[EN PLATEAU] Jérôme Bouvier : « On ne peut pas ignorer le massacre des journalistes à Gaza »

Jérôme Bouvier est le président de Journalisme & citoyenneté, association organisatrice des Assises du journalisme de Tours. Il lance le mardi 26 mars 2024 la 17e édition des Assises. Au programme cette année : le sport, l’éducation aux médias et la situation des journalistes sur les théâtres de guerre.

Réalisé par Maël Prévost/EPJT.

[LE RÉSUMÉ] Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ?

Retrouvez l’essentiel de l’événement « Quelles démarches pour l’EMI dans l’espace francophone ? »

De gauche à droite, Marine Leduc, Line Pagé, Ève Beaudin et Sarah Jacquin. Photo ArnaudFischer/EPJT.

Avec Blaise Andzango (Cameroun), président d’Eduk-Média, Line Pagé (Canada), présidente du conseil d’administration du CQEMI, Ève Beaudin (Canada), journaliste au Centre québécois d’éducation aux médias (CQEMI), Patrick Verniers (Belgique), directeur du Conseil supérieur de l’éducation aux médias, Sarah Jacquin (Liban), chargée de projet à la Fondation Samir Kassir.

Animé par Marine Leduc, chargée de Projet Le Retour de Zalumée/Globe Reporters.

 

 

Les enjeux

L’éducation aux médias et à l’information (EMI) peine à s’installer véritablement dans les programmes scolaires français. Dans les pays francophones, la situation n’est pas mieux voire pire. Les invités mènent des initiatives pour le démocratiser dans des pays comme la Belgique, le Liban, le Canada ou le Cameroun.

Ce qu’ils ont dit

Line Pagé : ​ « On a de grandes ambitions avec le CQEMI, on voudrait aller beaucoup plus loin. On veut aussi devenir un carrefour des bonnes initiatives qui se font en termes d’EMI au Québec. »

« Au Québec, l’EMI est dans le programme scolaire mais n’est pas obligatoire. Chez nous, il n’y a pas eu d’événements tragiques comme en France qui ont forcé une prise de conscience à propos de l’éducation aux médias (attentats de 2015). Mais on essaie de s’y sensibiliser quand même. »

« J’ai beaucoup aimé le thème de cette édition des Assises. Je pense qu’il faut aller en classe et donner aux enfants l’envie de retrouver le goût de l’info. »

Ève Beaudin : ​ « On a développé une formation qui met en relation des journalistes avec des écoles. Il faut jumeler les journalistes avec des régions, le Québec étant vraiment très grand. On explique aux jeunes comment fonctionne le journalisme. Il y en a beaucoup qui pensent n’importe quoi. Il y a pas mal de choses à démystifier. C’est hyper important pour nous d’envoyer des journalistes dans les classes, auprès des jeunes. »

« 95% de notre financement vient de subventions gouvernementales. Et tout ça fonctionne grâce à énormément de bénévolat. »

Sarah Jacquin : ​ « On remarque que la jeunesse est délaissée. Il faut savoir que l’EMI au Liban n’est qu’un onglet dans l’éducation civique. Ça ne reflète pas du tout le paysage médiatique actuel au Liban et dans le monde. On a donc décidé d’intervenir. On fait des ateliers pour sensibiliser les élèves de 13 à 15 ans à la désinformation avec le support du manga. Il est important de s’adapter à un langage qu’ils comprennent. C’est interactif. »

« L’EMI n’est ni une préoccupation ni une priorité au niveau étatique (au Liban). Les écoles privées sont plus réceptives à cette discipline. Mais ça reste toutefois secondaire. On ne peut pas facilement intervenir dans les écoles publiques parce qu’il faut l’aval du gouvernement. Pourtant, c’est important d’investir dans la jeunesse. On compte sur les futures générations pour défricher l’aspect social de la société libanaise. »

Blaise Pascal Andzango : ​« Eduk-Media a pour but de travailler sur l’esprit critique des jeunes. Notre association est née dans un contexte de crise sécuritaire au Cameroun. Ça a nécessité d’engager des activités de sensibilisation aux médias auprès des populations. Il faut savoir que les actions EMI au Cameroun ne sont pas très nombreuses pour l’instant. »

« Au Cameroun, le gouvernement ne prend pas l’éducation aux médias au sérieux. Ça n’est même pas inscrit au programme scolaire. Ce sont les ONG, les associations et la société civile qui s’y intéressent le plus. Nous avons la chance d’avoir quelques associations internationales comme l’OIF pour mener des activités d’éducation aux médias. Je profite de cette occasion pour appeler à une solidarité internationale. »

« Au Cameroun, l’EMI se finance à 90% par des fonds étrangers. »

Patrick Verniers : ​ « Le conseil supérieur de l’éducation aux médias en Belgique est une toute petite équipe. On a des représentants académiques, de l’enseignement, pas que du monde médiatique. Notre objectif est de développer l’éducation aux médias dans l’enseignement, notamment via des financements. On s’assure que l’EMI prenne une place importante dans les programmes scolaires. »

« Ça fait 20 ans qu’il y a des initiatives pour l’EMI en Belgique. Pourtant, je peux vous dire que sur le terrain, on entend beaucoup de discours qui disent qu’on en fait pas assez. »

« En Belgique ce sont des financements essentiellement publics. On est accompagné par le gouvernement. Depuis trois ans, on bénéficie d’une augmentation des financements pour l’EMI de 60 à 70%. »

À retenir

Dans les pays francophones, la situation de l’EMI est très différente. Dans des pays comme le Cameroun et le Liban, il n’y a aucune aide du gouvernement et l’EMI est loin d’être une priorité. En revanche, dans d’autres pays comme le Canada et la Belgique, les mesures prises sont importantes et l’EMI fait partie d’une vraie politique gouvernementale. Mais les acteurs de ces sociétés crient toujours au manque d’investissement. Il faudrait en faire plus.

Arnaud Fischer (EPJT)

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[LE RESUME] « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? »

Retrouvez l’essentiel de l’évènement « Quels changements pour une politique de l’EMI tout au long de la vie ? » 

De gauche à droite : Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM, Nathalie Sonnac, présidente du COP CLEMI, professeure, Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux et animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France. Photo : Tom Demars-Granja/EPJT

Présentation de l’étude « Information : 50 nuances de défiance. Les Français face à la désinformation »,
par Laurence DE NERVAUX, directrice de Destin commun.

Avec Violette SPILLEBOUT, députée de la 9e circonscription du Nord, Nathalie SONNAC, présidente du COP CLEMI, Divina FRAU-MEIGS, professeure-chercheuse, Savoir-Devenir, Tarik TOUAHRIA, président de la Fédération des centres sociaux, Sandra LAFFONT, présidente et cofondatrice d’Entre les Lignes, Julie JOLY, directrice L’Obs et secrétaire de l’APEM.

Animé par Christine MONCLA, déléguée EMI à Radio France.

 

 

Les enjeux

La conférence était l’occasion de tirer les conclusions et prendre connaissance des propositions du rapport parlementaire “Mission « flash » sur l’éducation critique aux médias” des députés Philippe Ballard et Violette Spillebout. L’enjeu est de démocratiser l’EMI au niveau national et aussi au niveau local en prenant en compte les spécificiés de chaque territoire. Il a été évoqué l’ambition de motiver les partenaires, tant publics que privés, pour financer l’EMI car l’information est “un bien commun”. L’objectif de la conférence était également d’entendre les critiques et les retours du terrain des différents acteurs présents dans la salle.

Ce qu’ils ont dit

Laurence De Nervaux : « Deux tiers des Français trouvent que les contenus extrêmes prennent trop de place. »

« En moyenne, un Français sur quatre fait confiance aux journalistes. »

« Plus d’un Français sur quatre n’écoute pas les informations car elles sont trop négatives. »

Violette Spillebout : ​ « Face à tout ce qui arrive, le plus important, c’est l’éducation. Nous aurons peut-être les moyens de renforcer l’éducation pour tous. Aurons-nous les moyens de combattre les ingérences, tout ce qu’on voit dans le numérique ? C’est moins certain. »

« Peut-être l’erreur a été de se concentrer sur le numérique dans l’éducation nationale et la culture. C’est un sujet qui concerne la citoyenneté, la jeunesse, la justice, c’est un sujet interministériel. On a un socle commun, ce qui réduit les inégalités. […] On a vu beaucoup choses liées à la bonne volonté, mais très peu de moyens. Je pense qu’il y a quand même une question de déperdition de l’argent public qui mérite d’être regardée. »

« Beaucoup d’éducateurs sont bénévoles, d’autres sont rémunérés. La mise en place d’un tarif règlementé, c’est une opportunité pour lutter contre la précarité du métier. »

« Les professeurs documentalistes s’en occupent, mais ce n’est pas reconnu de façon régulière. Pour moi, chacune des propositions du rapport mérite un groupe de travail composé des sphères publiques et privées. Chaque sujet est un chantier à mener. »

Nathalie Sonnac : « La façon dont on régulait les médias auparavant ne correspond pas à l’espace public numérique d’aujourd’hui. »

« La crise sanitaire a transformé les usages informationnels et mis le numérique sur le devant de la scène pour les plus jeunes ». « Je pense que la technologie doit demeurer un outil. »

 « L’école ne peut pas tout, elle doit se réintégrer avec des acteurs de la société civile. Les professeurs-documentalistes sont des acteurs centraux de l’EMI, mais l’éducation nationale ne leur a peut être pas donné une reconnaissance suffisamment importante. »

Divina Frau-Meigs : « Les compétences de l’EMI : comprendre, critiquer, créer. […] Cette dimension créative est en train de passer à la trappe. »

« On a besoin de l’école, c’est pour ça que je préconise une matière à part entière, pour que ce soit pratiqué, pas juste pensé. »

« Les personnes qui amplifient la désinformation sont des seniors écartés de l’enseignement depuis trente ou quarante ans. Comment on atteint ces seniors qui sont sur des médias traditionnels ? »

Tarik Touahria : ​ « Dans les actions qu’on porte dans les centres sociaux, le « faire » est bien souvent avec les médias associatifs, boîtes radio, outils en ligne… »

« Si on donne aux acteurs de l’EMI les moyens de travailler, ils feront du bon travail. »

« Tous les ans, il faut aller chercher de l’argent, répondre à des appels à projets, faire des bilans intermédiaires… »

« Il ne faut pas opposer ascendants et descendants […] Il faut créer des agents de coopération territoriale autour de la question de l’information, idem pour l’écologie, le numérique… »

Sandra Laffont : « On nous demande beaucoup d’intervenir sur la désinformation. Mais notre obejctif premier, c’est de donner le goût de l’info, pas d’avoir une approche anxiogène de l’info. Il faut ouvrir les jeunes sur le monde. »

« Nos bénévoles font ça dans un engagement citoyen. On peut se le permettre, car nous avons des CDI à côté. C’est plus compliqué pour les pigistes, car intervenir en classe, c’est renoncer à une pige. Je pense qu’il faut prioriser les moyens sur les interventions en classe. »

Julie Joly : « Il faut qu’on se rende compte que devant cette urgence info, si on reste rivés sur nos écrans, on va se faire avoir, on aura perdu notre capacité à penser seuls. Pour cela, il faut des moyens. Les médias doivent avoir les moyens d’intervenir, de toucher les jeunes, mais ces moyens sont considérables. »

« Pour parler à des jeunes, il faut des jeunes. »

À retenir

Les membres de la table ronde sont favorables à la mise en place de mesures permettant un meilleur rayonnement de l’EMI au niveau national mais aussi au niveau local. Par exemple, tous souhaitaient une meilleure reconnaissance du travail des professeurs-documentalistes. Toutefois, les avis divergent parfois sur la méthode à appliquer : faut-il mettre les journalistes au cœur de l’EMI au vu de la défiance vis-à-vis de ces derniers ? Doit-on donner une place plus importante aux acteurs des collectivités territoriales, qui connaissent déjà les publics et peuvent se révéler des partenaires clés ? Une chose est sûre, une meilleure coopération entre acteurs publics et privés est nécessaire.

Jane Coville (EPJT) Roméo Marmin (EPJT)

 

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[LE RÉSUMÉ] « Donner le goût de l’info. Les initiatives des médias jeunesse »

Retrouvez l’essentiel de la conférence « Donner le goût de l’info. Les initiatives des médias jeunesse »

Animé par Aurélie Kieffer, journaliste à France Culture, avec Raphaële Botte, rédactrice en chef de la revue Dong ! et journaliste à Mon Quotidien, Frédéric Fontaine, rédacteur en chef de Géo Ado, Marion Gillot, rédactrice en chef du Monde des Ados, David Groison, rédacteur en chef de Phosphore, Olivier Voizeux, rédacteur en chef de Science et Vie junior.

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(Photo : Suzanne Rublon)

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[LE RÉSUMÉ] « Focus sur la presse jeunesse »

Focus sur la presse jeunesse Le presse jeunesse résiste bien au numérique. Photo : Malvina Raud

Retrouvez l’essentiel de la conférence « Focus sur la presse jeunesse »

Animée par Benoit Califano, directeur de l’ESJ Pro Montpellier, avec Victoria Jacob, rédactrice en chef adjointe des magazines J’aime Lire Max et Je Bouquine chez Bayard, Julie Lardon, co-fondatrice du journal illustré Albert, Malicia Mai Van Can, directrice éditoriale Milan Planète à Milan Presse et Juliette Salin, directrice des rédactions et des programmes Jeunesse chez Fleurus.

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[LE RÉSUMÉ] « EMI : quelles propositions dans les médiathèques et les bibliothèques ? »

Retrouvez l’essentiel de la conférence : « EMI quelles propositions pour les médiathèques et les bibliothèques podcast »

Animé par Emmanuelle Daviet, journaliste à France Inter, déléguée à l’Éducation aux médias, à la Diversité et à l’Égalité des chances et responsable du dispositif « InterClass’ ». Avec Marie Berne, responsable de l’action culturelle à la Médiathèque de Jaude, Clermont Auvergne Métropole ; Noëlle Drognat-Landret, directrice des départements de la Part-Dieu, Bibliothèque municipale de Lyon ; Didier Jelen, assistant de conservation à la Médiathèque de Melun ; Yolaine Jouanneaux, responsable de la lecture publique et des enseignements artistiques de la Ville de Tremblay-en-France ;Dr. Aralynn McMane, fondatrice de World Youth & News Media Alliance ; Céline Meneghin, conservatrice des bibliothèques, directrice adjointe à la lecture publique du Loir-et-Cher ; Martin PIERRE, journaliste et créateur d’Educ’Média Info ; Ludovic Touchard, animateur-formateur de l’association ADEIFvidéo.

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[LE RÉSUMÉ] « Éducation à l’info : agir dès le primaire »

Education à l'info, agir dès le primaireApprendre à bien s’informer dès le plus jeune âge est l’un des enjeux de notre époquePhoto : Clara Gaillot

Retrouvez l’essentiel de l’atelier « Éducation à l’info : agir dès le primaire »

Animé par Virginie Sassoon (responsable Pôle Labo – formation au CLEMI), avec Marie Révillion, rédactrice en chef adjointe déléguée au monde enseignant chez Milan presse, Christophe Dupuis, chargé de mission DANE 1er dégré, Cécile Bourgneuf, journaliste au P’tit Libé, Gaëtan Despres, président de l’association Jeunes reporters 8 à 18 ans et Anne Lechaudel, coordinatrice académique EMI 1er degré au CLEMI (Centre de liaison de l’enseignement et des médias d’information) de l’académie de Paris.

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