Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, à la fin de la conférence « Quels changements pour une politique de l’Éducation aux médias et l’information (EMI) tout au long de la vie ? », mardi 28 mars. Photo : Roméo Marmin/EPJT

Tarik TOUAHRIA est président de la Fédération des centres sociaux depuis 2020. Il porte haut et fort le rôle des centres sociaux comme acteurs de démocratie pour plus de justice sociale.

Vous avez été la voix des acteurs associatifs de l’EMI durant cette conférence, quelle légitimité quand on est ni journaliste ni professeur ?

C’est la légitimité de la citoyenneté. Finalement, notre légitimité c’est le bien public, tout simplement. Au titre du bien public, ça concerne tout le monde y compris l’éducation populaire. Depuis son origine, l’éducation populaire travaille les questions de renforcement du sens critique et l’appartenance de l’information au privé. 

Dans le public, des membres associatifs de l’EMI ont évoqué leurs craintes face à une initiative d’homologation de leur pratique. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ?

Je comprends l’intention de la Mission Flash de dire : « Il y a besoin d’un certain niveau de qualité des actions d’éducation aux médias. » Par contre, je ne suis pas sûr que l’homologation, en ce qui concerne l’éducation populaire, soit le meilleur moyen de le faire. Je préférais que les moyens proposés viennent d’en bas en terme de formation des acteurs, des engagements ou de la constitution d’une charte. Il nous paraît assez dangereux d’avoir des modèles qui descendraient du haut pour être appliquer en bas. 

Il y a un problème de coût parce que, souvent, il faut payer les homologations. Il peut y avoir des petites associations qui n’ont pas les moyens de payer ces formations et de prendre en charge 100 % des coûts. Il y a aussi des questionnements sur la capacité des acteurs à innover et inventer pour répondre à des problématiques très spécifiques. C’est la même question que la liberté associée à la loi de 1901, qui est une loi de confiance. Or, plus ça va, plus on est en train de transformer cette confiance en défiance alors qu’on a besoin de liberté pour innover. Si on nous met tout le temps de la suspicion, c’est absolument contre-productif. Il faut laisser l’éducation populaire utiliser ces propres moyens et partir de là pour les innover et les renforcer. Il faut faire attention que ça ne devienne pas trop normatif. 

Vous avez parler de la nécessité de créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information. Pourquoi et à quels besoins ils répondent ?

Pour construire une politique d’intervention sur un sujet vital comme celui-là, il faut nécessairement partir des territoires. Il faut se baser sur le savoir-faire et les problématiques spécifiques aux territoires. Ce n’est pas la même chose de travailler sur les questions d’éducation aux médias à La Ferté-Macé (Orne) que dans le quartier nord de Marseille (Bouches-du-Rhône). Les choses ne vont pas se gérer de la même manière. Rien qu’au niveau du diagnostic, il faut regarder ce qu’il fonctionne et les forces du territoire pour ensuite intervenir. Certaines personnes préconisent de cibler des populations parce qu’il y a urgence mais comment on construit ces cibles et celles-ci ne sont pas les mêmes partout. La façon de faire ne peut être que territoriale. Un acteur comme la région ou le département ne peut pas être le seul à décider. La députée, Mme Violette Spillebout, a évoqué les communautés de communes comme pouvant être un niveau d’échelle intéressant surtout sur un sujet comme l’Education aux médias. 

Recueilli par Jane Coville et Roméo Marmin