Retrouvez l’essentiel de l’événement « Focus Liban : l’état du journalisme et des médias »

Manon Modicom/EPJT

Animé par Jad Shahrour, chargé de communication pour Sheyes avec Caroline Hayek, grand reporter pour L’Orient-le Jour (Prix Albert Londres 2021), Alia Ibrahim, co-fondatrice de CEO et de Daraj.com, et Marc Saikali, PDG d’Ici Beyrouth.

 

 

Les enjeux

Entre 2020 et 2021, le Liban a dégringolé de cinq places dans le classement annuel de Reporters sans frontière. Derrière la crise socio-économique qui fissure le pays, se cache une deuxième guerre : celle des médias pour leur liberté. Un climat de tension qui a atteint son paroxysme en février 2021, avec l’assassinat de l’éditeur et commentateur politique, Lokam Slim. Dans de telles conditions, et alors que la jeunesse libanaise fuit le pays vers d’autres horizons, comment les médias libanais parviennent-ils à maintenir leur indépendance et se renouveler ?

Ce qu’ils ont dit

Caroline Hayek : « Ce qui est important pour nous, c’est de modifier notre image d’élite de droite chrétienne. On s’est engouffré dans d’autres brèches pour bousculer notre lectorat. Notre enquête sur la pédophilie n’aurait pas été possible il y a quelques années, par crainte des critiques. Mais aujourd’hui, on arrive à capter de nouveaux lecteurs. »

« L’Orient-le Jour a su se remettre en question et penser contre lui-même pour attirer les jeunes. Ce qui est très important pour nous, c’est cette indépendance, rompre avec cette image d’un média élitiste et recomposer toute notre équipe. »

Alia Ibrahim : « Nous faisons confiance aux lecteurs. Ils savent la limite entre l’opinion et l’enquête. La distinction entre le journalisme et l’activisme est très importante pour la crédibilité de l’organe de presse. Elle touche à la confiance des publics dans les médias. »

Marc Saikali : « Aujourd’hui, tout le monde est sur les réseaux sociaux. Mais on a la prétention de penser que dans un océan d’informations partielles et de fake news, quand vous êtes un média crédible, les jeunes font le tri. »

« La presse libanaise est parfois partisane mais elle reste libre (…) La guerre en Ukraine montre que la presse ne peut avoir une ligne éditoriale objective comme le souhaiteraient les médias anglo-saxons. Cette ligne éditoriale n’est pas objective, mais elle est honnête, et n’est pas financée par des politiques, ni de grosses ONG internationales. »

À retenir

La question de la déontologie journalistique se pose tout particulièrement au Liban, marqué par une importante crise économique et sociale. Les reportages d’investigation menés par les médias libanais sont plébiscités, de même que les nouveaux formats journalistiques permettent d’attirer le jeune lectorat. Si une presse indépendante est possible au Liban, les journalistes se heurtent à des problèmes budgétaires au sein de leur rédaction et souffrent du départ de la jeunesse pour renouveler les contenus.

Clara Jaeger et Irène Prigent (EPJT)