En déplacement aux Assises du journalisme à Tours, vendredi 15 mars, Franck Riester a évoqué la possible création d’un conseil de presse. Le Ministre de la Culture est également revenu sur la position du pouvoir politique à l’égard des journalistes.


La Feuille : En janvier 2019, vous avez évoqué la volonté de créer un conseil de déontologie du journalisme. Pourquoi voulez-vous mettre en place ce dispositif ?

F.R. : Dans la société, il y a de plus en plus de défiance vis-à-vis des élites au sens large : les politiques, les chefs d’entreprise et les journalistes. Il me paraît intéressant de réfléchir aux moyens pour recréer de la confiance entre les Français et les journalistes. Dans certains pays, des instances ont été mises en place dans lesquelles les citoyens peuvent formuler des recours. Avec des résultats très intéressants, puisque cela offre la possibilité de donner un avis sur le traitement de l’information. Et donc avoir le sentiment que les journalistes ne sont pas des personnes qui n’ont aucun compte à rendre.

N’est-ce pas une mauvaise chose que cette initiative vienne du gouvernement ?

F.R. : Cela ne peut pas être une décision politique parce qu’elle toucherait à un principe très important de liberté de la presse. Une mission a été confiée à Emmanuel Hoog, ancien patron de l’AFP, pour réfléchir à cette question et consulter un grand nombre de journalistes et patrons de presse. Cela permet de voir sous quelle forme pourrait-on créer le conseil de presse. Mais il ne peut être créé que s’il y a une volonté des professionnels. Nous citoyens français, nous responsables politiques, nous journalistes, nous devons retisser des liens de confiance entre les médias et les Français. Le conseil de déontologie peut être une solution qui ne peut passer que par les professionnels de la presse.

Cette année, nous avons vu plusieurs personnalités politiques exprimer une certaine hostilité à l’égard des journalistes, à l’image de Jean-Luc Mélenchon qui a déclaré que la « haine des médias et de ceux qui les animent était juste et saine ». Qu’en pensez-vous ?

F.R. : C’est inadmissible. Nous, hommes et femmes politiques, avons une responsabilité toute particulière vis-à-vis de nos compatriotes pour expliquer qu’il n’y a pas de démocratie sans presse. La presse, et le pluralisme qui va avec, est un pilier essentiel de la démocratie. Nous devons montrer l’exemple sur ce sujet. Si on ne veut pas qu’il y ait de violences à l’égard des journalistes, il faut que les responsables politiques tiennent des propos respectueux. Les questions, les prises de position des journalistes peuvent parfois déranger, mais ce n’est pas grave : c’est cela la démocratie. Il faut que l’on veille à ce que cette presse reste libre, indépendante et plurielle.

Pourtant, après les révélations de l’affaire Benalla, le président Emmanuel Macron s’était attaqué à la presse en lui reprochant de « vouloir devenir un pouvoir judiciaire ».

F.R. : En tant que ministre de l’Audiovisuel et de la Culture, je vois que le président de la République souhaite continuer une politique ambitieuse en matière d’aides à la presse et de financement. La presse a besoin d’être accompagnée financièrement pour exister économiquement. Il souhaite que tous les moyens soient donnés pour faire en sorte que les missions de service public puissent continuer d’être satisfaites. Il a la volonté très claire de préserver la liberté de la presse et de donner les moyens nécessaires pour sa pérennité économique. Sur les questions de liberté de la presse, non seulement il est vigilant en France mais il a un rôle international majeur en travaillant avec un certain nombre d’organisations de journalisme, par exemple Reporters Sans Frontières, pour faire en sorte que la liberté de la presse soit vraie dans notre pays mais aussi dans un grand nombre de pays dans le monde.