Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué, grands reporters au Monde publient la Communauté une immersion à Trappes. Photo : Astrid di Crollalanza

Grands reporters au Monde, Ariane Chemin et Raphaëlle Bacqué publient La Communauté, une immersion dans la ville de Trappes. Secrets d’une écriture à quatre mains.

C’est le troisième livre que vous signez ensemble. Pourquoi choisir d’écrire en binôme ?

Les livres que nous écrivons à quatre mains sont des enquêtes très journalistiques. Ceux que l’on écrit seules sont des récits basés sur une enquête mais avec un ton et des sujets plus personnels. Celui-ci réclamait du temps, de l’énergie. Confronter nos points de vue sur une enquête longue et délicate est indéniablement un avantage.

Êtes-vous amies avant d’être collègues de travail ?

Notre amitié est née du journalisme. Nous étions voisines de bureau pendant la présidentielle de 2002, l’une pour suivre Chirac, l’autre Jospin. Nous avons toujours la même passion pour ce métier qui est un mode de vie, une curiosité constante, presque une façon d’être !

On vous dit inséparables, est-ce autant le cas pour le terrain que pour l’écriture ?

Nous discutons beaucoup et constamment de l’avancée de notre enquête. Nous rencontrons certains interlocuteurs à deux ou séparément mais en retranscrivant l’intégralité de nos entretiens de façon à avoir chacune le même niveau de connaissance. Google docs a changé notre vie (jusqu’à répondre par ce moyen à cette interview, NDLR) ! Nous pouvons ainsi écrire à deux, travailler en même temps sur le même texte, nous réécrire mutuellement.

Est-ce une pression supplémentaire pour les interviewés d’être deux ?

Espérons que nos interlocuteurs ne se sentent pas sous pression car on ne parle jamais vraiment librement et avec finesse lorsque l’on se sent traqué. Enquêter à deux est aussi une sécurité lorsque l’on se heurte à des tabous, des puissants, ou qu’il faut répondre à des attaques. Cela a été le cas pour nos enquêtes sur la campagne de Ségolène Royal, la chute de Dominique Strauss-Kahn et aujourd’hui pour Trappes.

Et pourquoi ne pas écrire une fiction un jour ?

On ne confond pas littérature et journalisme. Il faut beaucoup d’imagination pour écrire un roman mais la réalité est parfois plus inventive que la fiction. Il y a, posés à nos pieds , des tas d’histoires et de scénarios inouïs qu’il suffit de transformer en récits enquêtés.

 

Propos recueillis par Emma Gouaille