Photo : Prunelle Menu/EPJT

Haydée Sabéran est rédactrice en chef adjointe de la revue photographique 6 mois. également responsable du pôle narration, elle nous explique le processus d’élaboration de la revue. Le temps et la coopération sont pour elle les deux principes essentiels pour produire un travail de qualité.

Quelle place occupent les textes et les légendes dans une revue photographique telle que 6 mois ?

Haydée Sabéran. Les légendes des photos sont les mots des photographes. Nous les interviewons pour construire avec eux le récit qui accompagne leurs images. Les mots complètent les photos. Mais l’histoire doit tenir indépendamment des images. Si on masque les photos, on doit pouvoir comprendre la narration toute seule, et inversement.

Quelles sont les consignes que vous donnez à vos photographes avant d’aller sur le terrain ?

H. S. Nous ne leur donnons aucune consigne, car nous ne les envoyons pas sur le terrain. Ce n’est pas comme ça que nous fonctionnons. Nous ne commandons pas de récits. Nos photographes partent en quête d’images et de narrations. Ils travaillent sur le temps long, des mois voire des années. Ce qui va nous intéresser, c’est un travail de long terme qui traduise en profondeur une réalité d’aujourd’hui.

Selon vous, quel est le secret d’une photo réussie ?

H.S. Le temps. C’est la réponse la plus naturelle qui me vient. Nous cherchons à maintenir un travail de qualité et celui-ci n’est possible que si l’on prend le temps, aussi bien sur le terrain pour les photographes qu’a posteriori au sein de la rédaction. Nous pouvons passer trois heures à interviewer un photographe et ça ne pose souvent pas de problème aux interlocuteurs. Ils sont même plutôt touchés qu’on leur accorde autant de temps. Une série de photoreportage est toujours un travail extrêmement long.

Comment vous organisez-vous avec les photographes pour la partie rédaction ?

H. S. C’est un travail à faire ensemble. J’aime bien dire que nous partons en reportage dans la tête du photographe. C’est lui ou elle qui se trouvait sur le terrain. A nous de prendre le temps de les écouter, de poser les bonnes questions pour que les légendes soient les plus riches, les plus complètes possibles. Qu’elles racontent par exemple le hors-champ. Parfois, les photographes ne veulent pas trop en dire, certains souhaiteraient que la photo parle d’elle-même, donc il arrive qu’on soit dans une forme de négociation avec eux. Notre mission est de faire du journalisme, donc il faut être le plus précis possible. Mais nous cherchons toujours à respecter le pacte que les photographes ont passé avec les personnes photographiées.

 

Recueilli par Prunelle Menu