Bernard Guetta a dédicacé et présenté son nouvel ouvrage aux Assises du journalisme.

Dans l’Ivresse de l’Histoire, Bernard Guetta nous raconte ses premiers pas en journalisme, ses années de correspondant au Monde en Europe de l’Est et aux États-Unis ainsi que son engagement politique de soixante-huitard. 

Ce livre est un témoignage. Bernard Guetta a choisi de nous conter deux histoires. Tout d’abord, l’Histoire, celle avec un « h » majuscule, celle que nous lisons, celle que nous apprenons. Une Histoire complexe, tendue, dans un contexte de Guerre froide obscur, où les intérêts des deux grands se sont infiltrés au cœur de la vie de millions de personnes. Bernard Guetta est un grand témoin de cette Histoire. Des origines de « Solidarnosc » à la chute de l’URSS, en passant par la Révolution iranienne et les Printemps arabes, le journaliste a tenté de comprendre. Comprendre comment les forces collectives ont pu se soulever, ou non, contre l’ordre établi. Comprendre comment la volonté (bonne ou mauvaise), de quelques uns a changé le destin de milliers de Polonais, Hongrois, Russes ou Irakiens.

La deuxième histoire, c’est celle avec un petit « h ». C’est la sienne. L’histoire d’un soixante-huitard assumé, de ses premiers espoirs nés de la Révolution sociétale des années soixante aux grandes désillusions du « Nouvel ordre mondial ». L’histoire d’un homme, convaincu par sa « deuxième gauche », la gauche non-communiste, la gauche dans laquelle il croyait, celle pour laquelle il vivait. Une gauche bien spécifique qui a d’ailleurs fini par disparaître. Pourtant, Bernard Guetta est un optimiste, et comme lui a un jour glissé Shimon Pérès : « Et qu’est-ce qu’on fait avec le pessimisme ? ».

C’est donc à grand renfort d’anecdotes que Bernard Guetta entremêle habilement ces deux histoires. Des barricades de la Sorbonne en 1968 à son déjeuner avec des diplomates iraniens, amateurs de bon vin, nous voyageons dans le temps et dans l’espace avec Bernard Guetta. Si on enlève quelques passages un peu longs, notamment sa réflexion sur la chute de l’URSS et les déboires de Boris Eltsine, ce livre se lit avec une facilité troublante, compte tenu des thèmes abordés, loin d’être très sexy.

Toute sa vie, Bernard Guetta a souhaité comprendre. De ses premiers pas au Nouvel Observateur à son poste de correspondant du Monde en Europe de l’Est, son seul objectif réel est clair : comprendre. Comprendre l’ébullition polonaise des années soixante-dix, comprendre le choc des générations dans une ex-URSS tourmentée, comprendre la jeunesse arabe après 2011. Mais comprendre est une tâche vaine. Tous ceux qui s’y sont risqués le savent. On comprend mieux, certes, mais on ne comprend jamais tout. Bernard Guetta le sait. Mais son livre est un parcours. Un parcours dans l’ivresse de l’Histoire.


Pablo Menguy