[LE RÉSUMÉ] Afghanistan, parole aux artistes et aux journalistes en exil

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Afghanistan, parole aux artistes et aux journalistes en exil ».
Noorwali Khpalwak, Mortaza Behboudi, Darline Cothière, Mariam Mana et Solène Chalvon-Fioriti se sont réunis pour parler des journalistes en Afghanistan. Photo : Marion Galard / EPJT
Animée par Darline Cothière, directrice de la Maison des journalistes, avec Mortaza Behboudi, journaliste indépendant ; Solène Chalvon-Fioriti, grande reporter et réalisatrice ; Noorwali Khpalwak, journaliste afghan réfugié à La Maison des journalistes et Mariam Mana, correspondante pour Volant Media (Afghanistan International).

 

Les enjeux

Le 15 août 2021, les Talibans prennent la capitale de l’Afghanistan, Kaboul. De nombreux journalistes et artistes sont sous le choc. Ils subissent alors une répression grandissante et beaucoup cherchent à fuir. Certains d’entre eux arrivent en France. Des mois plus tard, le soir du mercredi 11 mai 2022, des artistes réfugiés afghans présentent pour la première fois sur scène leur spectacle « Kaboul, le 15 août 2021 » au théâtre Olympia de Tours. Mêlant danse, chant, théâtre et poésie, ce spectacle raconte la vie et la fuite des Afghans à partir du 15 août. Après le spectacle, une conférence a eu lieu avec des journalistes afghans sur la situation du journalisme dans leur pays d’origine.

Ce qu’ils ont dit

Noorwali Khpalwak, arrivé en France récemment, il s’exprime en anglais : « J’ai vu la nouvelle de la prise de Kaboul sur mon téléphone le 15 août 2021 quand je me suis réveillé. Je n’ai pas cru ces informations au départ. Je voulais aller voir mes collègues au bureau alors j’y suis allé. Ils étaient terrifiés. On n’aurait pas pu imaginer que vingt ans de progrès allait disparaitre en une minute. »

« Je suis parti de chez moi le lendemain matin avec un habit similaire à ceux des talibans pour passer inaperçu. Jusqu’au 24 août, j’étais caché dans un lieu secret. Je n’ai pas pu dire au revoir à ma femme et mes enfants, il n’y avait pas le temps de se dire au revoir. Ma famille est au Pakistan maintenant. »

Solène Chalvon-Fioriti : « Cela fait dix ans que je travaille en Afghanistan. On dit de nous, les femmes occidentales, que nous sommes le troisième genre. C’est un atout indéniable en tant que journaliste. On pouvait discuter avec des chefs de guerre car ils ne nous prennent pas au sérieux. »

« Maintenant, je peux interviewer un ministre taliban alors que les médias locaux ont du mal à obtenir les autorisations pour exister. »

« Les femmes journalistes et parlementaires étaient avant les talibans mal considérées. C’est une terreur civile de genre : les hommes sont garants de ce qui va arriver aux femmes. Il faut continuer d’accueillir ces femmes journalistes car certaines se cachent actuellement dans des caves à Kaboul et la plupart n’ont pas pu partir en août 2021. »

Mariam Mana : « Pour les journalistes qui travaillent sur l’Afghanistan, les nouvelles sont toujours effrayantes. J’ai peur quand je commence ma journée à 7 heures de regarder les informations. »

« En Afghanistan, il y a un blackout médiatique : tous les médias sont censurés ou les journalistes sont partis. Nous utilisons sur Volant Media les vidéos que les citoyens afghans nous envoient sur WhatsApp, elles représentent peut-être 40 % de nos vidéos. »

Mortaza Behboudi : « Je reçois des appels d’urgence, parfois pendant la nuit à 3 ou 4 heures du matin, pour aider à faire évacuer des journalistes afghans. »

« Je retourne régulièrement en Afghanistan, pour le journalisme surtout. C’est assez dangereux mais je vais y retourner bientôt. »

À retenir

Le journalisme en Afghanistan est en péril. La plupart des journalistes ont fui ou ne peuvent plus travailler. Des journalistes réfugiés ont été accueillis en France mais ceux restés sur place, en particulier les femmes, s’exposent à des risques. Une correspondante de l’AFP en Afghanistan présente dans la salle a d’ailleurs subi plusieurs menaces. L’évacuation des journalistes vers d’autres pays est difficile. Mortaza Behboudi, en France depuis 2015 et qui a obtenu la nationalité française, aide ses confrères à sortir d’Afghanistan. Il a reçu un appel pendant la conférence pour aider une présentatrice à venir en France, une bonne nouvelle qui a provoqué les applaudissements de la salle.

Marion Galard

[LE RÉSUMÉ] Solidarité Afghanistan : les Assises donnent la parole aux journalistes afghans exilés

Photo : Manuela Thonnel /EPJT

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Solidarité Afghanistan : les Assises donnent la parole aux journalistes afghans exilés »

Animé par Catherine MONET, rédactrice en chef à Reporters sans frontières avec Akbar Khan ARYOBWAL, fixeur et interprète des médias français ; Darline COTHIERE, directrice de la Maison des journalistes ; Ricardo GUTIERREZ, président de la Fédération européenne des journalistes (FEJ) ; Mariam MANA, journaliste afghane réfugiée ; Najiba NOORI, journaliste afghane réfugiée ; Rateb NOORI, directeur vidéo du bureau de l’AFP à Kaboul ; Solène CHALVON, grand reporter, correspondante en Afghanistan ; Lotfullah NAJAFIZADA, directeur de Tolo News.

LES ENJEUX

Depuis le 15 août et la chute de Kaboul, de nombreux journalistes ont quitté le pays et ont rejoint en France les Afghans déjà réfugiés. Il reste cependant des centaines de journalistes inscrits sur des listes d’évacuation.

CE QU’ILS ONT DIT

Akbar Khan ARYOBWAL : « Quand j’ai appris ce qui se passait à Kaboul, je n’ai pas pleuré dans un coin. Je suis parti direct à l’aéroport pour essayer de faire quelque chose. Il faut donner de l’espoir aux gens qui quittent le pays. Il faut leur montrer les bons chemins. »

Darline COTHIERE : « Depuis cette année, plus de 400 journalistes ont été accueillis à la Maison des journalistes, venus de 70 pays dont l’Afghanistan. Ils arrivent en catastrophe pour fuir la répression et parce que leur vie est en danger. »

Ricardo GUTIERREZ : « Des milliers de journalistes afghans sont toujours dans leur pays. Pour ceux présents sur liste d’attente, il y a des États qui ont des plans avec des corridors humanitaires comme par exemple l’Allemagne qui réalise toujours des évacuations. »

Mariam MANA : « Pour les réfugiés il y a deux types d’exil. Celui où vous n’êtes plus dans votre pays physiquement et l’autre, c’est l’exil de la langue. C’est ce dernier qui a été le plus dur pour moi. Pour les écrivains et les journalistes, la langue est notre outil de travail, nous gagnons notre vie grâce à elle. »

Najiba NOORI : « Avant le 15 août, on a vu se développer les assassinats ciblés contre les journalistes, le nombre de violences croître, mais on continuait de travailler. Mais quand les talibans ont marché devant chez moi, j’ai décidé de partir. »

Rateb NOORI : « Avec mon organisation, et toute la communauté, nous essayons de poursuivre le travail, de continuer à couvrir ce qui se passe. »

Solène CHALVON : « Il y a un vrai besoin de se coordonner. Les gens de l’ambassade de France sont des gens que l’on connaît depuis des années car il y a une communauté française très restreinte. »

Lotfullah NAJAFIZADA : « La différence entre l’avant, le pendant et l’après 15 août, c’est la même qu’entre le jour et la nuit. Avec une privation de liberté, aucun accès à l’information ni critique du gouvernement et les talibans qui demandent à être consultés au préalable avant toute diffusion. »

 

À RETENIR

Il y a beaucoup d’axes d’aide aujourd’hui pour les journalistes afghans. Il faut penser à ceux qui sont arrivés, mais aussi à ceux qui restent. Il faut maintenir la pression sur les chancelleries occidentales et donner des fonds aux organismes qui peuvent aider comme la Maison des journalistes, la Fédération européenne des journalistes ou Reporters sans frontières. Ils ont aussi un besoin de transfert de compétences, d’enseignement ou de matériel.