Les professionnels débattent sur la sécurité de l'information et des sources. Photo : Clara Gaillot

Retrouvez l’essentiel de la conférence “Sécurité et cybersécurité : mieux protéger les journalistes”

Animée par Albéric de Gouville, rédacteur en chef à France 24 et vice-président de la Maison des Journalistes, avec Anthony Bellanger, secrétaire général de la Fédération Internationale des Journalistes (FIJ), Taha Siddiqui, journaliste pakistanais et Prix Albert Londres 2014, Élodie Vialle, responsable du Bureau journalisme & Technologie de Reporters sans frontières.

LES ENJEUX

La sécurité des journalistes sur le terrain est un sujet impossible à négliger. La protection de leurs données et de leur travail ne peut l’être non plus. Aujourd’hui, avec des zones dangereuses pour la presse à quelques heures de vol de Paris, la formation des journalistes aux mesures de sécurité basiques, pour eux et leurs sources, paraît essentielle. Depuis plusieurs années, il existe des procédures strictes qui encadrent les déplacements des journalistes dans des zones périlleuses.

CE QU’ILS ONT DIT

Anthony Bellanger : « La FIJ travaille sur la sécurité depuis de nombreuses années. Nous formons les journalistes aux premiers secours, à la sécurité des déplacements et des bâtiments, aux situations d’enlèvement, de bombardements, etc. Nous intégrons aussi des formations juridiques, concernant la tenue d’un interrogatoire ou la sécurité des sources. Nous constatons que celle-ci se fait toujours à l’ancienne, sans note, sans papier, sans téléphone. Nous encourageons les rédacteurs en chef à se rendre compte de la situation dans leurs pays et à se former. Néanmoins, le résultat est toujours négatif, nous avons toujours autant de morts. Le problème c’est la censure, il n’est pas toujours évident d’y échapper. Nous délivrons une carte de presse internationale reconnue dans tous les pays sauf Israël, qui a permis à beaucoup de journalistes de se sortir de difficultés. Il existe également une assurance qui couvre les journalistes en déplacement. »

Taha Siddiqui : « Au Pakistan, en tant que journaliste, vous vous battez contre un ennemi invisible et puissant. Les militaires détiennent le vrai pouvoir. Savoir où est la ligne à ne pas franchir dans son travail de journaliste et/ou activiste est très compliqué. Il est très difficile de rester dans son pays dans de telles conditions. Au Pakistan, tous les agents du régime font en sorte de forcer l’autocensure chez les journalistes. Il s’agit de la forme la plus pernicieuse de censure. Je suis donc venu en France car j’y avais des soutiens et un réseau de connaissance. J’aurais pu rester au Pakistan en gardant le silence. Mais j’ai choisi l’option de l’exil, même si c’est difficile, pour pouvoir parler de mon histoire et de celle du Pakistan en sécurité. »

Élodie Vialle : « Il existe plusieurs types de menaces numériques. D’abord, la surveillance numérique. Aujourd’hui, il existe en France des entreprises qui exportent des armes de surveillances numériques dans des pays dirigés par des régimes autoritaires. Ces armes mènent à l’arrestation de nombreux journalistes. RSF tente de remettre en ligne des sites censurés par des attaques DDos de régimes autoritaires. Il y a un nouveau type d’attaque numérique. Ce sont des attaques dites de désinformation. Le but est de discréditer et décrédibiliser le travail des journalistes. Il s’agit d’armées de trolls qui ont pour mission de propager en ligne la propagande de prédateurs grâce à divers modes opératoires allant du harcèlement à étouffement du travail journalistique en le noyant avec d’autres contenus. »

À RETENIR

Il est aujourd’hui indispensable de mettre en place des procédures et des formations de sécurité pour les journalistes, tant physiquement que de façon numérique. Si les impératifs sécuritaires sur les terrains dangereux sont connus et maîtrisés par une partie de plus en plus importante de la profession, ce n’est pas le cas en cybersécurité. La diversité des menaces numériques et leur complexité doivent forcer les journalistes à se former aux dangers qui les menacent en ligne. Il est donc indispensable et urgent de mettre en place des formations adaptées.

Hugo Vallas