Photo : Sophie Jeanneteau/EPJT

Dans un contexte de crise économique dans les médias, de plus en plus de journalistes font le choix de l’auto-entreprenariat. Un statut souvent précaire et qui rend plus difficile l’accès à la carte de presse.

En 2022, le nombre de cartes de presse attribuées par la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) est de nouveau en baisse et pointe à 33 626.

Pourtant le nombre de primo-demandeurs est lui en hausse de 4,7% notamment en raison du développement de l’auto-entrepreunariat.

Les entreprises de presse ont régulièrement recours à des journalistes freelance qu’ils rémunèrent de plus en plus en facture et non en pige. Cette situation pose un certain nombre de problèmes pour ces journalistes, au premier rang desquels l’impossibilité d’obtenir la carte de presse. Car les conditions d’attribution de cette dernière restent immuables. Il faut justifier trois bulletins de salaire consécutifs, que le journalisme constitue l’activité principale et la principale source de revenus du demandeur. La commission reste pourtant à l’écoute des cas particuliers. La commission plénière, qui regroupe les représentants des journalistes et employeurs, étudie chaque année plus de 1 000 dossiers qui présentent des situations inédites.

Une vigilance extrême sur la relation salariée

Mais, donc, ces « situations inédites » ne concernent pas les auto-entrepreneurs, toujours exclus par la CCIJP. « Les commissaires sont opposés à une évolution au niveau de l’auto-entrepreunariat » confirme Olivier Samain, commissaire et ancienne voix d’Europe 1.

La commission reste réticente à faire évoluer les conditions d’attribution, arguant que la carte de presse représente avant tout une protection juridique régie par le Code du travail. Attribuer la carte de presse aux journalistes freelance ouvrirait ainsi selon la commission « un boulevard pour les entreprises de presse » estime Olivier Samain, ce qui favoriserait le recours aux auto-entrepreneurs et donc la précarisation encore plus grande du métier.

L’auto-entreprenariat prive de protection sociale prise en charge par un employeur et limite les recours en cas de litiges. La commission se veut être le dernier rempart face à cette flexibilisation de l’emploi journalistique, qui ne semble pourtant pas freiner les entreprises de presse dans leur pratique. 

Les limites de l’auto-entreprise

Mais la commission considère que les médias vont rapidement voir les limites à faire travailler des journalistes auto-entrepreneurs qui ne sont pas titulaires de la carte de presse. « Sans accréditation par exemple, les journalistes n’ont pas accès à un certain nombre de sources ce qui peut nuire à la qualité de leur travail », explique le commissaire de la CCIJP.

Et aussi à leur évolution salariale. La carte de presse est un outil de travail mais aussi la reconnaissance d’un statut, qui permet par exemple de faire le calcul de l’ancienneté et prétendre à des revalorisations salariales.

Dans le cas d’une cession d’un journal à un nouveau propriétaire, elle donne également la possibilité d’invoquer la clause de cession et aussi la clause de conscience, que ne permet pas le statut d’auto-entrepreneur. 

 

Dorian Gallais/EPJT