Source : Womanager

Tenin Samake, rédactrice en chef et fondatrice malienne de Womanager, s’est rendue aux Assises de Tunis pour parler de son média et de son combat pour mettre en avant plus de femmes dans l’espace médiatique.

 Qu’en est-il de la situation des femmes au Mali actuellement ?

Tenin Samake. Si on compare à la situation d’il y a dix, vingt ou trente ans, il y a une évolution. Les choses ont considérablement changé. Ma mère m’a dit qu’à son époque, une fille de mon âge ne pouvait pas s’exprimer dans les médias. Alors que moi je le fais facilement, que ce soit à la télé ou à la radio. Cela montre à quel point les mentalités ont changé.

Il y a aussi des lois qui ont été votées pour les femmes, mais malheureusement, ces lois ne sont pas appliquées. Mais la lutte majeure que mènent les Maliennes de nos jours, c’est la lutte contre les violences basées sur le genre. Cela regroupe les mutilations génitales féminines, le harcèlement ou le féminicide.

Vous avez lancé un projet au Mali, WoManager. Pouvez-vous nous en parler ?

T. S. Il s’agit d’un média féminin et féministe dont je suis la fondatrice et la rédactrice en chef. Nous y abordons les questions d’émancipation et d’épanouissement de la femme. Au départ, c’était un blog sur lequel je parlais de femmes inspirantes quand j’avais 21 ans. Je parlais de ces femmes qu’on ne retrouvait pas dans les médias, mais qui au final font partie intégrante du Mali, de l’Afrique, et qui sont de vraies actrices du développement socio-économique et qui pouvaient servir également de modèle pour les filles plus jeunes. C’est là que j’ai compris l’urgence de les montrer dans un média indépendant.

A l’époque, je n’aurais pas pu me faire embaucher dans une rédaction classique. J’ai donc lancé le blog. Par la suite, c’est devenu un média à part entière, avec une équipe rédactionnelle complète. En plus de cela, on organise des programmes de renforcement de capacités pour les jeunes filles où elles sont formées aux médias, à la politique ou au digital. WoManager est vraiment une plateforme qui est là pour les femmes et pour les aider à être plus impactantes. Elles le sont déjà, mais ici elles apprennent à prendre plus de place au sein de la société.

Ce média met-il en avant uniquement des femmes maliennes ?

T. S. On donne la parole aux femmes de tous les pays. Il y a des Maliennes, des Togolaises, des Ivoiriennes et il y a même des Françaises. On donne la parole à plusieurs femmes et surtout à différents types de femmes. L’idée, c’est vraiment de comprendre et surtout de découvrir des opinions mais aussi de créer un espace inclusif.

Et quel message voulez-vous faire passer aux femmes ?

T. S. Il faut que les femmes sachent qu’elles sont importantes, qu’elles ont du pouvoir. Lorsqu’elles sont quelque part, elles doivent vraiment faire savoir qu’elles sont là. Elles ne doivent pas être timides, elles ne doivent pas se mettre en retrait ou rester à leur place. Mon message se résume en une phrase de Rokhaya Diallo : « Il ne faut absolument pas que les femmes restent à leur place. » Elles doivent sortir des sentiers battus, prendre le pouvoir et assumer qui elles sont réellement.

 

Recueilli par Shirine Ghaemmaghami /IHECS

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