[LE RÉSUMÉ] Les prix des assises 2023

Les primés de la seizième édition des prix des Assises du journalisme accompagnés de Patrick Cohen, de Raphael Garrigos et Isabelle Roberts, présidents du jury. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

La remise des prix de Assises 2023 était présidée cette année par les journalistes Des Jours Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos.
Le prix du livre « recherche » sur le journalisme, doté par la métropole tourangelle, revient au sociologue des médias à l’Institut français de presse, Rémy Rieffel, pour son ouvrage L’Emprise médiatique sur le débat d’idées. Trente années de vie intellectuelles 1989-2019 (PUF).

Le prix « Enquête et reportage » a été attribué Franck Depretz pour son travail sur le groupe Ebra intitulé Dans l’empire médiatique du Crédit Mutuel. Le jury, composé d’étudiantes et d’étudiants des 14 écoles de journalisme reconnues, a tenu a précisé que son choix était « politique » et entendait récompenser une démarche journalistique en accord avec leurs valeurs.

Alice Géraud est la lauréate du prix du livre du journalisme pour Sambre, Radioscopie d’un fait-divers. Son enquête sur les victimes d’un délinquant sexuel qui a sévi dans l’Est de la France, donne la parole aux victimes.

Le grand prix du journalisme Michèle Léridon a été remis à la SDJ du JDD et de Paris Match pour leur engagement contre les pratiques despotiques de leur nouveau propriétaire, Vincent Bolloré. A cause des pressions qu’ils subissent, les récipiendaires n’étaient pas présents à la cérémonie. Ils étaient représenté par Patrick Cohen qui a lui aussi pris position contre l’homme d’affaires breton quand il était en poste à Europe 1.

Rédaction web/EPJT

Journalistes et citoyens, un banquet aux avant-goûts de réconciliation

Le Bateau ivre de Tours a accueilli le banquet journaliste-citoyen de cette 16e édition des Assises. Photo : Jean Tramier/Assises du journalisme

Le Bateau ivre s’est transformé en restaurant le temps d’une soirée originale, mercredi. Au banquet des Assises du journalisme de Tours, 100 convives, 50 journalistes et 50 citoyens, se sont rencontrés pour échanger sur l’info, à toutes les sauces. Et essayer d’y retrouver goût.

’embarquement à 19h30 était ambitieux. Encore plus avec des journalistes dont le défaut est de trop parler. Pourtant, tout le monde était à l’heure mercredi soir, au Bateau ivre, à Tours. La salle de spectacle a été transformée pour accueillir le deuxième banquet Journalisme et citoyenneté. Vingt-cinq tables ont été dressées pour la soirée avec, à chacune d’elles, deux professionnels de l’information, et deux « citoyens ». Les convives ont été choisis dans des associations locales, féministes, écologistes, et tous ont un rapport à l’information réfléchi. Objectif de la soirée ? Déguster un (bon) repas traiteur et discuter du goût de l’info.

Avant le début du service, Thierry Bouvet, président du centre associatif et artistique, monte sur scène, prend le micro, et déclame un discours à mi-chemin entre manifeste et poésie. « Vous voilà à vos assises, dans notre bateau. Ne soyons pas des galériens de l’info mais des volontaires de l’aventure du donné à voir, à raconter, à lire et à écouter. Veuillez ne pas m’en vouloir de tenter de jouer avec les mots. » Comme un sentiment de gêne d’être face à un parterre de professionnels, dont le métier est de manier les mots. D’ailleurs, tout au long de la soirée, les citoyens auront du mal à s’imposer et à prendre la parole.

L’académicien retardataire 

Un seul retardataire : Erik Orsenna. Il achevait, quelques minutes plus tôt, sa carte blanche à Mame où se tient pendant une semaine la seizième édition des Assises. Cambré, essayant de se cacher entre ses épaules, son entrée dans la salle cherche à être discrète. Jérôme Bouvier, président de Journalisme et citoyenneté, l’association organisatrice, le dévoile. L’académicien est applaudi.

Les entrées arrivent. Sur certaines tables, on trinque. Pour ouvrir l’appétit, spaghetti de courgettes accompagné de sa question : qu’est-ce qui vous donne goût à l’info ? Sur la table 7, pour Gaëlle, citoyenne, l’actualité nourrit sa curiosité, ses intérêts personnels, et lui permet de comprendre le monde dans lequel elle vit. Elle était infirmière en Ehpad. Son refus de se faire vacciner lui a coûté son poste en décembre 2020. Ça attise la curiosité de Catherine Boullay, journaliste à L’Opinion.

La conversation embraye naturellement sur le complotisme. Gaëlle a très mal vécu le fait qu’on lui colle cette étiquette : « J’étais informée, la santé c’est mon métier. Je discutais avec les médecins, et j’ai refusé en conscience. » Elle est maintenant en reconversion pour devenir assistante de direction. Elle avouera plus tard être aussi gilet jaune.

 “Je me permet de vous interrompre”

À l’autre bout de la salle, les citoyens de la table 23 parlent de leur goût pour le long format. Un podcast de plus d’une heure ne leur fait pas peur. Au contraire, ils aiment prendre le temps de développer un sujet sur le fond. Mais les vingt minutes de l’entrée n’auront pas permis de finir la conversation. Les assiettes sont vides. C’est le jeu des chaises musicales, on prend sa serviette sur le bras, son verre d’eau dans une main, le verre de vin dans l’autre et on se dirige vers une autre table.

Vient le plat de résistance : une escalope de poulet aux épinards pour accompagner le dégoût de l’info. Cette fois-ci, on n’hésite pas à être critique et pessimiste. « Qu’est-ce qui vous hérisse les poils dans l’info ? » interroge Lucile Berland, pigiste indépendante et médiatrice de la soirée.

Sur l’une des tables, le directeur de la rédaction de La Nouvelle République, Luc Bourianne, prend place face à Benoît Bruère de France 3. « Je me permets de te tutoyer« , lance l’un d’eux à Gaëlle, l’ex-infirmière, qui ne voit pas de problème dans cette proximité.

Sauf quand la conversation devient technique et pas inclusive. « Je me permets de vous interrompre« , lance-t-elle, un peu dépassée. De retour dans la conversation, elle lâche : « Je ne fais pas confiance aux lignes éditoriales.« 

 “ Les marronniers, on n’en peut plus ”

Sur la table 23, c’est davantage la diversité des rédactions qui est remise en cause. Deux citoyens interpellent une étudiante en journalisme sur les profils de sa promotion et leurs origines sociales. Un paramètre qui se ressent dans le choix des sujets. Du coq à l’âne, les JT laissent un goût amer chez beaucoup. « Les marronniers, on n’en peut plus« , avoue Eric, membre d’un collectif d’artistes de rue.

Au dessert, les citoyens changent encore de place. Sucré rime avec solutions. Mais les citoyens ont quand même l’impression de ne pas être considérés. Zénaïde est membre de Touraine Women. Elle a pu présenter le concours qu’elle organise : récompenser les femmes cheffes d’entreprise de Tours.

La solution envisagée ici : davantage de jeunes dans les rédactions. Un sujet qui passionne Cécile Prieur, directrice de la rédaction de L’Obs. Autre proposition : l’éducation aux médias et à l’information. Les citoyens sont conscients de l’enjeu de bien s’informer, tout comme les journalistes, qui manquent parfois de pédagogie.

L’initiative a le mérite d’avoir mis le dialogue au cœur (coulant caramel) de la soirée. Au micro, une dame suggère que l’événement soit reproduit dans toutes les villes de France. Histoire de partager la recette.

Jane COVILLE et Maël PREVOST

[INTERVIEW] Isabelle Roberts & Raphaël Garrigos : « Se comporter en bons artisans du journalisme »

Isabelle Roberts et Raphaël Garrigos sont présents aux Assises du journalisme 2023. Le duo qui a créé « Les Jours », en 2015, est cette année président du jury. Nous les avons interrogé avant la remise des prix sur les spécificités de leur média en ligne, ainsi que sur les grandes réflexions qui ont court dans le métier actuellement.

https://youtu.be/GtMVighsczY
Réalisé par Zacharie Gaborit/EPJT.

[INTERVIEW] Amara Makhoul (France 24) : « Il existe une énorme confusion des termes utilisés par les professionnels »

Amara Makhoul, rédactrice en chef du site InfoMigrants à France24, est présente aux Assises du journalisme de Tours. Elle anime une table ronde intitulée Exil, migration et journalisme. Elle pointe du doigt l’amalgame commis par des journalistes dans l’usage de certains termes. Selon elle, l’emploi de l’adjectif  « illégale » pour qualifier la migration est impropre. Il est préférable d’utiliser le mot « irrégulière ». 

Réalisé par Lina Kamoun/EPJT.

[rencontre] La ruralité, zone blanche de l’éducation aux médias

Isabelle Bordes, hier, lors de la conférence « Résidences de journalistes, partage d’expériences ». Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Isolées géographiquement et peu représentées dans l’actualité, les zones rurales peinent d’autant plus à avoir accès à l’éducation aux médias.

« La ruralité, c’est un quartier prioritaire. » Elodie Cerqueira, journaliste et présidente du Club de la presse Centre-Val de Loire, n’y va pas par quatre chemins pour parler de l’éducation aux médias dans les campagnes. « La ruralité, aujourd’hui, est une vraie cible de l’EMI. Les lycées au milieu des champs, où il n’y a rien autour, c’est joli mais ça veut dire que pour la moindre chose il faut affréter un bus. Ce sont des coûts en plus », ajoute-t-elle.

« Des zones très enclavées »

Cela ne veut pas dire qu’il est impossible de faire de l’éducation aux médias en zone rurale. Mais souvent, ces initiatives tiennent à la détermination personnelle de quelques individus. Karen Prévost-Sorbe, référente EMI pour l’académie Orléans-Tours, confirme : « Les médias sont principalement localisés dans des petites villes ou en métropole. Mais, il y a aussi des collèges et des écoles dans des zones très enclavées, où il est compliqué de faire venir des journalistes. »

La coordinatrice Clemi prend l’exemple de ce petit collège de 95 élèves, « au fin fond de l’Indre », à Ecueillé. « On a une classe média, avec une vraie web radio. Un ancien directeur de France Bleu est venu les encadrer et leur offrir cette chance. » La classe s’est d’ailleurs déplacée aux Assises du journalisme à Tours, « à plus de deux heures de bus. »

Isabelle Bordes fait le même constat. La journaliste, qui a travaillé pendant trente ans à Ouest-France a décidé il y a un an et demi de quitter son poste et de se lancer dans l’éducation aux médias. Depuis septembre 2022, elle effectue une résidence, une semaine par mois, dans un village de 2000 habitants dans le Calvados.

Un café des médias

Quand elle arrive dans le village, elle ne trouve aucun interlocuteur : « Il y a très peu de structures et il est très difficile d’aller vers les gens », raconte-t-elle. En plus de cela, « la difficulté, c‘est que l’EMI, c’est une notion qui est étrangère au grand public et ce sont des enjeux qui ne sont pas dans l’ère du temps dans ces territoires-là », poursuit la journaliste, pas habituée à ce genre de public.

Elle a finalement joué sur l’effet village. Chaque mercredi matin, jour de marché, elle organise « le café des médias », et s’installe à une table avec des journaux « pour se mettre à disposition des habitants, faire du lien et montrer que les journalistes sont des gens comme les autres ». Ce qu’essaient de faire aussi le collectif la Friche ou encore l’annuaire Vu des quartiers, qui visent eux à recréer un lien de confiance entre médias et habitants des quartiers prioritaires. Que ce soit dans les zones rurales ou les banlieues, le même problème d’accessibilité à l’EMI persiste.

 

 Fanny Uski-Billieux (EPJT)

[RÉSUMÉ] ChatGPT, ami ou ennemi des journalistes ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « ChatGPT, ami ou ennemi des journalistes ? »

Asma Mhalla, enseignante, spécialiste des enjeux géopolitiques du numérique, Benoit Raphaël, journaliste spécialisé dans l’intelligence artificielle et l’industrie des médias, fondateur de FLINT. Xavier Eutrope, journaliste à La Revue des médias de l’INA. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Asma Mhalla, enseignante, spécialiste des enjeux géopolitiques du numérique, Benoit Raphaël, journaliste spécialisé dans l’intelligence artificielle et l’industrie des médias et fondateur de FLINT. Animé par Xavier Eutrope, journaliste à La Revue des médias de l’INA

 

Les enjeux

Au coeur des débats et des préoccupations ces derniers mois, l’émergence de l’intelligence artificielle ChatGPT interroge sur le futur du journalisme. Capable de rédiger un article sur quasiment tous les sujets, il pourrait devenir un outil incontournable des rédactions. Une situation qui inquiète les journalistes qui craignent pour leur emploi.

Ce qu’ils ont dit

 Asma Mhalla. « La révolution de ChatGPT n’est pas technologique mais plutôt une révolution d’usage. »

« La révolution de l’IA que l’on fait miroiter comme une perspective à craindre est un fantasme. »

« La technologie est déjà partout mais elle n’a pas fait s’effondrer la société. Mais elle engendre des mutations »

« Ces technologies sont duales. Si elles sont civiles, elles sont aussi policières et militaires. »

« La technique n’est pas la technologie. La technologie n’est jamais idéologiquement neutre. »

 

Benoit Raphaël. « ChatGPT n’est pas ton ami ni ton ennemi. Ça n’est pas une personne. C’est un outil qui interagit avec nous. »

« Si on a peur d’être remplacés par des robots, c’est peut-être parce qu’on vit comme des robots »

« Toute tâche répétitive peut être remplacée mais on ne doit pas perdre de vue l’objectif du journalisme : produire une information nouvelle et de qualité. »

« On sait qu’aujourd’hui l’avenir de la presse est de moins produire mais d’avoir plus de qualité »

À retenir

ChatGPT n’est pas encore suffisamment performant pour être capable de remplacer un ou une journaliste. Cette intelligence artificielle pourrait en revanche être utile pour des tâches répétitives, permettant ainsi de libérer du temps pour les journalistes.

Il ne s’agit pas d’une révolution technologique mais plutôt une révolution d’usage. Les citoyens se sont largement appropriés cette nouvelle vague d’outils ce qui pose la question des mutations de nos sociétés engendrées par ces technologies.

Dorian Gallais (EPJT)

 

 

[RÉSUMÉ] Lutter contre les bulles informationnelles : comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Lutter contre les bulles informationnelles : Comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ?  »

 Xavier EUTROPE , Journaliste à la revue des médias de l’INA,  Mathilde SALIOU, journaliste de Next INpact et Cyrille FRANK, directeur de la formation et de la transformation numérique de CosaVostra Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Animé par Xavier EUTROPE , journaliste à la revue des médias de l’INA
Avec Mathilde SALIOU, journaliste de Next INpact et Cyrille FRANK, directeur de la formation et de la transformation numérique de CosaVostra

Les enjeux

A l’heure des réseaux sociaux, le public et les journalistes s’interrogent sur les enjeux du fonctionnement opaque des algorithmes qui entraînent des bulles informationnels. Le débat « Lutter contre les bulles informationnelles : Comment éviter que les algorithmes imposent un menu unique ? » tente de répondre à ces questions.

Ce qu’ils ont dit

Mathilde SALIOU : « À chaque fois qu’on like, qu’on tweete… on alimente la machine à algorithmes. »

« L’une des manières de faire rester les publics sur une plateforme, c’est de leur montrer des contenus avec lesquels ils ne sont pas d’accord. »

« Les chaînes de télévision extraient les moments de clash des émissions pour les poster sur les réseaux sociaux. C’est un problème, il faut que les journalistes comprennent ces effets. »

« Il ne faut pas que les réseaux sociaux nous laissent croire que leurs technologies sont dans les nuages mais qu’au contraire, elles ont un réalité, une existence voulue. »

Cyrille FRANK : ​« Les émotions créent de l’attention, de l’engagement. […] Les émotions négatives en particulier. »

« Aujourd’hui les contenus particulièrement relayés sur les réseaux sociaux sont des contenus télévisuels. »

« Derrière la question de la responsabilité, il y a la question de la régulation des médias et des réseaux sociaux. »

« Ce que les gens apprécie aujourd’hui sur Mastodon, c’est ce qu’ils aimaient sur Twitter au début. Ils étaient entre eux […] une impression d’entre soi. »

« L’un des rôles de l’EMI, est aussi d’expliquer aux utilisateurs comment fonctionne notre cerveau et nos biais cognitifs face aux contenus des réseaux sociaux. »

À retenir

L’opacité des algorithmes qui régissent les réseaux sociaux questionne et pose plusieurs questions. D’abord, la responsabilité des propriétaires des réseaux mais également celle des médias qui les alimentent par des contenus polarisant. Ensuite, un travail de pédagogie est à faire auprès des utilisateurs sur comment fonctionne notre cerveau et nos biais cognitifs face à ces algorithmes. Enfin, les intervenants au débat ont également évoqué les outils législatifs que les pouvoirs publics pourraient mettre en place pour réguler les algorithmes responsables des bulles informationnelles.

Thomas LEMOULT-EMMLER (EPJT)

 

 

[INTERVIEW] Pascal Guénée : Des états généraux pour « réfléchir à l’avenir de la formation et à l’emploi des jeunes journalistes »

Les états généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes ont eu lieux en octobre dernier. Pascal Guénée, président de la Conférence des écoles de journalisme (CEJ) revient sur cette réunion, inédite. C’est la première fois que étudiants, journalistes, employeurs, représentants syndicaux se retrouvaient autour de la table pour évoquer l’avenir de la profession. Il répond aux questions de Maël Prévost.

Réalisé par Maël Prévost/EPJT.

[RÉSUMÉ] Storykillers : lutter contre les entreprises de la désinformation

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Storykillers : lutter contre les entreprises de la désinformation »

Laurent Richard et Cécile Andrzejewski évoquent leur enquête Story Killers, menée en collaboration avec une centaine de journalistes à travers le monde, sur l’industrie de la désinformation en Inde, à Israël, à Malte, au Mexique… Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Laurent RICHARD, fondateur de Forbidden Stories et Cécile ANDRZEJEWSKI, journaliste de Fordbidden Stories.

Animé par Nassira EL MOADDEM, journaliste indépendante. 

 

 

Les enjeux

« Ils ont tué le messager, ils ne tueront pas le message. » Tel est le maître-mot de Forbidden Stories, le réseau de journalistes monté en 2017 afin de poursuivre les travaux de journalistes assassinés ou emprisonnés à travers le monde. Son fondateur, Laurent Richard, et Cécile Andrzejeweski, journaliste de Fordbidden Stories, aspirent à penser la profession autrement, à l’échelle globale. Leur démarche : le journalisme collaboratif.

Ce qu’ils ont dit

Laurent Richard (fondateur de Forbidden Stories) : « L’importance est de travailler de manière collaborative et solidaire, pour poser les questions que les journalistes de nombreux pays ne peuvent plus poser. »

« La collaboration apporte de la protection. Ça ne fait aucun sens de tuer un journaliste s’il y en a cinquante autres derrière, prêts à prendre la relève. La collaboration permet de générer du changement à l’échelle globale. »

« Il n’y a pas beaucoup d’écoles de journalisme dans le monde qui apprennent le journalisme collaboratif. C’est plutôt la culture du loup solitaire. Tous les sujets ne se prêtent pas à la collaboration. Mais c’est important de changer l’état d’esprit. »

Cécile Andrzejewski (journaliste de Fordbidden Stories)  : ​« Au moment de l’apparition de Story Killers, l’enquête qu’on a menée, des chiffres sont sortis montrant que les femmes journalistes étaient davantage victimes. »

« La question de la mise en danger se pose au fil de l’enquête. Plus on avance, plus on se rend compte que les gens en face sont puissants et dangereux. »

« C’est un peu rare, pour un journaliste, d’avancer à plusieurs et de mettre ses sources en commun. Mais il y a une espèce d’émulation qui est magique à vivre. »

 

 

 

À retenir

A travers le récit de Story Killers, l’enquête de Forbidden Stories sur les industries de la désinformation à travers le monde, Laurent Richard et Cécile Andrzejewski mettent l’accent sur la collaboration dans l’investigation. Ils regrettent une vision parfois trop solitaire du journalisme et appellent à la formation de consortiums. Ces réseaux permettraient d’offrir à l’opinion publique des informations que « certains ont voulu cacher ». Un combat pour le journalisme et l’intérêt général.

La volonté de Forbidden Stories est ainsi de prolonger le travail d’enquête de journalistes assassinés ou actuellement derrière les barreaux. Si les revenus de l’organisation ne lui permet pas de mettre en oeuvre ce travail pour l’ensemble des journalistes victimes dans le monde, sa volonté est d’agir à l’échelle globale. Et ce, parce que la désinformation est un problème lui-même à l’échelle globale, qui tue nos démocraties. Pour ce faire, le réseau recherche avant tout des journalistes de terrain. Car il ressort de cette conférence qu’une investigation de qualité combine terrain, y compris dangereux, et collaboration.

Élias INSA (EPJT)

 

 

Exil, migrations et journalisme

Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Sarah FRERES, journaliste à Imagine Demain le monde, Mariam THIAM, journaliste à Africa Check (en visioconférence depuis le Sénégal), Ali MAHFOUD, Journaliste libyen
Eleonora CAMILLI, journaliste à Redattore Sociale. Animé par Amara MAKHOUL, rédactrice en Chef à France 24

 

Marianna Thiam raconte sa visite dans un centre de migrants au Niger. Elle y a rencontré un migrant camerounais, traumatisé par son voyage, qui a eu ces mots qui l’ont marquée : « Pendant le voyage, on a « plus de frère, plus de sœur, plus d’amis ».

Ali Mahfoud raconte, lui, son parcours de journaliste en Libye à demandeur d’asile en France.

Eleonora Camilli développe son travail journalistique sur la migration. Elle suit depuis 2015 la question de la migration en Europe notamment en Grèce, dans les Balkans, à la frontière franco-italienne. Elle étudie aussi la politique migratoire européenne qui cherche à tenir les migrants loin de ses frontières. Elle s’est également rendue aux frontières de l’Ukraine pour voir, avec la guerre, comment était gérée cette migration-là, et la comparer aux autres. Elle relève que, pour le cas de l’Ukraine, le choix d’aider les migrants est politique et que les Ukrainiens sont mieux traités que d’autres dans la même situation. Elle note par exemple que rien n’a changé depuis pour ceux de l’ile de Lampedusa par exemple : « On a créé un système où les réfugiés ne sont pas les mêmes, où les droits ne sont pas les mêmes ».

Sarah Frère a travaillé sur la question de la migration « légale » en Belgique (étudiants, travailleurs) et notamment sur la question des procédures. Ces dernières sont externalisées ce qui donne un service public de l’immigration inaccessible. Cette situation se voit sans réponse politique concrète.

Amara Makhoul, de par son travail pour Infomigrants, rappelle que les migrants sont une audience particulière. Elle rappelle aussi l’importance du vocabulaire qui, dans son cas, participe de la confiance dans le média.

Première piste de réflexion : l’importance du vocabulaire pour la couverture du sujet.

Marianna Thiam distingue différents enjeux. Les termes utilisés par les gouvernements répondent souvent à des enjeux politiques. Donc les États retiennent des définitions qui sont en accord et facilitent leurs propres politiques migratoires. C’est pour cela que les pays ne sont pas d’accord sur les définitions. Ensuite, les termes utilisés par les journalistes se font les véhicules de certains stéréotypes. Elle cite comme exemple le terme migrant, qui connote « l’Africain qui vient en Europe », qu’elle oppose à « l’expatrié européen qui va travailler aux États-Unis ». Une personne qui utilise ces termes peut mal les utiliser, de manière active à des fins de désinformation ou de manière passive comme conséquences de préjugés. Elle rappelle que le journaliste est influencé par sa communauté et son milieu d’origine et qu’il se doit de faire attention à cette question du vocabulaire.

Sarah Frère raconte qu’il existe en Belgique des recommandations terminologiques faites par le Conseil de déontologie journalistique. Ces recommandations ont été formulées dans les années quatre-vingt-dix, suite à une poussée électorale de l’extrême droite. Elles posent un cadre aux journalistes, leur permet d’éviter des termes qui ne veulent rien dire, comme par exemple « migrant illégal ». Ces termes sont d’autant plus dangereux qu’ils nourrissent un imaginaire souvent mensonger chez le lecteur ou la lectrice.

Eleonora Camilli souligne l’importance de la réflexion sur la narration faite de la migration. Pour elle, les journalistes peuvent avoir tendance à dépeindre les migrants comme des « victimes » ou des « ennemis » et non pas comme des sujets de droit. Elle met en lumière un piège qui peut être présent : présenter les migrants comme objets plutôt que comme sujets de la narration.

Pour Ali MAHFOUD le problème de vocabulaire vient aussi de l’État, des administrations qui emploient et définissent des termes dans leur référentiel propre, sans penser à leur utilisation par d’autres acteurs. Ainsi, en Libye, la question de l’identification des migrants est un enjeu phagocyté par les administrations et le vocabulaire qu’elles emploient.

Deuxième piste de réflexion : comment parler de la migration autrement ? Comment sortir de l’aspect « événementiel » ?

Amara Makhoul propose de faire un suivi rapproché de la question. Par exemple en adoptant une approche plus régulière, comme le fait Infomigrants. Mais se pose la question de l’intégration de cette régularité dans un journal généraliste.

Sarah Frère complète le propos en analysant l’effet évènementiel comme étant lié non pas à la question de la migration, mais au caractère nouveau des évènements (d’un naufrage, d’une noyade). Pour elle, l’enjeu est alors de raconter la même chose, mais autrement, afin d’éviter des histoires qui se répètent, qui tournent en boucle. Une solution qu’elle met en pratique est de replacer les personnes au centre de l’histoire, plutôt que les faits. Chaque personne étant unique, son parcours différent des autres, on peut donc traiter la question avec une multitude d’histoires différentes.

Pour Marianna Thiam, le traitement évènementiel des informations sur les migrants est lié à la fonction du journaliste et au fait, qu’en fin de compte, il doit produire une valeur économique afin que le média puisse se vendre. Et le sensationnel vend plus. Pour elle, une solution à ce sensationnalisme est la production d’investigations. Cela permet d’aller au fond du problème, d’aller chercher les informations et de proposer un contenu moins sensationnel, mais plus complet et abouti. En effet, selon elle, les journalistes ont souvent tendance à produire du journalisme factuel, de remplissage, plus sensationnel, qui s’accommode parfois mal de problématiques liées à la question migratoire.

Troisième temps du débat : le témoignage du migrant dans le travail du journaliste

Ali Mahfoud partage son expérience en Libye où il est impossible d’obtenir des témoignages. En effet, il est interdit d’avoir des contacts avec les migrants pour des raisons politiques et sécuritaires. Seules quelques ONG le peuvent mais seulement sur 10 % du territoire environ. Il poursuit en rappelant que même s’il est difficile d’entendre les récits de migrants en Belgique, il est nécessaire et important d’avoir un espace de liberté où la parole peut se libérer.

Pour Eleonora Camilli, l’importance des témoignages est capitale. Mais le recueil est difficile car il faut composer avec la psychologie du migrant qui peut avoir des difficultés à revivre les évènements ou peut être incapable de les raconter. Pour elle, la question de la psychologie des migrants est difficile à aborder mais c’est une problématique centrale pour avoir une narration juste.

Sarah Frère pose un impératif de respect des personnes et de leur parole. Elle rappelle aussi l’importance de l’honnêteté dans la démarche du journaliste : il ne faut pas faire croire aux migrants que leur témoignage va changer leur vie. Mais il faut aussi faire attention, à force d’absorber des histoires tragiques, à ne pas déshumaniser les témoignages, à ne pas mettre l’empathie de côté.

Amara Makhoul souligne l’importance du recul pour le journaliste. Un constat partagé par Ali Mahfoud, qui rappelle que ce recul fait partie du travail de journaliste.

Marianna Thiam met l’accent sur l’importance de la connaissance de la culture des migrants pour appréhender leur posture face au journaliste. Elle rappelle que le migrant apporte au journaliste son histoire, mais aussi ses troubles, ses traumatismes . Il peut donc être amené à manipuler son interlocuteur.

Dernier point : l’aspect passionné et passionnel du sujet, qui génère des tensions. Quelle est donc la responsabilité des journalistes ?

Sarah Frère raconte l’expérience de la Belgique qui a mis en place un « cordon sanitaire médiatique » qui empêche l’extrême droite de prendre la parole en direct dans les médias. Ce qui permet de faire de la vérification d’informations avant publication. Elle pose ensuite la question de la reprise dans les articles d’extraits twitters de personnalités politiques. En effet, la citation de messages incitatifs à la haine dans des articles participe de leur publicité. Se pose alors la question de comment rendre compte de certains discours, sans se constituer porte-parole de politiques ou d’organisations. Un exercice qu’elle confie trouver parfois compliqué.

Marianna Thiam et Ali Mahfoud rappellent chacun à leur tour l’importance du débat contradictoire pour permettre une meilleure compréhension des enjeux et comme solution pour éviter les pièges tendus par les extrêmes.

Irénée JAUJAY/MRI

[RÉSUMÉ] « Les entretiens de l’info : burn out dans les rédactions, aussi »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Les entretiens de l’info : Burn out dans les rédactions, aussi »

Eloïse NGUYEN-VAN BAJOU, Journaliste santé,ex professionnelle de santé, Laurence CREUSOT, Formatrice à l’ESJ-Pro, Marie-Laurence DALLE, SNJ Radio-France  Yves KOSSOVSKY, Coordinateur des soins PsyPro-Lyon, Cécile SOURD, Directrice générale de Médiapart, Julien DA SILVA, Responsable de domaine accompagnement solidaire et social de AUDIENS.  Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Mme Eloïse NGUYEN-VAN BAJOU, Journaliste santé, ex professionnelle de santé, Mme Laurence CREUSOT, Formatrice à l’ESJ-Pro , Mme, Marie-Laurence DALLE, SNJ Radio-France , M. Yves KOSSOVSKY, Coordinateur des soins PsyPro-Lyon, Mme Cécile SOURD, Directrice générale de Médiapart, M. Julien DA SILVA, Responsable de domaine accompagnement solidaire et social de AUDIENS

Animé par M. Jean-Marie CHARON, Sociologue à l’EHESS 

 

 

Les enjeux

La santé mentale est aussi un sujet tabou au sein des rédactions. Libérer la parole sur le burn out est une nécessité au vu des deux enquêtes effectuées par le sociologue Jean-Marie Charon et le Syndicat national des journalistes à Radio France. Petit à petit, des dispositifs sont mis en place dans les rédactions afin d’accompagner les journalistes en burn out.

Ce qu’ils ont dit

Laurence Creusot (Formatrice à l’ESJ-Pro) : « On ne sait plus qui on est, on est perdu, on se sent seul »

Yves KOSSOVSKY (Coordinateur des soins PsyPro-Lyon) : ​« Si vous pensez constamment à votre travail, vos responsabilités et pas à vous, votre vie privée et à votre santé mentale c’est que quelque chose ne va pas.»

« Dans les rédactions, on rend la vie insupportable aux journalistes pour qu’ils démissionnent et ainsi réduire les effectifs.»

« Je dis à mes patients qu’ils ne sont pas malades, ils sont blessés. Je dois soigner des blessures psychologiques »

Marie-Laurence Dalle (SNJ Radio-France) : « Selon notre enquête, 70% des journalistes ne disposent pas d’assez de temps pour effectuer leur travail correctement. »

« 63% des journalistes pensent que leur travail est mauvais pour leur santé. »

​« Il y a une vraie fracture générationnelle, sur la question de la santé mentale. »

Cécile Sourd (directrice générale de Mediapart) : ​« À Mediapart, il y a une culture de partage et de vigilance à la rédaction où on fait attention les uns et les autres. »

« Les cofondateurs de Mediapart ont eu à coeur de faire aimer sa vie de journaliste »

 

À retenir

Jean-Marie Charon revient sur l’objectif de sa future enquête qu’il mène sur la santé mentale des jeunes journalistes. Il explique que la plupart des témoignages recueillis concernent des jeunes journalistes qui ont subi du harcèlement moral et ou sexuel. Ce constat a été appuyé par le témoignage de Laurence Creusot, en burn out quand elle était journaliste à la rédaction web de France 3 Occitanie. Elle revient sur l’ambiance de travail délétère qui susbite au sein des rédactions.

Marie-Laurence Dalle, journaliste est venue présenter l’enquête du SNJ sur la santé mentale des journalistes à Radio France. De nombreux dysfonctionnements ont été révélés. Elle interpelle sur le manque de considération et de reconnaissance des journalistes. Cécile Sourd, directrice générale de Mediapart présente les différents dispositifs mis en place par la rédaction pour accompagner les salariés en burn out tels que les cellules d’écoute ou l’existence de référents présents dans chaque pôle de la rédaction formé à recueillir la parole des salariés).

Zineb El Ouadi (EPJT)

 

 

Pourquoi l’auto-entreprenariat est toujours boudé par la Commission de la carte de presse

Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Dans un contexte de crise économique dans les médias, de plus en plus de journalistes font le choix de l’auto-entreprenariat. Un statut souvent précaire et qui rend plus difficile l’accès à la carte de presse.

En 2022, le nombre de cartes de presse attribuées par la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) est de nouveau en baisse et pointe à 33 626.

Pourtant le nombre de primo-demandeurs est lui en hausse de 4,7% notamment en raison du développement de l’auto-entrepreunariat.

Les entreprises de presse ont régulièrement recours à des journalistes freelance qu’ils rémunèrent de plus en plus en facture et non en pige. Cette situation pose un certain nombre de problèmes pour ces journalistes, au premier rang desquels l’impossibilité d’obtenir la carte de presse. Car les conditions d’attribution de cette dernière restent immuables. Il faut justifier trois bulletins de salaire consécutifs, que le journalisme constitue l’activité principale et la principale source de revenus du demandeur. La commission reste pourtant à l’écoute des cas particuliers. La commission plénière, qui regroupe les représentants des journalistes et employeurs, étudie chaque année plus de 1 000 dossiers qui présentent des situations inédites.

Une vigilance extrême sur la relation salariée

Mais, donc, ces « situations inédites » ne concernent pas les auto-entrepreneurs, toujours exclus par la CCIJP. « Les commissaires sont opposés à une évolution au niveau de l’auto-entrepreunariat » confirme Olivier Samain, commissaire et ancienne voix d’Europe 1.

La commission reste réticente à faire évoluer les conditions d’attribution, arguant que la carte de presse représente avant tout une protection juridique régie par le Code du travail. Attribuer la carte de presse aux journalistes freelance ouvrirait ainsi selon la commission « un boulevard pour les entreprises de presse » estime Olivier Samain, ce qui favoriserait le recours aux auto-entrepreneurs et donc la précarisation encore plus grande du métier.

L’auto-entreprenariat prive de protection sociale prise en charge par un employeur et limite les recours en cas de litiges. La commission se veut être le dernier rempart face à cette flexibilisation de l’emploi journalistique, qui ne semble pourtant pas freiner les entreprises de presse dans leur pratique. 

Les limites de l’auto-entreprise

Mais la commission considère que les médias vont rapidement voir les limites à faire travailler des journalistes auto-entrepreneurs qui ne sont pas titulaires de la carte de presse. « Sans accréditation par exemple, les journalistes n’ont pas accès à un certain nombre de sources ce qui peut nuire à la qualité de leur travail », explique le commissaire de la CCIJP.

Et aussi à leur évolution salariale. La carte de presse est un outil de travail mais aussi la reconnaissance d’un statut, qui permet par exemple de faire le calcul de l’ancienneté et prétendre à des revalorisations salariales.

Dans le cas d’une cession d’un journal à un nouveau propriétaire, elle donne également la possibilité d’invoquer la clause de cession et aussi la clause de conscience, que ne permet pas le statut d’auto-entrepreneur. 

 

Dorian Gallais/EPJT

[RÉSUMÉ] Media Freedom Act : un réel impact dans le quotidien des journalistes ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Media Freedom Act : quelle mise en oeuvre en France ? »

Adina Revol, Cécile Dubois, Emmanuel Poupard et Clothilde Le Coz ont débattu et répondu aux questions concernant le Media Freedom Act. Photo : Mathias Fleury/EPJT

Avec Adina REVOL, porte-parole de la Commission Européenne en France ; Emmanuel POUPARD, 1er secrétaire général SNJ ; Cécile DUBOIS, co-présidente du SPIIL et rédactrice en chef de Citoyens.com.

Animé par Clothilde Le Coz, responsable du développement international Journalisme & Citoyenneté

 

 

Les enjeux

Questionner et définir le « Media Freedom Act », une législation censée réglementer le paysage médiatique au sein de l’Union européenne et garantir la protection de la liberté et du pluralisme des médias.

Ce qu’ils ont dit

Adina Revol (représentante de la Commission européenne) : ​« C’est un texte novateur qui protège le pluralisme et l’indépendance des médias. Il s’agit d’un règlement, pas d’une directive. Une fois approuvé et publié dans le journal officiel, il s’applique après 6 mois dans l’ensemble des pays de l’Union européenne. »

Emmanuel Poupard (1er secrétaire général du SNJ) : ​ « Le projet de règlement doit instaurer un code de conduite en ce qui concerne l’éthique et la déontologie journalistique à l’échelle européenne. Si le texte peut nous aider à avancer sur la question de la concentration des médias, c’est une bonne chose. »

Cécile Dubois (co-présidente du SPIIL) : « En quoi ce règlement est utile ? Sur le plan démocratique, l’article 4 est fondamental : il résume les droits fondamentaux des journalistes et des éditeurs. »

À retenir

Comment harmoniser les règlementations européennes concernant les droits de la presse et garantir les libertés fondamentales des journalistes ? C’est l’objectif du « Media Freedom Act », dont les contours sont actuellement définis par différents comités de la Commission européenne. Les journalistes et représentants syndicaux ont ainsi pu exprimer leurs attentes et leurs questionnements quant à cette législation. La plupart d’entre eux s’accordaient pour dire que le projet était une bonne initiative, mais qu’il n’était pas assez ambitieux pour avoir un impact réel dans les pays où les médias disposent déjà d’une liberté et d’une protection juridique importantes. Adina Revol, représentante de la Commission européenne, a évoqué un calendrier : l’objectif est de voter le texte d’ici novembre au Parlement européen, afin qu’il soit mis en place avant les prochaines élections européennes. 

 

Mathias Fleury (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] « Atelier Histoire « Belle Époque » : Quand les médias diffusent le goût de l’info »

Retrouvez l’essentiel de l’atelier histoire « « Belle Époque » : Quand Les Médias Diffusent Le Goût De L’Info »

Lisa Bolz, chercheuse en SIC au GRIPIC-CELSA, Claire Blandin, professeur des universités LabSIC/Univ Paris 13, et Arthur Asseraf, maître de conférences à l’Université de Cambridge (en visio) Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Arthur ASSERAF, historien à l’université de Cambridge,
Lisa BOLZ, chercheuse en SIC au Gripic-Celsa – Sorbonne Université

Animé par Claire BLANDIN, professeure des Universités en SIC à Paris 13.

Les enjeux

Claire Blandin a fait un état des lieux de la recherche sur les médias à la Belle Époque, autour de la construction du goût de l’info. Arthur Asseraf présentait son ouvrage Le désinformateur – Sur les traces de Messaoud Djebari. Lisa Bolz revenait sur le chapitre qu’elle a co-écrit avec Juliette Charbonneaux dans le collectif Paris Capitale Médiatique : « Paris assiégé, Paris menacé, Girardin déplacé ».
L’enjeu : En quoi les deux livres présentés renouvellent les perceptions des fabriques de l’information et la diffusion de celle-ci dans le Paris de la « Belle Époque ».

Ce qu’ils ont dit

Claire Blandin : « Le goût de l’info se construit à la Belle Époque parce que c’est une période d’alphabétisation des Français, voire de scolarisation. C’est le développement de produits écrits bons marchés, de découverte des produits de l’écrit. Ces derniers arrivent dans les classes populaires, et ne sont plus réservés à la petite bourgeoisie. »

« Il y a la mise en place de formes de narration, comme le « feuilleton ». À la fois pour l’actualité, qui parfois arrive par épisodes, ou encore par la fiction, avec les romans-feuilletons. »

Arthur Asseraf : « Il existait un décalage fort entre un espace public, médiatique européen, où les infos circulent vite et de façon dense, et ces espaces [les colonies] qui apparaissent comme des trous noirs d’information pour les européens. Djebari se positionne comme celui qui a accès à ces espaces. Il profite de ce développement du goût de l’information en France et à Paris à ce moment-là. »

Lisa Bolz : « Dans la correspondance d’Émile de Girardin avec son neveu, on a ses témoignages plus personnels, comment il se projette… On voit toutes les pensées en amont, qu’il reprend aussi parfois dans ses publications. »

À retenir

Arthur Asseraf retrace le parcours de Messaoud Djebari, né en Algérie dans les années 1860, qui va affoler le Tout-Paris en racontant comment il aurait retrouvé la trace de membres survivants d’une mission française dans l’actuel Niger.

Lisa Bolz s’est intéressée à la correspondance de cette figure, à la fois célèbre et méconnue, du monde médiatique de la Belle Époque. Précisément dans ses velléités patriotiques au moment de l’invasion allemande en 1870.

Avant la Première Guerre mondiale, la confiance envers les journalistes et les médias est sans doute extrêmement forte. La Belle Époque est la découverte collective de l’écrit. Le bourrage de crâne, dès 1914, crée une rupture de confiance, dont la presse écrite ne se remettra jamais.

Le métier de journaliste, peu institutionnalisé dans les années 1880, n’est pas encore totalement identifié parmi les métiers de l’écrit (publicistes, écrivains…). Avec l’histoire de Messaoud Djebari, on découvre que le métier avait parfois des liens avec le renseignement d’État, les interprètes militaires.

Déjà à l’époque, une proto-économie de l’attention se met en place. L’affaire Djebari ne dure que quelques semaines, le public parisien finit par passer à autre chose : d’autres choses plus spectaculaires arrivent. Maintenir l’intérêt du public est quelque chose de complexe et de très volatile, déjà à la Belle Époque.

Zacharie Gaborit (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Des journalistes défricheurs de l’info locale »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Des journalistes défricheurs de l’info locale »

Millie Servant, rédactrice en chef de Climax, développe le modèle de son média. Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Avec Juliette CABACO-ROGER, journaliste et co-fondatrice de Splann !, Deborah ADOH, journaliste et fondatrice d’endémie, Millie SERVANT, rédactrice en chef de Climax, Raphaël POUGHON, directeur de La compagnie rotative.

Animé par Richard HECHT, membre de l’UCP2F.

 

 

Les enjeux

Des médias locaux fondés sur un modèle alternatif émergent sur le territoire. Splann !, Climax ou encore Endémik cherchent à se rapprocher des citoyens tout en vivant de ces nouveaux modèles, à la fois économiques et éditoriaux.

Ce qu’ils ont dit

Déborah Adoh (journaliste et co-fondatrice d’Endémik, média en ligne) : ​« J’ai pris Endémik sur mon dos et je me suis engagée à faire du journalisme participatif. Je suis allée dans les collèges, les lycées, les médiathèques, les hôpitaux de jour… Je voulais construire avec les citoyens des reportages et connaître leur vision des médias. »

Millie Servant (rédactrice en chef de Climax, média sur l’urgence climatique) : ​« Plusieurs choix éditoriaux pourraient nous décrédibiliser : l’humour, la culture mème et le cynisme. Moi, ça m’interroge que le métier soit hostile à un journalisme qui laisse place aux émotions. »

«Si des petits médias comme nous patinent, c’est parce que les médias plus traditionnels siphonnent le lectorat et les fonds publics d’aide à la presse. »

Juliette Cabaco-Roger (journaliste et co-fondatrice de Splann !, média breton d’enquête) : ​« On enquête en fonction de l’actualité qu’on estime plus urgente, par exemple les sujets environnementaux. Sans les gens sur le terrain, notre travail serait impossible. Grâce à eux, on a déjà une base de travail. »

Raphaël Poughon (directeur de La compagnie rotative, média alternatif) : ​« Les modèles économiques sont en train de changer. Ce sont des micro-modèles pour des micro-médias, mais qui ont des communautés extrêmement engagées.»

À retenir

Si les trois médias présentés au cours de cet atelier divergent sur le plan de leur choix éditorial, tous ont pour ambition principale de se rapprocher des citoyens de leur territoire d’ancrage. Splann ! s’appuie sur les locaux pour enquêter sur la Bretagne, Climax traite des l’urgence climatique sous l’angle du cynisme et Endémik publie les reportages de citoyens rencontrés dans différents établissements (collèges, médiathèques, hôpitaux…). Un modèle pas encore stable pour les journalistes. La plupart écrivent pour d’autres titres, ont un statut complexe d’auto-entrepreneur ou ne bénéficient pas de la carte de presse.

Malgré cette instabilité, ces journalistes partagent le même engagement. Ils mettent désormais tout leurs poids dans la balance pour défricher une information locale utile aux citoyens.

 

Élias INSA (EPJT)

 

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[Interview] Michel Dumoret « Jamais considérer que ce qu’on reçoit sur les réseaux sociaux c’est argent comptant »

L’arrestation de Donald Trump ou encore Emmanuel Macron en éboueur dans les rues parisiennes sont, entre autres, les images qui circulent sur les réseaux sociaux ces derniers semaines. Leur point commun ? Elles ont été générées à partir d’un programme d’intelligence artificielle (IA), Midjourney. Avec des IA de plus en plus performantes, le risque pour les médias de propager une fausse image est présent. Michel Dumoret, directeur en charge de la lutte contre la désinformation à France Télévisions, revient sur le risque « démocratique » de ce type d’image et comment France Télévisions travaille dans ce contexte. Il évoque également les bons réflexes à adopter.

Réalisé par Kelvin Jinlack/EPJT.

[REPORTAGE] La jeunesse prend la parole aux Assises du journalisme

Thalie, élève en Terminale au lycée Choiseul à Tours présente sa chronique radio aux Assises du journalisme.

Photo : Maël Prévost/ EPJT

Les Terminales du lycée Choiseul à Tours ont participé mercredi 29 mars à une émission de radio en direct pendant les Assises du journalisme. La radio 100% lycéen, mise en place par la région Centre-Val-de-Loire offre la possibilité aux jeunes de donner de la voix.

Il est 10 heures au MAME lorsque les élèves du lycée Choiseul à Tours prennent place autour du plateau de radio. Laurent Garofalo, un ancien journaliste pour Europe 1, est à la technique. Il les conseille sur les manières de relancer leurs camarades afin de garder une dynamique pendant l’émission. Aujourd’hui il travaille pour Mediacoms, une agence qui met en place des radios temporaires comme Radio 100% lycéen. Cette web radio mise en place par la région Centre-Val-de-Loire a pour objectif de donner la parole aux jeunes. Parmi les vingt-trois lycées qui participent au projet cette année, des élèves de six établissements sont conviés aux Assises du journalisme pour l’évènement.

Pour redonner le goût de l’information à la jeunesse, les lycéens ont carte blanche pour les sujets. Ce matin, les sept élèves de Terminale de Choiseul se sont exprimés sur le thème de « l’engagement chez les jeunes » qu’ils ont choisi à l’unanimité. Cachée derrière la table de mixage, Mélanie Belondo, la CPE du lycée n’a qu’une hâte, que l’émission commence. « Les sujets proposés sont très riches. Participer aux Assises du journalisme c’est une manière pour les élèves de concrétiser leur engagement », affirme-t-elle avec enthousiasme.

« L’EMI est indispensable »

« S’informer est un devoir. Aujourd’hui il y a trop de fake news, donc l’EMI est indispensable », assure Lélia. « C’est important de maîtriser les médias, sinon on croit tout ce qu’on voit », ajoute Thalie, qui reconnaît qu’il y a un manque d’EMI chez les jeunes.

Mélanie Belondo est de l’avis de ses élèves. Elle voit l’EMI comme une de ses missions en tant que CPE. « La manière de s’informer fait partie des prérogatives du lycée. Cette sortie aux Assises du journalisme est une forme d’EMI », assure-t-elle.

Parmi les sept Terminales présents sur le plateau de radio, rares sont ceux qui s’informent sur ce médium. Lélia et Thalie écoutent beaucoup les émissions de France Inter et France culture. Et ils s’informent tous sur les réseaux sociaux comme Instagram. Les élèves suivent par exemple les comptes d’Hugo Décrypte ou de Brut. Thalie et Luna, qui vivent encore chez leur parents, regardent par ailleurs le 20 heures de TF1.

«Un véritable espace d’expression »

C’est la troisième année que Mélanie Belondo travaille main dans la main avec Médiacoms car le projet radiophonique a trouvé son public auprès des lycéens de Choiseul. « J’ai imposé le format radio car c’est l’occasion pour les élèves de s’entraîner à l’épreuve du grand oral du baccalauréat », explique-t-elle.

 Il est presque 11 heures dans la grande salle des Assises du journalisme de Tours et le live approche à grands pas. Les lycéens se concentrent et gardent leur calme pour ne pas laisser le stress monter. « Je veux que vous profitiez de ce moment », leur conseille la CPE. L’émission débute avec la chanson Happy de Pharell Williams. Il reste une minute avant le lancement. Des grandes inspirations sont prises et des petits rictus nerveux s’affichent sur les visages de ces lycéens de 17 et 18 ans. Luna est stressée. C’est elle qui lance l’émission. Les chroniques s’enchaînent, mêlée à des interactions entre les participants. Il y a également une grande place laissée au débat.

Lorsque Lohan parle de l’engagement écologique, il a la voix tremblante mais gagne vite en confiance au fur et à mesure de sa chronique. « J’aime quand ils se révèlent. L’émission dure une heure on sent qu’ils montent en puissance », confie avec tendresse la CPE. Pendant la deuxième partie de l’émission, les chroniqueurs sont beaucoup plus détendus. « L’atelier radio est un réel espace d’expression, je peux donner mon opinion, faire des revendications. C’est une belle opportunité à saisir », témoigne Luna. Titouan quant à lui confirme que la radio lui a permis de se libérer de sa timidité.

Thalie passe en dernier et propose aux auditeurs une chronique sur l’engagement en musique avec le rappeur Orelsan. Elle scande son texte avec passion. « J’étais dans mon élément. J’ai découvert la radio grâce à l’école. Ça a été un déclic sachant que je me destine à des études de journalisme » raconte-t-elle.

Il est midi et l’émission touche à sa fin. Les sept élèves chantonnent tous un « au revoir » avant de rendre l’antenne et de souffler pour de bon. « Nous sommes fiers de vous », lancent à l’unisson Laurent et Mélanie. Les lycéens aussi sont ravi d’avoir passé ce moment ensemble et d’avoir pu s’exprimer autour d’autant de sujets. C’est avec de grands sourires qu’ils repartent des locaux du MAME, direction le lycée Choiseul.

Zeïneb Hannachi (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Histoire d’un ogre – carte blanche à Erik Orsenna »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Histoire d’un ogre – carte blanche à Erik Orsenna »

Erik Orsenna, écrivain et académicien français. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Erik ORSENNA, écrivain et académicien français.

Animé par Catherine BOULLAY, journaliste spécialiste des médias à L’Opinion.

Les enjeux

Erik Orsenna, écrivain et académicien français, était présent mercredi 29 mars dans le cadre de la publication de son dernier ouvrage, Histoire d’un ogre. L’occasion, aussi, de donner son avis sur l’importance des journalistes dans la société, aujourd’hui.

Ce qu’il a dit

Erik Orsenna : « J’écris quand je ne comprends pas quelque chose. Ici, c’est pour comprendre pourquoi il existe cette haine entre les Français et ceux qui les nourrissent. Les Français adorent le pain mais détestent les céréaliers. »

« On n’a jamais eu autant besoin de journalistes car la société est compliquée. »

« Deux raisons peuvent expliquer pourquoi il y a un désintérêt des Français à l’égard du journalisme. La première : les journalistes ne travaillent peut-être pas assez. La seconde : les journalistes préfèrent parfois traiter des sujets de manière simple plutôt que complexe. »

« Comme il y a une grande demande, il faudrait que les analyses aillent plus loin. Mais les journalistes n’ont pas toujours les moyens financiers. »

« Ce sont les Assises de la nécessité et de la possibilité du journalisme. »

À retenir

Erik Orsenna est revenu brièvement sur son nouvel ouvrage, Histoire d’un ogre. Il y décrit le personnage d’un Breton, né à Quimper dans un moulin à papier des bords de l’Odet. Brutalement, il se transforme en « coucou » qui dévore toutes les entreprises. Ce personnage, jamais nommé, n’est autre que Vincent Bolloré.

Mais, surtout, Erik Orsenna a donné son opinion sur le rôle des journalistes. Il les décrit comme essentiels dans la société. Pourtant, la défiance des Français à leur égard ne cesse d’augmenter. L’occasion, également, de faire part de son inquiétude. Les organes de presse français sont majoritairement possédés par des milliardaires qui interviennent au sein des rédactions. Les journalistes doivent alors redoubler d’efforts pour proposer des contenus aux analyses plus poussées pour captiver le public.

Anne-France Marchand (EPJT)

[INTERVIEW]« Ensemble on retrouve le goût de l’info, le plaisir de s’informer »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Jérôme Bouvier, Président de Journalisme et Citoyenneté, l’association organisatrice des Assises, nous explique l’idée derrière la thématique de cette année « Retrouver le goût de l’info ».

« Une des raisons pour laquelle on fait ce métier de journaliste, c’est parce qu’on a le goût de l’autre, du terrain, des gens, des histoires, des parcours. Et je pense que depuis trois ans on a un peu perdu ce goût des gens. » C’est ainsi que Jérôme Bouvier justifie le thème de cette 16e édition des Assises internationales du Journalisme de Tours.

Une idée qui lui est venue après trois années intenses en actualité et qu’il a proposé cet automne au comité des Assises : « Je ne sais pas si vous vous souvenez les trois dernières années des Assises. On a eu s’informer au moment du Covid, ce moment incroyable où le monde s’est arrêté, il y a eu la guerre en Ukraine, il y a eu l’urgence climatique avec l’anxiété qu’elle génère. C’étaient des thèmes d’actualité très précis. Trois ans après, cette succession d’événements nous a profondément marqué dans nos rapports à l’actualité, dans notre rapport au monde et à l’autre. On a profondément perdu nos repères. »

Jérôme Bouvier a répondu aux questions d’Elise Bellot de l’EPJT. 

Pour le Président de Journalisme et Citoyenneté, cette nécessité de « redonner le goût de l’info » concerne autant les journalistes que les citoyens : « On le verra dans le baromètre ViaVoice des Assises qu’on rend public cet après-midi. Il y a plus d’un tiers de nos concitoyens qui disent « moi, depuis le Covid, depuis la guerre en Ukraine, je ne veux plus suivre l’info, c’est trop anxiogène pour moi ». Et puis, il y a ceux qui nous disent : « je ne veux plus suivre l’info parce que je ne nous fais plus confiance ». » C’est un travail collectif : « Ensemble on retrouve le goût de l’info, le plaisir de s’informer. »

 

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

[RÉSUMÉ] La conférence « Comment retrouver le goût de l’info, quelles propositions ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Comment retrouver le goût de l’info, quelles propositions ? »

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Raphaël GARRIGOS, co-fondateur des Jours et co-président du jury, Isabelle ROBERTS, co-fondatrice des Jours et co-présidente du jury, Thierry THUILLIER, directeur de l’information du groupe TF1 et directeur délégué de LCI et Cécile PRIEUR, directrice de la rédaction de L’Obs.

Animé par Catherine BOULLAY, journaliste spécialiste des médias à L’Opinion.

Les enjeux

Selon le baromètre 2023 de l’institut Vivavoice sur l’utilité du journalisme, 84 % des sondés disent que le journalisme est un métier et qu’il est utile. Si le résultat peut sembler bon, il est en fait de six points inférieur au baromètre de l’année précédente. L’objectif est de réfléchir sur les moyens de limiter cette baisse de confiance dans les journalistes et, dans l’idéal, récupérer ces lecteurs déçus.

Ce qu’ils ont dit

Isabelle ROBERTS (co-fondatrice des Jours et co-présidente du jury 2023) : « Notre proposition : ne pas tout faire, ne pas être exhaustif mais ce qu’on fait on le fait bien, en série et on l’épuise. »

« On ne s’interdit aucun sujet sauf si on n’a rien dire dessus. »

« Pour que les gens retrouvent le goût de l’info, il faut donner envie aux gens. Donc nous on a eu envie de raconter des histoires, de le faire sous forme de série. »

Raphaël GARRIGOS (co-fondateur des Jours et co-président du jury 2023) : « La fonction des chaînes d’info, c’est d’être en prise direct avec l’info, mais parfois on a l’impression que c’est plutôt les doigts dans une prise électrique. »

« La neutralité n’existe pas. On ne va pas donner 5 minutes aux juifs et 5 minutes à Hitler comme dirait Godard. »

« Nos abonnés nous dise qu’on est un peu le Netflix du papier. »

Thierry Thuillier (directeur de l’information du groupe TF1) : « La clé absolue, c’est de raconter des histoires. »

« Traiter l’actualité via le reportage permet de redonner du goût à l’information. Cela permet de raconter des histoires. »

« Il y a une question à se poser sur la transparence. Il est très important de montrer comment l’information fonctionne. Les journalistes ont leur propre indépendance, leur propre éthique et heureusement. »

Cécile PRIEUR (directrice de la rédaction de l’Obs) :​ « Au fond, redonner le goût de l’info, c’est faire notre travail. Notre travail de journaliste a le rôle social de sortir des informations. »

« Aujourd’hui on fait attention à la manière dont sont encadrés les journalistes. »

À retenir

Pour retrouver ce goût de l’information, les journalistes doivent se réinventer dans le fond de leur contenu et surtout dans la forme qu’ils donnent à leurs productions. Le média Les Jours s’inscrit dans cette lignée en faisant le choix fort de choisir spécifiquement les sujets qu’il traite tout en délaissant volontairement d’autres. Il choisit aussi pour quelques papiers de lui donner un format de série, popularisé par Netflix qui attire les jeunes.

Sur la question de la toxicité des informations, les intervenants sont tous d’accord : les grands sujets tels que l’Ukraine, l’environnement ou encore le Covid sont incontournables car ce sont les thèmes qui intéressent le plus les lecteurs. Pour redonner goût à l’information, même avec ces thématiques, les participants tablent sur un retour au terrain, au reportage et au local car ce qui compte c’est de raconter une histoire, celle des gens qui sont au plus près des évènements.

Zachary Manceau (EPJT)

[RÉSUMÉ] Label ou auto-régulation : comment certifier l’info ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « label ou auto-régulation : comment certifier l’info »

Benjamin Sabbah, directeur général à Worldcrunch, Kathleen Grosset, présidente de la CDJM, Thibaut Bruttin, adjoint au directeur de Reporters sans Frontière, Pascal Doucet Bon, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie France Télévision. . Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Benjamin SABBAH, directeur général à Worldcrunch, Kathleen GROSSET, présidente de la CDJM, Thibaut BRUTTIN, adjoint au directeur de Reporters sans Frontière, Pascal DOUCET BON, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie France Télévision. 

Animé par Christian GOUEROU, journaliste et médiateur pour Ouest-France

 

 

 

Les enjeux

Défiance des citoyens, fake news : quelles solutions existent pour regagner la confiance des citoyens ? Comment les médias peuvent-ils prouver que l’information proposée est de qualité ? Pour faire face à ces enjeux, des médias et des organismes s’engagent pour le public. 

Ce qu’ils ont dit

Benjamin SABBAH : « Sur le process de production journalistique, des organismes comme la CDMJ et la RSF ou des labels de qualité comme le JTI (journalism trust initiative) poussent à plus de transparence. C’est une bonne initiative  »

Thibaut BRUTTIN : ​« Il faut aussi demander plus de transparence de la part des systèmes de plateforme. Google news référence les médias par rapport à leur réputation. Mais c’est quoi, au juste, la réputation ? C’est un fonctionnement très opaque. »

Pascal DOUCET BON : « Cette autorégulation s’impose à nous par elle-même. Le problème, c’est que la plupart des régulateurs qui encadrent la pratique du journalisme et veillent au respect de la déontologie ne pointent que nos erreurs. Quand vous lisez leur bilan de fin d’année, vous avez l’impression que France Télévisions est un mauvais média. Même si nous reconnaissons que nous faisons des erreurs. »

Kathleen GROSSET : ​« Nous avons créé le conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM)  pour ne pas seulement montrer les erreurs des rédactions. Ça aurait montré une fausse image de leur travail. Tout n’est pas noir. »

 

À retenir

Pour regagner la confiance du public et lutter contre la désinformation, reporters sans frontières a créé le label JTI (journalism trust initiative) qui fonctionne par système d’adhésion libre. Ce label propose des critères de qualités et d’indépendance auxquels les médias signataires doivent se conformer. Il permet aux lecteurs d’identifier clairement les rédactions qui respectent ces normes. En parallèle, le conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM), instance de médiation entre les journalistes, les médias, les agences de presse et les publics, veille, lui aussi, au respect de la déontologie. Tout le monde peut saisir le CDJM  lorsqu’un doute existe sur les pratiques d’une rédaction. Le CDJM émet ensuite un avis, favorable ou non, et fonctionne comme un régulateur. 

Camelia Aidaoui (EPJT)

 

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Depuis 15 ans, La Chance donne la possibilité à tous de devenir journaliste

Chaque année, près de 80 étudiants bénéficient du dispositif égalité des chances grâce à la prépa gratuite La Chance. Un dispositif qui offre aux aspirants journalistes une possibilité d’intégrer une des 14 écoles reconnues par la profession.

« J’ai essayé de préparer seule les concours. Je me suis rendue compte qu’il y avait un fossé avec les autres étudiants, que je n’avais pas le bagage culturel nécessaire. » Mais La Chance lui a souri, et Lune Armand est parvenue à intégrer l’antenne de Strasbourg de cette association créée en 2007 pour plus de diversité dans les médias. Et comme elle, qui est entrée à l’École publique de journalisme de Tours, 45 étudiants sur les 80 de la promotion 2022, ont été admis à la rentrée suivante une école des quatorze écoles de journalisme reconnues.

« Représenter toutes les diversités dans tous les médias »

L’association La Chance est née d’une volonté d’offrir la possibilité à tous les étudiants, notamment boursiers, d’aspirer à un avenir de journaliste. Président depuis 2015, Marc Epstein perpétue cette philosophie avec un objectif : « représenter toutes les diversités dans tous les médias ». Les diversités d’origine, de parcours, de territoire. Lui-même, ancien grand reporter des pages internationales de l’Express et du Monde, a pu le constater durant sa carrière : l’entre-soi est omniprésent dans le métier.

« Quand on a grandi dans une famille où il n’y a pas de journalistes, où on est éloigné du monde des médias […] ou que l’on est issu dune zone rurale éloignée des grandes villes, La Chance est là pour les aider dans ces fameux concours. », assure Marc Epstein, qui se consacre pleinement à l’association depuis 3 ans.

« La prépa ma tout payé »

La prépa offre une formation de près de 250 heures ainsi qu’un accompagnement financier, à hauteur de 600 € en moyenne par étudiants. Sans cette aide, Lune n’aurait pas passé autant de concours. « La prépa m’a tout payé : déplacements, concours, aide au déménagement… », apprécie-t-elle. Des financements qui ne seraient d’ailleurs pas possible sans la quinzaine de partenariats noués par La Chance et parmi lesquels on recense Le Parisien, L’OBS, France TV ou encore La Croix.

Mais le recrutement, même s’il est fondé sur des critères sociaux, reste exigeant. Les candidats doivent passer un véritable concours : une première sélection sur dossier en ligne, puis un oral avec des épreuves écrites et d’actualité. Beaucoup le reconnaissent : cet examen permet de supprimer le sentiment d’illégitimité des étudiants. Et le résultat est incontestable : « Aujourd’hui, ce sont les médias qui nous contactent, […] peut-être par une prise de conscience qui s’ouvrent davantage vers des profils plus diversifiés. »

Sarah Costes. Montage : Maëva Dumas

Née à Paris, La Chance est aujourd’hui présente sur tout le territoire. De Bordeaux à Grenoble, en passant par Marseille, Strasbourg, Toulouse et Rennes. Elle compte 6 salariés et plus de 350 bénévoles dont la plupart sont d’anciens étudiants. Parmi eux, Yousra Gouja. Après un an de préparation au sein de La Chance en 2018-2019, elle est à présent pigiste dans la presse spécialisée. « La Chance nous aide et nous prépare à ce à quoi nous pourrons être confrontés après les écoles. Ils sont là pour nous challenger. » Une préparation intense qui lui a permis d’intégrer l’ESJ Pro Montpellier.

En parallèle du processus de tutorat, la prépa est un accompagnement sur le long terme. Elle fournit des aides pour trouver des stages, des alternances ; elle transmet des offres d’emploi et dispose d’un pôle insertion professionnelle. Lune le confirme : « La Chance, c’est une communauté. Tu n’es pas lâché, c’est un collectif tout au long de la vie de journaliste. »

Sarah Costes

[Article] Vente de livres : Les livres en dédicaces caracolent déjà en tête

Les locaux de la librairie « La Boite à Livres » sont situés 19 rue Nationale à Tours. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Chaque année, en marge des Assises du journalisme, la librairie “la Boite à Livres” tient son stand où elle propose à la vente uniquement des ouvrages qui concernent les médias et le journalisme. Et comme tous les ans, ce sont les livres en dédicace et les grands auteurs qui mènent la danse.  

Même si elle confie ne pas avoir encore de chiffres, Margot, la gérante du stand de la Boîte à Livres, est magnanime : « Il ne faut pas se le cacher, ce qui se vend mieux, ce sont les livres des auteurs en dédicace. » Elle ajoute : « en deuxième position, je dirais que ce sont les grands auteurs un peu classiques qui ont du succès comme Bruno Patino, Marc Endeweld ou encore Florence Aubenas. »

Cependant, les ouvrages des intervenants ont aussi du succès. C’est le cas de Mieux s’informer d’Anne-Sophie Novel. Le livre dans lequel elle guide les lecteurs pour se repérer dans le monde des médias, pour mieux les comprendre et éviter l’indigestion « se vend comme des petits pains », de l’aveu de Margot. L’autrice est d’ailleurs intervenue mardi aux Assises dans le cadre de l’atelier “La jungle des médias avec Anne-Sophie Novel et un bout des médias”.  

Ce soir la venue de l’académicien Érik Orsenna pour sa carte blanche (dans l’Auditorium à 18h30) devrait doper les ventes. L’auteur, qui a sorti cette année Histoire d’un ogre, métaphore des conquêtes médiatiques de Vincent Bolloré, saura à coup sûr attirer les foules.

Zachary Manceau

 

 

[RESUME] La conférence « Garantir le pluralisme des médias : quelle législation ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement «  GARANTIR LE PLURALISME DES MÉDIAS : QUELLE LÉGISLATION »

Avec Alexandre Buisine, journaliste et membre du SNJ, Benoit Huet, avocat au barreau de Paris, Nathalie Sonnak, présidente du COP CLEMI, Alexis Levrier, historien de la presse à l’Université de Reims.  Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Avec Alexandre BUISINE, journaliste et membre du SNJ, Benoit HUET, avocat au barreau de Paris, Nathalie SONNAC, presidente du COP CLEMI, Alexis LEVRIER, historien de la presse à l’Université de Reims.  

Animé par Lucile Berland journaliste et membre de l’association Informer n’est pas un délit (INPD)

 

 

Les enjeux

Vincent Bolloré, Bernard Arnault, Patrick Drahi, Arnaud Lagardère ou encore Xavier Niel. Vous avez forcément déjà lu un de leur journaux. Vous travaillez peut-être même pour l’un d’eux. La concentration de la presse régionale et nationale dans les mains de quelques propriétaires doit nous interpeller sur la question du pluralisme dans les médias. Est-ce qu’une myriade de médias équivaut forcément à du contenu différent ? Une réelle diversité d’opinion ? Ces tycoons qui achètent de l’influence posent un risque pour le journalisme et cultivent une défiance du public vis-à-vis des journalistes.

Ce qu’ils ont dit

Alexis LEVRIER : « La concentration des médias a parfois permis le pluralisme et l’émancipation de la presse par rapport au pouvoir politique. Cependant, aujourd’hui, la situation est différente. Nous sommes dans une crise structurelle, dû au modèle économique des médias et une crise structurelle à cause de la Covid. Suite à l’épidémie,  de nombreux médias sont tombés dans les mains de Bollore. »

Benoit HUET : « On a l’impression d’avoir le choix, en termes de médias, mais les contenus sont assez homogènes. »

« Au niveau de la législation, seulement l’audiovisuel est encadré, avec l’arcom. Une chaine ne peut donc pas être de gauche ou de droite. La rédaction doit donner la parole à des politiciens de tous bords. Les journaux, eux, ne sont pas tenus de respecter ce principe. »

Alexandre BUISINE : « Le problème avec l’Arcom, c’est que leur indépendance est discutable. Le système de nomination pose un problème. Avec la SNJ, nous demandons que la moitie du collège soit désigné par des journalistes salariés. Mais on nous répète qu’on est trop bête pour comprendre les technicités de l’arcom. »

« Plus il y a une concentration des médias dans quelques mains, plus les rédactions sont réduites et les journalistes licenciés. Ils sont remplacés par des créateurs de contenu. Le rêve de Reworld media (NDLA: le premier groupe de presse magazine français en nombre de journaux détenus), c’est de faire du journalisme sans journaliste. »

Benoit Huet : « Ce que fait Realworld est tout à fait légal. C’est bien là le problème. Il faut légiférer. C’est un groupe qui bénéficie des subventions d’aide à la presse. Il faut repenser ces critères d’attribution. »

Alexandre BUISINE : « Le problème, c’est que les propriétaires qui possèdent plusieurs journaux vont inciter les journalistes à publier les mêmes contenus. De plus, ils n’ont aucun intérêt à faire des médias rentables avec le système de défiscalisation des pertes. »

Nathalie SONNAC : « Les citoyens ne veulent pas payer pour de l’information. C’est une des causes de la concentration des médias. »

Lucile BERLAND en réponse : « Oui, mais les citoyens n’ont pas envie d’acheter un journal dans lequel ils ne se retrouvent pas. »

 

À retenir

Les journalistes doivent composer avec une défiance accrue des citoyens. La concentration des titres est un facteur d’aggravation qui amplifie ce phénomène.  Au milieu de tout ça, l’indépendance des rédactions est parfois menacée. Il faut apporter de réelles solutions à la hauteur de l’enjeu : repenser les critères d’attribution des aides à la presse, donner l’indépendance juridique aux rédactions, retoquer la loi relative à la liberté de communication de 1986. Le Freedom Media Act adopté par la Commission européenne propose également « des garanties contre les ingérences politiques dans les décisions éditoriales et contre la surveillance». La solution pour préserver notre indépendance sera peut-etre européenne.

Camelia Aidaoui

[RÉSUMÉ] Comment retrouver le goût de l’information ? (Etat des lieux avec DE FACTO, MILAN PRESSE, FONDATIONS DESCARTES, FONDATION JEAN-JAURÈS)

Retrouvez l’essentiel de l’événement « COMMENT RETROUVER LE GOÛT DE L’INFO ? » (Etat des lieux avec DE FACTO, MILAN PRESSE, FONDATIONS DESCARTES, FONDATION JEAN-JAURÈS)

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Marie-Anne DENIS, directrice générale de Milan Presse et David MEDIONI, journaliste et directeur de l’Observatoire des médias. 

Animé par Catherine BOULAY, journaliste spécialise des médias à L’Opinion.

 

 

Les enjeux

53% des Français disent souffrir de fatigue informationnelle. À partir de ce constat, comment redonner envie ? Faut-il que les médias changent complètement leur manière d’informer pour attirer à nouveau le public ? Ou doit-on repenser individuellement notre rapport à l’information ?

Ce qu’ils ont dit

Marie-Anne Denis (directrice générale de Milan Presse) : « 85% des jeunes (13-17 ans) pensent que l’info est importante. Ils ne sont pas du tout lassés par l’info. C’est une très bonne nouvelle. »

« Les ados sont contradictoires. Leur première source d’information ce sont les réseaux sociaux et pourtant c’est la source à laquelle ils donnent le moins de crédibilité. »

David Medioni (journaliste et directeur de l’Observatoire des médias) : « L’individu doit avoir un questionnement sur la manière dont il s’informe. Ensuite, évidemment, les médias traditionnels ont une part de responsabilité dans la fatigue informationnelle. Cette volonté de vouloir toujours étonner plutôt qu’informer me dit que oui, les médias ont leur part de responsabilité. »

« On est à un moment de bascule. Cette fatigue informationnelle, elle s’exprime aussi dans une fatigue institutionnelle importante. »

À retenir

À l’heure où de plus en plus de Français se disent affectés psychologiquement par les informations, certains décident de se couper complètement de l’info. Pour les deux intervenants, la fatigue informationnelle, au même titre que l’alimentation, est un enjeu de santé publique et devrait être traité comme tel. Ils militent pour la création d’une campagne de sensibilisation, comme la très connue « cinq fruits et légumes par jour », sur l’information.

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

 

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[RESUME] « Baromètre Viavoice – les Assises sur l’utilité du Journalisme »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Le baromètre Vivavoice / Les Assises sur l’utilité du Journalisme (France médias monde, France TV, Ouest France et Radio France » !

Photo : Eva Pressiat / EPJT

Avec François Xavier Lefranc, directeur de l’information à Ouest France, Pascal DOUCET BON, directeur délégué de l’information en charge de la stratégie à France Télévisions, Frédérique MISSLIN, directrice adjointe de RFI, Léopold STRAJNIC, directeur adjoint de la rédaction de France Bleu.

Animé par Adrien BROCHE, Consultant Viavoice

 

 

Les enjeux

Le baromètre Vivavoice sur l’utilité du Journalisme est présenté pour la septième fois lors de ces Assises 2023. La question de l’utilité du journalisme est posée chaque année, accompagnée d’une seconde sur le thème des Assises. Pour cette édition, il s’agit du goût pour l’information.

Ce qu’ils ont dit

François Xavier Lefranc (directeur de l’information à Ouest France) : ​« Les résultats du baromètre ont un côté inquiétant et à la fois extrêmement rassurant, surtout en ce qui concerne la confiance et la volonté des publics à avoir une information vraie, vérifiée, impartiale. »

« La question est aussi de savoir si le journaliste a le temps de travailler. Le sujet, aujourd’hui, c’est le temps. Le temps de pouvoir travailler, traiter les informations, etc. »

Pascal DOUCET BON (directeur délégué de l’information en charge de la stratégie à France Télévisions) : « Il faut que nous, les rédactions, apprenions à écouter. Le courrier des lecteurs, un médiateur, des organes d’écoute ne suffisent pas. Il faut du dialogue avec les publics. »

« Il existe aussi un journalisme factuel, de décryptage, et donc de nuance. Mais on est en face d’autres médias, comme Twitter, qui ne s’embarassent pas de nuance. Le manque de nuance est plus lié à des externalités qu’à la pratique journalistique »

Frédérique MISSLIN (directrice adjointe de RFI) :​ « Est-ce que l’idée ne serait pas de co-construire nos éditions avec le public ? »

« Il y a une éducation à faire sur les manières de traité l’information. Pour le climat, il faut savoir qu’il y a des coûts, des formations nécessaires pour les sujets où on a peu de compétences. »

Léopold STRAJNIC (directeur adjoint de la rédaction de France Bleu) : « Pour les Gilets jaunes, on n’a pas été accueilli comme on le pensait, on était vu comme des instances du pouvoir. Donc on a ouvert nos rédactions pour rendre transparente nos pratiques. »

« Quand on a des mauvaises nouvelles à annoncer, normalement, on prend des pincettes. Mais dans le journalisme, dans notre pratique, il n’y a aucune nuance. Il faut mettre un coup d’arrêt à cette course au sensationnel. »

À retenir

Le baromètre de l’Institut Vivavoice présente chaque année ses résultats. 84% des Français disent que le journalisme est un métier et qu’il est utile. Mais c’est six points de moins que l’an dernier et surtout le pourcentage le plus bas depuis la création du baromètre. L’information professionnelle reste la source de confiance privilégiée du public et 88% des répondants jugent qu’il est utile de s’informer. Les attentes du public concernent la vérification des informations, une information partiale et hiérarchisée et enfin la nécessité d’information pratiques, utiles au quotidien.

Cependant, ce baromètre ne reste qu’un indicateur pour les médias, qui peuvent ou non en tenir compte.

Louise Monard-Duval

 

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Panthéon du journalisme : découvrez les dix premiers noms

Jérôme Bouvier dévoile les dix premières personnalités retenues pour le panthéon du journalisme. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Jérôme Bouvier, organisateur des Assises du Journalisme à Tours, a présenté les dix premiers noms qui incarnent les valeurs de la profession, à travers son panthéon du journalisme.

Ce mercredi après-midi, Jérôme Bouvier, le président de l’association Journalisme et Citoyenneté, qui organise les Assises du Journalisme à Tours, et le président du comité du prix Albert Londres, Hervé Brusini, ont révélé les dix premiers noms les plus cités en vue d’intégrer un panthéon du journalisme. « Nous avons assez peu de bagage historique sur notre profession, dans un moment de grande discussion sur qui est journaliste », a-t-il argumenté pour justifier le lancement de ce projet. « Le drame du journaliste, c’est l’ignorance de son histoire », déclare Hervé Brusini, qui veut y remédier. Pour y parvenir, Jérôme Bouvier a lancé une grande consultation sur le site journaliste.com où chacun pouvait choisir dix noms parmi une liste en contenant une cinquantaine, jusqu’à l’automne.

Voici les dix premiers noms :  Albert Londres, Albert Camus, Françoise Giroud, Emile Zola, Hubert Beuve-Méry, Joseph Kessel, Cabu, Louise Weiss, Pierre Lazareff et Theophraste Renaudot.

Ces personnalités ont été retenues parmi une cinquantaine de journalistes disparus. Pour poursuivre leur héritage, le panthéon est amené à s’agrandir chaque année avec l’entrée de deux nouveaux noms. En 2023, les Assises européennes du journalisme de Bruxelles seront aussi l’occasion de créer un panorama des journalistes qui continuent d’inspirer la profession à plus grande échelle, au sein de chaque pays de l’Union européenne.

 

Mathilde Lafargue (EPJT)

[RÉSUMÉ] « Le baromètre social des Assises par Jean-Marie Charon : le collectif dans le journalisme aujourd’hui »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Le baromètre social des Assises par Jean-Marie Charon : le collectif dans le journalisme aujourd’hui »

Jean-Marie Charon, chercheur en sociologie à l’EHESS, Elise Descamps, journaliste et membre de la CFDT
et Maïté Darnault (en visioconférence), journaliste indépendante au collectif We Report. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Elise DESCAMPS, journaliste et membre de la CFDT et Maïté DARNAULT, journaliste indépendante au Collectif We Report.

Animé par Jean-Marie CHARON, chercheur en sociologie à l’EHESS.

 

Les enjeux

Le baromètre social des Assises était présenté ce mercredi 29 mars. Le but : faire un état des lieux de l’emploi des journalistes et des entreprises médiatiques.

Cette année, le focus portait sur la dimension collective dans le journalisme. Une multitude d’organisations existent et rassemblent nombre de journalistes. Leur objectif : l’entraide et le partage.

Ce qu’ils ont dit

Jean-Marie CHARON : « Le journalisme reste centralisé : 52,61 % des détenteurs de carte de presse se situent à Paris. La Bretagne arrive en seconde position, suivie de l’Aquitaine et des Pays de la Loire. »

« J’ai réalisé une typologie des principes des collectifs de journalistes. Le premier est l’entraide et le partage de moyens. Le second est la défense ou la promotion d’une catégorie particulière de journalistes. »

Elise DESCAMPS : « L’offre pléthorique des collectifs de journalistes est enthousiasmante. C’est rassurant de savoir qu’il y a de l’entraide dans un milieu que l’on pense individuel. »

« Il reste encore de la marge. Beaucoup de journalistes ne sont pas dans un collectif. C’est dommage car c’est une profession qui souffre et qui nécessite de serrer les rangs. »

Maïté DARNAULT : « L’un des prix de l’indépendance du pigiste, c’est la précarité. » 

À retenir

Les statistiques présentées concernaient les 34 043 journalistes qui détenaient la carte de presse sur l’année 2022. Les jeunes journalistes (de 30 et moins), qui représentent 13% de la profession, sont les plus touchés par la précarité. Ils représentent deux-tiers de cette tranche d’âge, soit un recul de 10% en comparaison de l’année précédente. Parmi eux : les pigistes, les journalistes en CDD et les demandeurs d’emploi. En ce qui concerne la parité, elle n’est pas encore atteinte : un peu moins de 48% des femmes détiennent la carte de presse.

Cette année, le focus portait sur la dimension collective de l’organisation des journalistes en dehors des rédactions. La majorité des associations sont sectorisées. Elles se développent dans un domaine particulier : défense des femmes, des pigistes mais aussi des personnes racisées. Leur but est aussi de permettre l’entraide et le partage entre les journalistes. Parmi ces organisations collectives sont recensées les associations de journalistes, les clubs de la presse, les sociétés et les collectifs de journalistes.

Anne-France Marchand (EPJT)

Créer un Panthéon du journalisme, l’ambitieux projet de Jérôme Bouvier

Jérôme Bouvier aux Assises du journalisme de Tours de 2023. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Le président des Assises du Journalisme a lancé une grande consultation sur les illustres journalistes qui mériteraient d’entrer dans un panthéon de la profession. Mercredi après-midi, il a révélé les dix noms les plus cités par les journalistes.

Donner « une photo de comment la profession se voit ». Tel est l’objectif de Jérôme Bouvier, qui a lancé en marge des Assises du Journalisme de Tours une grande consultation pour créer un panthéon des journalistes. ». L’idée est de savoir « d’où nous venons », explique le président de l’association Journalisme et citoyenneté. « Nous avons assez peu de bagage historique sur notre profession, dans un moment de grande discussion sur qui est journaliste », ajoute-t-il.

Albert Londres, premier choisi !

A l’instar du Panthéon où se retrouvent les héros et les héroïnes de la nation, ce panthéon du journalisme veut instaurer un débat démocratique autour des valeurs qui rassemblent la communauté de journalistes, environ 35 000 en France. L’objectif est de créer un véritable panthéon avec la BnF, avec la reconnaissance de deux nouveaux noms chaque année. Pour le lancement, cette année, Jérôme Bouvier a révélé les dix premiers noms – en tête desquels figure l’illustre Albert Londres – les plus cités par les quelque 500 journalistes qui ont pris part à la consultation disponible sur le site journaliste.com.

Le procédé est simple et pédagogique : chaque nom qui peut être retenu par le votant est associé à une biographie. Ceci permet de partir à la découverte de figures qui ont incarné le journalisme, de l’Ancien Régime à aujourd’hui. On y retrouve par exemple Marguerite Durand, dont le fondateur du panthéon ne connaissait pas l’existence. Elle est à l’origine du premier titre de presse féminine à la fin du XIXe siècle, La Fronde.

Des spécialistes de la presse et des historiens sollicités

Pour réunir les premiers noms, des journalistes, des spécialistes de la presse et des historiens ont été sollicités. L’entrée de certaines personnalités dans la liste a parfois été discutée, comme celle d’Émile Zola, déjà présent au Panthéon, ou encore de Jean Jaurès. Cela fait écho à « l’entre-deux de la presse française, dont l’évolution est intimement liée à la politique, au débat d’idées, à la littérature ou encore au genre du récit de voyage », rappelle Jérôme Bouvier. Pour lui, c’est Albert Camus qui est la source de son envie de devenir journaliste.

Lors de leur deuxième édition en 2023, les Assises européennes du journalisme de Bruxelles seront aussi l’occasion d’encourager tous les pays de l’Union européenne à faire de même, pour dessiner un panorama de l’héritage journalistique à plus grande échelle.

[RÉSUMÉ] « Ils ont créé leur média cette année »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Ils ont créé leur média cette année »

De gauche à droite, Gilles Vanderpooten, Ulyse Mathieu, Mathilde Boudon-Lamraoui, Axel Roux et Gilles Tanguy. Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Gilles VANDERPOOTEN, directeur général de Reporters d’espoirs, Axel ROUX, rédacteur en chef de Vakita, Gilles TANGUY, président de L’informé, Mathilde BOUDON-LAMRAOUI, formatrice à la Friche, Ullyse MATHIEU, fondateur de Contre-jour.

Animé par Romain COLAS, rédacteur en chef adjoint de La Correspondance de la presse.

 

 

Les enjeux

Journalisme de solution (revue Reporters d’espoirs), journalisme populaire (Contre-jour), environnemental (Vakita) ou encore investigation économique-tech (L’informé), les journalistes de cette année veulent redonner goût aux médias en mettant en avant des angles originaux et attrayants.

Ce qu’ils ont dit

Gilles VANDERPOOTEN (Reporters d’espoirs) : ​« Nous considérons que le journalisme de solution est une méthodologie et non pas une idéologie. »

Axel ROUX (Vakita) : « Nous avons décidé de nommer notre média “Vakita”. Le Vatika est le mammifère marin le plus menacé au monde. Il représente pour nous l’urgence face à l’effondrement de la biodiversité. Notre média veut donc représenter à la fois l’urgence climatique et mettre en lumière les combats. »

« Ce qui nous tient à cœur c’est l’action, pouvoir engager notre audience dans des dynamiques d’action, telles que les mobilisations, pour essayer de faire bouger les lignes. »

Gilles TANGUY (L’informé) : ​« Nous voulons trouver notre place en nous adressant à tout le monde. D’une part, nous sommes pour la plupart tous salariés, notre média couvre alors l’information de chaque secteur. D’autre part, nous sommes aussi citoyens et nous nous intéressons aux informations générales. C’est la raison pour laquelle notre média ne les omet pas. Finalement, nous souhaitons toucher les deux facettes de notre lectorat. »

Mathilde BOUDON-LAMRAOUI (Collectif La Friche, Contre-jour)​ : « Nous ne sommes pas vraiment militants mais nous assumons de donner une place centrale aux personnes et aux sujets en marge, sous les radars des médias de masse. »

Ullyse MATHIEU (Contre-jour) :​ « Nous souhaitons créer des espaces de paroles dans les zones rurales, les quartiers populaires, les prisons ; partir de ces endroits que l’on côtoie pour en faire du journalisme. »

 

À retenir

En plus de vouloir promouvoir et mettre en écho de nouvelles manières de s’informer, les quatre médias présentés ont des perspectives différentes avec la presse papier et le numérique. Les revues de Contre-Jour et de Reporters d’espoirs souhaitent, avec le support papier, exposer « un objet singulier » qui laisserait une trace pérenne des recueils. Vakita lui, s’attachent au format vidéo en web, dont la plus-value serait l’image, la mise en forme et l’incarnation des enquêtes grâce au visuel. Quant à L’informé, le web serait le plus approprié face au déclin de la presse papier.

Du côté de la ligne éditoriale, les médias présentés n’ont aucune interférence et ont la liberté d’écrire sur tous les sujets. Cependant, quand L’informé et Reporters d’espoirs se veulent factuels, Vitika et Contre-jour ont une écriture plus engagée.

Aya El Amri (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] Conférence « Atelier école – États généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes : et maintenant ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Atelier école – États généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes : et maintenant ? »

Photo : Eva Pressiat/EPJT

Avec Antoine CHUZEVILLE, secrétaire général de la CPNEJ et membre du comité stratégique des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes, Agathe LEGRAND, jeune diplômée de l’EJDG – Grenoble, membre du comité étudiant des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes, Elodie LOMBARDO, directrice de l’innovation sociale de l’Afdas et Pascal GUENEE, président de la Conférence des écoles de journalisme, et directeur de Institut pratique du journalisme (IPJ) Dauphine/PSL

Animé par Anne TEZENAS DU MONTCEL , déléguée générale de la Conférence des écoles de journalisme en charge de l’organisation des Etats généraux de la formation et de l’emploi des jeunes journalistes.

Les enjeux

Suite au compte rendu des états généraux de la Conférence des écoles de journalisme, en octobre 2022, 36 propositions ont été faites pour améliorer la formation et l’insertion à la profession de journalisme. De la précarité des journalistes, à une carte de presse étudiante, en passant par la possibilité de prendre la parole en tant qu’étudiants, différents projets sont en cours de construction ou de discussion.

Ce qu’ils ont dit

Antoine CHUZEVILLE : « Il y a plusieurs réalisations concrètes qui vont être lancées dès 2023 : une carte de presse étudiante et un guide de la pige publié fin mai, à la demande des étudiants qui se retrouvent dans la jungle de la pige en sortie d’écoles. »

« Pour d’autres sujets, comme la précarité, il y a encore des discussions et des efforts à faire. C’est l’avenir de la profession qui est en jeu. »

Pascal GUENEE : « Les écoles ont mis en place des dispositif mais on intègre très peu les étudiants dans le dialogue, il était temps de les faire participer aux discussions autour des enjeux du métier de journaliste. »

« Il faut s’interroger sur les compétences que l’on doit apprendre dans les écoles, mais cela revient à s’interroger sur les critères de sélection pour entrer dans les écoles. »

« Notre responsabilité c’est de savoir quels sont les sujets prioritaires pour répondre au plus vite aux défis des états généraux. »

Agathe LEGRAND : ​« Lorsque l’on s’est réuni il y a un an pour les états généraux, ça nous a fait du bien. On n’était pas seulement étudiant dans une école, mais on faisait partie d’un ensemble, et on a pu discuter et voir que nos problèmes n’étaient pas uniques. »

« Chaque année, les problèmes sociaux, économiques, etc. changent, il faut donc des propositions différentes. »

Elodie LOMBARDO : « La formation est ce qui est important, donc on doit la développer. Et pour ça, l’Afdas va mettre en place une plateforme pour l’alternance dans tous les secteurs que nous gérons. »

« Il y a tout un travail fait par les écoles par rapport à l’augmentation des alternances. »

Anne TEZENAS DU MONTCEL : « Le but c’était d’être en contact et les états généraux ont permis cela. »

À retenir

À la question « et maintenant on fait quoi ? », les différents participants ont insisté sur le fait qu’il était temps d’agir suite aux discussions des états généraux de la CEJ. Trois projets prioritaires sont déjà bien engagés : une carte de presse étudiante, garantissant une reconnaissance et une sécurité pour les journalistes en formations, un encadrement des stages, concernant les conditions de travail des étudiants, et enfin une journée de discussion et de propositions concrètes sur les compétences, entre écoles, étudiants et rédactions.

Louise Monard–Duval

[RÉSUMÉ] « Atelier École : étudiant(s)s en journalisme, toujours aussi accros à l’info ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Atelier École partie I. Étudiant(s)s en journalisme, toujours aussi accros à l’info ? »

Cyril Petit, journaliste, Dario Borgogno, étudiant en première année de master à l’ESJ Lille, Corinne VANMERRIS, directrice adjointe de l’ESJ Lille et Maëva Dumas, étudiante en première année de master à l’EPJT, passée par la prépa La Chance. Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Cyril PETIT, journaliste, Dario BORGOGNO, étudiant en première année de master à l’ESJ Lille, Maëva DUMAS, étudiante à l’EPJT, passée par La Chance pour la diversité.

Animé par Corinne VANMERRIS, directrice adjointe de l’ESJ Lille.

 

Les enjeux

Le suivi de l’actualité est indissociable du quotidien du journaliste. En première ligne de ce phénomène : les étudiants des écoles de journalisme. De plus en plus, un phénomène de « perte du goût de l’info » émerge. À l’image d’une partie des Français, ces étudiants ne sont pas non plus exclus de ce surmenage face au trop-plein d’information.

 

Ce qu’ils ont dit

Corinne VANMERRIS : ​« J’ai deux anecdotes à vous raconter. La première concerne Patrick de Saint-Exupéry, un journaliste installé dans la profession. Il venait à l’ESJ pour encadrer des sessions. Un jour, il est arrivé à la gare de Lille et m’a contacté pour me dire qu’il serait en retard à l’école parce qu’il avait pris des journaux pour les lire à la gare. C’était son rituel et j’ai senti qu’il prenait plaisir à parcourir l’actualité du jour. L’autre anecdote concerne les étudiants de l’ESJ. Ils sont venus me voir, un matin, pour me demander d’annuler le questionnaire d’actualité qui était prévu tous les quinze jours. Ils m’ont dit qu’ils n’avaient pas eu le temps de réviser l’actualité à cause de leur trop grande charge de travail. Et je me suis rendue compte, ici, que suivre l’actualité était, pour eux, un exercice très scolaire et non pas un plaisir. »

« Les 20-25 ans peuvent être victimes d’infobésité. Dans tous les sondages et les baromètres, c’est une tendance qui émerge. Il n’y a donc pas de raison pour que les étudiants en école de journalisme ne le soient pas aussi. »

Cyril PETIT : ​« L’actualité s’impose aux journalistes et n’est pas négociable. »

« Pour retrouver le goût de l’info, une des pistes serait de s’intéresser aux gens pour qu’en retour, ils s’intéressent à nous. »

Maëva DUMAS : ​« Quand on prépare les concours, le rythme est assez intense. Avec la prépa La Chance, nous avions une masse d’infos qu’il fallait connaître. Et, au sein de l’EPJT, nous avons des travaux pour maintenir ce suivi de l’actualité. »

Dario BORGOGNO : ​« Quand on arrive en école de journalisme, on fait un burn-out de l’info. Avant l’oral d’admissibilité à l’ESJ, j’apprenais plein de choses car j’angoissais à l’idée des questions qu’on allait me poser. »

 

À retenir

Dans les écoles de journalisme, les étudiants peinent parfois à prendre du plaisir dans leur suivi de l’actualité. La raison ? Leur intérêt est impacté par la charge de travail de leurs études. Alors que le suivi de l’actualité devrait être inné, il s’apparente parfois, pour certains, à un exercice scolaire. Surtout, le manque de temps les conduit à sélectionner les productions journalistiques qu’ils lisent, écoutent ou regardent. Résultat : les étudiants suivent davantage les sujets d’actualité qui les intéressent, au détriment de ceux qui les captivent moins. Cette sélection risque, pourtant, de biaiser leur regard sur certaines actualités.

Anne-France Marchand (EPJT)

[RÉSUMÉ] Résidences de Journalistes, partage d’expériences

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Résidences de journalistes, partage d’expériences »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Isabelle BORDES, journaliste indépendante, Mathilde BOUDON-LAMRAOUI, formatrice à La Friche, Guillaume DE LA CHAPPELLE, responsable de la communication à la DRAC Pays de la Loire, et Jean-Christophe THEOBALT, chargé de mission pour les nouvelles technologies de l’information et de la communication à la délégation au développement et à l’action territoriale du ministère de la Culture et de la Communication.

Animé par Elodie CERQUEIRA, présidente du Club de la Presse Centre-Val de Loire.

 

Les enjeux

Certains journalistes sont en résidences pour participer à des actions d’éducation aux médias. Gérées par les directions régionales des affaires culturelles (Drac), ces interventions ne sont pas encore reconnues comme du travail journalistique en soi. Cela peut donc être compliqué de se lancer. Vers quels acteurs se tourner ? Quel mode de rémunération choisir ? Partage d’expériences.

Ce qu’ils ont dit

Mathilde Boudon-Lamraoui : « Nous, notre approche journalistique passe par le récit de soi, on assume l’usage du « je » »

Jean-Christophe Théobalt : « Notre priorité au ministère, ce sont les adultes, mais en même temps c’est le public le plus difficile à toucher en termes d’éducation aux médias. »

Isabelle Bordes : « Les gens qui se sentent invisibles, il y en a plein dans les territoires ruraux »

Guillaume de la Chappelle : « Le profil parfait de l’intervenant, pour moi, c’est quelqu’un qui a un profil pédagogique mais qui est aussi un praticien »

À retenir

L’éducation aux médias est une mission relativement récente pour les Drac et elles ne sont pas toutes encore habituées aux résidences des journalistes. Il y a sur le territoire, de fait, une très grande diversité dans le fonctionnement de l’EMI : dans le montant des subventions ou dans les durées des résidences, entre autres. La Drac Pays de la Loire, par exemple, n’accepte que celles d’un minimum de deux mois, car elle estime qu’en deçà il est difficile de réaliser un travail de fond. Ce n’est pas le cas partout.

Fanny Uski-Billieux (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] Conférence « Retrouver le goût d’entreprendre »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Retrouver le goût d’entreprendre dans les médias »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Jean-Cristophe BOULANGER, président de Context, Catherine RONIN, journaliste du média réunionnais Zinfos 974, Nadia BERRA, journaliste et fondatrice de Lisons Lizon, Alvina LEDRU-JOHANSSON présidente et directrice de la publication à Culs de Poule.

Animé par Laurent MAURIAC, co-président du SPIIL (Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne)

Les enjeux

À la recherche de plus de présence féminine dans les sujets traités, de médias davantage indépendants ou encore de titres qui donnent la parole aux enfants, ces journalistes n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient dans l’offre médiatique actuelle et ont décidé de créer leur média. Cependant, entre le marketing, la distribution, ou encore le design, les difficultés de l’entreprenariat sont nombreuses et peuvent dissuader.
Pour les rassurer, le syndicat de la presse indépendante d’information en ligne (SPIIL) les accompagne tout au long de leurs parcours et les informe des aides dont ils peuvent bénéficier.

Ce qu’ils ont dit

Jean-Christophe BOULANGER : ​« Il faut relativiser son rapport à l’échec. Qu’un projet ne marche pas n’est pas une finalité, ce n’est peut-être qu’une étape pour un destin plus grand. »

« S’il y a un truc que j’ai retenu de mes deux échecs, c’est bien choisir les gens autour de soi. Des gens avec qui on partage des valeurs où l’on respecte les compétences des uns et des autres. C’est vraiment le truc que j’avais sous-estimé. »

« Au début j’étais très seul mais quand le SPIIL a été créé ça a été indescriptible pour moi. Je pouvais enfin partager. »

Catherine RONIN : ​« Aujourd’hui on n’hésite plus pour demander aux gens de nous aider et ça marche. Il faut juste oser. »

« On préfère perdre de l’argent que dire à un journaliste “retiens ta plume“.»

Nadia BERRA : ​« Si on a peur de se tromper et de faire mal il ne faut pas entreprendre »

« Il y a plein d’outils pas cher qui sont très utile pour se lancer. »

« À chaque fois que je pose une brique, je m’assure qu’elle est bien solide. »

« Je vois cette revue comme une créature qui grandit petit à petit. »

Alvina LEDRU-JOHANSSON : ​ « Les écoles devraient plus sensibiliser à la réalité du monde des médias. Si on n’a pas connaissance d’incubateurs on perd des années. »

Laurent MAURIAC :« Il faut être capable de connaitre ses limites et ne pas attendre trop longtemps pour être épaulé. »

À retenir

Les principaux problèmes que rencontrent les créateurs de média ne concernent pas la partie éditoriale mais la partie entrepreneuriale. Ils déplorent un manque de préparation dans les écoles sur les difficultés de l’entreprenariat dans le monde médiatique. Ils font face aux problèmes financiers et font tous la course aux financements. Néanmoins pour se lancer, la bourse « Émergence » de l’État est une aide non négligeable. Elle peut aller de 30 000 à 50 000 euros et permet aux jeunes médias de commencer leur aventure sereinement.
Pour qu’un média fonctionne, les intervenants insistent sur la bonne alchimie entre la ligne éditoriale et la ligne entrepreneuriale. L’une ne fonctionne pas sans l’autre. C’est dans cette optique qu’il est nécessaire pour ces jeunes médias de rapidement s’entourer des bons collaborateurs dotés des compétences adéquates, comme par exemple des commerciaux et des webdesigners pour un journaliste avec une ligne éditoriale déjà solide.

Zachary MANCEAU (EPJT)

[LE RÉSUMÉ] Actualité des organisations syndicales : Briser le tabou du racisme dans les rédactions.

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Briser le tabou du racisme dans les rédactions »

Photo : Mathilde Lafargue/EPJT

Avec Estelle Ndjandjo, porte-parole de l’Association des journalistes antiracistes et racisés (AJAR) et Rémi-Kenzo Pages, journaliste et membre du SNJ-CGT.

Animé par Clément OLLIVIER, journaliste indépendant.

 

 

Les enjeux

Face aux peu d’études et de données chiffrées sur le racisme dans les rédactions, les organisations syndicales souhaitent briser ce tabou avec leur rapport « briser le silence ». A travers un questionnaire transmis à 167 personnes de la profession, l’étude met en avant des chiffres sur les discriminations internes.

Ce qu’ils ont dit

Estelle Ndjandjo : « On avait peur qu’on nous associe à des mots qui ne nous correspondaient pas forcément. »

« Je suis une femme. Je suis féministe. Je suis noire. J’ai ce qu’on appelle une double peine. »

Rémi-Kenzo Pages : « Le but [de cette étude] est de faire prendre conscience aux gens du racisme dans le journalisme » ;

« Le racisme interne est un tabou dans les rédactions françaises. »

À retenir

L’étude « Briser le silence » a débuté d’un constat : les personnes qui subissent du racisme sont isolées dans les rédactions et la question de la diversité est inexistante en France. Les chiffres le montrent, 24.2 % des répondants déclarent avoir déjà été victimes de racisme au travail. Pourtant, 80 % qui s’estiment victimes et qui l’ont déclaré, affirment ne pas avoir été soutenus.

Parmi les solutions proposées par les membres du SNJ-CGT : une charte de modération, un protocole de sécurité sur le terrain ou encore rendre public les offres d’emploi.

Sarah Costes

 

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[RÉSUMÉ] Conférence « Faire confiance à la science ? »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Faire confiance à la science ? »
Helen Lee Bouyghes présente la fondation Reboot.

Photo : Laura Blairet/EPJT

Avec Helen Lee Bouygues, présidente de la fondation Reboot, Frédéric Courant, cofondateur de l’Esprit Sorcier TV, Laurence Devillers, professeur à la Sorbonne et présidente de la fondation Blaise Pascal et Etienne Klein, physicien et producteur de l’émission « Le pourquoi du comment » sur France Culture.

Animé par Élodie Cerqueira, présidente du Club de la Presse Centre-Val de Loire.

 

 

Les enjeux

Peut-on faire confiance à la science ? Il s’agit là d’une question large, soumise à interprétation. C’est ce qui a résulté du débat du mardi 28 mars au soir. Chaque intervenant a planché sur ses propres réflexions autour de cette interrogation. C’est donc un mélange de questionnements variés qui se sont élevés dans la salle des fêtes de l’hôtel de ville de Tours. Des questionnements sur la connaissance des enjeux numériques, notamment en termes d’intelligence artificielle, sur les éventuelles législations ou sources d’éducation sur le sujet et sur la place des journalistes dans ce manège.

Ce qu’ils ont dit

Helen Lee Bouygues : « On ne prend plus le temps d’apprendre aujourd’hui. Les entreprises qui nous proposent des informations le savent et jouent sur le sensationnel pour nous faire rester. »

« Ce n’est pas une question d’âge sur les réseaux sociaux mais une question des contenus qui nous sollicitent sans arrêt. C’est sur cela qu’il faut légiférer, pas sur l’âge des utilisateurs. »

« Les jeunes n’ont pas l’habitude d’avoir le temps d’apprendre et de réagir. Il faut peut-être mettre un cadre à cela pour les réseaux sociaux mais aussi pour l’éducation de manière plus générale. »

Frédéric Courant : ​« Il y a une profonde curiosité dans la science pour le public, qu’il faut qu’on respecte. »

« Il y a le problème du temps dans le journalisme, qui manque toujours. Mais il y a aussi la satisfaction d’être payé à apprendre des choses. Ce métier demande un effort intellectuel : essayer de comprendre les choses avant de raconter des histoires. Sur les chaînes d’info en continu, on invite des experts que l’on ménage souvent. Ce n’est pas la même chose. »

Laurence Devillers : ​« Il y a une émergence de comportements dans la machine [à intelligence artificielle] qui n’a rien à voir avec une émergence de conscience, mais qui répond à notre besoin d’impression de parler à quelqu’un. »

« Il faut arrêter avec cette peur des machines qui nous remplaceraient. Elles apprennent différemment de nous. Tant qu’on en aura peur on ne comprendra pas ce que sont ces objets. »

« Je remarque que 90 % des programmeurs sont des hommes et que 90 % des robots programmés ont des caractéristiques féminines. Il faut se poser la question de la représentation que l’on donne de l’humanité à travers ces machines. »

« Je m’adresse aux journalistes. ChatGPT, c’est de la parole statistique en provenance de machines sans que les sources ne soient clairement identifiées. Attention à ces usages. »

Etienne Klein : « Notre cerveau n’a pas changé depuis 20 000 ans. Nous avons développé des biais cognitifs qui nous servent à prendre des décisions face à une information. Sans ces biais cognitifs, on ne survit pas. Nous sommes passés d’un contexte historique avec peu d’informations à un contexte avec beaucoup d’informations. Parmi lesquelles des fake news. »

« Notre cerveau n’aime pas être contredit. Les algorithmes se basent là-dessus et nous enferment dans des biais de confirmation. On se retrouve bloqué dans un monde qui se répète. »

« Il y a une complète confusion entre la compétence et la militance. Le fait d’avoir un avis tranché semble dédouaner de l’obligation de s’instruire. »

« Le droit de savoir, s’il n’est pas converti en désir de connaître, est complètement stérile. »

 

 

À retenir

Faire confiance à la science, en particulier dans l’espace médiatique, est un sujet vaste et fertile de questionnements. La place des journalistes dans l’utilisation du numérique, de l’intelligence artificielle mais surtout de leur compréhension de ces enjeux est primordial. Car elle affecte directement la façon dont ils parleront de la science et de ces nouvelles technologies au grand public. Une question que chacun et chacune doit se poser, comme nous ont invité à le faire les intervenants à la fin de la conférence.

Laura Blairet

 

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Assises 2023 : l’impact des grèves et des manifestations amoindri par l’anticipation des organisateurs

La 16e édition des Assises du Journalisme s’est ouverte à Tours en pleine mobilisation contre la réforme des retraites. Face à de possibles problèmes de transport, les organisateurs ont dû trouver des solutions en amont pour que chaque intervenant arrive à bon port.

La grève de la SNCF a empêché certains intervenants de venir mardi. La plupart ont cependant pu intervenir en visio.  (Photo : Edgar Zuniga Jr)

Deux événements se télescopaient ce mardi à Tours : la 10e journée de mobilisation contre la réforme des retraites et la 16e édition des Assises du Journalisme. Pour que cette dernière se déroule sans encombres, les organisateurs ont dû anticiper et sont assez satisfaits du résultat. « On est plutôt très bien au niveau de la fréquentation », explique Marie Jansen, l’une des organisatrices des Assises.

Ils ont travaillé de paire avec l’agence tourangelle « Corporate travel » pour gérer les billets de train des intervenants. Et pour ceux qui n’ont pas pu se déplacer, des visios ont été mises en place afin d’assurer au mieux le déroulement des diverses conférences. 

Il y a quand même eu des réajustements à faire dans la programmation, entre des changements d’intervenants, de modérateur, ou tout simplement une annulation. « Pour la conférence « Identifier les bonnes sources », une seule personne pouvait se déplacer et nous avons donc dû l’annuler », commente Eva Renaux, une autre des organisatrices de l’événement. Mais le plus dur semble passé, à écouter Marie Jansen : « Ça devrait aller mieux dans les prochains jours. »

Maylis YGRAND (EPJT)

[RESUME] La conférence « Urgence climatique et responsabilité des journalistes : des médias s’engagent ! »

Retrouvez l’essentiel de l’événement « L’urgence climatique et la responsabilité des journalistes : des médias s’engagent ! »
Edouard Reis Carona, rédacteur en chef de Ouest-France, et Jean-Pierre Dorian, directeur de la rédaction de Sud-Ouest à la conférence  » Urgence climatique et responsabilités journalistes : des médias s’engagent ! « , mardi 28 mars. Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Avec Violaine CHAURAND, directrice RSE du groupe Bayard, Jean-Pierre DORIAN, directeur de la rédaction de Sud-Ouest (PQR), Vincent GIRET, directeur de l’information de Radio France, Edouard REIS CARONA, rédacteur en chef de Ouest-France.

Animé par Sidonie WATRIGANT, directrice de l’ESJ Pro.

 

Les enjeux

Les médias ont un rôle à jouer dans la perception qu’a le public du changement climatique. Ils doivent mettre à disposition de leurs lecteurs des « boîte à outils » dans laquelle ces derniers pourront trouver les réponses aux grandes questions qui se posent sur le sujet. La question climatique et la disparition de la biodiversité doivent être traiter à la hauteur des enjeux qu’elles soulèvent.

Ce qu’ils ont dit

Violaine CHAURAND : ​ « La rédaction a fait le choix d’orienter la transition écologique de pair avec la transition économique. »

Jean-Pierre DORIAN :« Aujourd’hui, les jeunes sont désintéressés de l’information. On espère que le sujet de la question climatique ramène les jeunes à l’information. »

« Les gens sont plus réceptifs. La question climatique impacte la vie des Français. On l’a identifié sur notre territoire avec notamment les incendies qui ont touchés le Sud-Ouest cet été. »

« Il s’agit aussi de balayer devant notre porte. Au sein de notre entreprise, les imprimeries, les livraisons, les déplacements de nos journalistes… tout ça a un coût énergétique. »

Vincent GIRET :« Avant, les rédacteurs en chefs se méfiaient un peu de ces thématiques-là. Le risque était de faire un journalisme militant et très idéologique. […] La difficulté est de faire du journalisme engagé sans faire du journalisme militant. »

« On est dans un contexte encore différent d’il y a deux ou trois ans. Les sujets sont remontés dans le temps d’antenne. Ce n’est plus la petite brève en fin de journal. »

 « Ça doit être un engagement systémique des entreprises. Chez nous, on travaille à diminuer les émissions carbone de l’activité des rédactions. »

Edouard REIS CARONA : « Sur le web, l’audience a été multiplié par six ou sept sur les sujets de la question climatique. Chez Ouest-France, nous ne mettons pas de pay-wall sur ces questions. Priorité à l’information. »

« Jusqu’à présent les articles qui fonctionnaient le mieux sur l’environnement c’étaient les articles sur les catastrophes naturelles. »

« Il faut qu’on décline nos sujets pour faire rentrer l’information climatique. Le travail éditorial montre que les rédactions sont en mouvement. On distille la question climatique dans tous les sujets. »

« La charte pour un journalisme au niveau de l’enjeu écologique n’est pas qu’un effet de mode. Elle est faîte pour nous permettre de nous engager pour les générations futures. La question climatique doit être inscrite dans l’ADN de l’entreprise. »

À retenir

Les Français sont demandeurs de contenus portant sur la question climatique. Les résultats d’audience sont formels : les émissions scientifiques trouvent du public, les articles web explicatifs génèrent du clic. Dans la hiérarchie éditoriale, les sujets sont remontés. Une seule brève en fin de journal ne suffit plus aux lecteurs ou aux auditeurs. Les rédactions tendent de répondre aux mieux à cette demande. Progressivement, les journalistes se forment pour traiter ces sujets à la hauteur de ce qu’ils méritent, sans être moralisateur, ni fataliste.

Jane Coville

 

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[LE RÉSUMÉ] Urgence climatique et responsabilités journalistes : la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Urgence climatique et responsabilités journalistes : la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique »

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Avec Anne-Sophie NOVEL, journaliste, réalisatrice et co-autrice de la Charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique, Steven JAMBOT, journaliste (RFI), producteur de « L’atelier des médias » et coordinateur éditorial des podcasts, Alexandre KOUCHNER, rédacteur en chef (L’ADN-Le Shift),

Animé par Sidonie WATRIGANT, directrice de l’ESJ Pro

 

 

Les enjeux

Face à un dérèglement climatique de plus en plus flagrant, les journalistes ont la responsabilité de rendre compte de la réalité de l’urgence. Alors que ces questions ont longtemps été délaissées et méprisées au sein des rédactions, certains professionnels de l’information montrent aujourd’hui leur détermination d’être à la hauteur de cet enjeu.

 

Ce qu’ils ont dit

Anne-Sophie NOVEL : ​ « L’avènement de cette charte a-t-il permis de changer certaines pratiques ? Non à 48 %. »

« On n’a pas vocation à contraindre, c’est une boussole. On est là pour éclairer un cap. »

« C’est d’avoir cette petite musique qui s’inscrit dans l’article, de comprendre que ce qu’on est en train de consulter s’inscrit dans une histoire au plus long cours. »

Steven JAMBOT : ​ « Nous n’avons pas vocation à être des donneurs de leçon. »

« On a fait ce texte pour qu’il s’inscrive sur le temps long. Lisez chacun des points du texte, ils seront valables dans 5 ans, 10 ans, etc. Ce n’est pas ancré dans l’humeur du moment. »

« Les réponses doivent être politiques et c’est aux médias et aux journalistes de pointer les errements du système dans lequel nous vivons. »

Alexandre KOUCHNER : ​« Est-ce que l’information que je suis en train de produire est alignée avec les engagements que j’ai pris ? Le fait que ça repose sur notre volonté est extrêmement fort. »

« Nous avons eu cette réflexion de ne plus dire la transition mais les transitions parce qu’elles sont écologique, économique, politique, culturelle. »

« Nous avons un rôle social à jouer, d’informer correctement et de faire comprendre ce que nous vivons. »

 

À retenir

Rendue publique le mercredi 14 septembre 2022, la charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique a été conçue comme une boussole pour les professionnels de l’information. Ce texte a pour but de faire changer les mentalités et les pratiques dans le traitement journalistique du dérèglement climatique. Il a entre autres mis en exergue les systèmes économiques des médias français et la difficulté des rédactions de refuser des annonceurs. Un problème qui empêche les rédactions et les journalistes d’être en harmonie avec les engagements pris.

La charte a ouvert des débats mais n’a pas encore porté de fruits réellement visibles. Suite à un questionnaire diffusé récemment aux signataires de la charte, 48 % des répondants ont rapporté que la charte n’avait aucunement changé les pratiques.

Maylis YGRAND (EPJT)

 

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[RÉSUMÉ] Présentation du Prix l’Alerte à la Une

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Actualité des organisations syndicales : parole à la maison des lanceurs d’alerte »

Christian Dauriac, administrateur de la Maison des Lanceurs d’Alerte, présente le prix « l’Alerte à la Une ».

Photo : Laura Blairet/EPJT

Avec Christian Dauriac, administrateur de la Maison des Lanceurs d’Alerte et Dominique Pradalié, présidente de la FIJ (Fédération Internationale des Journalistes).

 

 

Les enjeux

La dernière conférence de la journée était l’occasion de présenter le nouveau prix mis en place par la Maison des Lanceurs d’Alerte : le prix « l’Alerte à la Une ». L’occasion de rappeler la nécessité de protéger les lanceurs d’alerte dans le cadre de la loi comme dans le cadre associatif.

Ce qu’ils ont dit

Christian Dauriac : « Les lanceurs d’alerte sont souvent des salariés licenciés à la suite de leur action. D’où l’importance du fond mis en place par la Maison des Lanceurs d’Alerte. »

Dominique Praladié :  « Presque toutes les grosses dernières enquêtes journalistiques, comme les LuxLeaks, ont été lancées grâce à un lanceur d’alerte. »

« Le lanceur d’alerte n’est plus perçu comme un traître ou un mouton noir. C’est ça qui a évolué. Grâce à la loi [Waserman du 21 mars 2022, qui élargit la protection des lanceurs d’alerte] mais surtout grâce à l’opinion publique. »

 

À retenir

La Maison des Lanceurs d’Alerte, cofondée par dix-sept organisations autour du journalisme, lance un nouveau prix appelé l’Alerte à la Une pour récompenser les enquêtes journalistiques.

Laura Blairet

 

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[LE RÉSUMÉ] Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ? »

De gauche à droite, Marine Leduc, Line Pagé, Ève Beaudin et Sarah Jacquin. Photo ArnaudFischer/EPJT.

Avec Blaise Andzango (Cameroun), président d’Eduk-Média, Line Pagé (Canada), présidente du conseil d’administration du CQEMI, Ève Beaudin (Canada), journaliste au Centre québécois d’éducation aux médias (CQEMI), Patrick Verniers (Belgique), directeur du Conseil supérieur de l’éducation aux médias, Sarah Jacquin (Liban), chargée de projet à la Fondation Samir Kassir.

Animé par Marine Leduc, chargée de Projet Le Retour de Zalumée/Globe Reporters.

 

 

Les enjeux

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) peine à s’installer véritablement dans les programmes scolaires français. Dans les pays francophones, la situation n’est pas mieux voire pire. Les invités mènent des initiatives pour le démocratiser dans des pays comme la Belgique, le Liban, le Canada ou le Cameroun.

Ce qu’ils ont dit

Line Pagé : ​ « On a de grandes ambitions avec le CQEMI, on voudrait aller beaucoup plus loin. On veut aussi devenir un carrefour des bonnes initiatives qui se font en termes d’EMI au Québec. »

« Au Québec, l’EMI est dans le programme scolaire mais n’est pas obligatoire. Chez nous, il n’y a pas eu d’événements tragiques comme en France qui ont forcé une prise de conscience à propos de l’éducation aux médias (attentats de 2015). Mais on essaie de s’y sensibiliser quand même. »

« J’ai beaucoup aimé le thème de cette édition des Assises. Je pense qu’il faut aller en classe et donner aux enfants l’envie de retrouver le goût de l’info. »

Ève Beaudin : ​ « On a développé une formation qui met en relation des journalistes avec des écoles. Il faut jumeler les journalistes avec des régions, le Québec étant vraiment très grand. On explique aux jeunes comment fonctionne le journalisme. Il y en a beaucoup qui pensent n’importe quoi. Il y a pas mal de choses à démystifier. C’est hyper important pour nous d’envoyer des journalistes dans les classes, auprès des jeunes. »

« 95% de notre financement vient de subventions gouvernementales. Et tout ça fonctionne grâce à énormément de bénévolat. »

Sarah Jacquin : ​ « On remarque que la jeunesse est délaissée. Il faut savoir que l’EMI au Liban n’est qu’un onglet dans l’éducation civique. Ça ne reflète pas du tout le paysage médiatique actuel au Liban et dans le monde. On a donc décidé d’intervenir. On fait des ateliers pour sensibiliser les élèves de 13 à 15 ans à la désinformation avec le support du manga. Il est important de s’adapter à un langage qu’ils comprennent. C’est interactif. »

« L’EMI n’est ni une préoccupation ni une priorité au niveau étatique (au Liban). Les écoles privées sont plus réceptives à cette discipline. Mais ça reste toutefois secondaire. On ne peut pas facilement intervenir dans les écoles publiques parce qu’il faut l’aval du gouvernement. Pourtant, c’est important d’investir dans la jeunesse. On compte sur les futures générations pour défricher l’aspect social de la société libanaise. »

Blaise Pascal Andzango : ​« Eduk-Media a pour but de travailler sur l’esprit critique des jeunes. Notre association est née dans un contexte de crise sécuritaire au Cameroun. Ça a nécessité d’engager des activités de sensibilisation aux médias auprès des populations. Il faut savoir que les actions EMI au Cameroun ne sont pas très nombreuses pour l’instant. »

« Au Cameroun, le gouvernement ne prend pas l’éducation aux médias au sérieux. Ça n’est même pas inscrit au programme scolaire. Ce sont les ONG, les associations et la société civile qui s’y intéressent le plus. Nous avons la chance d’avoir quelques associations internationales comme l’OIF pour mener des activités d’éducation aux médias. Je profite de cette occasion pour appeler à une solidarité internationale. »

« Au Cameroun, l’EMI se finance à 90% par des fonds étrangers. »

Patrick Verniers : ​ « Le conseil supérieur de l’éducation aux médias en Belgique est une toute petite équipe. On a des représentants académiques, de l’enseignement, pas que du monde médiatique. Notre objectif est de développer l’éducation aux médias dans l’enseignement, notamment via des financements. On s’assure que l’EMI prenne une place importante dans les programmes scolaires. »

« Ça fait 20 ans qu’il y a des initiatives pour l’EMI en Belgique. Pourtant, je peux vous dire que sur le terrain, on entend beaucoup de discours qui disent qu’on en fait pas assez. »

« En Belgique ce sont des financements essentiellement publics. On est accompagné par le gouvernement. Depuis trois ans, on bénéficie d’une augmentation des financements pour l’EMI de 60 à 70%. »

À retenir

Dans les pays francophones, la situation de l’EMI est très différente. Dans des pays comme le Cameroun et le Liban, il n’y a aucune aide du gouvernement et l’EMI est loin d’être une priorité. En revanche, dans d’autres pays comme le Canada et la Belgique, les mesures prises sont importantes et l’EMI fait partie d’une vraie politique gouvernementale. Mais les acteurs de ces sociétés crient toujours au manque d’investissement. Il faudrait en faire plus.

Arnaud Fischer (EPJT)

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[INTERVIEW] Elin Casse : « En tant que femme trans, je sers parfois à redorer le blason de certains médias »

Photo : Maëva Dumas/EPJT

Elin Casse, journaliste chez Radio Parleur et membre de l’association des journalistes LBGT (AJL), porte un regard critique sur le traitement des communautés queer par les médias. Un sujet qui l’affecte directement en tant que journaliste et femme trans.

Comment les médias abordent-ils les sujets liés aux communautés queer ?

Le plus souvent, le traitement de ces thématiques est maladroit. Pour commencer, les sujets sont souvent les mêmes. On parle rarement du sida chez les lesbiennes par exemple. Cela va être plutôt des thèmes qui correspondent aux fantasmes associés aux LBGT+ : le chemsex, la chirurgie autour de la transition, le sexe entre deux lesbiennes. La vision qu’on a de la communauté est d’ailleurs souvent liée à la pornographie. Au-delà des sujets, le vocabulaire employé peut aussi poser problème comme lorsqu’on parle des personnes trans. Dans certains articles, le dead name est cité ou le mauvais pronom est utilisé pour qualifier une personne. Cela peut sembler être des détails mais ça touche directement à l’identité des trans. Il y a aussi des sujets où l’écriture est maladroite mais les informations données correspondent à la réalité et partent d’une bonne intention. Je pense notamment à l’émission de Karine Le Marchand l’année dernière, « Enfant trans : comment faire ? », le titre est désastreux mais l’idée était de sensibiliser à la trans-identité.

En tant que journaliste et femme trans, quel est votre ressenti vis-à-vis de ces médias ?

E.C. Je suis mitigée. Je travaille pour une radio indépendante et je vais devoir me tourner à contre-coeur vers des médias plus généralistes parce que je ne gagne pas suffisamment d’argent. Si je dis à contre-coeur, c’est parce que je sais que les sujets qu’ils abordent sur les communautés queer sont catégorisés. Il y a aussi le fait qu’en tant que femme trans, je sers parfois à redorer le blason de certains médias. Médias qui le plus souvent me contactent après avoir été accusés de discrimination. 

Selon vous, quels changements devraient être opérés dans la façon de traiter l’actualité liée aux communautés queer ?

E.C. Pour commencer, il faudrait simplement faire preuve de déontologie journalistique. Quand je vois un psychologue et un prêtre sur un plateau télé pour aborder la trans-identité, je me demande où est la contradiction. Il faut donner la parole aux personnes directement concernées. Les journalistes devraient aussi lire plus de la littérature scientifique à propos des transitions ou tout simplement des ouvrages liés à la communauté LGBTQI+. Enfin, il faut faire attention au vocabulaire utilisé et ne pas être dans une forme de voyeurisme en abordant que des sujets « chocs » comme le chemsex.

Recueilli par Maëva Dumas (EPJT)

[Découverte] Trois outils d’enquête en sources ouvertes pour vos prochaines recherches en ligne

De nombreux outils permettent d’enquêter en utilisant uniquement des ressources disponibles en ligne.

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Est-ce que vous avez déjà essayé de chercher des informations sur un inconnu après qu’il vous ait suivi sur un réseau social ? Si la réponse est oui, alors vous avez déjà fait de l’OSINT, peut-être sans le savoir. L’OSINT (pour Open-source intelligence), c’est ce qu’on appelle du renseignement en sources ouvertes. On utilise des outils en ligne, gratuits ou non, afin de trouver des informations sur un site web, sur une photo ou sur une personne. Présentation de trois outils de recherche et vérification en ligne.

  • Boredhumans

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Urgence climatique et responsabilité journalistique : des médias s’engagent

Photo : Tom Demars Granja/EPJT

Avec Violaine CHAURAND, directrice RSE du groupe Bayard, Jean-Pierre DORIAN, directeur de la rédaction de Sud-Ouest (PQR), Vincent GIRET, directeur de l’information de Radio France, Edouard REIS CARONA, rédacteur en chef de Ouest-France.
Animée par Sidonie WATRIGANT, directrice de l’ESJ Pro.

 

La rencontre a débuté par la question de l’adaptation des rédactions face à l’urgence écologique. Les journalistes ont répondu un à un à cette question, prenant soin de développer la prise de conscience ainsi que les méthodes d’actions.

Vincent Giret a répondu que « la loi n’était pas assez armée pour traiter le sujet ». Il a ressenti le besoin de former ses équipes et de les enrichir en connaissances pour gagner en crédibilité. Il a notamment mis en place un plan de formation pour les journalistes et les chargés de programme ainsi que des master class tous les trois mois.

Edouard Reis Cardona a pour sa part démontré la complexité du sujet. Il a ajouté que la crise démocratique que vit le pays a accentué la demande du public de parler des sujets souvent mis sous le tapis par les politiques. Le public ressent le besoin de se sentir impliqué dans l’écologie.

C’est sur ce point que Violaine Chaurand rebondit pour expliquer l’influence des lecteurs dans la prise de décisions. Elle partage que le groupe Bayard rend accessible le sujet de l’écologie afin de ramener la population vers l’information. Une opinion partagée par tous les journalistes intervenants.

Les clés pour comprendre et pour agir

Tous expliquent avoir repensé à leur manière de travailler, de l’impression à la distribution. Ils citent leurs nouveaux moyens de transmission tels que les podcasts ou les formats numériques. Ils se sont entourés de professionnels de l’écologie comme les comités scientifiques pour pouvoir renseigner les lecteurs.

Violaine Chaurand qualifie ce travail de « journalisme de solution ». Le but est, selon elle, « de donner les clés pour comprendre le monde et pour agir ».

La censure de la part des rédactions a été évoqué. Selon Jean-Pierre Dorian, ce n’est pas courant d’être censuré. Le chemin est long pour trouver des solutions et ce qui compte vraiment est de lier les actes aux propos. Il continue en affirmant que c’est un travail de fond et que la charte « n’est pas un effet de mode mais sert pour s’engager sur le long terme ».

La question d’une transition globale est spontanément venue dans le débat. Elle a soulevé des questions autour de la décarbonisation d’une activité, de l’impact sur les lecteurs ou encore de l’équilibre économique d’une entreprise.

Vincent Giret a glissé qu’il s’agissait d’un enjeu systémique pour les entreprises et que des critères d’évaluation avaient été mis en place afin de faire un point sur les avancées chaque année.

Enfin, la conférence s’est terminée sur la méfiance des rédacteurs en chef envers ces sujets à la fois politique et sociaux. Jean-Pierre Dorian a pris le temps d’expliquer que l’écologie était un sujet à risque de militantisme. Il a défini la différence entre militantisme et engagement de la part des médias. Il a particulièrement insisté sur le fait que le « rôle des médias est d’éveiller les consciences et non pas d’arbitrer les choix ». Il a conclu que l’écologie est un thème de vie et que c’est un enjeu pour les générations futures.

Faustine Delahaie/MRI

[INTERVIEW] Yousra Gouja : « La diversité doit être visible »

Photo : Tom DEMARS-GRANJA/EPJT

Étudiante La Chance en 2018-2019, puis à l’ESJ-Pro, Yousra Gouja est aujourd’hui pigiste. Présente à l’atelier « Diversité dans la rédaction : Les RH s’engagent avec La Chance » aux Assises internationales du journalisme, elle revient sur son expérience et pointe du doigt les enjeux de la lutte pour la diversité au sein des rédactions.

Durant la conférence, Estelle Ndjandjo, porte-parole de l’Association des journalistes antiracistes et racisés (AJAR) a interpellé l’association La Chance : « Vous parlez d’un recrutement basé sur des critères sociaux, je me demande quels sont-ils ? Vous parlez de diversité, j’ai vu la promo La Chance cette année, ce n’est pas ce que j’appelle diversité. » La rejoignez-vous sur ce point ?

Yousra Gouja. Bien sûr ! La Chance ce ne sont pas que des personnes racisées. Il faut aussi prendre en compte notre territoire. Paris, ce n’est pas le fin fond de l’Auvergne, où les opportunités sont presque inexistantes. Il ne faut pas ignorer ces conditions. Ce qui n’est pas normal c’est que ces profils auront plus de chance à l’embauche qu’un Parisien racisé. On sait très bien que le prénom Mohammed est mis de côté dans la pile des CV. Les rédactions internationales ont compris. À la BBC par exemple, il y a de tout, c’est l’idéal. La diversité doit être visible. Tout le monde n’est pas blanc en France, pourtant, on continue de faire les mêmes erreurs.

Quelles sont les limites de La Chance ?

Y. G. La Chance nous aide et nous prépare à ce à quoi nous pourrons être confrontés après les écoles. Ils sont là pour nous challenger. Parfois trop et des propos discriminatoires ou déplacés vont être exprimés, notamment pendant les épreuves orales pour intégrer La Chance. Ils en sont conscients et savent qu’il y a un travail à faire. Il y a un code de bonne conduite à adopter. Il faudrait que des formations anti-discrimination soient mises en place. Premièrement pour lutter contre ces comportements, mais aussi et surtout, pour que les membres de La Chance prennent conscience de ce problème. Trop d’abstractions sont faites, il y a peu de remise en question. Ils travaillent pour les médias, mais également pour les Français. Il y a urgence sur la question. J’ai déjà été confrontée à des journalistes qui ne savent pas comment me parler ou qui ne vont pas aborder certains sujets avec moi, parce qu’ils pensent que je vais « m’énerver » [rire].

Quelles sont les difficultés auxquelles vous êtes confrontée aujourd’hui en tant que journaliste ?

Y. G. Pour commencer, il y a des enjeux face à la diversité. Parce que je suis racisée, on va penser, dans certaines rédactions, que je ne vais pas m’intégrer et comprendre le jargon. D’autant plus que je travaille sur des thématiques spécifiques et très techniques : majoritairement l’immobilier. C’est un milieu très masculin où l’on va me faire des réflexions sur mes cheveux, sur ma langue natale. Ce n’est pas méchants, selon eux, mais ce sont des remarques constantes. D’où l’intérêt d’éveiller les consciences avec des formations par exemple.
Ensuite, en tant que pigiste nous sommes confrontés à un manque de transparence et de communication avec les rédactions. Nous passons trop de temps à attendre et à relancer. Les pigistes ont besoin de réponses ou ils finiront par changer de métier. C’est un combat permanent alors que nous avons tous le même objectif : nous sommes tous là pour faire en sorte que le lecteur ait la bonne information. Nous sommes ensemble.

 

Recueilli par Sarah Costes et Manon Louvet (EPJT)

EMI, travaux en cours

EMI, travaux en cours

Photo : Kelvin Jinlack/EPJT

L’éducation aux médias et à l’information s’intensifie en classe. Mais les intervenants manquent de formation et de coopération pour que tous les élèves en profitent.

Au bout du fil, une professeure documentaliste au ton agacé. Elle a l’impression de se battre dans le vide. Presque gênée, elle s’en excuse. Enseignante dans un collège d’Indre-et-Loire, Caroline* ne mâche pas ses mots lorsqu’elle évoque l’éducation aux médias et à l’information (ÉMI). Le lendemain, coup de fil à la rédaction : elle ne veut pas que son nom apparaisse, consciente d’avoir dépassé son droit de réserve. Pour elle, c’est tous les ans la même chose. Vingt ans qu’elle s’efforce de mener à bien des projets de ce type au sein de son établissement. « Je dois négocier avec chaque prof, avec chaque classe et dans chaque discipline », souffle-t-elle. Quand un enseignant ou un directeur s’en va, c’est pire encore. Il faut tout recommencer.

Cette année, elle n’a vu que trois classes sur les trente que compte son collège. L’éducation aux médias et à l’information, créée quarante ans plus tôt, fait pourtant consensus. « L’ensemble du personnel de l’Éducation nationale est concerné », assure Karen Prévost-Sorbe, référente ÉMI à l’académie d’Orléans-Tours. Le ministère est conscient de son importance.

Pas d’heures obligatoires

Si Jean-Michel Blanquer, ancien ministre de l’Éducation nationale, l’a décrite comme un pilier du parcours de chaque élève, ce n’est pas une discipline à part entière. En clair, les élèves n’ont pas d’heures obligatoires dédiées à cet enseignement. Les professeurs, toutes disciplines confondues, sont encouragés à l’inclure dans leurs heures de cours.

En réalité, l’ÉMI passe souvent au second plan à cause du manque de temps pour finir les programmes. Les « profs docs », responsables ÉMI au sein des établissements, en sont réduits à se greffer aux cours de leurs collègues. « Parfois, je comprends. Ils n’ont pas le temps. Le souci, c’est qu’on travaille toujours avec les mêmes », témoigne Anne Esnon, professeure documentaliste au lycée professionnel Martin-Nadaud de Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire). Le manque de communication et de reconnaissance accentue l’incompréhension. Un sentiment d’isolement d’autant plus fort selon la taille de l’établissement scolaire.

C’est le cas de Caroline qui est seule face à plus de 800 élèves pour mener à bien des projets d’ÉMI : « J’ai beaucoup de mal à mettre en place des projets concrets sur le long terme. » Comme le précise Anne Esnon, pour que les projets d’établissement soient réalisables, il faut que tous les acteurs de l’équipe pédagogique s’investissent : « C’est un vrai travail d’équipe, ça ne peut pas venir d’une seule personne. »

Karen Prévost-Sorbe, référente ÉMI, en conférence. Photo : EPJT

Si les professeurs ont conscience de la nécessité de l’ÉMI, ils n’y sont pourtant pas initialement formés. En effet, les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), qui visent à préparer les futurs enseignants, n’intègrent pas l’éducation aux médias dans leurs programmes. « Dans mon établissement, il y a une collègue stagiaire en formation initiale. Elle n’a pas suivi de modules sur l’ÉMI et elle ne savait même pas ce que c’était », s’étonne Anne Esnon.

La question est de savoir comment placer l’ÉMI comme priorité dans le parcours d’un élève si les professeurs ne sont pas eux-mêmes préparés à cette discipline ? À défaut d’avoir été formés lors de leur cursus initial, les professeurs peuvent suivre une formation continue. Mise à disposition par le Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (Clémi), elle propose des vidéos en ligne auxquelles chacun peut s’inscrire… s’il le souhaite. Quelques heures devant l’écran permettent, par exemple, de se sensibiliser au journalisme de guerre, à la lutte contre la désinformation, ou aux réseaux sociaux. 

En montant un projet d’ÉMI, les professeurs se sentent parfois démunis. Les secrets de la fabrication journalistique, sans compter les subtilités techniques, sont difficiles à appréhender. Ils se tournent vers les professionnels du secteur pour les épauler. « Le problème c’est qu’il n’y a pas de journaliste référent pour chaque projet d’ÉMI initié, regrette Karen Prévost-Sorbe. Il faut qu’ils arrivent à dégager du temps tout en sachant qu’ils ont un agenda chargé au sein de leur rédaction. »

La demande des établissements scolaires est bien plus importante que l’offre journalistique. Face à ce manque de disponibilité, une solution est souvent utilisée : se tourner vers les radios associatives.

« Par moment, c’est du bricolage »

S’ils disposent de compétences techniques, les bénévoles ne sont pas tous formés à l’ÉMI, ni au journalisme. « Il faut le dire, par moment, c’est du bricolage », reconnaît Anne Esnon. Au niveau de l’accompagnement et des formations, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux pour les professeurs documentalistes.

L’initiative a la particularité d’allier trois compétences pour rendre l’ÉMI optimale : le journalisme, la technique et la pédagogie. Un équilibre difficile à obtenir. En Centre–Val de Loire, plusieurs personnes réfléchissent à la création d’un annuaire en ligne, qui recenserait les acteurs certifiés.

L’objectif est d’assurer la formation des intervenants et d’améliorer la qualité de l’éducation aux médias. Une idée insufflée par Élodie Cerqueira, nouvelle présidente du Club de la Presse Centre – Val de Loire. Depuis son élection en novembre 2022, elle place l’ÉMI au cœur de ses préoccupations. Même son de cloche chez Karen Prévost-Sorbe : « À terme, il y aura des journalistes et des intervenants certifiés en ÉMI qui se différencieront des autres. »

Sarah COSTES, Jane COVILLE, Arnaud FISCHER et Kelvin JINLACK

(*) Le prénom a été modifié.

[LE RÉSUMÉ] Quelle représentation des communautés queer ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quelle représentation des communautés queer ? »

Photo : Maëva Dumas/EPJT

Avec Eline Casse , journaliste chez Radio Parleur et membre de l’AJL ( Association des journalistes LGBT), Lauriane Nicol, fondatrice de Lesbien Raisonnable, Christophe Martet, directeur de rédaction de Komitid et Marie Kirschen, journaliste indépendante et rédactrice en chef chez WellWellWell.

Animée par Mélisse Wyckhuyse, journaliste pour la Méridienne sur Radio Campus Tours, et Audrey Lecomte, co-animatrice de la quotidienne Sortez.

Les enjeux

Les communautés queer sont généralement représentées dans les médias à travers certains sujets. Chemsex, transition, mariage pour tous… les thématiques abordées se ressemblent et catégorisent les communautés à une image bien définie. Celle-ci peut être parfois connotée et discriminante. Face à cette situation, des changements sont nécessaires au sein des rédactions pour offrir une meilleure représentation des communautés queer plus proche de la réalité.

Ce qu’ils ont dit

Lauriane Nicol : «  C’est important d’apporter de la légèreté. Je ne sais pas si ça fait partie de notre militantisme mais c’est important le divertissement. On réduit trop les communautés queer à des sujets graves ou sérieux. »

Christophe Martet : « En général, les images utilisées pour représenter les communautés queer sont problématiques. Ce sont souvent des clichés lisses tirées de banques d’images ou des photos de la Pride où l’on voit des personnes dans des cadres spectaculaires. Rien à voir avec la réalité. »

Marie Kirschen : « Souvent, les journalistes envoient des questions aux associations queer qui n’ont pas lieu d’être. Évidemment, les réponses qu’ils reçoivent sont abruptes. Ce n’est pas un terrain neutre, les interlocuteurs ont des attentes et à juste titre. »

Elin Casse : « Je travaille pour un média indépendant mais ça ne paie pas assez donc je vais devoir me tourner vers des médias généralistes. C’est un choix que je fais à contre-coeur quand on connait la façon dont ils abordent les sujets autour des communautés LGBTQI+ . »

 

À retenir

Les médias traditionnels doivent sensibiliser leurs rédactions à la réalité des communautés queer. Le vocabulaire employé, les images mises en avant, les sujets abordés, une réflexion est nécessaire autour de ces thématiques pour arrêter de transmettre des représentations trop connotées. 

Maëva Dumas (EPJT)

[INTERVIEW] EMI : « La façon de faire ne peut être que territoriale », défend Tarik Touahria

Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, à la fin de la conférence « Quels changements pour une politique de l’Éducation aux médias et l’information (EMI) tout au long de la vie ? », mardi 28 mars. Photo : Roméo Marmin/EPJT

Tarik TOUAHRIA est président de la Fédération des centres sociaux depuis 2020. Il porte haut et fort le rôle des centres sociaux comme acteurs de démocratie pour plus de justice sociale.

Vous avez été la voix des acteurs associatifs de l’EMI durant cette conférence, quelle légitimité quand on est ni journaliste ni professeur ?

C’est la légitimité de la citoyenneté. Finalement, notre légitimité c’est le bien public, tout simplement. Au titre du bien public, ça concerne tout le monde y compris l’éducation populaire. Depuis son origine, l’éducation populaire travaille les questions de renforcement du sens critique et l’appartenance de l’information au privé. 

Dans le public, des membres associatifs de l’EMI ont évoqué leurs craintes face à une initiative d’homologation de leur pratique. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Je comprends l’intention de la Mission Flash de dire : « Il y a besoin d’un certain niveau de qualité des actions d’éducation aux médias. » Par contre, je ne suis pas sûr que l’homologation, en ce qui concerne l’éducation populaire, soit le meilleur moyen de le faire. Je préférais que les moyens proposés viennent d’en bas en terme de formation des acteurs, des engagements ou de la constitution d’une charte. Il nous paraît assez dangereux d’avoir des modèles qui descendraient du haut pour être appliquer en bas. 

Il y a un problème de coût parce que, souvent, il faut payer les homologations. Il peut y avoir des petites associations qui n’ont pas les moyens de payer ces formations et de prendre en charge 100 % des coûts. Il y a aussi des questionnements sur la capacité des acteurs à innover et inventer pour répondre à des problématiques très spécifiques. C’est la même question que la liberté associée à la loi de 1901, qui est une loi de confiance. Or, plus ça va, plus on est en train de transformer cette confiance en défiance alors qu’on a besoin de liberté pour innover. Si on nous met tout le temps de la suspicion, c’est absolument contre-productif. Il faut laisser l’éducation populaire utiliser ces propres moyens et partir de là pour les innover et les renforcer. Il faut faire attention que ça ne devienne pas trop normatif. 

Vous avez parler de la nécessité de créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information. Pourquoi et à quels besoins ils répondent ?

Pour construire une politique d’intervention sur un sujet vital comme celui-là, il faut nécessairement partir des territoires. Il faut se baser sur le savoir-faire et les problématiques spécifiques aux territoires. Ce n’est pas la même chose de travailler sur les questions d’éducation aux médias à La Ferté-Macé (Orne) que dans le quartier nord de Marseille (Bouches-du-Rhône). Les choses ne vont pas se gérer de la même manière. Rien qu’au niveau du diagnostic, il faut regarder ce qu’il fonctionne et les forces du territoire pour ensuite intervenir. Certaines personnes préconisent de cibler des populations parce qu’il y a urgence mais comment on construit ces cibles et celles-ci ne sont pas les mêmes partout. La façon de faire ne peut être que territoriale. Un acteur comme la région ou le département ne peut pas être le seul à décider. La députée, Mme Violette Spillebout, a évoqué les communautés de communes comme pouvant être un niveau d’échelle intéressant surtout sur un sujet comme l’Education aux médias. 

Recueilli par Jane Coville et Roméo Marmin

[LE RÉSUMÉ] Diversités dans les rédactions : les RH s’engagent avec La Chance

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Diversités dans les rédactions : les RH s’engagent avec la chance »

Le programme égalité 360 permet, depuis deux ans, de « renouveler les talents ». Photo : Manon Louvet/EPJT

Avec Morgan Bak, adjointe auprès de la DRH au groupe Le Monde et l’ObsEmmanuelle Baugartner, directrice adjointe en charge des politiques Egalité, Diversité et Handicap à Radio FranceYousra Gouja, journaliste pigiste La Chance à la diversité et Maxime Lefebure, chargé de mission RH à Médiapart.

Animé par Yassine Khiri, journaliste AFP et bénévole de La Chance

 

 

Les enjeux

Un constat : les discriminations à l’embauche ne cessent de croître envers les personnes racisées. Les directeurs et directrices des ressources humaines s’engagent  pour davantage de diversité et de transparence dans les rédactions avec La Chance. Une association dont l’objectif est de diversifier les profils. 

Ce qu’ils ont dit

Morgane BAK : « Il faut sensibiliser et former les journalistes. Donner les clés pour recruter sans discrimination. »

« Le réseau La Chance nous permet d’être en contact avec des candidats qui n’accèdent pas à certaines rédactions. »

Emmanuelle BAUMGARTNER : « Je pense que la diversité vient également des origines sociales. »

« La transparence vient d’abord de la composition du jury lors des recrutements. »

Yousra GOUJA : « Il faut qu’il y ait plus de regards différents pour que la population ait davantage confiance aux médias. »

Maxime LEFEBURE : « Nous devons détacher diversité et enjeux commerciaux. »

 

À retenir

Le réseau des RH, né il y a à peine un an, permet d’échanger sur les contraintes et les difficultés au sein des rédactions. A l’initiative du projet, Maxime Lefebure, chargé de mission RH à Médiapart, a pour but de développer la transparence et la diversité dans les médias.

Le réseau des RH de rédactions telles que le groupe Le Monde/l’OBS et Radio France, s’engage afin de soutenir La Chance dans ses actions. Parmi elles : une formation antidiscriminations, la création d’une commission des diversités, une publication des offres d’emploi, ou encore un guide de la pige.

Mais les intervenants le certifient : il existe encore une marge importante pour diversifier les recrutements.

Sarah Costes et Manon Louvet

 

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[PRIX EMI] Et les nommés sont…

Présentation du POD’Classe Mou’v, de Radio France pour les prix EMI des Assises 2023.

Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Découvrez les nommés aux prix éducation aux médias et à l’information (EMI) par catégorie.

Dans la catégorie « Média »

  • Citizen Facts par Babel Doc d’Arte : « Un projet de fact-checking collaboratif européen », selon Aude Favre, à l’origine du projet. Une rédaction participative a été créée par la journaliste sur le serveur Discord, à cette invitation.
  • POD’Classe Mou’v de Radio France : La station de Radio France à destination des jeunes publics, Mouv’, a lancé en 2019 son projet EMI : POD’Classe, qui permet aux collèges et lycées partenaires de fonder leurs propres webradios.
  • Salut l’info ! de Bayard et Radio France : Un podcast hebdomadaire à destination des 7-11 ans de dix minutes par épisodes, c’est ce que propose ce partenariat entre Astrapi et France Info.

Dans la catégorie « Ecole »

  • Le Collège Olympe de Gouges (Gironde) propose à ses élèves de s’exercer au journalisme et de se former au changement climatique grâce au journal Décoder. 
  • L’association Fragil et le lycée Les Bourdonnières de Nantes ont lancé un média collaboratif pour lutter contre la haine sur Instagram : lahaine.44.
  • Le webzine L’âge des passions réalisé par les élèves du Collège Simone de Beauvoir à Villeneuve-d’Ascq (Nord).

Dans la catégorie « Hors l’école »

  • ABEJ Solidarité : permettre aux personnes sans-abris de se réapproprier l’actualité à travers la photographie, voilà l’essence de ce projet mené en partenariat avec l’ESJ Lille.
  • La revue Far-Ouest accompagne cinq classes de collèges du Lot-et-Garonne dans la création d’un mook sur le thème de l’eau et ses enjeux.
  • A Pessac (Gironde), le Pod’Rap de l’institut de journalisme Bordeaux-Aquitaine (IJBA) en partenariat avec les écoles de la ville.

Dans la catégorie « Association »

  • La caravane des médias de l’association Carmen : des journalistes qui sillonnent les Hauts-de-France dans un studio mobile depuis 2020 pour discuter de leur rapport aux médias.
  • Le Journal Spectaculaire de Globe reporters : plusieurs heures d’interview et de reportages qui sont jouées en spectacle. La première édition a eu lieu en juin 2022 à Bruxelles.
  • Leur Etouvie de l’Ecole Supérieure de Journalisme (ESJ) : il s’agit d’un film documentaire réalisé par les habitants du quartier prioritaire d’Etouvie à Amiens (Hauts-de-France) en partenariat avec l’ESJ de Lille. Les premiers témoignages sont à retrouver ici.

Dans la catégorie « Touraine – Région Centre – Val de Loire »

  • Radio Pasteur par le Collège Louis Pasteur à La Chapelle-Saint-Mesmin (Loiret) : il s’agit de la radio de cet établissement classé unité localisée pour l’inclusion scolaire (Ulis). Les élèves qui s’y trouvent sont atteint de troubles cognitifs et réalisent des reportages et interviews, notamment de journalistes.
  • FaKe Investigation à Blois : un projet de réalisation de reportages et fact-checking réalisés par des adolescents. Orchestré par le Service jeunesse de Blois avec des journalistes professionnels.
  • Fritz le mag – Tours : Un magazine tourangeau d’actualité locale fait pour les enfants et parfois même, par des enfants en classe de CM2.

Dans la catégorie « Rive Sud de la Méditerranée »

  • Caravane EMI 237 par Eduk Media : une caravane de sensibilisation à l’EMI qui a parcouru le Cameroun au cours de l’année 2022.
  • La fondation Samir Kassir : des mangas pour sensibiliser à la désinformation. Ces ouvrages constituent un fil rouge qui permet de proposer des jeux de rôles dans des ateliers mis en place au Liban.
  • L’association Al Khatt, qui propose des clubs de médias citoyens à travers la Tunisie.

Alhussein Sano, l’exemple parfait de l’utilité de la Maison des Journalistes

Alhussein Sano (à gauche) et Albéric De Gouville (à droite) discutent de la liberté de la presse sur la scène de l’Agora à Mame.

Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

La Maison des Journalistes intervient tous les matins à 9h15 à l’Agora de l’Espace MAME devant un public de collégiens et de lycéens. L’association a été fondée en 2002 pour accueillir les journalistes réfugiés en France et pratique l’éducation aux médias et à l’information (EMI) depuis 2007.

L’Agora n’est pas encore tout à fait remplie mardi 28 mars à 9 h du matin. Ce sont principalement des adolescents qui sont assis, même si la conférence est ouverte à tous. Tous les matins, de 9h15 à 10h30, pendant les Assises, la place est laissée à la Maison des Journalistes (MDJ).

Sur la scène, deux intervenants : Albéric De Gouville et Alhussein Sano. Le premier est le président de l’association. Le second est un journaliste guinéen, demandeur d’asile, qui vit en ce moment à la MDJ à Paris.

Car accueillir des journalistes en exil, menacés pour leur profession dans leurs pays d’origine est la priorité de cette association, fondée en 2002. « Il y a quatorze chambres pour six à huit mois de présence par personne, le temps que les demandes d’asile soient acceptées » explique Albéric De Gouville.

L’association propose à ses protégés des aides pour les démarches, des cours de français et organise des évènements. Elle est financée par des organismes français, le fond européen pour les réfugiés et par des médias partenaires.

Ce n’est pas tout : « L’autre mission principale de la Maison, c’est l’éducation aux médias et à l’information », précise M. De Gouville. A travers le projet Renvoyés Spécials, les journalistes de la Maison rencontrent des classes de collèges et de lycées à travers la France. Pendant les Assises internationales de journalisme de Tours, cette rencontre a lieu à Mame.

Arrêté par la junte guinéenne

Alhussein Sano est un professionnel de médias depuis 2007. En Guinée, il travaillait à la tête d’une agence de production. Celle-ci travaillait en collaboration avec la RTJ, la radio-télévision publique guinéenne. Lui-même a exercé le poste d’animateur d’une émission de télévision culturelle. En 2013, il devient directeur des programmes de la chaine.

En 2017, « le directeur général est remplacé par un militant du parti au pouvoir » explique Alhussein Sano. La ligne éditoriale change pour une promotion active du président, Alpha Condé et de son troisième mandat consécutif. « Je me suis opposé à cette promotion et j’ai donc été rétrogradé. Par la suite, je me suis surtout concentré sur mon agence de production. » C’est là que les ennuis ont commencé : « Je louais mon matériel aux opposants, j’ai fait un documentaire sur les oppositions au troisième mandat, j’interviewais des jeunes de cette frange. On refusait de diffuser mes productions. »

En 2021, il y a eu un coup d’Etat militaire en Guinée. M. Sano continue à louer son matériel aux mêmes opposants. Cette fois-ci, il ne s’agit plus de mise au placard mais de menaces physiques. « J’ai été arrêté deux fois, à la première, j’ai été emprisonné et j’ai réussi à m’enfuir. C’était en juin 2022. Un mois plus tard, après la première grande manifestation de juillet contre la junte. Le lendemain, on est revenu m’arrêter. J’ai une nouvelle fois réussi à m’enfuir et ai préféré quitter le pays avec ma famille. »

« Ca me fait du bien ces rencontres »

Sano arrive donc en France fin 2022. « J’ai découvert la Maison des journalistes sur internet. Je les ai contactés, ils m’ont poussé à faire ma demande d’asile. » Après trois mois en hébergement d’urgence pour les demandeurs d’asile à Strasbourg, puis dans un centre d’urgence à Reims, il est finalement recontacté par la MDJ et s’y installe le 7 décembre dernier.

Il a participé lui-même aux opérations Renvoyé Spécial à Paris et à Montpellier. C’est la première fois qu’il vient aux Assises de Tours. « Ça me fait du bien ces rencontres. Cela me permet de parler de mon métier. J’échange avec des collégiens et des lycéens, je leur parle de l’importance de la liberté d’expression qui est un pilier de la démocratie et même, pour moi, un pilier de l’existence. »

Laura Blairet

[LE RESUME] « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? »

Retrouvez l’essentiel de l’évènement « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? » 

De gauche à droite : Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM, Nathalie Sonnac, présidente du COP CLEMI, professeure, Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux et animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France. Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Présentation de l’étude « Information : 50 nuances de défiance. Les Français face à la désinformation »,
par Laurence DE NERVAUX, directrice de Destin commun.

Avec Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Nathalie SONNAC, présidente du COP CLEMI, Divina FRAU-MEIGS, professeure-chercheuse, Savoir-Devenir, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, Sandra LAFFONT, présidente et cofondatrice d’Entre les Lignes, Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM.

Animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France.

 

 

Les enjeux

La conférence était l’occasion de tirer les conclusions et prendre connaissance des propositions du rapport parlementaire “Mission « flash » sur l’éducation critique aux médias” des députés Philippe Ballard et Violette Spillebout. L’enjeu est de démocratiser l’EMI au niveau national et aussi au niveau local en prenant en compte les spécificiés de chaque territoire. Il a été évoqué l’ambition de motiver les partenaires, tant publics que privés, pour financer l’EMI car l’information est “un bien commun”. L’objectif de la conférence était également d’entendre les critiques et les retours du terrain des différents acteurs présents dans la salle.

Ce qu’ils ont dit

Laurence De Nervaux : « Deux tiers des Français trouvent que les contenus extrêmes prennent trop de place. »

« En moyenne, un Français sur quatre fait confiance aux journalistes. »

« Plus d’un Français sur quatre n’écoute pas les informations car elles sont trop négatives. »

Violette Spillebout : ​ « Face à tout ce qui arrive, le plus important, c’est l’éducation. Nous aurons peut-être les moyens de renforcer l’éducation pour tous. Aurons-nous les moyens de combattre les ingérences, tout ce qu’on voit dans le numérique ? C’est moins certain. »

« Peut-être l’erreur a été de se concentrer sur le numérique dans l’éducation nationale et la culture. C’est un sujet qui concerne la citoyenneté, la jeunesse, la justice, c’est un sujet interministériel. On a un socle commun, ce qui réduit les inégalités. […] On a vu beaucoup choses liées à la bonne volonté, mais très peu de moyens. Je pense qu’il y a quand même une question de déperdition de l’argent public qui mérite d’être regardée. »

« Beaucoup d’éducateurs sont bénévoles, d’autres sont rémunérés. La mise en place d’un tarif règlementé, c’est une opportunité pour lutter contre la précarité du métier. »

« Les professeurs documentalistes s’en occupent, mais ce n’est pas reconnu de façon régulière. Pour moi, chacune des propositions du rapport mérite un groupe de travail composé des sphères publiques et privées. Chaque sujet est un chantier à mener. »

Nathalie Sonnac : « La façon dont on régulait les médias auparavant ne correspond pas à l’espace public numérique d’aujourd’hui. »

« La crise sanitaire a transformé les usages informationnels et mis le numérique sur le devant de la scène pour les plus jeunes ». « Je pense que la technologie doit demeurer un outil. »

 « L’école ne peut pas tout, elle doit se réintégrer avec des acteurs de la société civile. Les professeurs-documentalistes sont des acteurs centraux de l’EMI, mais l’éducation nationale ne leur a peut être pas donné une reconnaissance suffisamment importante. »

Divina Frau-Meigs : « Les compétences de l’EMI : comprendre, critiquer, créer. […] Cette dimension créative est en train de passer à la trappe. »

« On a besoin de l’école, c’est pour ça que je préconise une matière à part entière, pour que ce soit pratiqué, pas juste pensé. »

« Les personnes qui amplifient la désinformation sont des seniors écartés de l’enseignement depuis trente ou quarante ans. Comment on atteint ces seniors qui sont sur des médias traditionnels ? »

Tarik Touahria : ​ « Dans les actions qu’on porte dans les centres sociaux, le « faire » est bien souvent avec les médias associatifs, boîtes radio, outils en ligne… »

« Si on donne aux acteurs de l’EMI les moyens de travailler, ils feront du bon travail. »

« Tous les ans, il faut aller chercher de l’argent, répondre à des appels à projets, faire des bilans intermédiaires… »

« Il ne faut pas opposer ascendants et descendants […] Il faut créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information, idem pour l’écologie, le numérique… »

Sandra Laffont : « On nous demande beaucoup d’intervenir sur la désinformation. Mais notre obejctif premier, c’est de donner le goût de l’info, pas d’avoir une approche anxiogène de l’info. Il faut ouvrir les jeunes sur le monde. »

« Nos bénévoles font ça dans un engagement citoyen. On peut se le permettre, car nous avons des CDI à côté. C’est plus compliqué pour les pigistes, car intervenir en classe, c’est renoncer à une pige. Je pense qu’il faut prioriser les moyens sur les interventions en classe. »

Julie Joly : « Il faut qu’on se rende compte que devant cette urgence info, si on reste rivés sur nos écrans, on va se faire avoir, on aura perdu notre capacité à penser seuls. Pour cela, il faut des moyens. Les médias doivent avoir les moyens d’intervenir, de toucher les jeunes, mais ces moyens sont considérables. »

« Pour parler à des jeunes, il faut des jeunes. »

À retenir

Les membres de la table ronde sont favorables à la mise en place de mesures permettant un meilleur rayonnement de l’EMI au niveau national mais aussi au niveau local. Par exemple, tous souhaitaient une meilleure reconnaissance du travail des professeurs-documentalistes. Toutefois, les avis divergent parfois sur la méthode à appliquer : faut-il mettre les journalistes au cœur de l’EMI au vu de la défiance vis-à-vis de ces derniers ? Doit-on donner une place plus importante aux acteurs des collectivités territoriales, qui connaissent déjà les publics et peuvent se révéler des partenaires clés ? Une chose est sûre, une meilleure coopération entre acteurs publics et privés est nécessaire.

Jane Coville (EPJT) Roméo Marmin (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] Présentation de « vu des quartiers » : suivez le guide !

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Présentation de « vu des quartiers » suivez le guide ! »

De gauche à droite, Michel Dumoret, Maxime Daridan, Manon Meye, Antoine Ly et Maryam El Hamouchi. Conférence sur l’outil « vu des quartiers », aux Assises de Tours, le 28 mars 2023.​ Photo : ArnaudFischer/EPJT.

Avec Maxime Daridan, secrétaire général de BFM TV, Michel Dumoret, directeur en charge de la lutte contre la désinformation France Télévisions, Maryam El Hamouchi, journaliste au pôle enquête et reportage à l’AFP et Antoine Ly, délégué éditorial Radio France en charge de la diversité et de l’égalité des chances.

Animé par Manon Meye, créatrice de contenu au Groupe Cerise.

 

 

Les enjeux

Il est reproché aux journalistes de ne pas assez parler des banlieues et, quand c’est le cas, c’est pour en parler en mal : violences, pauvreté etc. Face à ce constat, BFM TV en collaboration avec l’association des maires Ville&Banlieue a créé « Vu des Quartiers », un annuaire qui met en valeur les contacts d’habitants et d’acteurs des quartiers prioritaires qui veulent échanger avec la presse et raconter ce qui se passe chez eux. L’objectif est de parler plus justement et de façon plus équilibrée de ce qui se passe dans les quartiers.

 

Ce qu’ils ont dit

Maxime Daridan : ​ « ‘Vu des quartiers’ est un annuaire de contact de quartiers prioritaires. On n’est absolument pas sur une question d’expertise. Vous venez d’un quartier, venez ! C’est simplement un outil mis à disposition. »

« Il faut que l’on arrive à faire que les habitants des quartiers soient comme tout le monde : dans un traitement banal de l’actu. »

« ‘Vu des quartiers’ est juste un outil. Après ça dépend de ce qu’en font les gens. Je suis convaincu que ça peut marcher, parce que c’est un outil simple. Mais ça s’inscrit dans un écosystème qui ne se suffit pas à lui-même. Il va falloir que tout le monde s’investisse. »

« Dans le règlement intérieur on a listé les règles du jeu. Il ne faut pas tricher. Ceux qui s’inscrivent, les habitants des quartiers et les journalistes, s’engagent à être honnêtes. Le but de l’outil n’est pas de parler des quartiers en bien. C’est de rétablir un équilibre sur le traitement que l’on en fait. »

« On a essayé de recenser au maximum les quartiers hors Île-de-France. On s’intéresse aussi aux quartiers des département d’Outre-mer (DOM). C’est d’ailleurs un double défi parce-que le traitement des DOM en tant que tel est déjà insuffisant. »

Michel Dumoret : ​ « Quand on va dans ces cités ou quartiers prioritaires, on n’est pas les bienvenus. On nous reproche d’être très loin de ces gens, de leurs préoccupations. Je pense que cet outil va nous permettre de décloisonner cette relation. À France TV, notre objectif est de montrer la France telle qu’elle est. Ces gens en font partie. Or, ils n’ont pas beaucoup de place dans l’actualité. Si cet annuaire peut permettre de susciter des vocations dans nos rédactions, j’en serais très heureux. »

« Il faut être optimiste. Dans les médias, il y a de plus en plus de visages, de noms qui montrent la diversité. Il y a aussi des bourses dans la formation, etc. »

Maryam El Hamouchi : ​ « Je ne trouve pas que ce soit difficile de travailler en banlieue. La critique que je peux faire c’est que, très souvent, les journalistes parisiens passent le périph’ quand ça va mal. »

« Rien ne remplace le terrain. Il faut aller sur place pour voir ce qu’il se passe. Ne pas se contenter d’un coup de téléphone. »

Antoine Ly : ​ « C’est compliqué de filmer en banlieue. La plupart des journalistes n’ont pas les clés de ce que sont les banlieues. ‘Vu des quartiers’ permet d’avoir un annuaire dans lequel des contacts sont volontaires pour parler. Ça a aussi l’avantage de multiplier les sources. Ça permet d’avoir une image très concrète des banlieues. C’est ce qui nous intéresse à Radio France. »

« On a créé cet annuaire pour que ceux qui veulent parler soient des volontaires. C’est important. Ce sont des personnes qui ont envie de se réapproprier leur histoire. Si cet outil peut permettre de rétablir un gage de vérité, cet un outil précieux. »

« Le journaliste doit toujours avoir du recul, un œil critique. Il ne doit pas juste appeler et tendre un micro. Quand on appelle un contact de l’annuaire, on le teste, on essaie de voir s’il veut nous balader. »

« J’ai des collègues reporters de guerre qui m’ont dit « je préfère aller en Irak ou en Afghanistan qu’en banlieue ». C’est hallucinant. On se doit donc de rétablir une confiance chez les journalistes et les habitants pour démocratiser le traitement du quotidien en banlieues. On y croit à Radio France. »

À retenir

Le traitement médiatique du quotidien des habitants des banlieues n’est pas le reflet de ce qu’ils vivent. Et on ne parle que rarement d’eux, sauf quand ça va mal. Avec l’outil ‘Vu des quartiers’, l’objectif est de rétablir une certaine confiance entre journalistes et habitants des banlieues pour pouvoir résoudre ce problème. Leur laisser prendre la parole est la meilleure manière de faire.

Arnaud Fischer (EPJT)

 

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Assises 2023 : une semaine pour « Re trouver le goût de l’info »

Aujourd’hui commence la 16e édition des assises du journalisme de Tours. Qui dit nouvelle édition, dit nouvelle thématique. Avec en tête d’affiche de l’événement cette année : « Re trouver le goût de l’info ».

 

Première matinée des Assises du Journalisme 2023. Photo : Inés ALMA/EPJT

C’est parti pour les 16e Assises du Journalisme de Tours. Au menu des trois prochains jours : ateliers formations, conférences, débats et soirées sur le thème « Re trouver le goût de l’info ». De quoi s’interroger et débattre sur une profession qui peine à capter l’attention du public et à avoir sa confiance.

Pour démarrer ces Assises, en guise de mise en bouche, s’est déroulée lundi une conférence qui visait à mettre en parallèle les problématiques dans la cuisine et dans le journalisme. Ce mardi, zoom sur l’Éducation aux Médias et à l’Information (EMI), avec par exemple une conférence sur les changements à adopter pour une politique de l’EMI ou un atelier formation sur l’investigation citoyenne avec nothing2hide.

L’après-midi, ce sera le dérèglement climatique qui sera principalement au cœur des réflexions, avec plusieurs conférences sur cette thématique et sur comment les médias abordent ce défi. La journée se conclura, à la salle Thélème, avec un débat sur « Peut-on faire confiance à la science ? ».

Mercredi, plongée dans la thématique principale de ces Assises avec une conférence sur « Ils ont créé leur média cette année » ou « Comment retrouver le goût de l’info ? ». La journée sera également riche en ateliers formations avec entre autres « Journalisme de solutions : comment le pratiquer avec succès ? ». La soirée se déroulera, quant à elle, au Bateau Ivre pour un banquet de journalisme et citoyenneté.

Jeudi, les difficultés des journalistes seront au centre de l’attention. Au programme : des conférences sur le burn-out des journalistes, les entreprises de désinformation, les bulles informationnelles ou encore sur ChatGPT. La ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, interviendra également en fin de journée. À nouveau, se dérouleront des ateliers formations pour, par exemple, s’y retrouver dans « La jungle des médias ». Enfin, la journée s’achèvera avec la projection du film « Service Public » au Cinémas Studio.

Les Assises du Journalisme se conclueront samedi 1er avril avec le salon du livre du journalisme. De quoi découvrir des ouvrages qui ont su marquer et parler de l’actualité comme avec « Dessinez encore » de Coco ou « Une journaliste ne devrait pas dire cela » de Memona Hintermann.

 

Suivez-nous sur Twitter pour vivre les Assises du Journalisme au plus près. Et pour approfondir les sujets traités lors des Assises, rendez-vous sur La Feuille (distribuée également à La Mame en format papier les 28,29 et 30 mars 2023)

Défi éminent

Mardi 28 mars débutent les 16e Assises internationales du journalisme à Tours. A cette occasion, les étudiants en première année du master de l’EPJT réalisent La Feuille, dont les numéros seront distribués lors des Assises mais que vous pouvez également trouver ci-dessous.

Bonne lecture