à démystifier. C’est hyper important pour nous d’envoyer des journalistes dans les classes, auprès des jeunes. »

« 95% de notre financement vient de subventions gouvernementales. Et tout ça fonctionne grâce à énormément de bénévolat. »

Sarah Jacquin : ​ « On remarque que la jeunesse est délaissée. Il faut savoir que l’EMI au Liban n’est qu’un onglet dans l’éducation civique. Ça ne reflète pas du tout le paysage médiatique actuel au Liban et dans le monde. On a donc décidé d’intervenir. On fait des ateliers pour sensibiliser les élèves de 13 à 15 ans à la désinformation avec le support du manga. Il est important de s’adapter à un langage qu’ils comprennent. C’est interactif. »

« L’EMI n’est ni une préoccupation ni une priorité au niveau étatique (au Liban). Les écoles privées sont plus réceptives à cette discipline. Mais ça reste toutefois secondaire. On ne peut pas facilement intervenir dans les écoles publiques parce qu’il faut l’aval du gouvernement. Pourtant, c’est important d’investir dans la jeunesse. On compte sur les futures générations pour défricher l’aspect social de la société libanaise. »

Blaise Pascal Andzango : ​« Eduk-Media a pour but de travailler sur l’esprit critique des jeunes. Notre association est née dans un contexte de crise sécuritaire au Cameroun. Ça a nécessité d’engager des activités de sensibilisation aux médias auprès des populations. Il faut savoir que les actions EMI au Cameroun ne sont pas très nombreuses pour l’instant. »

« Au Cameroun, le gouvernement ne prend pas l’éducation aux médias au sérieux. Ça n’est même pas inscrit au programme scolaire. Ce sont les ONG, les associations et la société civile qui s’y intéressent le plus. Nous avons la chance d’avoir quelques associations internationales comme l’OIF pour mener des activités d’éducation aux médias. Je profite de cette occasion pour appeler à une solidarité internationale. »

« Au Cameroun, l’EMI se finance à 90% par des fonds étrangers. »

Patrick Verniers : ​ « Le conseil supérieur de l’éducation aux médias en Belgique est une toute petite équipe. On a des représentants académiques, de l’enseignement, pas que du monde médiatique. Notre objectif est de développer l’éducation aux médias dans l’enseignement, notamment via des financements. On s’assure que l’EMI prenne une place importante dans les programmes scolaires. »

« Ça fait 20 ans qu’il y a des initiatives pour l’EMI en Belgique. Pourtant, je peux vous dire que sur le terrain, on entend beaucoup de discours qui disent qu’on en fait pas assez. »

« En Belgique ce sont des financements essentiellement publics. On est accompagné par le gouvernement. Depuis trois ans, on bénéficie d’une augmentation des financements pour l’EMI de 60 à 70%. »

À retenir

Dans les pays francophones, la situation de l’EMI est très différente. Dans des pays comme le Cameroun et le Liban, il n’y a aucune aide du gouvernement et l’EMI est loin d’être une priorité. En revanche, dans d’autres pays comme le Canada et la Belgique, les mesures prises sont importantes et l’EMI fait partie d’une vraie politique gouvernementale. Mais les acteurs de ces sociétés crient toujours au manque d’investissement. Il faudrait en faire plus.

Arnaud Fischer (EPJT)

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[INTERVIEW] Elin Casse : « En tant que femme trans, je sers parfois à redorer le blason de certains médias »

Photo : Maëva Dumas/EPJT

Elin Casse, journaliste chez Radio Parleur et membre de l’association des journalistes LBGT (AJL), porte un regard critique sur le traitement des communautés queer par les médias. Un sujet qui l’affecte directement en tant que journaliste et femme trans.

Comment les médias abordent-ils les sujets liés aux communautés queer ?

Le plus souvent, le traitement de ces thématiques est maladroit. Pour commencer, les sujets sont souvent les mêmes. On parle rarement du sida chez les lesbiennes par exemple. Cela va être plutôt des thèmes qui correspondent aux fantasmes associés aux LBGT+ : le chemsex, la chirurgie autour de la transition, le sexe entre deux lesbiennes. La vision qu’on a de la communauté est d’ailleurs souvent liée à la pornographie. Au-delà des sujets, le vocabulaire employé peut aussi poser problème comme lorsqu’on parle des personnes trans. Dans certains articles, le dead name est cité ou le mauvais pronom est utilisé pour qualifier une personne. Cela peut sembler être des détails mais ça touche directement à l’identité des trans. Il y a aussi des sujets où l’écriture est maladroite mais les informations données correspondent à la réalité et partent d’une bonne intention. Je pense notamment à l’émission de Karine Le Marchand l’année dernière, « Enfant trans : comment faire ? », le titre est désastreux mais l’idée était de sensibiliser à la trans-identité.

En tant que journaliste et femme trans, quel est votre ressenti vis-à-vis de ces médias ?

E.C. Je suis mitigée. Je travaille pour une radio indépendante et je vais devoir me tourner à contre-coeur vers des médias plus généralistes parce que je ne gagne pas suffisamment d’argent. Si je dis à contre-coeur, c’est parce que je sais que les sujets qu’ils abordent sur les communautés queer sont catégorisés. Il y a aussi le fait qu’en tant que femme trans, je sers parfois à redorer le blason de certains médias. Médias qui le plus souvent me contactent après avoir été accusés de discrimination. 

Selon vous, quels changements devraient être opérés dans la façon de traiter l’actualité liée aux communautés queer ?

E.C. Pour commencer, il faudrait simplement faire preuve de déontologie journalistique. Quand je vois un psychologue et un prêtre sur un plateau télé pour aborder la trans-identité, je me demande où est la contradiction. Il faut donner la parole aux personnes directement concernées. Les journalistes devraient aussi lire plus de la littérature scientifique à propos des transitions ou tout simplement des ouvrages liés à la communauté LGBTQI+. Enfin, il faut faire attention au vocabulaire utilisé et ne pas être dans une forme de voyeurisme en abordant que des sujets « chocs » comme le chemsex.

Recueilli par Maëva Dumas (EPJT)

[Découverte] Trois outils d’enquête en sources ouvertes pour vos prochaines recherches en ligne

De nombreux outils permettent d’enquêter en utilisant uniquement des ressources disponibles en ligne.

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Est-ce que vous avez déjà essayé de chercher des informations sur un inconnu après qu’il vous ait suivi sur un réseau social ? Si la réponse est oui, alors vous avez déjà fait de l’OSINT, peut-être sans le savoir. L’OSINT (pour Open-source intelligence), c’est ce qu’on appelle du renseignement en sources ouvertes. On utilise des outils en ligne, gratuits ou non, afin de trouver des informations sur un site web, sur une photo ou sur une personne. Présentation de trois outils de recherche et vérification en ligne.

  • Boredhumans

Vous avez besoin de Facebook pour une recherche mais vous ne souhaitez pas laisser de traces ? Boredhumans, un site gratuit, permet de générer une fausse photo de profil à partir d’une intelligence artificielle. L’intérêt ? Se créer un faux compte plus vrai que nature, sans laisser à personne la possibilité de remonter jusqu’à vous, ce qui serait possible si vous utilisiez une image déjà existante en photo de profil.

  • Have I been pwned ?

En argot informatique, pwned signifie se faire avoir. Si vous avez peur pour votre sécurité numérique, Have I been pwned ? est fait pour vous. En quelques clics, grâce à ce service gratuit, vous pouvez savoir si votre adresse mail ou si votre numéro de téléphone ont été partagés lors d’une fuite de données. En cas de brèche, il faut changer son mot de passe immédiatement !

Lien du site : 

  • Social Bearing

Envie de savoir qui like le plus vos tweets ? Quels sont les hashtags qui sont les plus populaires chez une personnalité politique ? Social Bearing est un outil statistique puissant et gratuit qui vous permet d’analyser une quinzaine de variables, offrant un grand nombre de possibilités ! Pour cela, il suffit de rentrer le lien d’un tweet ou un identifiant Twitter et en quelques secondes, le résultat apparaît.

[INTERVIEW] Yousra Gouja : « La diversité doit être visible »

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Étudiante La Chance en 2018-2019, puis à l’ESJ-Pro, Yousra Gouja est aujourd’hui pigiste. Présente à l’atelier « Diversité dans la rédaction : Les RH s’engagent avec La Chance » aux Assises internationales du journalisme, elle revient sur son expérience et pointe du doigt les enjeux de la lutte pour la diversité au sein des rédactions.

Durant la conférence, Estelle Ndjandjo, porte-parole de l’Association des journalistes antiracistes et racisés (AJAR) a interpellé l’association La Chance : « Vous parlez d’un recrutement basé sur des critères sociaux, je me demande quels sont-ils ? Vous parlez de diversité, j’ai vu la promo La Chance cette année, ce n’est pas ce que j’appelle diversité. » La rejoignez-vous sur ce point ?

Yousra Gouja. Bien sûr ! La Chance ce ne sont pas que des personnes racisées. Il faut aussi prendre en compte notre territoire. Paris, ce n’est pas le fin fond de l’Auvergne, où les opportunités sont presque inexistantes. Il ne faut pas ignorer ces conditions. Ce qui n’est pas normal c’est que ces profils auront plus de chance à l’embauche qu’un Parisien racisé. On sait très bien que le prénom Mohammed est mis de côté dans la pile des CV. Les rédactions internationales ont compris. À la BBC par exemple, il y a de tout, c’est l’idéal. La diversité doit être visible. Tout le monde n’est pas blanc en France, pourtant, on continue de faire les mêmes erreurs.

Quelles sont les limites de La Chance ?

Y. G. La Chance nous aide et nous prépare à ce à quoi nous pourrons être confrontés après les écoles. Ils sont là pour nous challenger. Parfois trop et des propos discriminatoires ou déplacés vont être exprimés, notamment pendant les épreuves orales pour intégrer La Chance. Ils en sont conscients et savent qu’il y a un travail à faire. Il y a un code de bonne conduite à adopter. Il faudrait que des formations anti-discrimination soient mises en place. Premièrement pour lutter contre ces comportements, mais aussi et surtout, pour que les membres de La Chance prennent conscience de ce problème. Trop d’abstractions sont faites, il y a peu de remise en question. Ils travaillent pour les médias, mais également pour les Français. Il y a urgence sur la question. J’ai déjà été confrontée à des journalistes qui ne savent pas comment me parler ou qui ne vont pas aborder certains sujets avec moi, parce qu’ils pensent que je vais « m’énerver » [rire].

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontée aujourd’hui en tant que journaliste ?

Y. G. Pour commencer, il y a des enjeux face à la diversité. Parce que je suis racisée, on va penser, dans certaines rédactions, que je ne vais pas m’intégrer et comprendre le jargon. D’autant plus que je travaille sur des thématiques spécifiques et très techniques : majoritairement l’immobilier. C’est un milieu très masculin où l’on va me faire des réflexions sur mes cheveux, sur ma langue natale. Ce n’est pas méchants, selon eux, mais ce sont des remarques constantes. D’où l’intérêt d’éveiller les consciences avec des formations par exemple.
Ensuite, en tant que pigiste nous sommes confrontés à un manque de transparence et de communication avec les rédactions. Nous passons trop de temps à attendre et à relancer. Les pigistes ont besoin de réponses ou ils finiront par changer de métier. C’est un combat permanent alors que nous avons tous le même objectif : nous sommes tous là pour faire en sorte que le lecteur ait la bonne information. Nous sommes ensemble.

 

Recueilli par Sarah Costes et Manon Louvet (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Quelle représentation des communautés queer ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quelle représentation des communautés queer ? »

Photo : Maëva Dumas/EPJT

Avec Eline Casse , journaliste chez Radio Parleur et membre de l’AJL ( Association des journalistes LGBT), Lauriane Nicol, fondatrice de Lesbien Raisonnable, Christophe Martet, directeur de rédaction de Komitid et Marie Kirschen, journaliste indépendante et rédactrice en chef chez WellWellWell.

Animée par Mélisse Wyckhuyse, journaliste pour la Méridienne sur Radio Campus Tours, et Audrey Lecomte, co-animatrice de la quotidienne Sortez.

Les enjeux

Les communautés queer sont généralement représentées dans les médias à travers certains sujets. Chemsex, transition, mariage pour tous… les thématiques abordées se ressemblent et catégorisent les communautés à une image bien définie. Celle-ci peut être parfois connotée et discriminante. Face à cette situation, des changements sont nécessaires au sein des rédactions pour offrir une meilleure représentation des communautés queer plus proche de la réalité.

Ce qu’ils ont dit

Lauriane Nicol : «  C’est important d’apporter de la légèreté. Je ne sais pas si ça fait partie de notre militantisme mais c’est important le divertissement. On réduit trop les communautés queer à des sujets graves ou sérieux. »

Christophe Martet : « En général, les images utilisées pour représenter les communautés queer sont problématiques. Ce sont souvent des clichés lisses tirées de banques d’images ou des photos de la Pride où l’on voit des personnes dans des cadres spectaculaires. Rien à voir avec la réalité. »

Marie Kirschen : « Souvent, les journalistes envoient des questions aux associations queer qui n’ont pas lieu d’être. Évidemment, les réponses qu’ils reçoivent sont abruptes. Ce n’est pas un terrain neutre, les interlocuteurs ont des attentes et à juste titre. »

Elin Casse : « Je travaille pour un média indépendant mais ça ne paie pas assez donc je vais devoir me tourner vers des médias généralistes. C’est un choix que je fais à contre-coeur quand on connait la façon dont ils abordent les sujets autour des communautés LGBTQI+ . »

 

À retenir

Les médias traditionnels doivent sensibiliser leurs rédactions à la réalité des communautés queer. Le vocabulaire employé, les images mises en avant, les sujets abordés, une réflexion est nécessaire autour de ces thématiques pour arrêter de transmettre des représentations trop connotées. 

Maëva Dumas (EPJT)

[INTERVIEW] EMI : « La façon de faire ne peut être que territoriale », défend Tarik Touahria

Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, à la fin de la conférence « Quels changements pour une politique de l’Éducation aux médias et l’information (EMI) tout au long de la vie ? », mardi 28 mars. Photo : Roméo Marmin/EPJT

Tarik TOUAHRIA est président de la Fédération des centres sociaux depuis 2020. Il porte haut et fort le rôle des centres sociaux comme acteurs de démocratie pour plus de justice sociale.

Vous avez été la voix des acteurs associatifs de l’EMI durant cette conférence, quelle légitimité quand on est ni journaliste ni professeur ?

C’est la légitimité de la citoyenneté. Finalement, notre légitimité c’est le bien public, tout simplement. Au titre du bien public, ça concerne tout le monde y compris l’éducation populaire. Depuis son origine, l’éducation populaire travaille les questions de renforcement du sens critique et l’appartenance de l’information au privé. 

Dans le public, des membres associatifs de l’EMI ont évoqué leurs craintes face à une initiative d’homologation de leur pratique. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Je comprends l’intention de la Mission Flash de dire : « Il y a besoin d’un certain niveau de qualité des actions d’éducation aux médias. » Par contre, je ne suis pas sûr que l’homologation, en ce qui concerne l’éducation populaire, soit le meilleur moyen de le faire. Je préférais que les moyens proposés viennent d’en bas en terme de formation des acteurs, des engagements ou de la constitution d’une charte. Il nous paraît assez dangereux d’avoir des modèles qui descendraient du haut pour être appliquer en bas. 

Il y a un problème de coût parce que, souvent, il faut payer les homologations. Il peut y avoir des petites associations qui n’ont pas les moyens de payer ces formations et de prendre en charge 100 % des coûts. Il y a aussi des questionnements sur la capacité des acteurs à innover et inventer pour répondre à des problématiques très spécifiques. C’est la même question que la liberté associée à la loi de 1901, qui est une loi de confiance. Or, plus ça va, plus on est en train de transformer cette confiance en défiance alors qu’on a besoin de liberté pour innover. Si on nous met tout le temps de la suspicion, c’est absolument contre-productif. Il faut laisser l’éducation populaire utiliser ces propres moyens et partir de là pour les innover et les renforcer. Il faut faire attention que ça ne devienne pas trop normatif. 

Vous avez parler de la nécessité de créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information. Pourquoi et à quels besoins ils répondent ?

Pour construire une politique d’intervention sur un sujet vital comme celui-là, il faut nécessairement partir des territoires. Il faut se baser sur le savoir-faire et les problématiques spécifiques aux territoires. Ce n’est pas la même chose de travailler sur les questions d’éducation aux médias à La Ferté-Macé (Orne) que dans le quartier nord de Marseille (Bouches-du-Rhône). Les choses ne vont pas se gérer de la même manière. Rien qu’au niveau du diagnostic, il faut regarder ce qu’il fonctionne et les forces du territoire pour ensuite intervenir. Certaines personnes préconisent de cibler des populations parce qu’il y a urgence mais comment on construit ces cibles et celles-ci ne sont pas les mêmes partout. La façon de faire ne peut être que territoriale. Un acteur comme la région ou le département ne peut pas être le seul à décider. La députée, Mme Violette Spillebout, a évoqué les communautés de communes comme pouvant être un niveau d’échelle intéressant surtout sur un sujet comme l’Education aux médias. 

Recueilli par Jane Coville et Roméo Marmin

[LE RÉSUMÉ] Diversités dans les rédactions : les RH s’engagent avec La Chance

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Diversités dans les rédactions : les RH s’engagent avec la chance »

Le programme égalité 360 permet, depuis deux ans, de « renouveler les talents ». Photo : Manon Louvet/EPJT

Avec Morgan Bak, adjointe auprès de la DRH au groupe Le Monde et l’ObsEmmanuelle Baugartner, directrice adjointe en charge des politiques Egalité, Diversité et Handicap à Radio FranceYousra Gouja, journaliste pigiste La Chance à la diversité et Maxime Lefebure, chargé de mission RH à Médiapart.

Animé par Yassine Khiri, journaliste AFP et bénévole de La Chance

 

 

Les enjeux

Un constat : les discriminations à l’embauche ne cessent de croître envers les personnes racisées. Les directeurs et directrices des ressources humaines s’engagent  pour davantage de diversité et de transparence dans les rédactions avec La Chance. Une association dont l’objectif est de diversifier les profils. 

Ce qu’ils ont dit

Morgane BAK : « Il faut sensibiliser et former les journalistes. Donner les clés pour recruter sans discrimination. »

« Le réseau La Chance nous permet d’être en contact avec des candidats qui n’accèdent pas à certaines rédactions. »

Emmanuelle BAUMGARTNER : « Je pense que la diversité vient également des origines sociales. »

« La transparence vient d’abord de la composition du jury lors des recrutements. »

Yousra GOUJA : « Il faut qu’il y ait plus de regards différents pour que la population ait davantage confiance aux médias. »

Maxime LEFEBURE : « Nous devons détacher diversité et enjeux commerciaux. »

 

À retenir

Le réseau des RH, né il y a à peine un an, permet d’échanger sur les contraintes et les difficultés au sein des rédactions. A l’initiative du projet, Maxime Lefebure, chargé de mission RH à Médiapart, a pour but de développer la transparence et la diversité dans les médias.

Le réseau des RH de rédactions telles que le groupe Le Monde/l’OBS et Radio France, s’engage afin de soutenir La Chance dans ses actions. Parmi elles : une formation antidiscriminations, la création d’une commission des diversités, une publication des offres d’emploi, ou encore un guide de la pige.

Mais les intervenants le certifient : il existe encore une marge importante pour diversifier les recrutements.

Sarah Costes et Manon Louvet

 

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[PRIX EMI] Et les nommés sont…

Présentation du POD’Classe Mou’v, de Radio France pour les prix EMI des Assises 2023.

Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Découvrez les nommés aux prix éducation aux médias et à l’information (EMI) par catégorie.

Dans la catégorie « Média »

  • Citizen Facts par Babel Doc d’Arte : « Un projet de fact-checking collaboratif européen », selon Aude Favre, à l’origine du projet. Une rédaction participative a été créée par la journaliste sur le serveur Discord, à cette invitation.
  • POD’Classe Mou’v de Radio France : La station de Radio France à destination des jeunes publics, Mouv’, a lancé en 2019 son projet EMI : POD’Classe, qui permet aux collèges et lycées partenaires de fonder leurs propres webradios.
  • Salut l’info ! de Bayard et Radio France : Un podcast hebdomadaire à destination des 7-11 ans de dix minutes par épisodes, c’est ce que propose ce partenariat entre Astrapi et France Info.

Dans la catégorie « Ecole »

  • Le Collège Olympe de Gouges (Gironde) propose à ses élèves de s’exercer au journalisme et de se former au changement climatique grâce au journal Décoder. 
  • L’association Fragil et le lycée Les Bourdonnières de Nantes ont lancé un média collaboratif pour lutter contre la haine sur Instagram : lahaine.44.
  • Le webzine L’âge des passions réalisé par les élèves du Collège Simone de Beauvoir à Villeneuve-d’Ascq (Nord).

Dans la catégorie « Hors l’école »

  • ABEJ Solidarité : permettre aux personnes sans-abris de se réapproprier l’actualité à travers la photographie, voilà l’essence de ce projet mené en partenariat avec l’ESJ Lille.
  • La revue Far-Ouest accompagne cinq classes de collèges du Lot-et-Garonne dans la création d’un mook sur le thème de l’eau et ses enjeux.
  • A Pessac (Gironde), le Pod’Rap de l’institut de journalisme Bordeaux-Aquitaine (IJBA) en partenariat avec les écoles de la ville.

Dans la catégorie « Association »

  • La caravane des médias de l’association Carmen : des journalistes qui sillonnent les Hauts-de-France dans un studio mobile depuis 2020 pour discuter de leur rapport aux médias.
  • Le Journal Spectaculaire de Globe reporters : plusieurs heures d’interview et de reportages qui sont jouées en spectacle. La première édition a eu lieu en juin 2022 à Bruxelles.
  • Leur Etouvie de l’Ecole Supérieure de Journalisme (ESJ) : il s’agit d’un film documentaire réalisé par les habitants du quartier prioritaire d’Etouvie à Amiens (Hauts-de-France) en partenariat avec l’ESJ de Lille. Les premiers témoignages sont à retrouver ici.

Dans la catégorie « Touraine – Région Centre – Val de Loire »

  • Radio Pasteur par le Collège Louis Pasteur à La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret) : il s’agit de la radio de cet établissement classé unité localisée pour l’inclusion scolaire (Ulis). Les élèves qui s’y trouvent sont atteint de troubles cognitifs et réalisent des reportages et interviews, notamment de journalistes.
  • FaKe Investigation à Blois : un projet de réalisation de reportages et fact-checking réalisés par des adolescents. Orchestré par le Service jeunesse de Blois avec des journalistes professionnels.
  • Fritz le mag – Tours : Un magazine tourangeau d’actualité locale fait pour les enfants et parfois même, par des enfants en classe de CM2.

Dans la catégorie « Rive Sud de la Méditerranée »

  • Caravane EMI 237 par Eduk Media : une caravane de sensibilisation à l’EMI qui a parcouru le Cameroun au cours de l’année 2022.
  • La fondation Samir Kassir : des mangas pour sensibiliser à la désinformation. Ces ouvrages constituent un fil rouge qui permet de proposer des jeux de rôles dans des ateliers mis en place au Liban.
  • L’association Al Khatt, qui propose des clubs de médias citoyens à travers la Tunisie.

Alhussein Sano, l’exemple parfait de l’utilité de la Maison des Journalistes

Alhussein Sano (à gauche) et Albéric De Gouville (à droite) discutent de la liberté de la presse sur la scène de l’Agora à Mame.

Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

La Maison des Journalistes intervient tous les matins à 9h15 à l’Agora de l’Espace MAME devant un public de collégiens et de lycéens. L’association a été fondée en 2002 pour accueillir les journalistes réfugiés en France et pratique l’éducation aux médias et à l’information (EMI) depuis 2007.

L’Agora n’est pas encore tout à fait remplie mardi 28 mars à 9 h du matin. Ce sont principalement des adolescents qui sont assis, même si la conférence est ouverte à tous. Tous les matins, de 9h15 à 10h30, pendant les Assises, la place est laissée à la Maison des Journalistes (MDJ).

Sur la scène, deux intervenants : Albéric De Gouville et Alhussein Sano. Le premier est le président de l’association. Le second est un journaliste guinéen, demandeur d’asile, qui vit en ce moment à la MDJ à Paris.

Car accueillir des journalistes en exil, menacés pour leur profession dans leurs pays d’origine est la priorité de cette association, fondée en 2002. « Il y a quatorze chambres pour six à huit mois de présence par personne, le temps que les demandes d’asile soient acceptées » explique Albéric De Gouville.

L’association propose à ses protégés des aides pour les démarches, des cours de français et organise des évènements. Elle est financée par des organismes français, le fond européen pour les réfugiés et par des médias partenaires.

Ce n’est pas tout : « L’autre mission principale de la Maison, c’est l’éducation aux médias et à l’information », précise M. De Gouville. A travers le projet Renvoyés Spécials, les journalistes de la Maison rencontrent des classes de collèges et de lycées à travers la France. Pendant les Assises internationales de journalisme de Tours, cette rencontre a lieu à Mame.

Arrêté par la junte guinéenne

Alhussein Sano est un professionnel de médias depuis 2007. En Guinée, il travaillait à la tête d’une agence de production. Celle-ci travaillait en collaboration avec la RTJ, la radio-télévision publique guinéenne. Lui-même a exercé le poste d’animateur d’une émission de télévision culturelle. En 2013, il devient directeur des programmes de la chaine.

En 2017, « le directeur général est remplacé par un militant du parti au pouvoir » explique Alhussein Sano. La ligne éditoriale change pour une promotion active du président, Alpha Condé et de son troisième mandat consécutif. « Je me suis opposé à cette promotion et j’ai donc été rétrogradé. Par la suite, je me suis surtout concentré sur mon agence de production. » C’est là que les ennuis ont commencé : « Je louais mon matériel aux opposants, j’ai fait un documentaire sur les oppositions au troisième mandat, j’interviewais des jeunes de cette frange. On refusait de diffuser mes productions. »

En 2021, il y a eu un coup d’Etat militaire en Guinée. M. Sano continue à louer son matériel aux mêmes opposants. Cette fois-ci, il ne s’agit plus de mise au placard mais de menaces physiques. « J’ai été arrêté deux fois, à la première, j’ai été emprisonné et j’ai réussi à m’enfuir. C’était en juin 2022. Un mois plus tard, après la première grande manifestation de juillet contre la junte. Le lendemain, on est revenu m’arrêter. J’ai une nouvelle fois réussi à m’enfuir et ai préféré quitter le pays avec ma famille. »

« Ca me fait du bien ces rencontres »

Sano arrive donc en France fin 2022. « J’ai découvert la Maison des journalistes sur internet. Je les ai contactés, ils m’ont poussé à faire ma demande d’asile. » Après trois mois en hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile à Strasbourg, puis dans un centre d’urgence à Reims, il est finalement recontacté par la MDJ et s’y installe le 7 décembre dernier.

Il a participé lui-même aux opérations Renvoyé Spécial à Paris et à Montpellier. C’est la première fois qu’il vient aux Assises de Tours. « Ça me fait du bien ces rencontres. Cela me permet de parler de mon métier. J’échange avec des collégiens et des lycéens, je leur parle de l’importance de la liberté d’expression qui est un pilier de la démocratie et même, pour moi, un pilier de l’existence. »

Laura Blairet

[LE RESUME] « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? »

Retrouvez l’essentiel de l’évènement « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? » 

De gauche à droite : Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM, Nathalie Sonnac, présidente du COP CLEMI, professeure, Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux et animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France. Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Présentation de l’étude « Information : 50 nuances de défiance. Les Français face à la désinformation »,
par Laurence DE NERVAUX, directrice de Destin commun.

Avec Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Nathalie SONNAC, présidente du COP CLEMI, Divina FRAU-MEIGS, professeure-chercheuse, Savoir-Devenir, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, Sandra LAFFONT, présidente et cofondatrice d’Entre les Lignes, Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM.

Animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France.

 

 

Les enjeux

La conférence était l’occasion de tirer les conclusions et prendre connaissance des propositions du rapport parlementaire “Mission « flash » sur l’éducation critique aux médias” des députés Philippe Ballard et Violette Spillebout. L’enjeu est de démocratiser l’EMI au niveau national et aussi au niveau local en prenant en compte les spécificiés de chaque territoire. Il a été évoqué l’ambition de motiver les partenaires, tant publics que privés, pour financer l’EMI car l’information est “un bien commun”. L’objectif de la conférence était également d’entendre les critiques et les retours du terrain des différents acteurs présents dans la salle.

Ce qu’ils ont dit

Laurence De Nervaux : « Deux tiers des Français trouvent que les contenus extrêmes prennent trop de place. »

« En moyenne, un Français sur quatre fait confiance aux journalistes. »

« Plus d’un Français sur quatre n’écoute pas les informations car elles sont trop négatives. »

Violette Spillebout : ​ « Face à tout ce qui arrive, le plus important, c’est l’éducation. Nous aurons peut-être les moyens de renforcer l’éducation pour tous. Aurons-nous les moyens de combattre les ingérences, tout ce qu’on voit dans le numérique ? C’est moins certain. »

« Peut-être l’erreur a été de se concentrer sur le numérique dans l’éducation nationale et la culture. C’est un sujet qui concerne la citoyenneté, la jeunesse, la justice, c’est un sujet interministériel. On a un socle commun, ce qui réduit les inégalités. […] On a vu beaucoup choses liées à la bonne volonté, mais très peu de moyens. Je pense qu’il y a quand même une question de déperdition de l’argent public qui mérite d’être regardée. »

« Beaucoup d’éducateurs sont bénévoles, d’autres sont rémunérés. La mise en place d’un tarif règlementé, c’est une opportunité pour lutter contre la précarité du métier. »

« Les professeurs documentalistes s’en occupent, mais ce n’est pas reconnu de façon régulière. Pour moi, chacune des propositions du rapport mérite un groupe de travail composé des sphères publiques et privées. Chaque sujet est un chantier à mener. »

Nathalie Sonnac : « La façon dont on régulait les médias auparavant ne correspond pas à l’espace public numérique d’aujourd’hui. »

« La crise sanitaire a transformé les usages informationnels et mis le numérique sur le devant de la scène pour les plus jeunes ». « Je pense que la technologie doit demeurer un outil. »

 « L’école ne peut pas tout, elle doit se réintégrer avec des acteurs de la société civile. Les professeurs-documentalistes sont des acteurs centraux de l’EMI, mais l’éducation nationale ne leur a peut être pas donné une reconnaissance suffisamment importante. »

Divina Frau-Meigs : « Les compétences de l’EMI : comprendre, critiquer, créer. […] Cette dimension créative est en train de passer à la trappe. »

« On a besoin de l’école, c’est pour ça que je préconise une matière à part entière, pour que ce soit pratiqué, pas juste pensé. »

« Les personnes qui amplifient la désinformation sont des seniors écartés de l’enseignement depuis trente ou quarante ans. Comment on atteint ces seniors qui sont sur des médias traditionnels ? »

Tarik Touahria : ​ « Dans les actions qu’on porte dans les centres sociaux, le « faire » est bien souvent avec les médias associatifs, boîtes radio, outils en ligne… »

« Si on donne aux acteurs de l’EMI les moyens de travailler, ils feront du bon travail. »

« Tous les ans, il faut aller chercher de l’argent, répondre à des appels à projets, faire des bilans intermédiaires… »

« Il ne faut pas opposer ascendants et descendants […] Il faut créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information, idem pour l’écologie, le numérique… »

Sandra Laffont : « On nous demande beaucoup d’intervenir sur la désinformation. Mais notre obejctif premier, c’est de donner le goût de l’info, pas d’avoir une approche anxiogène de l’info. Il faut ouvrir les jeunes sur le monde. »

« Nos bénévoles font ça dans un engagement citoyen. On peut se le permettre, car nous avons des CDI à côté. C’est plus compliqué pour les pigistes, car intervenir en classe, c’est renoncer à une pige. Je pense qu’il faut prioriser les moyens sur les interventions en classe. »

Julie Joly : « Il faut qu’on se rende compte que devant cette urgence info, si on reste rivés sur nos écrans, on va se faire avoir, on aura perdu notre capacité à penser seuls. Pour cela, il faut des moyens. Les médias doivent avoir les moyens d’intervenir, de toucher les jeunes, mais ces moyens sont considérables. »

« Pour parler à des jeunes, il faut des jeunes. »

À retenir

Les membres de la table ronde sont favorables à la mise en place de mesures permettant un meilleur rayonnement de l’EMI au niveau national mais aussi au niveau local. Par exemple, tous souhaitaient une meilleure reconnaissance du travail des professeurs-documentalistes. Toutefois, les avis divergent parfois sur la méthode à appliquer : faut-il mettre les journalistes au cœur de l’EMI au vu de la défiance vis-à-vis de ces derniers ? Doit-on donner une place plus importante aux acteurs des collectivités territoriales, qui connaissent déjà les publics et peuvent se révéler des partenaires clés ? Une chose est sûre, une meilleure coopération entre acteurs publics et privés est nécessaire.

Jane Coville (EPJT) Roméo Marmin (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] Présentation de « vu des quartiers » : suivez le guide !

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Présentation de « vu des quartiers » suivez le guide ! »

De gauche à droite, Michel Dumoret, Maxime Daridan, Manon Meye, Antoine Ly et Maryam El Hamouchi. Conférence sur l’outil « vu des quartiers », aux Assises de Tours, le 28 mars 2023.​ Photo : ArnaudFischer/EPJT.

Avec Maxime Daridan, secrétaire général de BFM TV, Michel Dumoret, directeur en charge de la lutte contre la désinformation France Télévisions, Maryam El Hamouchi, journaliste au pôle enquête et reportage à l’AFP et Antoine Ly, délégué éditorial Radio France en charge de la diversité et de l’égalité des chances.

Animé par Manon Meye, créatrice de contenu au Groupe Cerise.

 

 

Les enjeux

Il est reproché aux journalistes de ne pas assez parler des banlieues et, quand c’est le cas, c’est pour en parler en mal : violences, pauvreté etc. Face à ce constat, BFM TV en collaboration avec l’association des maires Ville&Banlieue a créé « Vu des Quartiers », un annuaire qui met en valeur les contacts d’habitants et d’acteurs des quartiers prioritaires qui veulent échanger avec la presse et raconter ce qui se passe chez eux. L’objectif est de parler plus justement et de façon plus équilibrée de ce qui se passe dans les quartiers.

 

Ce qu’ils ont dit

Maxime Daridan : ​ « ‘Vu des quartiers’ est un annuaire de contact de quartiers prioritaires. On n’est absolument pas sur une question d’expertise. Vous venez d’un quartier, venez ! C’est simplement un outil mis à disposition. »

« Il faut que l’on arrive à faire que les habitants des quartiers soient comme tout le monde : dans un traitement banal de l’actu. »

« ‘Vu des quartiers’ est juste un outil. Après ça dépend de ce qu’en font les gens. Je suis convaincu que ça peut marcher, parce que c’est un outil simple. Mais ça s’inscrit dans un écosystème qui ne se suffit pas à lui-même. Il va falloir que tout le monde s’investisse. »

« Dans le règlement intérieur on a listé les règles du jeu. Il ne faut pas tricher. Ceux qui s’inscrivent, les habitants des quartiers et les journalistes, s’engagent à être honnêtes. Le but de l’outil n’est pas de parler des quartiers en bien. C’est de rétablir un équilibre sur le traitement que l’on en fait. »

« On a essayé de recenser au maximum les quartiers hors Île-de-France. On s’intéresse aussi aux quartiers des département d’Outre-mer (DOM). C’est d’ailleurs un double défi parce-que le traitement des DOM en tant que tel est déjà insuffisant. »

Michel Dumoret : ​ « Quand on va dans ces cités ou quartiers prioritaires, on n’est pas les bienvenus. On nous reproche d’être très loin de ces gens, de leurs préoccupations. Je pense que cet outil va nous permettre de décloisonner cette relation. À France TV, notre objectif est de montrer la France telle qu’elle est. Ces gens en font partie. Or, ils n’ont pas beaucoup de place dans l’actualité. Si cet annuaire peut permettre de susciter des vocations dans nos rédactions, j’en serais très heureux. »

« Il faut être optimiste. Dans les médias, il y a de plus en plus de visages, de noms qui montrent la diversité. Il y a aussi des bourses dans la formation, etc. »

Maryam El Hamouchi : ​ « Je ne trouve pas que ce soit difficile de travailler en banlieue. La critique que je peux faire c’est que, très souvent, les journalistes parisiens passent le périph’ quand ça va mal. »

« Rien ne remplace le terrain. Il faut aller sur place pour voir ce qu’il se passe. Ne pas se contenter d’un coup de téléphone. »

Antoine Ly : ​ « C’est compliqué de filmer en banlieue. La plupart des journalistes n’ont pas les clés de ce que sont les banlieues. ‘Vu des quartiers’ permet d’avoir un annuaire dans lequel des contacts sont volontaires pour parler. Ça a aussi l’avantage de multiplier les sources. Ça permet d’avoir une image très concrète des banlieues. C’est ce qui nous intéresse à Radio France. »

« On a créé cet annuaire pour que ceux qui veulent parler soient des volontaires. C’est important. Ce sont des personnes qui ont envie de se réapproprier leur histoire. Si cet outil peut permettre de rétablir un gage de vérité, cet un outil précieux. »

« Le journaliste doit toujours avoir du recul, un œil critique. Il ne doit pas juste appeler et tendre un micro. Quand on appelle un contact de l’annuaire, on le teste, on essaie de voir s’il veut nous balader. »

« J’ai des collègues reporters de guerre qui m’ont dit « je préfère aller en Irak ou en Afghanistan qu’en banlieue ». C’est hallucinant. On se doit donc de rétablir une confiance chez les journalistes et les habitants pour démocratiser le traitement du quotidien en banlieues. On y croit à Radio France. »

À retenir

Le traitement médiatique du quotidien des habitants des banlieues n’est pas le reflet de ce qu’ils vivent. Et on ne parle que rarement d’eux, sauf quand ça va mal. Avec l’outil ‘Vu des quartiers’, l’objectif est de rétablir une certaine confiance entre journalistes et habitants des banlieues pour pouvoir résoudre ce problème. Leur laisser prendre la parole est la meilleure manière de faire.

Arnaud Fischer (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] Quels projets, quels enjeux pour le journalisme constructif en Europe ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quels projets, quels enjeux pour le journalisme constructif en Europe ? »

Photo : Guillaume Bosmans/IHECS

Avec Orla BORG, directeur des bourses d’études du Constructive Institute, Balint ABLANCZY, journaliste politique et cofondateur de Valaszonline.hu et Lorenzo DI STASI, journaliste et membre du réseau italien pour le journalisme constructif. 

Animé par Yasmine BOUDAKA, coordinatrice New6s

 

Les enjeux

Le journalisme constructif doit permettre d’apporter des perspectives à un sujet, sans faire abstraction des problèmes. En Europe, plusieurs projets de journalisme constructifs se sont développés, autour des mêmes valeurs : présenter des solutions, nuancer les sujets traités et engager un débat démocratique.

Ce qu’ils ont dit

Orla BORG :« Nous laissons notre audience voir tout ce qui ne va pas en leur présentant plusieurs problèmes. Face à cela, certains publics se déconnectent des médias. Or sans les faits, on n’a pas la vérité. Et sans la vérité, on n’a pas de démocratie. »

« Notre devoir est-il de montrer seulement des problèmes et leurs victimes ? Ou a-t-on d’autres responsabilités ? Le journalisme constructif permet d’aller plus loin, de proposer des solutions. Nous devons garder en tête que nous travaillons pour nos publics. »

Balint ABLANCZY : « Le journalisme constructif est une méthode qui enrichit notre profession : créer une structure nouvelle, en essayant de se détacher de la folle course au sensationnel et du storytelling d’un gouvernement. Ce n’est pas l’opposé du breaking news. Il existe une certaine complémentarité entre les deux. »

« On sait que nous ne sommes pas un média de masse. Pour échapper à l’asphyxie du breaking news, certains médias sont devenus des médias de niche et trouvent leurs publics. Chez Valaszonline.hu, nous voulons développer notre communauté avec qui nous partageons les mêmes envies et valeurs.»

Lorenzo DI STASI : « Essayer d’être indépendant est aussi une valeur. Nous vivons grâce à des donations, qui assurent l’indépendance de notre organisation. »

« Pendant la pandémie, les breaking news amenaient beaucoup de confusion parmi la population. Nous (les journalistes) avons rapidement décidé de travailler ensemble pour réaliser un travail de journalisme constructif. Nous étions en contact tous les jours avec une communauté, pour mettre en avant différentes informations sur la pandémie. »

À retenir

Face à la crise de confiance entre les publics et les médias, le journalisme constructif peut apporter une réponse. Quand les breakings news peuvent jouer sur le dramatique et que le journalisme d’investigation pointe du doigt des problèmes, le journalisme constructif apporte des nuances et propose des solutions.

Guillaume Bosmans (Ihecs) et Amandine Ollier (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Soirée débat: elles racontent la guerre en Ukraine

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Soirée-débat: elles racontent la guerre en Ukraine ».

Photo : Marc Mentré

Avec Maryse BURGOT, grande reportrice à France Télévisions, Clémence DIBOUT, reportrice pour BFM TVenvoyée spéciale en Ukraine, Galyna KRYCHKOVSKA, productrice pour TV Kyiv, Alla LAZAREVA, rédactrice en chef adjointe de The Ukrainian Weekly, Alexander QUERY, reporter au Kyiv Independent et coordinateur du Centre pour la liberté de la presse en Ukraine (RSF) et Lydia TARAN, journaliste et présentatrice (1+1 TV). Animé par Grégoire DENIAUdirecteur de la rédaction de TV5 Monde.

 

 

Les enjeux

Journalistes françaises et ukrainiennes ont partagé les expériences qu’elles ont eu en couvrant la guerre en Ukraine. Dans ce débat riche de témoignages, les journalistes ont raconté les grands défis auxquels elles font face: propagande, censure, désinformation, couvrir la guerre dans son propre pays…

Ce qu’ils et elles ont dit

Alexander Query : « Beaucoup de journalistes ukrainiens sont devenus des reporters de guerre par obligation. Contrairement à la majorité des professionnels du métier, ils ne sont pas allés vers la guerre, elle est arrivée à eux. »

Maryse Burgot : « Nous, journaliste français en Ukraine, avons pour mission de transmettre les faits. Mais nous n’encourrons pas les mêmes risques que nos confrères ukrainiens. Nos fixeurs, qui nous aident à exercer notre métier, sont constamment au téléphone avec leur famille. Ils ont des préoccupations plus importantes que le journalisme. »

« En Ukraine, les personnes voulant s’unir avec la Russie sont très minoritaires. C’est une population pauvre et âgée et nostalgique de l’Union soviétique, qui habite souvent près de la frontière russe. J’ai rencontré plusieurs russophones qui avaient envie d’être européen. »

Clémence Dibout : « Quelques jours avant l’invasion, j’étais en reportage dans le Donbass. Ma fixeuse m’a dit qu’elle avait un mauvais pressentiment et qu’il fallait rentrer à Kiev. Le 24 février, jour de l’invasion, nous sommes rentrées à Kiev. Elle m’a demandé de prendre un avion pour la France. »

« On me donnait souvent des cafés et des fleurs pour me remercier d’être là. Mais ce sont ces personnes-là qui sont les plus courageuses. On est arrivé à Bucha. Notre fixeur a fait un malaise car c’était sa ville natale. »

Galya Krychkovska : « Je savais, depuis 2004 (année de la révolution orange, NDLR), que la Russie allait envahir l’Ukraine. Le jour avant le 24 février, j’ai demandé à mes proches de faire leurs valises. Je savais que ça allait se produire ce jour-là. »

« Il est difficile de rester objectif lorsque la guerre est dans votre pays. J’essaye tout de même d’avoir le recul nécessaire lorsque je couvre cette guerre. »

Alla Lazareva : « J’ai des connaissances en Russie qui critiquent mes articles. Ils ont le cerveau lavé par la propagande. Ce qui est choquant, c’est que les ambassadeurs russes prennent la parole, sur les plateaux télévisés, et disent des mensonges. Il faut lutter contre les mauvaises informations. La liberté de parole et laisser passer des mauvaises informations, ce n’est pas la même chose. »

« Je ne suis pas d’accord avec le clivage Est-Ouest, souvent présenté dans les médias. Ce clivage n’est ni géographique ni linguistique, mais plus au niveau de l’attachement aux libertés et droits. »

Lydia Taran : « Le soir avant l’invasion, je travaillais. Je suis rentrée chez moi, je n’ai pas fait mes bagages. A 4 heure du matin, j’ai été réveillée par les bombardements. Je savais que ça venait, mais je n’étais pas prête. »

« La guerre en Ukraine n’est pas nouvelle, elle dure depuis huit ans. Nos reporters portaient toujours des gilets par-balles pour travailler à l’Est. Aujourd’hui, ce qui a changé, c’est que les plus grosses chaînes se sont unies pour diffuser un journal télévisé commun. Celui-ci s’appelle « Le télémarathon ». »

 

À retenir

La couverture de la guerre en Ukraine pose de nouveaux défis aux journalistes françaises et ukrainiennes. Même si tous les reporters n’ont pas le même rapport au pays, ils font tous face aux mêmes contraintes: la propagande, la censure, la désinformation, les dangers du terrain…

Cem Taylan

[INTERVIEW] Maxime Audinet : « RT est un média russe qui ne sert pas sa population mais la politique extérieure de l’État »

Photo : Cem Taylan/EPJT

Maxime Audinet, chercheur et auteur de Russia Today : un média d’influence au service de l’État russe, lauréat du Prix recherche sur le journalisme des Assises, commente la suspension de la chaîne dans l’Union européenne. Il qualifie RT de « média d’État » mais souligne que l’interdiction d’un média dans des démocraties libérales n’est pas un « geste anodin ».

Dans votre livre, vous distinguez les médias d’État et ceux du service public. Pouvez-vous nous en dire plus ? 

Maxime Audinet. Ce n’est pas une distinction binaire et stricte. C’est quelque chose qui se joue dans le traitement quotidien de l’information, notamment lorsqu’il s’agit de médias internationaux. A quoi sert et à qui s’adresse un média du service public ? Est-ce qu’il a pour simple mission d’informer des populations extérieures ? Russia Today est un média qui ne sert pas sa population mais la politique extérieure de l’État russe. RT n’est pas un média qui parle de la Russie mais de l’État russe. C’est pourquoi ce n’est pas un instrument de soft power classique car il ne participe pas au rayonnement international de son pays.

Moins d’un an après la publication de votre livre, RT a été suspendu en Europe. Comment interprétez-vous cette décision ? Pourquoi une telle mesure n’a pas été adoptée en 2014, lors de l’annexion de la Crimée ?

M. A. En 2014, la présence de RT en Europe n’était pas si importante. Il n’existait que la branche anglophone. La crise ukrainienne survient et cela accélère l’internationalisation du réseau RT. Par ailleurs, l’ampleur de l’invasion de l’Ukraine par la Russie n’est pas la même que celle de l’annexion de la Crimée. L’Union européenne a justifié sa décision de suspendre la chaîne par le paquet de sanctions contre toutes les entités russes.

Est-ce que cette suspension pose un certain nombre de questions sur la liberté de la presse en Europe ?

M. A. Interdire un média dans une démocratie libérale n’est jamais un geste anodin. Même s’il s’agit d’un média propagandiste comme RT France. C’est ce qui distingue un système pluraliste d’un système autoritaire où l’unanimisme règne. En Russie, depuis le début de la guerre en Ukraine, on a vu la disparition de plusieurs médias indépendants. Il s’agit tout de même d’une suspension, ce qui sous-entend qu’une fois le conflit terminé, une réouverture sera envisageable. Mais il est clair que la chaîne n’aura plus la même crédibilité si elle revient en France.

Est-ce que cette décision entraînera un assouplissement de la ligne éditoriale du RT par rapport au Kremlin ?

M. A. Je ne pense pas. En interdisant RT, le droit communautaire a pris le dessus sur le droit national. L’Arcom, qui avait un effet dissuasif sur la chaîne, a été court-circuitée. Cela signifie que RT France n’a plus de convention auprès du CSA. La rédaction française est en pleine recomposition. Il peut y avoir une recentralisation d’une partie de la rédaction à Moscou.

Recueilli par Cem Taylan

[LE RÉSUMÉ] La remise des prix des Assises 2022

Les prix des Assises 2022, présidés par la journaliste Manon Loizeau, ont été remis jeudi 12 mai , aux lauréats. Le livre Les Fossoyeurs, de Victor Castenet, a notamment été récompensé du Prix du livre de journalisme.

Photo : Amandine Hivert / EPJT

Le Grand prix du journalisme Michèle-Léridon. Il récompense la ou le journaliste, le média, le collectif ou l’action éditoriale qui a le mieux honoré les valeurs du journalisme lors de l’année écoulée. Le lauréat est le journal russe Novaïa GAZETA, et son rédacteur en chef Dmitri Mouratov, pour sa lutte en faveur de la liberté d’expression en Russie. « Dans un an nous allons fêter les 30 ans de notre rédaction, nous espérons pouvoir fêter cela après la fin de la guerre pour célébrer la démocratie. »

Le Prix du livre du journalisme. Prix parrainé par la ville de Tours. Il a été décerné à Victor Castanet pour Les Fossoyeurs (éditions Fayard). « Il a fallu du temps et les moyens afin d’enquêter sur ce sujet. Je suis fier de ce prix car il vient encourager le travail d’investigation qui ne se vend pas forcément mieux que d’autres formats et qui coûtent cher », a expliqué le lauréat.

Le Prix recherche sur le journalisme. C’est Maxime Audinet qui a reçu cette récompense pour son livre Russia Today (RT). Un média d’influence au service de l’Etat russe (INA éditions). Le chercheur a rappelé que « cette guerre a eu l’effet d’une bombe notamment en asséchant les médias russes indépendants. Mais il y a eu un effet très fort sur les chercheurs russes qui ont été expulsés de leur université ou qui ont dû quitter leur pays. Nous nous devons aujourd’hui de les soutenir ».

Le Prix enquête et reportage. Il est remis par vingt-huit étudiants issus des quatorze écoles de journalisme reconnues par la Conférence des écoles de journalisme (CEJ) dont l’EPJT fait partie. Cette année cette récompense a été remise à « Mécaniques du journalisme, le podcast. Saison 9 : Fixeur les yeux et les oreilles du reporter ». C’est une série en quatre épisodes pour France Culture, signée Alain Lewkowicz, réalisée par Vincent Decque, et coordonnée par Grégory Philipps. Léo Humbert et Héloïse Weisz, journalistes en formation à l’EPJT, étaient sur scène pour expliquer ce choix : « Décerner cette récompense, c’est mettre en avant le travail indispensable des fixeurs, notamment en terrain difficile comme en Ukraine ou au Sahel. » Alain Lewkowicz a envoyé une vidéo depuis Verdun expliquant : « Il nous semblait fondamental de rendre hommage a toutes ces femme, à tous ces hommes qui se mettent en danger pour nous permettre de raconter le monde. » 

Amandine Ollier

[LE RÉSUMÉ] Propagande, censure et vérité dans la guerre

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Propagande, censure et vérité dans la guerre »

Photo : Cem Taylan/ EPJT

Avec Hervé Brusini, président du Comité Albert-Londres, Manon Loizeau, grande reportrice et lauréate du Prix Albert-Londres en 2006, Elodie Martinez, journaliste pour « AFP Factcheck » et Elsa Vidal, rédactrice en chef du service en langue russe à RFI. Animé par Maxime Audinet, chercheur et auteur de Russia Today : un média d’influence au service de l’État russe.

 

 

Les enjeux

Comment couvrir la guerre en Ukraine dans un contexte d’extrême polarisation des médias ? Comment mettre en récit deux visions antagonistes ? Quelle place accorder aux émotions ? Témoignages et réflexions sur le rôle des journalistes face à la propagande, la censure et la vérité dans la guerre.

 

Ce qu’ils ont dit

Hervé Brusini : « Aujourd’hui, il se passe en France quelque chose qui sort de l’habituel. Les reporters sur place choisissent l’histoire qu’ils racontent. Ils ne sont pas soumis aux ordres de leurs médias. C’est très précieux. »

« Nous, journalistes, nous luttons pour la bonne santé de la vérité. L’idéal serait que tous les reporters s’unissent pour créer une même base de données et d’informations. Les grands médias européens devraient s’unir pour documenter les faits et pour les délivrer à la justice internationale. »

Manon Loizeau : « Quand j’ai couvert la guerre de Tchétchénie pour Canal+, j’étais assez jeune. Je pensais que j’étais en sécurité. J’ai appris, dix ans plus tard, que ce n’était pas le cas. Beaucoup de jeunes journalistes meurent sur le terrain, c’est très dangereux pour eux d’aller en Ukraine, même avec un fixeur. »

« Lorsque j’ai publié mon documentaire sur les femmes syriennes violées, l’État syrien a accusé les services secrets français d’être à l’origine du documentaire et les victimes d’être des comédiennes. Il se passe la même chose en Ukraine aujourd’hui. »

Elodie Martinez : « Aujourd’hui, il n’y a pas une guerre de l’information mais une guerre de la désinformation. Les vérificateurs de l’AFP ont publié 818 articles sur la désinformation sur la guerre en Ukraine. Les fake news n’ont plus de frontières, elles sont dans toutes les langues. »

« Quand l’AFP n’a pas de photographe ou de vidéaste sur place, elle regarde les publications sur les réseaux sociaux. Elle vérifie leur authenticité grâce à des outils comme la géolocalisation. »

Elsa Vidal : « En Russie, du fait de l’héritage soviétique, il n’y a pas de société civile indépendante. L’action médiatique est de fait conçue comme une manière de mettre en valeur l’État russe. »

« Notre travail est de rendre compte des différentes expériences sur le terrain, de pouvoir distinguer ce qui relève des faits et ce qui relève des interprétations. Même si on vient de pays différents et qu’on a des points de vue divergents, on doit savoir rester objectif. En tant que correspondante pour RFI à Moscou, j’ai été très exposée à la propagande russe. »

À retenir

Les journalistes de guerre sont souvent confrontés à des choix très difficiles. La propagande, la censure et la vérité sont les plus grands obstacles à la vérité sur les terrains de guerre. 

Cem Taylan

[LE RÉSUMÉ] Lassitude électorale et lassitude médiatique : vraie ou fausse symétrie ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Lassitude électorale et lassitude médiatique : vraie ou fausse symétrie ? »

Photo : Amandine Hivert/EPJT

Rémy Buisine, journaliste et vidéaste pour Brut, Frédéric Carbonne, présentateur du « 12-14 » sur France Info, Cléa Chakraverty, cheffe de rubrique politique et société pour The Conversation, Nolwenn Le Blevennec, rédactrice en chef en charge du numérique de L’Obs et Benoit Raphael, journaliste, directeur de la publication de Flint et expert en innovation digitale et média.
Animé par Aude Carasco, journaliste spécialiste des médias à La Croix.

 

 

 Les enjeux

Le baromètre La Croix sur la confiance dans les médias montre que le désintérêt pour l’actualité n’a jamais été aussi fort que pendant l’élection présidentielle 2022. Au fil des mois qui ont précédé le premier tour, les médias ont mis en avant le fait que cette campagne n’intéressait pas les citoyens. La lassitude politique est-elle le reflet d’une lassitude médiatique ?

Ce qu’ils ont dit

Rémy Buisine : « L’idée à Brut était d’écouter ce que le public avait à dire. Aller voir les professions qui ont souffert pendant ce quinquennat pour connaître leurs revendications et leurs préoccupations. Nous voulions les faire entrer dans le débat. »

« J’ai le sentiment que la profession n’a pas été à la hauteur. Il n’y a pas eu assez de débat, on a peut-être été trop sur la petite phrase et les gens ne s’y sont pas retrouvé. »

Benoit Raphael : « La profusion et l’accélération de la production de l’information crée la peur de louper quelque-chose. C’est un problème d’addiction. »

« La surcharge informationnelle provoque une perte d’attention et pose des problèmes de stress. On peut dire aujourd’hui que l’infobésité est un problème de santé publique. »

« Une des première réponses qu’on peut apporter au problème de surcharge informationnelle, c’est de travailler sur la lenteur. Pour les journalistes, ça peut passer par la production d’information sur le temps long. Ce qu’on a essayé de faire avec Flint c’est d’utiliser l’intelligence artificielle pour créer des newsletters intelligentes qui fonctionnent par curation. »

Nolwenn Le Blevennec : « A L’Obs, on a un traitement de la politique assez institutionnel. On a fait une série, « Douce France », où on demandait aux journalistes de retourner sur les terres de leur enfance pour raconter le changement qui s’est produit en vingt ou trente ans. »

À retenir

Lassitude politique et médiatique sont liées. Il est essentiel aujourd’hui de modifier les pratiques journalistiques pour recréer un lien de confiance et mettre à l’agenda médiatique des sujets différents de ceux imposés par les politiques.

Amandine Hivert

[LE RÉSUMÉ] Concentration des médias : indépendance économique, indépendance éditoriale

Retrouvez l’essentiel de l’événement «Concentration des médias : indépendance économique, indépendance éditoriale»

Photo : Amandine Hivert/EPJT

Animé par  Salomé Saque, journaliste politique et économie pour Blast, avec David Assouline, sénateur de Paris, président délégué du groupe Socialiste, écologiste et républicain et vice-président de la commission culture du Sénat, Cécile Dubois, co-présidente du SPIL et rédactrice en chef de citoyens.com, Emmanuel Gagnier, rédacteur en chef de « Cash investigation » et membre du collectif « Informer n’est pas un délit » et Daphné Ronfard, coordinatrice du pôle plaidoyer pour l’association Un bout des médias.

 

 

Les enjeux

Les médias sont soumis à la même réglementation depuis la loi Léotard, adoptée en 1986. Cependant, la révolution numérique a changé la donne. Et si le phénomène de concentration existe depuis longtemps, il s’est accentué ces dernières années. Une commission d’enquête menée par le Sénat a récemment auditionné les propriétaires des principaux médias. 

Ce qu’ils ont dit

David Assouline : « La commission d’enquête a appelé pour la première fois les vrais propriétaires des médias. Ils étaient obligés de venir et de répondre à des questions sous serment. Ils ont dû s’expliquer sur les raisons pour lesquelles ils se sont tout à coup attachés au monde des médias. Au total, il y a eu 82 personnes auditionnées pendant cent heures.»

« Il m’a fallu six minutes pour énumérer l’ensemble des médias et des maisons d’édition que Vincent Bolloré possède. Le fait qu’il me faille six minutes éclaire l’opinion publique sur ce que représente la concentration des médias.»

Cécile Dubois : « La concentration sectorielle permet de créer des entreprises de presse qui sont robustes. Ce n’est pas forcément un problème. Pour nous, il y a un problème à partir du moment où cette concentration se fait dans le giron d’entreprises qui n’ont rien à voir avec la presse à l’origine. »

« Aujourd’hui, 50 % des aides directes à la presse sont données à des titres qui appartiennent à des groupes dont ce n’est pas l’activité principale.  Ça n’incite pas la presse indépendante à se développer. Pour nous, il faudrait que les objectifs des aides à la presse soient quantifiables et évaluables. »

Emmanuel Gagnier : « Ce qui se passe dans le groupe Bolloré est grave. Mais nous pouvons voir d’autres exemples de censure ou d’autocensure dans les autres grands groupes. Ce n’est pas évident de faire ce recensement mais il faut le faire.»

« Le collectif Informer n’est pas un délit s’est créé face au problème du secret des affaires. Mais aujourd’hui, on milite aussi pour l’indépendance des rédactions. Il faut absolument la sanctuariser sinon on aura la risque d’une intrusion de l’actionnaire dans des sujets qui ne lui plaisent pas.»

Daphné Ronfard : « La loi protège insuffisamment l’indépendance des journalistes au sein des médias. Le modèle du Monde est très parlant. Ils disposent de mécanismes protecteurs comme le droit d’agrément. Ce n’est pas le cas pour d’autres journalistes dans d’autres médias.»

À retenir

En France, neuf millionnaires et milliardaires détiennent plus de 90 % des médias privés. Au lendemain de la commission d’enquête du Sénat, la question de la manière de réagir pour défendre l’indépendance économique et éditoriale des rédactions se pose plus que jamais. Les participants et participantes à la conférence ont fait différentes propositions pour limiter ce phénomène.

Amandine Ollier

[INTERVIEW] Marc Epstein : «La diversité est un enjeu pour la démocratie et l’avenir du journalisme»

Photo : Coline Poiret/EPJT

Marc Epstein, ex-rédacteur en chef du service Monde de L’Express, est président de La Chance, une prépa qui aide des étudiants boursiers à préparer les concours des écoles de journalisme. Lors des Assises du journalisme de Tours, il est intervenu pour témoigner de l’urgence de diversifier les profils dans les rédactions.

Vous faites état d’un manque de diversité dans le milieu du journalisme et ce, dès la formation. C’est d’ailleurs dans ce but que vous avez créer le dispositif de La Chance. Avez-vous constaté une évolution dans le milieu ?

Marc Epstein. Depuis une quinzaine d’années que l’on existe, j’ai en effet constaté des changements. Au tout début, les gens étaient surpris qu’il y ait ce besoin d’un soutien. Pour ces personnes, les concours étaient un système juste qui garantissait une égalité des chances. Ils y voyaient un moyen d’évaluer les candidats sur leurs compétences et d’éviter les discriminations. Mais ils ne comprenaient pas que, si la ligne d’arrivée est la même, la ligne départ est différente pour chacun. Aujourd’hui, grâce aux efforts des différents dispositifs comme La Chance, il y a de plus en plus de boursiers dans les écoles de journalisme.

Lors de la conférence, vous évoquiez la lenteur de l’évolution dans les rédactions. Quels sont les freins qui ralentissent l’intégration des personnes issues de la diversité dans la profession ?

M. E. Je pense que cela s’inscrit dans une tradition française. Ce sont des facteurs profonds qui sont l’héritage d’un idéal révolutionnaire qui dicte une égalité entre tous. En France, on a aussi une difficulté à penser qu’il y a une diversité : des parcours, des origines sociales ou des situations de handicaps… On partage un idéal républicain aveugle à nos différences. Et si on ne les considère pas, on ne peut pas les traiter correctement. C’est comme ça que le manque de diversité dans les rédactions est d’une grande violence pour les journalistes et leur public.

Défendre la place de la diversité dans les rédactions est encore un poids souvent réservé aux personnes concernées. Mais les intervenants de la table ronde s’accordent pour dire que cela doit être le combat de tous et surtout des médias et de leurs directions. Qu’en pensez-vous  ?

M. E. L’absence de la diversité, c’est le souci des rédactions et pas celui des personnes issues de la diversité. Parce qu’une rédaction qui a des journalistes aux profils différents incarne mieux la réalité. Tant dans la représentation de la société que dans son traitement de l’information. Les différents titres ont à cœur d’être appréciés et d’offrir à leur public des sujets qui les touchent. Sinon, ils risquent de perdre leur audience qui se tournera vers les réseaux sociaux, où les algorithmes renvoient vers un entre-soi. La diversité, c’est un enjeu qui concerne l’équité sociale mais aussi la démocratie et l’avenir du journalisme.

Recueilli par Coline Poiret

[INTERVIEW] Haydée Sabéran : « Une série de photoreportage est toujours un travail extrêmement long »

Photo : Prunelle Menu/EPJT

Haydée Sabéran est rédactrice en chef adjointe de la revue photographique 6 mois. également responsable du pôle narration, elle nous explique le processus d’élaboration de la revue. Le temps et la coopération sont pour elle les deux principes essentiels pour produire un travail de qualité.

Quelle place occupent les textes et les légendes dans une revue photographique telle que 6 mois ?

Haydée Sabéran. Les légendes des photos sont les mots des photographes. Nous les interviewons pour construire avec eux le récit qui accompagne leurs images. Les mots complètent les photos. Mais l’histoire doit tenir indépendamment des images. Si on masque les photos, on doit pouvoir comprendre la narration toute seule, et inversement.

Quelles sont les consignes que vous donnez à vos photographes avant d’aller sur le terrain ?

H. S. Nous ne leur donnons aucune consigne, car nous ne les envoyons pas sur le terrain. Ce n’est pas comme ça que nous fonctionnons. Nous ne commandons pas de récits. Nos photographes partent en quête d’images et de narrations. Ils travaillent sur le temps long, des mois voire des années. Ce qui va nous intéresser, c’est un travail de long terme qui traduise en profondeur une réalité d’aujourd’hui.

Selon vous, quel est le secret d’une photo réussie ?

H.S. Le temps. C’est la réponse la plus naturelle qui me vient. Nous cherchons à maintenir un travail de qualité et celui-ci n’est possible que si l’on prend le temps, aussi bien sur le terrain pour les photographes qu’a posteriori au sein de la rédaction. Nous pouvons passer trois heures à interviewer un photographe et ça ne pose souvent pas de problème aux interlocuteurs. Ils sont même plutôt touchés qu’on leur accorde autant de temps. Une série de photoreportage est toujours un travail extrêmement long.

Comment vous organisez-vous avec les photographes pour la partie rédaction ?

H. S. C’est un travail à faire ensemble. J’aime bien dire que nous partons en reportage dans la tête du photographe. C’est lui ou elle qui se trouvait sur le terrain. A nous de prendre le temps de les écouter, de poser les bonnes questions pour que les légendes soient les plus riches, les plus complètes possibles. Qu’elles racontent par exemple le hors-champ. Parfois, les photographes ne veulent pas trop en dire, certains souhaiteraient que la photo parle d’elle-même, donc il arrive qu’on soit dans une forme de négociation avec eux. Notre mission est de faire du journalisme, donc il faut être le plus précis possible. Mais nous cherchons toujours à respecter le pacte que les photographes ont passé avec les personnes photographiées.

 

Recueilli par Prunelle Menu

[LE RÉSUMÉ] Les organisations professionnelles interpellent les politiques

Retrouvez l’essentiel de l’événement « les organisations professionnelles interpellent les politiques »

Sonia Reyne, Jean-Christophe Boulanger, Christophe Deloire, Yoann Labroux-Satabin et Emmanuel Poupard débattent de l’indépendance des médias et de la liberté de la presse. Photo : Lilian Ripert/EPJT

Animé par Isabelle Bords, journaliste à Ouest-France, avec Sonia Reyne, journaliste pigiste membre du bureau de la SNJ-CGT, Jean-Christophe Boulanger, président de Contexte et ex-président du SPIL, Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières, Yoann Labroux-Satabin, journaliste pigiste élu CFDT et à la CCIJP et Emmanuel Poupard, premier secrétaire du SNJ.

 

 

Les enjeux

Dans un contexte de crise économique et de concentration des médias, les organisations professionnelles militent pour mieux protéger la liberté de la presse et permettre aux rédactions de se défendre contre les pressions.

 

Ce qu’ils ont dit

Sonia Reyne : « On a besoin d’une volonté politique affirmée de lutte contre la concentration des médias. »

« Il y a urgence. Nous souhaitons lancer avec les autres syndicats un mouvement pour lutter contre la suppression de la redevance audiovisuelle. Cela affaiblirait encore plus le service public. »

«Le vrai problème est de savoir comment on s’oppose à des personnes comme Vincent Bolloré. Il faut vraiment réfléchir à comment on redistribue les aides à la presse pour permettre une plus grande pluralité. »

Yoann Labroux-Satabin : « Il y a besoin d’avoir une revalorisation des salaires des journalistes et particulièrement dans la pige. Un feuillet à moins de 60 euros nous paraît absolument impensable. »

«Il manque une grande instance indépendante de régulation des médias. Ce n’est pas le cas de l’Arcom.  »

Jean-Christophe Boulanger : « Les aides à la presse représentent 20 % des revenus des médias. Ce que l’on reproche, c’est qu’elles se concentrent majoritairement sur les journaux alors qu’aujourd’hui l’information est plurielle avec le numérique. »

Christophe Deloire revient en avant-propos sur l’enlèvement du journaliste français Olivier Dubois au Mali en avril 2021. Des applaudissements résonnent dans la salle.

« RSF a formulé dix propositions très concrètes pour protéger le journalisme au début de la présidentielle, reprises en grande partie dans la dernière semaine par La France insoumise et par Emmanuel Macron. »

Emmanuel Poupard : « La première règle pour qu’un journaliste fasse bien son métier est de lui donner de bonnes conditions de travail et un bon salaire. »

« On est toujours favorable à donner un droit d’opposition collective aux rédactions pour se protéger des pressions extérieures. Il faut leur redonner du pouvoir. »

« La loi Bloche de 2016 a permis de négocier une charte de déontologie au sein de la profession. La déontologie à géométrie variable, ça ne fonctionnera jamais. »

 

 À retenir

Les intervenants s’accordent sur le constat que la loi doit accroître la protection des journalistes pour réduire le risque de pression extérieure sur les rédactions. Ils estiment également que la redevance audiovisuelle doit être maintenue au risque d’affaiblir le service public.

Lilian Ripert

[LE RÉSUMÉ] Traiter d’un objet politique non identifié : le mouvement des gilets jaunes

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Les entretiens de l’info. Traiter d’un objet politique non identifié : le mouvement des gilets jaunes ».
Photo : Prunelle Menu/EPJT
Animé par Jean-Marie Charon, sociologue, spécialisé dans l’étude des médias et du journalisme et Arnaud Mercier, professeur en communication et responsable de la licence communication à l’IFP, avec Maïté Darnault, journaliste indépendante à Les Jours, Eric Lagneau, journaliste à l’AFP, Aline Leclerc, grande reportrice au Monde et Mickael Tassard, rédacteur en chef du Courrier Picard et Fabrice Valery, journaliste à France 3 Toulouse.

 

es Les enjeux

Plus de trois ans après le mouvement des Gilets jaunes, le sujet de son traitement médiatique est encore discuté. Jean-Marie Charon et Arnaud Mercier ont publié Les gilets jaunes : un défi journalistique le 3 mai 2022. Ils reviennent sur les différentes difficultés rencontrées par les journalistes sur le terrain.

Ce qu’ils ont dit

Aline Leclerc : « Luc Bronner, directeur des rédactions du Monde en 2018, a eu l’idée de me nommer au début de la crise pour suivre les conséquences économiques et sociales sur la vie des Français. Je suis là pour voir ce qu’il va arriver. Et je suis persuadée qu’on pouvait voir arriver ce mouvement. »

« Après le 1er décembre 2018, je me suis dit « je veux un casque », « je veux des protections contre les bombes lacrymogènes ». Vous arrivez dans un truc délirant tous les samedis. Il y a eu un déferlement de violence, sur les réseaux sociaux également. On vous répète sans cesse que vous êtes la honte du journalisme. »

Mickael Tassart : « On s’est aperçu tard de la montée de la colère au sein des Gilets jaunes. On aurait dû la voir parce que c’est notre boulot. »

« Ce que je retiens de cet épisode, c’est qu’on aurait dû voir le mouvement arriver. On doit être davantage au contact des gens. »

Maïté Darnault : « J’ai couvert deux manifestations régionales pour Libération, à Lyon et à Valence. J’ai constaté que la présence du journaliste lors de ces manifs induit un biais dans ce qui est en train de se passer.»

« Expliquer le métier de journaliste a été une constance. Lors de mes reportages, j’ai pu expliquer mon statut financier. Parfois, je gagne comme eux. Parfois, je gagne plus. Créer un échange et un lien de proximité m’a paru important. »

Fabrice Valéry : « On a choisi d’utiliser Twitter pour de l’information factuelle, des photos par exemple, et Facebook pour faire des lives vidéo. Ces lives étaient commentés pendant plusieurs heures. Avec le mouvement des Gilets jaunes, nous avons changé nos pratiques journalistiques.»

« J’ai toujours pensé que ce métier devait être plus ouvert à des gens de toutes origines et que les étudiants ne devaient pas être trop formatés par les écoles de journalisme. »

Eric Lagneau : « La médiatisation des Gilets jaunes a fait partie du mouvement social. Qu’il s’agisse des médias traditionnels ou des médias créés par les Gilets Jaunes eux-mêmes sur les réseaux sociaux.»

« Il était important pour nous de coordonner le travail qu’on faisait partout en France.»

À retenir

Sujet « passionné et passionnant », comme l’a décrit Arnaud Mercier, le mouvement des Gilets jaunes a remis en question de nombreux principes journalistiques alors que la défiance envers les médias s’est accrue. Les journalistes se disent désormais plus vigilants et se veulent plus proches des publics pour mieux anticiper de nouveaux mouvements sociaux.

Prunelle Menu

[LE RÉSUMÉ] Diversité dans les rédactions: il reste tant à faire…

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Diversité dans les rédactions. Il reste tant à faire… ».

Photo : Coline Poiret/EPJT

Animé par Nordine Nabili, directeur de la formation « Journalisme » à l’Institut des Hautes Etudes des Communications Sociales, avec Emilie Cochaud-Kaminski, journaliste indépendante et ex-bénéficiaire de La Chance, Geoffrey Lopes, journaliste à LCI, ex-bénéficiaire du la Prépa égalité des chances de l’ESJ-Bondy Blog, N’fanteh Minteh, journaliste pour France 3 TV Bretagne et ex étudiante à l’EMI-CFD, Martin Zuber, journaliste indépendant, ex-bénéficiaire de La Chance, Rachel Bertout, responsable de la prépa Egalité des chances de l’ESJ Lille, Pascale Colisson, professeure et chargée de la mission Egalité et lutte contre les discriminations à l’IPJ Dauphine, David Eloy, co-directeur de l’EMI-CFD, Marc Epstein, président de La Chance et Maxime Lefebure, chargé de mission Ressources Humaines à Médiapart.

Les enjeux

La parole est aux jeunes journalistes et aux acteurs du milieu professionnel pour échanger sur la place de la diversité dans les rédactions. Ensemble, ils font état des avancées et surtout des choses qui restent à accomplir pour garantir l’égalité des chances.

Ce qu’ils ont dit

Nordine Nabili : « C’est l’heure de mettre le doigt où ça fait mal. Il y a eu des progrès mais la profession est lente en termes d’égalité. Est-ce que la question de la diversité dans les médias est d’ordre social ou est-ce du marketing pour valoriser les rédactions ? »

Emilie Cochaud-Kaminski : « La question de la confiance en soi est centrale dans ce milieu. J’ai fait les mêmes études que les gens que je retrouve dans les rédactions, mais il y a toujours ce syndrome de l’imposteur.  »

Geoffrey Lopes : « J’ai toujours entendu qu’en tant que journaliste en situation de handicap, j’étais le porte étendard de cette différence. J’ai une part à jouer sur le handicap, c’est vrai. Mais je veux être journaliste et juste faire mon métier. »

N’fanteh Minteh« Je suis fatiguée de voir que la diversité est seulement notre affaire. J’en ai marre de devoir me battre, c’est un enjeu de notre profession qui doit concerner tout le monde. »

Pascale Colisson : « Il faut tout le temps se battre pour instaurer l’égalité dans les écoles de journalisme. C’est un combat quotidien pour protéger les étudiants et pas seulement pour avoir un beau macaron. »

David Eloy : « Dès la création de la formation EMI CFD, la volonté a été de transformer la sociologie de la profession question de l’égalité des chances s’inscrit dans notre démarche. »

Maxime Lefebure : « Il faut déconstruire tout le processus de recrutement pour promouvoir la diversité. Par exemple, on fait attention à la façon dont on rédige nos offres d’emploi car on sait que ça peut influencer sur l’autocensure des candidates et candidats. »

Marc Epstein : « Nous vivons dans un pays où la diversité de la société n’est pas incarnée, que ce soit dans les médias mais également dans les fictions. »

À retenir

Le journalisme est un combat sur une multitude de plans, la diversité est l’un d’eux. C’est dans l’optique de mettre fin à une inégalité des chances récurrente que les acteurs mettent en place des prépa qui accompagnent les étudiants et les jeunes journalistes. Mais une fois au sein des rédactions, ces personnes se sentent parfois réduits au statut de « caution diversité ». En réponse, le message des intervenants est clair : « La diversité ne doit rien rapporter de particulier, elle doit simplement être acceptée. »

Coline Poiret

[LE RÉSUMÉ] Médias et journalisme en Ukraine et Russie : informer en temps de guerre

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Médias et journalisme en Ukraine et Russie: informer en temps de guerre ».

Photo : Cem Taylan/ EPJT

Animé par Loïc Ballarini, enseignant-chercheur à l’Université de Rennes 1 et Simon Gadras, enseignant-chercheur à l’Université Lumière Lyon 2, avec Maxime Audinet, chercheur et auteur de Russia Today : un média d’influence au service de l’État russeValentina Dymytrova, enseignante-chercheure en sciences de l’information et de la communication, enseignante à l’Université Lyon 3, Alexander Kondatrov, maître de conférences en science de l’information et de la communication à l’Université Clermont Auvergne.

 

Les enjeux

Depuis le début de la guerre en Ukraine, les paysages médiatiques russe et ukrainien connaissent des reconfigurations importantes. Le brouillage entre sphère politique et médiatique met en danger l’indépendance éditoriale des médias des deux pays. Dans cette guerre de l’information, les médias détournent parfois les codes déontologiques au nom de l’unité nationale.

 Ce qu’ils ont dit

Maxime Audinet : « Depuis le début de la guerre en Ukraine, on observe un assèchement total du paysage médiatique russe. La loi de mars, qui criminalise la propagation de fausses informations sur l’armée, a consolidé cette tendance. Pour s’informer librement, les Russes n’ont d’autres moyens que de trouver des stratégies de détournement.»

« Il faut distinguer les médias publics et les médias d’État. Russia Today est le porte-parole du Kremlin. Des médias comme RFI, n’ont pas le même rapport au pouvoir. Cela s’observe dans la couverture d’événements qui ont un intérêt stratégique pour l’État.» 

Alexander Kondatrov : « En Russie, il n’y a pas de distinction entre les sphères politique et médiatique. Il y a deux types de journalisme : le premier, inspiré du modèle occidental, est un journalisme pour l’intérêt public. En revanche, le deuxième est exercé par des serviteurs de l’État, qui sont prêts à bricoler la vérité pour servir les intérêts de ces dernier. Pour les journalistes proches du pouvoir, couvrir la guerre est un moyen de monter en grade dans leur chaîne.»

« Les médias russes ont tendance à diffuser des spectacles de pouvoir, comme des défilés militaires ou la célébration de la Pâque orthodoxe. C’est une manière de créer des liens avec les spectateurs et de faire adhérer les Russes aux discours du Kremlin. »

Valentina Dymytrova : « En Ukraine, depuis le début de la guerre, il y a une uniformisation des JT. Il y a un alignement entre les discours de Zelensky et les contenus médiatiques. Cela pose la question de l’indépendance éditoriale sous prétexte d’unité nationale.»

« Auparavant, les oligarques avaient le dessus sur la ligne éditoriale des médias. Avec la guerre, l’influence du gouvernement ukrainien a considérablement augmenté. Volodymyr Zelensky utilise les médias pour donner des messages de solidarité. Le pouvoir ukrainien essaye de mettre en place un soft power pour sensibiliser le public international avec la cause ukrainienne. »

À retenir

La guerre en Ukraine a  transformé les paysages médiatiques russe et ukrainien. Alors que les médias russes sont devenus encore plus rigides sur leurs contenus, les médias ukrainiens se sont transformés en une caisse de résonnance du gouvernement sous prétexte d’unité nationale. 

Cem Taylan

[LE RÉSUMÉ] Comment expliquer la guerre aux enfants ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « COMMENT EXPLIQUER LA GUERRE AUX ENFANTS ? ».

Photo : Sélim Oumeddour/Epjt

Animé par Aurélie Kieffer, journaliste pour France Culture, avec Marie-Noëlle CLEMENT psychiatre, psychothérapeute, directrice de l’hôpital de jour pour enfants du CEREP-PHYMENTIN  ; Serge Barbet, directeur délégué au CLEMI ; Jean-Yves DANA, rédacteur en chef OKAPI (Bayard) ; Mathieu Pays, rédacteur en chef de FRITZ le mag ; Camille Laurans, rédactrice en chef d’Un Jour une Actu (Milan Presse) ; Serge BARBET, directeur délégué du CLEMI.

 

 

Les enjeux

La guerre en Ukraine a commencé le 24 février 2022. Comment aborder le conflit auprès des enfants ? Quels thèmes faut-il aborder ou éviter ?

Ce qu’ils ont dit

Jean-Yves Dana : « Les parents nous contactent car ils comptent sur nous pour leur donner des clés pour parler du conflit ukrainien avec leurs enfants. »

« On a lancé un compte TikTok qui a atteint le million de vues. On se doit d’aller sur ces plateformes car c’est à ce public là qu’on s’adresse, même si on informe sur les dangers des réseaux sociaux. »

Camille Laurans : « On fait le choix de doser et de fournir petit à petit des clés de compréhension pour les enfants. On évite l’immersion dans l’émotion en privilégiant la compréhension. »

« Sur la durée du conflit, on ne fait pas de suivi jour par jour. On ne montre pas d’images difficiles à voir et on essaie d’en parler autrement, avec des acteurs qui agissent autour de ce conflit. On essaie de trouver des actions positives pour faire la balance avec la dureté des événements. »

Serge Barbet : « Les enseignants doivent être plus formés à l’accueil, y compris émotionnel, des enfants. On a beaucoup progressé mais il reste beaucoup de travail à faire. »

« Il est important de former les enfants, de tout âge, sur les fondamentaux de l’information en démocratie. »

À retenir

Aujourd’hui, les enfants entendent parler de tous les sujets, notamment via les réseaux sociaux. Il faut donc apprendre à les aborder avec eux et leur donner les clés pour mieux comprendre ce qu’il se passe. L’accent doit être mis sur l’éducation aux médias et la bonne gestion des émotions auxquelles les enfants sont sujets.

Sélim Oumeddour

[LE RÉSUMÉ] Presse et élections : une très longue histoire…

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Presse et élections : une très longue histoire… »

Photo : Lilian Ripert/EPJT

Animé par Isabelle Garcin-Marrou, enseignante-chercheure à l’IEP de Lyon, avec Géraldine Delacroix, journaliste à Mediapart, Etienne Manchette, responsable contenus et partenariats Retronews Bnf et Claire Blandin, enseignante-chercheure à l’Université Sorbonne Paris-Nord.

 

 

Les enjeux

L’importance de la presse dans le débat politique ne date pas d’hier. Les élections législatives de 1936 ont notamment été marquées par la violence de la couverture médiatique contre certains candidats et l’apparition de la radio. Un parallèle peut-il être fait avec la présidentielle de 2022 ?

Ce qu’ils ont dit

Claire Blandin : « Après la Première Guerre mondiale, on est dans un paysage médiatique en recomposition. C’est la première élection où la radio va rentrer dans ce temps de la campagne. »

« Il se passe quelque chose autour de la campagne radiodiffusée. Léon Blum trouve un ton pour parler à la radio alors que Maurice Thorez ne réussit pas à s’emparer de la forme de ce média. La violence de cette campagne est réelle. Il y a une propagation de la photo de Léon Blum dans la presse suite à son agression par les Camelots du roi. Dans le journal Action Française, Charles Maurras explique qu’il faut le « fusiller, mais dans le dos ». »

Etienne Manchette : « Le journal Paris-soir vient balayer le vieux modèle du journalisme. Il y a de la photo, une grosse titraille, de l’information internationale à gogo… Tous les éléments de la presse moderne. »

Géraldine Delacroix : « Cette violence [décrite] me fait penser à ce que l’on voit sur Twitter aujourd’hui. »

A propos de la campagne 2022 : « On a senti qu’il se passait quelque chose à gauche. Beaucoup d’électeurs et d’électrices se sont tournés vers le vote utile pour Jean-Luc Mélenchon. On s’est demandé si on devait inciter les gens à aller voter ou non. »

« Pendant l’entre-deux-tours, on s’est également posé la question de savoir s’il fallait voter pour Emmanuel Macron, car le faire pour Marine Le Pen n’était pas une option. Edwy Plenel a publié un édito « Contre Le Pen, voter dans la douleur pour conjurer l’effroi ». »

À retenir

L’arrivée de la radio dans la campagne de 1936 a bousculé les pratiques. Certains candidats s’en emparent mais d’autres comme Maurice Thorez, tribun politique, n’arrivent pas à trouver le ton pour parler aux Français. Pour les intervenants, les années 1930 sont un tournant dans la presse.

Lilian Ripert

[LE RÉSUMÉ] Couverture de l’élection présidentielle : audience de la politique, politique de l’audience

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Retour sur la couverture de l’élection présidentielle : audience de la politique, politique de l’audience ».

Photo : Zoé Keunebroek/EPJT

Animé par Francis Letellier, journaliste et présentateur pour France Télévisions, avec Philippe Corbé, chef du service politique de BFMTV, Laurent Guimier, directeur de l’information de France Télévisions et Clea Chakraverty, cheffe de la rubrique Politique et Société de The Conversation France.

 

Les enjeux

Le débat s’ouvre sur un constat : le débat de l’entre-deux-tours a été le moins regardé de l’histoire de la télévision avec 15 millions de téléspectateurs. Est-ce parce que la télévision intéresse moins ? La télévision régit-elle toujours le débat présidentiel ?

Ce qu’ils ont dit

Cléa Chakraverty : « S’il y a eu de nombreux débats télévisés durant la campagne, ils n’ont pas pour autant abordé les thèmes de fond. Il est évident que la chose politique a été désacralisée. »

« Les débats médiatiques sont finalement le climax de ce qui existait déjà sur les réseaux sociaux. Et cela se vérifie avec Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon dont les mouvements étaient très actifs sur ces réseaux. »

Philippe Corbé : « Les règles du débat en France sont à peu près les mêmes depuis 1974, et c’est un peu dommage qu’elles n’aient pas changé depuis. »

« Concernant le débat de l’entre-deux tours, nous avons vraiment essayé d’organiser ce débat qui ne s’est finalement pas fait. Cette campagne s’est peut-être finalement plus jouée sur les radios d’information. »

Laurent Guimier : « La politique à la télévision continue à faire beaucoup d’audience, quel que soit le candidat. Pour l’émission 20h22, on a gardé à chaque fois près de 80 % des téléspectateurs entre la fin du 20 H et le début de l’émission. »

« Je ne pense pas qu’Éric Zemmour avait une place importante dans le début public. Il avait une place importante dans le débat médiatique, oui. Il a eu la place que certains médias d’information voulaient lui donner pour faire de l’audience. »

À retenir

La télévision reste le principal média d’information politique même chez les plus jeunes. Malgré tout, son audience baisse et elle doit se réinventer pour continuer à rester un acteur majeur du débat politique en France.

Zoé Keunebroek

[LE RÉSUMÉ] Afghanistan, parole aux artistes et aux journalistes en exil

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Afghanistan, parole aux artistes et aux journalistes en exil ».
Noorwali Khpalwak, Mortaza Behboudi, Darline Cothière, Mariam Mana et Solène Chalvon-Fioriti se sont réunis pour parler des journalistes en Afghanistan. Photo : Marion Galard / EPJT
Animée par Darline Cothière, directrice de la Maison des journalistes, avec Mortaza Behboudi, journaliste indépendant ; Solène Chalvon-Fioriti, grande reporter et réalisatrice ; Noorwali Khpalwak, journaliste afghan réfugié à La Maison des journalistes et Mariam Mana, correspondante pour Volant Media (Afghanistan International).

 

Les enjeux

Le 15 août 2021, les Talibans prennent la capitale de l’Afghanistan, Kaboul. De nombreux journalistes et artistes sont sous le choc. Ils subissent alors une répression grandissante et beaucoup cherchent à fuir. Certains d’entre eux arrivent en France. Des mois plus tard, le soir du mercredi 11 mai 2022, des artistes réfugiés afghans présentent pour la première fois sur scène leur spectacle « Kaboul, le 15 août 2021 » au théâtre Olympia de Tours. Mêlant danse, chant, théâtre et poésie, ce spectacle raconte la vie et la fuite des Afghans à partir du 15 août. Après le spectacle, une conférence a eu lieu avec des journalistes afghans sur la situation du journalisme dans leur pays d’origine.

Ce qu’ils ont dit

Noorwali Khpalwak, arrivé en France récemment, il s’exprime en anglais : « J’ai vu la nouvelle de la prise de Kaboul sur mon téléphone le 15 août 2021 quand je me suis réveillé. Je n’ai pas cru ces informations au départ. Je voulais aller voir mes collègues au bureau alors j’y suis allé. Ils étaient terrifiés. On n’aurait pas pu imaginer que vingt ans de progrès allait disparaitre en une minute. »

« Je suis parti de chez moi le lendemain matin avec un habit similaire à ceux des talibans pour passer inaperçu. Jusqu’au 24 août, j’étais caché dans un lieu secret. Je n’ai pas pu dire au revoir à ma femme et mes enfants, il n’y avait pas le temps de se dire au revoir. Ma famille est au Pakistan maintenant. »

Solène Chalvon-Fioriti : « Cela fait dix ans que je travaille en Afghanistan. On dit de nous, les femmes occidentales, que nous sommes le troisième genre. C’est un atout indéniable en tant que journaliste. On pouvait discuter avec des chefs de guerre car ils ne nous prennent pas au sérieux. »

« Maintenant, je peux interviewer un ministre taliban alors que les médias locaux ont du mal à obtenir les autorisations pour exister. »

« Les femmes journalistes et parlementaires étaient avant les talibans mal considérées. C’est une terreur civile de genre : les hommes sont garants de ce qui va arriver aux femmes. Il faut continuer d’accueillir ces femmes journalistes car certaines se cachent actuellement dans des caves à Kaboul et la plupart n’ont pas pu partir en août 2021. »

Mariam Mana : « Pour les journalistes qui travaillent sur l’Afghanistan, les nouvelles sont toujours effrayantes. J’ai peur quand je commence ma journée à 7 heures de regarder les informations. »

« En Afghanistan, il y a un blackout médiatique : tous les médias sont censurés ou les journalistes sont partis. Nous utilisons sur Volant Media les vidéos que les citoyens afghans nous envoient sur WhatsApp, elles représentent peut-être 40 % de nos vidéos. »

Mortaza Behboudi : « Je reçois des appels d’urgence, parfois pendant la nuit à 3 ou 4 heures du matin, pour aider à faire évacuer des journalistes afghans. »

« Je retourne régulièrement en Afghanistan, pour le journalisme surtout. C’est assez dangereux mais je vais y retourner bientôt. »

À retenir

Le journalisme en Afghanistan est en péril. La plupart des journalistes ont fui ou ne peuvent plus travailler. Des journalistes réfugiés ont été accueillis en France mais ceux restés sur place, en particulier les femmes, s’exposent à des risques. Une correspondante de l’AFP en Afghanistan présente dans la salle a d’ailleurs subi plusieurs menaces. L’évacuation des journalistes vers d’autres pays est difficile. Mortaza Behboudi, en France depuis 2015 et qui a obtenu la nationalité française, aide ses confrères à sortir d’Afghanistan. Il a reçu un appel pendant la conférence pour aider une présentatrice à venir en France, une bonne nouvelle qui a provoqué les applaudissements de la salle.

Marion Galard

[LE RÉSUMÉ] Baromètre Viavoice : utilité du journalisme, guerre en Ukraine et campagne présidentielle

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Conférence sur l’utilité du journalisme et le baromètre Viavoice 2022 »

Stewart Chau, Nathalie Saint-Criqc, Cyril Petit, Nabil Aoudi et Eric Valmir se sont rassemblés pour parler du baromètre 2022 sur l’utilité du journalisme. Photo : Marion Galard/EPJT

 

Les participants à cette conférence sont Nabil Aouadi, directeur de la coordination éditoriale de France Médias Monde, Stewart Chau, directeur des études politiques et opinions de Viavoice, Nathalie Saint-Cricq, journaliste et éditorialiste du service politique à France Télévisions, Cyril Petit, journaliste, Eric Valmir, secrétaire général de l’information de Radio France.

Les enjeux

90 % des Français trouvent que le journalisme est un métier utile. C’est ce que révèle l’enquête réalisée pour les Assises par l’institut Viavoice, en partenariat avec France Télévisions, France Médias Monde, Le Journal du dimanche et Radio France. Cette étude dévoile chaque année les attentes des Français envers les journalistes, l’information et les médias. En 2022, elle aborde également l’avis des Français sur le traitement médiatique de la guerre en Ukraine et de la campagne présidentielle.

Ce qu’ils ont dit

Stewart Chau : « 64 % des Français estiment qu’on peut trouver des informations fiables en dehors des médias de référence. C’est un chiffre en baisse de trois points par rapport à octobre 2021. On peut imaginer que les Français comprennent de plus en plus qu’il faut payer pour accéder à une information de qualité car 38 % d’entre eux le pensent. C’est deux points de plus qu’en octobre 2021. »

« Nous pouvons interpréter les chiffres de plusieurs façons. On peut être optimiste en se disant que 47 % des Français ont confiance en la manière dont la politique est traitée par les médias ou être pessimiste car 19 % n’ont pas du tout confiance. »

« Le traitement médiatique de la guerre en Ukraine est perçu comme utile pour 82 % des Français et indispensable pour 78 % d’entre eux. Par contre, certains l’ont trouvé orienté. »

« La télévision apparaît comme le canal d’information principal des Français pour s’informer sur la campagne présidentielle. Les trois quarts d’entre eux l’ont regardée pour s’informer sur ce sujet. La radio (38 % des Français) et la presse écrite (37 %) arrivent en seconde place. »

Nabil Aouadi : « Le baromètre montre que les gens trouvent le journalisme utile pour se forger une opinion. Nous ne formons pas l’opinion mais personne ne sort vierge de la consultation d’une information. »

Cyril Petit : « La règle d’égalité du temps de parole à la télévision s’applique en fait à tous car les lecteurs nous reprochent de ne pas donner la parole à certains candidats. C’est aux journalistes d’expliquer que cette règle ne s’applique pas à la presse écrite. »

Eric Valmir : « Concernant l’Ukraine, on fait un effort considérable sur le terrain pour ne pas être pro-ukrainien. Quand on a découvert Boutcha, on n’a pas dit que c’était la Russie mais que ça l’était peut-être. Nous allons sur le terrain pour vérifier. On peut se sentir insulté par le terme « journalisme orienté » parce qu’on fournit des efforts pour rapporter des faits, surtout sur la guerre en Ukraine. » 

Nathalie Saint-Cricq : « Ce qui m’insupporte le plus, c’est le fantasme des journalistes politiques qui sont perçus comme amis avec les politiques.  Ce n’est pas le cas : nous ne sommes pas une petite caste de puissants. On ne fait jamais ce genre de reproches aux journalistes de sport ou culturels. On ne leur dit pas qu’ils mettent en avant leurs amis. » 

À retenir

Le journalisme est perçu comme un métier utile ; 84 % des Français considèrent par exemple qu’il est indispensable dans une société démocratique. Les Français s’inquiètent aussi de la concentration des médias. Plus de 8 sur 10 considèrent que ce phénomène porte atteinte au débat démocratique. Si le traitement éditorial de la guerre en Ukraine par les journalistes est jugé utile, les résultats ne sont pas les mêmes selon le vote au premier tour de l’élection présidentielle des répondants. Le traitement fait par les journalistes de la guerre en Ukraine est jugé suffisamment neutre et objectif par 80 % des électeurs d’Emmanuel Macron au premier tour mais par seulement 41 % des électeurs d’Eric Zemmour.

Marion Galard

[LE RÉSUMÉ] Sondages, drogue dure ou abstinence ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Sondages : drogue dure ou abstinence ? ».

Photo : Agathe Kupfer/EPJT

Animé par Nassira El Moaddem, journaliste indépendante, avec Frédéric Dabi, directeur général de l’Ifop, Françoix-Xavier Lefranc, rédacteur en chef de Ouest-France, et Philippe Morand, rédacteur en chef adjoint du service politique du Groupe TF1.

 

 

Les enjeux

Lors de la campagne pour l’élection présidentielle, le quotidien Ouest-France a choisi de ne pas utiliser de sondages d’intentions de vote, indicateurs très prisés. Plus que le fondement même de cette pratique, c’est leur usage qui doit être questionné.

Ce qu’ils ont dit

Frédéric Dabi : « Nous proposons des enquêtes appelés rolling, littéralement des sondages roulants, en continu. C’est moins instantané, spectaculaire et brutal que les enquêtes d’opinion classiques.  »

« L’absence des Outre-mer dans nos enquêtes d’intentions de vote pour l’élection présidentielle, faute de temps, ne doit pas masquer nos autres travaux réalisés sur ces territoires. Nous le ferons d’ailleurs dans le cadre des élections législatives. »

François-Xavier Lefranc : « Nous avons pris la décision de ne pas commander de sondages sur la présidentielle au moment où Éric Zemmour était placé en deuxième position des intentions de vote alors qu’il n’était pas encore candidat. Cela déstabilise la démocratie en invisibilisant les « petits candidats ». »

« Dans les sondages d’intentions de vote, les Guadeloupéennes et Guadeloupéens n’existent pas, ils sont considérés comme des sous-citoyens. Il en va de même pour les paysans et les personnes qui n’ont pas Internet. Notre boulot de journaliste, c’est d’aller voir ces gens et de les écouter. »

« L’utilisation des sondages par certains médias n’est pas sérieuse. On part d’un sondage réalisé auprès d’un échantillon de personnes à un moment donné et on le présente comme une réalité pour l’ensemble des Français. En tant que journalistes, nous n’avons pas le droit d’interpréter ces enquêtes comme cela. »

Philippe Morand : « Nous échangeons en permanence avec l’Ifop pour proposer des questions pertinentes aux enquêtés. Nous nous sommes engagés avec l’institut pour les élections régionales, présidentielle et législatives. Ces sondages nous coûtent plusieurs dizaines de milliers d’euros et engagent à la fois la responsabilité de l’Ifop et des rédactions de TF1 et LCI. »

« Nous ne travaillons pas qu’avec les sondages. Grâce à des formats comme « route nationale », diffusés lors de nos journaux télévisés, nous avons fait émerger des thématiques de campagne comme la ruralité ou le pouvoir d’achat. »

À retenir

Plus que l’outil sondage, c’est davantage son utilisation excessive par certaines rédactions qui a été évoquée. L’utilité et le sérieux des enquêtes réalisées sur le temps long ne sont pas remis en cause. La responsabilité de certains journalistes, qui ont tendance à mal les utiliser et les interpréter, doit être interrogée.

Léo Humbert (EPJT)

[INTERVIEW] Jean-Marie Charon : « Face aux jeunes qui arrêtent le métier, les rédactions sont dans le déni »

Photo : Clémentine Louise/EPJT

Jean-Marie Charon, sociologue des médias, est l’auteur avec Adénora Pigeolat de Hier, journalistes : ils ont quitté la profession, paru en 2021 aux éditions Entremises. Dans le cadre du baromètre social des Assises, il est intervenu pour expliquer la désertion de nombreux jeunes journalistes.

 

 

 

Vous avancez l’idée que les jeunes journalistes ont conscience des difficultés rencontrées pour s’insérer dans le milieu. Peut-on parler d’un désenchantement lorsqu’ils quittent le métier ?

Jean-Marie Charon.  Ils savent que ça va être difficile mais entre ce qu’on vous dit et ce que l’on vit, c’est très différent. L’expérience en rédaction est beaucoup plus destructrice que ce qu’ils avaient imaginé. Dans d’autres secteurs, notamment le numérique, ils affirment avoir été bien mieux accueillis et bien mieux payés. Ils ne sont pas forcément épanouis car ce n’est pas le métier qu’ils souhaitaient faire mais c’est plus sécurisant.

Les rédactions ont-elles conscience des difficultés que rencontrent les jeunes journalistes ?

JM. C.  Les rédactions sont dans le déni. Beaucoup de journalistes expliquent que eux aussi ont dû persévérer au début pour se faire une place et que c’est donc normal. Les rédactions estiment aussi parfois que les jeunes journalistes sont mal formés en école, même si ces derniers assurent au contraire recevoir une formation très complète. Et puis les contraintes économiques du secteur mettent aussi une pression sur les rédactions qui doivent parer au plus pressé.

Ce problème de décrochage n’est visible qu’en France ou aussi dans d’autres pays ?

JM. C. En Belgique, cette tendance est encore plus forte. Cela s’explique en grande partie par le fait qu’il n’y ait pas de concours pour entrer en école de journalisme. Beaucoup d’étudiants sortent diplômés et se heurtent au peu d’emplois qu’il y a dans le domaine. On remarque aussi qu’il y a encore moins de filles qui arrivent à devenir journalistes après leurs études qu’en France.

 

Recueilli par Clémentine Louise/EPJT

[LE RÉSUMÉ] Le journalisme politique en France vu par la presse étrangère

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Le journalisme politique en France vu par la presse étrangère »
Photo : Amandine Hivert/EPJT
Animé par Carolin Lohrenz, cheffe de rubrique France au Courrier International, avec Marc Bassets, correspondant pour El Pais, Ana Navarro Pedro, correspondante pour Visão et Nadia Pantel, correspondante pour Süddeutsche Zeitung.

 

Les enjeux

Quelques semaines après l’élection présidentielle française, trois journalistes espagnol, portugais et allemand reviennent sur les spécificités du journalisme politique français. Au coeur de la discussion, la proximité avec les politiques.

Ce qu’ils ont dit

Marc Bassets : « Le grand journal télevisé de 20 heures que tout le monde écoute n’existe plus. Les citoyens ont de multiples sources d’informations. Les médias traditionnels n’ont plus l’autorité qu’ils avaient auparavant. »

« A El Pais, nous autorisons la relecture mais interdisons la modification. Ce qui arrive très souvent en France, c’est d’envoyer une interview à un ministre qui la renvoie avec des modifications. Ce n’est plus une interview. »

Ana Navarro Pedro : « Il y a peut-être une plus grande profondeur dans les débat en France mais il y a aussi un manque de communication avec les français. La proximité avec les arcanes du pouvoir se traduit par une prise de distance avec les lecteurs. »

« La concentration des médias est problématique. Les lois françaises ne sont plus adaptés à cette concentration des médias et sont nuisibles à la démocratie parce qu’elles sont nuisibles à la liberté d’expression. »

« Aujourd’hui il y a de très bon journalistes politiques qui font des enquêtes, qui recoupent les informations, varient leurs sources mais on les trouve aux marges, dans des médias alternatifs. »

Nadia Pantel : « Au moment des gilets jaunes, ce qui m’a marqué c’est la difficulté pour les journalistes à parler de politique avec leurs concitoyens »

«On nous force de plus en plus à devenir auto-entrepreneur. Je trouve ça problématique. Quand j’ai commencé le journalisme il y a 10 ans, on ne savait pas quels étaient les articles les plus lus, lesquels faisaient partie du top 10 des articles du jour. »

À retenir

La proximité entre journalistes et politiques surprend la presse internationale. Selon les journalistes présents à cette table ronde, celle-ci renforce le phénomène de distanciation entre les journalistes et les publics. La concentration, qui n’est pas une spécificité française, a également été évoquée.

Amandine Hivert

[INTERVIEW] Marc Bassets, correspondant pour El Pais : «En Espagne, Anne Hidalgo nous intéressait beaucoup»

Photo : Léo Humbert/EPJT

Marc Bassets est correspondant en France pour le quotidien espagnol El Pais. Il traite principalement de sujets économiques, culturels et politiques, surtout en période de campagne électorale. Invité aux Assises du journalisme de Tours, le 11 mai, il livre sa vision de la campagne et du journalisme politique français.

Qu’avez-vous pensé du traitement médiatique de la campagne pour l’élection présidentielle française de 2022 ?

Marc Bassets. Je trouve que la presse de qualité a fait du très bon boulot, avec des analyses et des décryptages. Je n’ai pas de reproches à lui faire de façon générale. La campagne a mis du temps à se lancer dans les journaux à cause de la guerre en Ukraine. Et cela a été la même chose pour moi. J’avais prévu un planning sur trois mois pour mon journal mais il n’a finalement pas servi.

A quels sujets vous êtes-vous intéressés pour El Pais ?

M. B. Nous sommes deux correspondants pour le journal en France, un envoyé spécial et un photographe nous ont rejoints. J’ai évoqué les sondages, j’ai écrit des portraits de candidats et j’ai fait beaucoup de reportages dans les zones où il y avait eu un vote important de protestation ou d’abstention après le premier tour. Je me suis rendu dans l’Aisne, en Moselle ou dans les quartiers Nord de Marseille.

Avez-vous trouvé des particularités à cette campagne par rapport aux précédentes ? En 2012, c’était un duel classique entre la gauche et la droite et en 2017, l’élection d’Emmanuel Macron avait surpris beaucoup de monde.

M. B. Zemmour était très présent avant le début de la campagne, à la fin de l’année 2021. J’ai écrit pas mal de papiers sur lui, je l’ai suivi en campagne. Il a beaucoup attiré l’attention et a fini par se dégonfler. En Espagne, Anne Hidalgo nous intéressait beaucoup car elle a la double-nationalité et elle parle espagnol parfaitement. En tant que correspondant, je cherche toujours l’angle local. A l’approche de l’élection et pendant l’entre-deux-tours, je n’ai pas trouvé de nouveauté. On s’est retrouvé avec les deux candidats attendus et le vainqueur annoncé depuis cinq ans.

Quel regard portez-vous sur le journalisme politique français ?

M. B. Je suis un admirateur du bon journalisme politique français en général, à la télévision, dans les magazines, les grands journaux. J’aime beaucoup le style d’écriture. Il est très analytique, beaucoup plus reposé que le journalisme espagnol qui est plus électrique, réactif et porté sur les polémiques. Mais cela peut être un défaut. En Espagne, on tombe beaucoup dans le journalisme de commentaire, dans la petite phrase, plus que de faits.

Une partie de la population française trouve qu’il y a une grande proximité entre les journalistes politiques et le pouvoir. Est-ce quelque chose que l’on retrouve en Espagne ?

M. B. J’ai effectivement ce sentiment. En France, je constate aussi cette proximité. En revanche, la gestion du « off » et des sources anonymes me gêne beaucoup. Pour moi, cela sert à protéger une source, pas lorsqu’il y a une fuite d’un briefing à l’Élysée. Lorsque le lit dans un journal « dit-on à l’Élysée », oui mais qui ? Cela crée une atmosphère d’entre-soi. Je trouve cela nocif, même si ce n’est pas propre à la France. Autre point : la modification des interviews avant publication. On peut rectifier un mot à la relecture, mais pas une idée.

 

Recueilli par Léo Humbert

[LE RÉSUMÉ] Droits voisins : quelle reconnaissance du travail des auteurs et des journalistes ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Droits voisins : quelle reconnaissance du travail des auteurs et des journalistes ? ».

Photo : Clémentine Louise/EPJT

Animée par Amaury de Rochegonde, rédacteur en chef adjoint à Stratégies et chroniqueur médias à RFI, avec Pablo Aiquel, secrétaire général adjoint du SNJ-CGT, Jean-Marie Cavada, président de la société des droits voisins de la presse, Olivier Da Lage, responsable du dossier des droits d’auteurs au SNJ, Marie Hedin-Christophe, directrice générale du Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (Spiil) et Hervé Rony, directeur général de la Scam.

 

Les enjeux

Depuis le développement des médias sur internet, la question des droits voisins fait débat. Les médias reprochent à Google de toucher des revenus publicitaires par le biais de leurs contenus. L’enjeu de cette conférence est de faire le point sur les négociations autour de ces droits voisins et de se questionner sur le poids des Gafam dans la presse française.

Ce qu’ils ont dit

Jean-Marie Cavada : « Actuellement, ce que j’entends à l’intérieur des plateformes c’est : « Le temps que les patrons de presse et les journalistes se mettent d’accord, on a encore de beaux-jours devant nous. » Unissez-vous et essayez de régler vos rapports à l’intérieur de vos entreprises. N’offrez pas aux plateformes le spectacle d’une telle division. »

« La loi sur les droits voisins dit qu’il y a obligation pour les plateformes de négocier avec les médias. L’objectif est de rendre obligatoire le partage de la recette publicitaire. »

Marie Hédin-Christophe : « La loi qui concerne les droits voisins a été votée et la gestion collective n’a pas été rendue obligatoire. C’est une victoire pour Google. »

« La notion de répartition est essentielle. Si on opte pour une gestion collective, on peut décider de cette répartition. Sinon c’est Google qui va continuer de faire la loi. Il faut aussi défendre le fait que les coûts éditoriaux et les cartes de presse soient un critère de répartition. »

Pablo Aiquel : « La reconnaissance du travail c’est d’avoir accès à un cadre social. Il n’y pas de barème de rémunération minimum pour les piges. Je ne comprends pas qu’un syndicat parle de droits voisins quand il ne parle pas de salaires au sein de la branche. »

« Aujourd’hui, je dis au nom du SNJ-CGT que nous allons demander à ce que tous les correspondants locaux de presse soient inclus dans les accords de droits voisins. »

À retenir

Le coeur des négociations porte sur la gestion collective de la répartition. Les différents interlocuteurs affirment qu’il faut une coordination des différentes entreprises de presse.

Amandine Hivert

[LE RÉSUMÉ] Le journalisme politique s’enseigne t-il ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « L’Atelier école. Le journalisme politique s’enseigne t-il ? ».
Photo : Zoé Keunebroek/EPJT
Animé par Stéphanie Lebrun, directrice du CFJ Paris, avec Pascale Colisson, responsable pédagogique chargée de l’alternance et de la mission Egalité et lutte contre les discriminations à l’IPJ, avec Maria Santos Sainz, docteur en sciences de l’information et maître de conférences à l’Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA) et Pierre Savary, directeur de l’ESJ Lille.

Les enjeux

Le constat est clair : le journalisme politique ne fait plus rêver. Les écoles cherchent un moyen de se réinventer car si « la politique des petites phrases fait peur », le sujet politique passionne lui toujours les étudiants. Plus encore que la manière de traiter le journalisme politique, c’est la question du militantisme et du journalisme d’opinion qui interroge les élèves.

Ce qu’ils ont dit

Maria Santos Sainz : « A l’IJBA, on essaye de contrecarrer le manque d’appétit pour le journalisme politique. On fait tout pour introduire des nouvelles manières de faire, comme le journalisme politique de proximité. Les étudiants veulent parler de politique autrement, ils veulent être plus près du terrain. »

« Je me permets de citer Albert Camus qui nous disait que « Le goût de la vérité n’empêche pas de prendre parti ». »

Pierre Savary : « Les étudiants s’interrogent sur la question du militantisme, sur la politique mais aussi sur l’environnement. Beaucoup d’entre eux se demandent comment interroger des personnes dont les positions vont parfois à l’encontre de leurs convictions. »

Pascale Colisson : « Les étudiants voient encore le journalisme politique comme un journalisme de déjeuner, de corridor ou de couloir. En fin de compte, le journalisme politique n’est pas seulement une pratique de plateau télé et tous les journalistes peuvent traiter de politique dans leur domaine. Un spécialiste de l’agriculture peut s’emparer de la politique pour traiter ses sujets. »

Stéphanie Lebrun : « C’est ce que vous avez envie de faire avec ce métier qui compte. »

À retenir

C’est en privilégiant les nouveaux formats que l’on peut réussir à intéresser de nouveaux publics au journalisme politique. Le rapport au militantisme doit, lui aussi être repensé. Avoir des convictions et prendre parti ne doit pas empêcher d’avoir une méthodologie journalistique issue des faits. La conférence s’est terminée par une vague d’espoir donnée aux nombreux étudiants en journalisme présents dans la salle, la directrice du CFJ les invitant à innover dans ce qui est « le plus beau métier du monde ».

Zoé Keunebroek et Célio Fioretti (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Journalistes et politiques : l’importance d’une connaissance scientifique

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Journalistes et politiques : l’importance d’une connaissance scientifique partagée »

Photo : Marion Galard / EPJT

Animée par Benoît Tonson, chef de rubrique science de The Conversation, avec Michel Dubois, sociologue des sciences et techniques au CNRS, Aline Richard, rédactrice en chef du magazine Le Figaro Santé, Corinne Vanmerris, directrice adjointe et directrice des études de l’ESJ Lille et Jade Lindgaard, journaliste au pôle écologie de Mediapart.

 

 

Les enjeux

Les journalistes et les responsables politiques sont insuffisamment formés aux questions scientifiques. Pour répondre à ce besoin, des formations spécifiques se développent, comme le master 2 de l’ESJ. Comment les journalistes doivent-ils adapter la parole scientifique au grand public ? Réponse avec ces quatre interlocuteurs.

Ce qu’ils ont dit

Aline Richard : « Tout le monde peut être journaliste scientifique. Ça fait peur un peu, les personnes se disent que c’est difficile. Mais avec du travail, tout est possible. Une formation scientifique préalable n’est pas un prérequis. »

« Nous constatons qu’il y a un problème culturel : personne ne remet en cause les statistiques scientifiques car personne ne les comprend, y compris certains journalistes et politiques. Les sujets scientifiques devraient intéresser plus les politiques. »

« Il faut que tous les journalistes jouent le jeu, ils doivent se renseigner pour ne pas raconter n’importe quoi. Il ne faut pas se limiter à interviewer les mêmes experts. La précipitation pour interviewer Didier Raoult pendant la pandémie de Covid-19 a été terrible. »

Corinne Vanmerris : « Je ne sens pas une grande appétence chez les étudiants pour les sciences. Nous avons 15 places dans le master 2 de journalisme scientifique. Il y a seulement une cinquantaine de candidats dans cette filière. »

Michel Dubois : « Nous avons réalisé une enquête nationale sur les Français et la science. Nous avons constaté qu’environ 8 Français sur 10 font confiance aux scientifiques et c’est le cas depuis les années 1970. »

« Toutefois, nous avons aussi constaté qu’environ 60 % des Français considèrent aujourd’hui que la science apporte autant de bien que de mal. C’est un résultat assez nouveau. »

Jade Lindgaard : « Est-ce qu’une Assemblée où les élus auraient tous une thèse en science serait plus démocratique ? Pas forcément. Des députés ont déposé des amendements radicaux sur l’écologie et ils n’ont pas de formation scientifique. »

« C’est un progrès que les écoles de journalisme proposent des formations en sciences mais ce qui fait qu’un média produit une information juste et audacieuse, c’est son modèle économique. »

À retenir

Les journalistes ne peuvent pas être spécialisés sur tous les sujets mais ils doivent avoir suffisamment de connaissances scientifiques pour comprendre les scientifiques. Les hommes et femmes politiques ne peuvent pas être tous des experts non plus mais on constate parfois un manque d’intérêt pour certains sujets scientifiques.

Marion Galard

[LE RÉSUMÉ] Les États généraux de la formation des journalistes

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Les états généraux de la formation des journalistes ».

Des représentants de la Conférence des écoles de journalisme (CEJ) et des étudiants des écoles reconnues par la profession ont débattu des enjeux de la formation des journalistes. Photo : Célio Fioretti/EPJT

Animé par Anne Tezenas, déléguée générale de Conférence des écoles de journalisme (CEJ), avec Arnaud Schwartz, secrétaire général de la CEJ, Cem Taylan et Lilian Ripert (EPJT), Léa Bouvet (EJDG), Héléna Lébely (EJCAM).

 

Les enjeux

Des représentants de la Conférence des écoles de journalisme (CEJ) et des écoles de journalisme reconnues sont revenus sur les grands enjeux de la formation des jeunes journalistes. Il s’agit notamment de la diversité dans les écoles et les rédactions et des difficultés d’insertion des jeunes diplômés sur le marché du travail. Ces thématiques seront abordées lors des premiers États généraux de la formation des journalistes, prévus les 3 et 4 octobre 2022.

Ce qu’ils ont dit

Arnaud Schwartz : « Les objectifs de la CEJ et de ces États généraux sont de créer un dialogue entre les jeunes journalistes et les étudiants pour qu’ils partagent leur vision du métier. Ces discussions doivent aboutir à des propositions et des bonnes pratiques en matière de formation et d’emploi. »

« Nos étudiants nous font part de deux affirmations. Leur passion pour le métier de journaliste est aussi forte que celle de leurs prédécesseurs. Mais ils ils ne sont pas non plus prêts à tout sacrifier pour exercer cette profession. »

Anne Tezenas : « Nous avons lancé une enquête qui porte sur les quatre dernières cohortes qui sont sorties des quatorze écoles reconnues. Nous cherchons à savoir où ils en sont sur le plan professionnel et à quels problèmes ils sont confrontés. Une seconde enquête porte sur l’égalité des chances, la diversité et les pratiques des écoles pour aider ses étudiants à s’insérer. »

Héléna Lébely : « La question de la diversité dans les écoles est essentielle, il y a un problème systémique d’homogénéité. Plus on avance dans les cursus, moins il y a de diversité. Dans nos écoles, nous avons songé à mettre en place un référent chargé des discriminations et une charte. Nous avons fait des propositions d’éducation aux médias, de tutorat avec les collèges et d’actions pour élargir la communication des écoles. »

Cem Taylan : « Nous voulons travailler sur l’idée préconstruite de la pige, associée à la précarité. Nous souhaitons mettre en place un module commun d’initiation à la pige, un système de parrainage avec les anciens étudiants et une journée dédiée à la gestion des aspects administratifs de la pige. »

« Nous avons proposé la création d’une carte de presse étudiante. Les étudiants souffrent d’un manque de légitimité de la part des sources qu’ils questionnent et d’interdiction d’accès à certains événements, notamment les manifestations. Cet outil doit nous faire réfléchir à notre posture professionnelle. »

À retenir

Les représentants de la CEJ et des étudiants des écoles de journalisme s’accordent pour dialoguer ensemble sur les enjeux de diversité dans les rédactions et de traiter en profondeur les conditions de travail et de santé mentale. L’ensemble des problématiques évoquées par les étudiants et les écoles seront au cœur des États généraux planifiés les 3 et 4 octobre prochains.

Léo Humbert (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Comment faire de l’écologie un vrai sujet politique ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Comment faire de l’écologie un vrai sujet politique ? ».

Photo : Amandine Hivert/EPJT

Animé par Stéphane Frachet, correspondant en région pour Les Echos, avec Jade Lindgaard, journaliste à MediapartAnne-Sophie Novel, journaliste pour le média Vert, Cyrille Vanlerberghe, rédacteur en chef Sciences et Médecine du Figaro et Florent Rimbert, membre de l’Alliance pour la Presse d’information générale (APIG)

 

 

Les enjeux

L’écologie peine à être au devant de la scène médiatique. Pendant la dernière compagne présidentielle, les candidats ont été peu interrogés sur ces questions par les journalistes. Un constat : l’écologie est encore peu abordée comme un sujet politique par les médias.

Ce qu’ils ont dit

Anne-Sophie Novel : « Je me suis rendue compte qu’on était nombreux à traiter ces questions mais qu’on était considérés comme moins sérieux que les autres journalistes. »

« Ce fait scientifique est réellement devenu un fait social, on observe quotidiennement ces bouleversements. »

« Il y a d’un côté les travaux scientifiques et de l’autre la manière dont on s’en empare. »

Jade Lindgaard : « À Mediapart, l’écologie n’a pas été pensée au départ comme une rubrique mais comme un sujet. »

« Pour moi, le climat n’est pas une question scientifique mais politique. »

« Bien sûr, c’est important d’avoir un apport scientifique mais d’un point de vue journalistique, le champ de bataille n’est plus là. La question, c’est interroger l’inaction notamment celle des politiques. »

Cyrille Vanlerberghe : « Pour imposer mes sujets, je me suis toujours appuyé sur la science. Ça me donne de la force. »

« Sur ces questions, il faut savoir interroger les bonnes personnes sur les bons sujets. »

À retenir

Les articles au sujet de l’écologie sont de plus en plus nombreux dans les médias. Mais pour, certains journalistes, il faut encore que cette question soit traitée de manière transversale dans les rédactions car l’écologie impacte l’ensemble de la société. Pour Jade Lindgaard, il faut, en tant que journaliste, interroger l’inaction des politiques et des citoyens vis-à-vis de ces bouleversements.

Agathe Kupfer (EPJT)

[INTERVIEW] Lorraine de Foucher : « Il y a une désinformation autour du viol qui empêche de se confronter au vrai problème »

Photo : Fayard

Lorraine de Foucher, journaliste au Monde, a décidé de se consacrer au sujet des violences sexistes et sexuelles depuis quelques années. Dans le cadre des assises du journalisme à Tours ce mardi 10 mai, elle participait à un atelier sur les enquêtes dans ce domaine.

Lors de l’atelier consacré aux enquêtes sur les violences sexistes et sexuelles, un seul homme était présent sur les six intervenants. Dans le public, il y avait également beaucoup plus de femmes que d’hommes. Est-ce représentatif du problème des violences faites aux femmes ?

Lorraine de Foucher. Oui, clairement ! Au Monde, on a enquêté sur les personnes chargés de la question de l’égalité femme / homme dans les préfectures de France. Ce sont toutes des femmes ! Ca fait partie du processus d’invisibilisation des femmes : on fait comme si c’était un problème de femmes. C’est rare que les hommes enquêtent là-dessus, c’est inconfortable pour eux : ce n’est pas marrant de s’interroger sur sa condition de privilégié. On a encore beaucoup de progrès à faire sur ce point.

Vous avez évoqué cette frontière entre liberté d’expression et diffamation. Quand on enquête sur ce genre de sujet, est-ce qu’on se prépare toujours au risque d’être poursuivi au pénal ? 

L. F. C’est un sujet abrasif qui touche à la réputation, et la réputation, ça coûte cher. En une dizaine d’années de carrière, je n’ai eu de plaintes que lorsque j’enquêtais sur ce sujet.

Vous affirmez que le viol n’est pas une question de plaisir mais de domination, donc de pouvoir. Selon vous, est-ce qu’on peut dire que le viol est un acte politique ? 

L. F. Il y a une désinformation autour du viol qui empêche de se confronter au vrai problème. Tant qu’un sujet n’est pas politique, il n’est pas pris en compte. Le patriarcat est le plus vieux système de domination. Dans les situations de guerre, le viol est utilisé comme une arme de guerre. Il y a une entreprise de casse industrielle des femmes. La peur du viol touche toutes les femmes.

Marine Turchi disait que 99 % des affaires qui sortent sur les violences sexistes et sexuelles ne suscitent plus l’étonnement. Comment faire en tant que journaliste pour garder l’attention des lecteurs sur ces sujets ? 

L. F. On a tous peur de la saturation, mais on voit une véritable appétence des lecteurs pour comprendre ces actes. Je pense qu’on est très loin d’en avoir assez parlé.

Vous travaillez depuis quatre ans sur une chronique : « S’aimer comme on se quitte ». Est-ce une autre manière de dénoncer les violences sexistes ? 

L. F. Non, mais il y a une corrélation avec l’intime. On pense que l’intime n’a rien à voir avec le journalisme alors que tout le monde parle d’amour. On doit renforcer notre éducation amoureuse. On a l’impression que l’amour est personnel alors que c’est très social. On aime comme notre époque nous le permet, les normes sociales sont à l’œuvre dans l’intime.

Vous dites que c’est la société, de manière systémique, qui produit les individus qui vont infliger des violences sexistes et sexuelles, et qu’il faut essayer d’en comprendre les origines. Vous avez des pistes ? 

L. F. Oui, la domination masculine, le patriarcat, qui existent depuis bien longtemps. On a un rapport aux minorités, comme avec la nature, comme s’il fallait les domestiquer. Cela interroge les rapports de prédation présents chez l’homme.

 

Recueilli par Charles Bury/EPJT

[LE RÉSUMÉ] La remise des prix EMI 2022

La remise des prix EMI a eu lieu ce mardi 10 mai. Le président du jury Julien Pain a remis les prix aux lauréats qui ont remporté un chèque de 1 500 €.

Les lauréats du prix EMI 2022, accompagnés de Julien Pain, président du jury. Photo : Sarah Chevalier / EPJT

Catégorie associative, prix parrainé par le ministère de la Culture

Le gagnant est Maitrise ton web de Signe de sens.

Catégorie école, prix parrainé par la fondation TF1

Le gagnant est Médias quelle histoire, Interactivités par les CE2 de l’école Jean Jaurès à Toulouse.

Catégorie hors école, prix parrainé par France Médias Monde

Le gagnant est L’ombre de l’actu par Urban prod. Le journal permet d’informer sur ce qu’il se passe en détention tout en ayant une ouverture sur l’extérieur.

Catégorie média, prix parrainé par le CLEMI

Le gagnant est Ta voix de La Voix du Nord. « Cela fait trois ans que nous candidatons, nous sommes très heureuses », explique l’une des porteuses du projet.

Catégorie région Centre-Val-De-Loire, prix parrainé par la région

Le gagnant est Radio Gem37 par Radio Campus Tours.

Catégorie Rive sud de la méditerranée, prix parrainé par CFI-développement Médias

Madha-Yahduth, un média citoyen qui traite de l’actualité tunisienne.