Le département invité des assises 2019:Mayotte_Cred Laurent Théoret

Retrouvez l’essentiel de la conférence « Le département invité des assises 2019 : Mayotte »

Animé par Nassira Elmoaddem, journaliste, avec Kalathoumi Abdil-hadi, journaliste et cofondatrice de 101Mag, Abby Said Adinani, directrice du magazine May’People et correspondante locale du Bondy Blog, Chamsudine Ali, journaliste Mayotte la première, Pierre Bellusci, journaliste reporter d’images et rédacteur en chef de Kwezi TV, Laurent Canavate, co-fondateur et directeur de Somapresse.

LES ENJEUX

Après la Corse l’an passé, les Assises accueillent le dernier né des départements français. Une occasion de mieux connaitre ce territoire, porte d’entrée de l’Europe au cœur de l’Océan Indien et de l’archipel des Comores. Mais comment parle-t-on des outre-mer, de Mayotte en particulier? Il y a parfois un fort décalages entre certains faits et le début de leur couverture en métropole, avec par exemple la mobilisation sociale de 2016. Aussi, quel est le paysage médiatique mahorais?

CE QU’ILS ONT DIT

Kalathoumi Abdil-hadi : « Nous nous sommes demandés ce qu’on voulait proposer aux mahorais. Notre devise est « un autre regard sur Mayotte ». En terme de quotidien il y en avait déjà beaucoup et donc on s’est dit que les gens n’avaient pas besoin de quotidien. Mais qu’ils avaient besoin qu’on prenne du recul. Par exemple, on avait travaillé à froidsur les coulisses de l’élection président conseil départemental ».

«On y a longuement réfléchi à la forme de 101Mag. Imprimer coute très cher. On a donc choisi internet. Autre question que nous nous sommes posés : fallait-il de la publicité publicité ou non ? Parce que nous voulons garder une totale indépendance. »

« Pour ce qui est de l’investigation. Il y a une sorte d’omerta. Personne ne veut parler, personne ne veut rien dire.

Abby Said Adinani : « Le turnover dans les rédactions mahoraises n’est pas seulement une question de langues mais aussi une question de besoin. On recherche deseperement des journalistes. En métropole il y en a trop, les jeunes sortis d’écoles ne trouvent pas de travail et sont obligés de ce reconvertir. Le problème à Mayotte c’est que c’est l’inverse, le journalisme devient un job alimentaire. De jeunes journalistes viennent parce que ils ont besoin de remplir leurs frigos. »

« Les médias mahorais ont compris l’utilité des réseaux sociaux pour toucher de nouveaux publics. Initiatives de manière encore personnelle. On commence à les intégrer mais pas tant que ça finalement. »

Chamsudine Ali : « Notre ligne éditoriale historique est de « faire remonter la voix de Mayotte ». La radio nous correspond beaucoup, car nous sommes un pays de culture orale: les exigences au niveau du langage sont moins strictes que la télévision. Nous diffusons en français, en mahorais et aussi en malgache. Il y a une volonté de s’ouvrir sur la région. »

« Il y a de la place pour d’autres chaines. Les mahorais sont plus exigeants et  c’est tant mieux. »

« Mayotte a un territoire qui est jeune au niveau du traitement journalistique de l’information. Nous devons pouvoir faire notre métier sans pression, enfin amortir la pression, pour pouvoir informer comme tout bon journaliste. »

Pierre Bellusci : «Notre chaine (Kwezi TV) est née en 2011 car il y avait un vrai besoin de pluralité. Au niveau de la programmation, nous avons quatre piliers : l’information (matinale, journaux télé) ; sport ; divertissement ; culture et tradition ( le débat fonctionne très très bien à Mayotte.). Six journalistes dont parti intégrante de la rédaction, avec Kwezi FM inclus. »

« Nous avons dix fois moins de budget que de Mayotte la première. »

Laurent Canavate : « Il n’y a pas de formations de journalisme à Mayotte, donc ceux qui reviennent de Métropole trouvent du travail directement. Première a absorbé les journalistes qui arrivaient à ce moment là. Le problème est qu’il n’y a pas assez de journalistes locaux. Quand un journaliste de métropole arrive, il est difficile d’interviewer quelqu’un qui ne parle que mahorais ou malgache. Après il y a toujours des journalistes qui parlent la langue. Ont peut aussi trouver à la dernière minute un interprète. »

« Avec Somapresse on avait pas accès aux aides à la presse donc il a fallu faire tenir un journal. On a regardé ce qu’il se faisait ailleurs. Nous publions donc des journaux mais aussi des travaux d’édition, des numéros spéciaux annuels, des annuaires administratifs, des cartes et des plans,etc… Nous avons de la publicité oui, parfois des partenaires publics. Nous faisons aussi de événementiel, avec les trophées sportifs de l’année ou les trophées mahorais de l’entreprise. L’objectif est de valoriser les acteurs du territoire. » 

A RETENIR

La question du manque de moyen est de la formation des journalistes a été abordée longuement. (il n’y a pas d’école de journalisme à Mayotte). Le lien entre journalistes mahorais et les rédactions nationales a été abordé en fin de conférence. Pierre Bellusci expliquait que même Réunion Première envoyait ses journalistes pour traiter un événement, comme « si il y avait un manque de confiance sur les journalistes locaux ». Abby rappelait qu’il n’y avait pas eu une bonne couverture lors de la grève générale de 2011, tournant de l’histoire récente mahoraise.  Mais il y a  un consensus à la tribune pour dire qu’il y avait une légère amélioration du traitement ces derniers temps.

Ariel GUEZ